Cœur givré

Chapitre 17 : Flashback : Les cendres du passé

1565 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour 17/11/2025 07:30

Notes:

Petite introduction avant de commencer ; Ce chapitre est un chapitre flashback afin d’en apprendre plus sur Lucy.C’est le chapitre qui me fait le plus peur ; à cause de la timeline. C’est terriblement difficile de faire entrer un personnage inventé dans une histoire qui en a déjà une, et j’espère l’avoir respecté au mieux. Et aussi la présence de Giyu. Puisque mon personnage a un souffle qui dérive de celui de l'eau, c'était logiquement le meilleur choix. Mais je ne suis pas certaine de ce que ça donne. Aussi, j'aimerai avoir particulièrement des retours sur celui-ci. Merci !C’est parti !


I. L’Amérique, 1897 – 1908 : Les rires sous le porche

L’air sentait le bois fraîchement coupé et le fer chaud. Le petit atelier de Elias résonnait du cliquetis des outils, du souffle régulier du feu et du rire clair de Lucy.

Elle aimait observer son père travailler, fascinée par la précision de ses gestes. Sa mère, Lacey, les appelait parfois d’une voix douce, un livre à la main, pour leur rappeler que la lecture valait autant que les engrenages.

Lucy avait grandi entre la rigueur et la curiosité — deux héritages qui allaient la forger.

Son petit frère Mikey, lui, courait déjà partout, les genoux couverts de poussière, toujours à la recherche de nouvelles aventures.

Leur maison, simple mais emplie de chaleur, se trouvait à la frontière d’un monde en pleine mutation : les trains sifflaient au loin, les journaux parlaient de machines, de voyages, de pays lointains.

Lucy rêvait, sans le savoir encore, de voir ces horizons dont parlait son père le soir, les yeux brillants.

Un jour, à table, Elias posa son journal, le regard grave et émerveillé à la fois.

— Le Japon ouvre enfin ses portes au monde. Ils ont besoin d’ingénieurs, d’enseignants... et d’esprits curieux.

Lacey, un sourire aux lèvres, répondit sans hésiter :

— Alors allons voir ce monde nouveau.

Lucy sentit son cœur bondir. À onze ans, elle pensait que rien n’était plus grand que l’océan. Elle allait bientôt le traverser.

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II. Le voyage en mer – 1908 : L’océan et le silence

Le paquebot semblait un monde flottant. Des visages de toutes origines, des odeurs mêlées d’huile, de sel et de métal. Lucy restait souvent sur le pont, observant la mer s’étendre à perte de vue, comme si elle cherchait à deviner le Japon au loin.

Mais le quatrième soir, alors que le vent s’était levé et que le ciel s’était obscurci, un grondement terrible fit vibrer tout le navire. Les passagers hurlèrent, le sol pencha brutalement, des lampes se brisèrent.

Lucy, agrippée à son frère, sentit la panique de son père qui courait vers la salle des machines.

— Elias ! cria Lacey, sa voix perdue dans la tempête.

Le navire se cabra sous le choc d’une avarie. Les minutes semblèrent des heures. Lucy crut un instant qu’ils allaient sombrer. Puis, peu à peu, le vacarme diminua.

Le bateau, blessé mais encore debout, poursuivit sa route à vitesse réduite.

Cette nuit-là, Lucy ne dormit pas. En regardant la mer noire, elle comprit que le monde pouvait basculer à tout instant — et que la peur avait une odeur : celle du sel et du fer.

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III. Le Japon – 1909 à 1913 : Le temps des fleurs et du labeur

La première chose qui la frappa, ce fut le silence. Pas celui de la mer, mais celui des montagnes, du vent dans les bambous, des rivières qui chantaient à voix basse.

Le village où ils s’installèrent semblait endormi dans une autre époque. Les habitants les observaient avec méfiance. Des murmures suivaient leurs pas.

Mais Lacey apprit aux enfants du village à lire les caractères occidentaux, tandis que Elias réparait des charrues, des lampes et même un moulin.

Peu à peu, les sourires remplacèrent les regards froids. Lucy, elle, aimait courir dans les rizières, écrire dans un carnet en anglais et en japonais, et écouter les vieilles légendes qu’on racontait au coin du feu.

— Les montagnes abritent des esprits, Lucy-san, lui disait souvent une vieille femme du village.

Lucy riait. Pour elle, ce n’était que des histoires.

Mais certaines nuits, quand le vent hurlait entre les pins, elle croyait entendre des pas trop lourds, trop lents, derrière la maison.

Et une fois, au bord du sentier, elle crut voir deux yeux luire dans l’ombre.

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IV. L’attaque – 1913 : Le sang et le silence

La pluie battait contre les vitres, une de ces pluies fines et continues qui semblent vouloir dissoudre le monde dans la brume.

Dans la maison, l’odeur du riz chaud se mêlait au parfum du bois humide. Mikey chantonnait doucement, les jambes pendantes depuis la table, pendant que leur mère préparait le repas.

Lucy dessinait sur une feuille, le menton posé sur sa main, observant son père lire un manuel japonais avec fierté.

Tout semblait paisible. Trop paisible.

Puis, un craquement, venu du dehors. Un souffle étrange, lourd, presque animal.

Elias releva la tête, fronçant les sourcils.

— Ce n’est rien, murmura Lacey. Mais sa voix tremblait.

Le silence revint. Et soudain, la porte vola en éclats.

Une masse d’ombre surgit, si rapide qu’aucun regard humain n’aurait pu la suivre. Des griffes s’abattirent, une table se renversa, un cri déchira la nuit.

Lucy n’eut pas le temps de comprendre. Son père fut projeté contre le mur, sa mère hurla le nom de Mikey, puis tout devint rouge.

Le démon tourna son visage vers elle — des yeux jaunes, fendus, un sourire trop large.

Lucy se plaça devant son frère, les bras écartés, un tisonnier brûlant dans la main.

— Ne touche pas à mon frère !

Elle frappa. L’arme se brisa.

Un coup, une douleur atroce : une griffure lui lacéra le corps, de l’épaule jusqu’à la hanche.

Tout s’éteignit.

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Quand elle reprit conscience, il faisait froid. La pluie entrait par la porte brisée.

La maison était silencieuse.

Son père, sa mère, Mikey…

Tout ce qu’elle aimait gisait là, inerte.

Elle voulut crier, mais seul un souffle rauque sortit de sa gorge.

Alors elle rampa, s’accrochant au sol, appelant des noms qui ne répondraient plus.

C’est là qu’elle entendit des pas — légers, rapides, ordonnés.

Une jeune fille entra, suivie d’hommes vêtus de noir.

Son haori était orné de motifs semblables aux ailes des papillons, ses yeux d’une douceur surnaturelle.

Elle s’agenouilla près de Lucy.

— Ne bouge pas, tout ira bien. Tu es en vie, n’est-ce pas ? C’est déjà un miracle.

Sa voix avait quelque chose d’irréel, comme une berceuse au milieu du chaos.

Lucy voulut parler, mais sa bouche n’émit qu’un sanglot.

La fille prit sa main avec une délicatesse infinie.

— Je m’appelle Shinobu Kocho. Je vais te sortir d’ici.

Lucy s’évanouit dans la chaleur de cette voix.

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VI. L’entraînement – 1913 à 1915 : L’eau se fige

Elle resta longtemps à l’infirmerie du Domaine des Papillons.

Les nuits étaient pleines de cauchemars — des cris, du sang, la pluie.

Mais chaque matin, Shinobu venait la voir, un sourire tranquille sur les lèvres.

— Le monde peut être cruel, Lucy. Mais si tu veux qu’il change, tu devras d’abord survivre.

Shinobu lui apprit à respirer, à se tenir droite malgré la douleur, à marcher de nouveau.

Et un jour, Lucy demanda :

— Que puis-je faire, moi ?

Shinobu répondit simplement :

— Apprends à protéger ce qui reste.

Shinobu l’avait confiée à un pourfendeur aux traits froids, impassibles : Giyu Tomioka, Hashira de l’Eau. Il portait dans ses yeux la même solitude qu’elle — un silence de pierre, mais pas vide.

C’est lui qui constata son aptitude, son instinct fluide, sa respiration encore fragile mais juste.

Sous sa surveillance silencieuse, Lucy réapprit à respirer, à concentrer chaque battement de cœur, chaque souffle, jusqu’à retrouver l’équilibre du corps et de l’esprit.

L’entraînement fut rude.

Giyu parlait peu — jamais un mot inutile, jamais un encouragement.

Mais parfois, d’un geste bref, il rectifiait sa posture, laissait échapper un léger hm approbateur, et cela suffisait à la pousser plus loin.

Lucy, de son côté, apprit la rigueur de l’Eau, sa constance, sa force tranquille.

Pourtant, quelque chose en elle restait différent.

Là où l’Eau s’écoulait, elle cherchait à immobiliser le mouvement, à figer l’instant parfait, comme si la glace pouvait retenir la beauté d’un monde qu’elle n’avait pas su protéger.

Ainsi naquit son propre style — le Souffle de la Glace, dérivé direct de celui de l’Eau.

Fluide mais tranchant, calme mais impitoyable, il incarnait sa dualité : douceur et givre, compassion et vengeance.

En fin d’année 1914, Lucy reçut enfin la veste noire du Corps et son propre sabre — une lame d’argent pâle, parcourue d’un éclat bleuté.

Hashira depuis deux mois, elle portait désormais le poids de ses promesses.

Quand elle se battait, l’air se figeait autour d’elle, et sur le sol restait parfois une fine pellicule de givre.

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