Cœur givré
Lucy resta immobile un long moment, le souffle court, la poitrine encore secouée par l’adrénaline.
Autour d’elle, le givre s’évaporait lentement de sa peau, comme si la nuit elle-même reprenait ses droits.
Le corps du démon finit de se consumer, se désagrégeant en une pluie de cendres ternes qui retomba doucement sur l’herbe noirci.
Alors seulement, ses griffes se rétractèrent, ses crocs se dissimulèrent derrière ses lèvres —
mais la tension demeura.
Elle se tourna lentement vers les civils.
Ils tremblaient encore.
Certains étaient couverts de poussière, d’autres avaient le visage strié de larmes.
Mais tous la dévisageaient avec un mélange complexe de crainte… et d’admiration.
Le kimono de Lucy s’était légèrement ouvert sur la jambe lors du combat, révélant une peau trop pâle, presque luminescente. Pourtant, le tissu était intact, ses cheveux parfaitement en place malgré la violence de l’affrontement.
Seuls ses yeux, toujours brillants dans l’obscurité, trahissaient encore le démon en elle.
Un vieil homme s’avança, boitillant, s’appuyant sur un bâton épais taillé dans du bois rugueux.
Il s’arrêta à quelques pas d’elle, hésitant, la gorge serrée.
— Vous… vous nous avez sauvés, souffla-t-il.
Son regard glissa sur ses yeux, ses crocs qu’elle peinait à dissimuler.
— Mais… vous êtes un démon ? Comment est-ce possible… ?
Sa voix tremblait entre prudence et gratitude.
À ce moment précis, un battement d’ailes fendit l’air.
Koriha plongea et atterrit sur l’épaule de Lucy dans un croassement grave et autoritaire, gonflant son plumage comme un général prêt à annoncer une vérité indisputable.
Les villageois sursautèrent en reconnaissant l’oiseau.
— Le corbeau d’un pourfendeur…
— C’est impossible…
— Alors… elle est…
Le vieil homme écarquilla les yeux, bouche bée d’incompréhension, puis de compréhension.
Le corbeau Kasugai, symbole incontesté du Corps.
Un démon ne pouvait pas en posséder un…
Lucy, elle, restait crispée.
Elle n’osait pas desserrer la mâchoire.
Son propre combat intérieur était encore trop proche, trop brûlant.
Mais les humains ne voyaient rien de cela.
Le vieillard inspira profondément…
Puis il s’inclina.
Lentement.
Profondément.
Avec le respect dû à un sauveur.
— Au nom de notre village… merci.
Ses épaules tremblaient légèrement.
— Nous vous devons la vie.
Autour de lui, les survivants l’imitèrent un à un.
Hommes, femmes…
Et même les enfants.
Même ceux qui la fixaient encore avec de grands yeux ronds où se mêlaient peur ancienne et émerveillement nouveau… s’inclinèrent.
Un démon.
Un démon les avait sauvés.
Lucy resta figée.
Son expression s’adoucit malgré elle.
Ses yeux brillèrent — cette fois, pas de faim, pas de rage…
Mais d’une émotion nouvelle.
Sincère.
Désarçonnante.
Koriha, percevant l’atmosphère comme un chef d’orchestre, gonfla les plumes, le torse ouvert, dominant la scène avec l’aplomb d’un petit empereur.
Lucy déglutit difficilement.
— N-non… vous n’avez pas besoin de vous incliner, s’il vous plaît… relevez-vous…
Sa voix tremblait, prise entre la gêne et une émotion qu’elle ne savait même pas nommer.
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Des pas précipités fendent les arbres.
Kyojuro surgit de la forêt comme une bourrasque de feu, tenant encore l’enfant contre lui.
Il s’arrêta net.
Sa respiration se bloqua.
Devant lui, les villageois — hommes, femmes, vieillards et enfants —
tous s’inclinaient devant Lucy.
Une démone.
Un sourire ému traversa brièvement son visage, effaçant toute trace de fatigue.
Une fierté chaleureuse y brillait, pure, simple, immense.
Il n’eut même pas le temps de parler qu’un villageois déclara d’une voix tremblante :
— Mais nous le devons ! Vous nous avez sauvés la vie !
Un petit garçon lâcha soudain la main de sa mère et tira timidement sur le kimono de Lucy.
Il leva vers elle deux yeux ronds, brillants comme des billes d’eau.
— Est-ce que… vous êtes un ange ?
Lucy resta figée.
Un ange ?
Elle… ?
Elle sentit son cœur se serrer violemment.
Elle pensa à ses crocs, à ses griffes, à la faim qui hurlait encore au fond d’elle.
Non.
Non, elle était tout sauf un ange.
Et pourtant…
Kyojuro éclata d’un rire doux, apaisant.
Il posa une main chaleureuse sur l’épaule de Lucy — sa présence un pilier de feu à côté de son froid naturel.
— Pas besoin de formalités ! déclara-t-il avec son entrain habituel.
— Elle se bat pour nous tous !
Puis il se pencha vers elle, approchant ses lèvres de son oreille.
— Tu as géré ça à merveille, murmura-t-il d’une voix basse et sincère.
Elle sentit une chaleur étrange lui envahir la poitrine.
Elle lui offrit un sourire ému, presque fragile.
Puis son regard revint sur l’enfant.
Un ange…
Pour une première fois, ce mot ne la fit pas fuir.
Il lui fit du bien.
Elle inspira doucement, puis détourna les yeux vers le vieil homme — probablement le doyen du village.
— Y a-t-il des blessés ? demanda-t-elle avec douceur.
Les villageois échangèrent des regards incertains avant que le vieillard ne secoue la tête.
— Par miracle, personne n’a été grièvement blessé, répondit-il.
— Seulement quelques coupures… quelques frayeurs.
Puis son expression se fit plus grave, et son regard se perdit vers les silhouettes sombres du village derrière eux.
— Mais nos maisons ont été détruites… nos récoltes ravagées…
Il soupira, une lassitude immense pesant sur ses épaules.
— Il nous faudra des semaines pour nous en relever.
Il releva les yeux vers Lucy.
Dans son regard…
De l’espoir.
Pur et brûlant.
— Puis-je… vous demander une faveur ? murmura-t-il d’une voix légèrement tremblante.
Lucy sentit son cœur faire un bond.
Elle hocha doucement la tête et s’avança d’un pas.
— Dites-moi…
Le vieil homme esquissa un sourire, mêlé de nervosité et de gratitude.
Derrière lui, les villageois observaient Lucy comme une apparition salvatrice, encore secoués par le spectacle de puissance auquel ils venaient d’assister.
— Nous sommes un petit village, dit-il d’une voix tremblante, et la reconstruction sera longue… très longue. Cependant…
Il hésita.
Ses doigts serrèrent la poignée de sa canne.
— Serait-il possible que vous envisagiez de… rester ici ? Même quelques jours nous seraient d’une aide inestimable.
Lucy cligna des yeux, surprise.
— Que… je reste ici ?
Le vieil homme s’inclina un peu plus, comme écrasé par sa propre demande.
— Votre présence seule… suffirait. Elle empêcherait d’autres démons d’approcher. Et nous pourrions reconstruire sans craindre une nouvelle attaque…
Il jeta un bref coup d’œil aux ruines noircies derrière eux avant d’ajouter :
— Nous comprendrions si c’est trop demander.
Les villageois retinrent leur souffle.
Même Koriha sembla suspendre son croassement… avant de le relâcher d’un cri sonore et important, gonflant les plumes comme s’il annonçait déjà sa décision.
Puis il s’envola dans un battement brusque, tournoyant autour du groupe.
Lucy resta immobile, partagée entre l’honneur, l’incertitude et une pointe de crainte.
Elle se tourna vers Kyojuro.
— Qu’en penses-tu… ?
Le Hashira de la Flamme porta la main sous son menton, son expression d’abord sérieuse, puis pensive.
Enfin, un léger sourire étira ses lèvres.
— Je pense que c’est une excellente idée, répondit-il chaleureusement.
Son regard se posa sur les villageois aux yeux humides.
— Ils ont clairement besoin d’aide. Et toi… tu as le pouvoir de changer beaucoup de choses ici.
Lucy baissa les yeux, touchée.
Puis Kyojuro ajouta, avec une flamboyance typique :
— Et je suis certain que Koriha est d’accord !
Comme pour confirmer, le corbeau revint dans un vol majestueux, faisant des cercles rapides autour des enfants qui riaient et tendaient les mains vers lui.
Lucy rit doucement à cette vision avant de reporter son attention sur Kyojuro.
— Tu préviendras le Maître… et les autres ?
— Bien sûr ! répondit-il avec un hochement de tête ferme.
Il réajusta le petit garçon endormi dans ses bras — le pauvre enfant n’avait pas résisté à l’épuisement.
— Je leur dirai exactement où tu es, pourquoi tu restes, et combien leur reproche serait absurde.
Un clin d’œil malicieux accompagna sa phrase.
— Et si l’un d’eux ose se plaindre… je lui rappellerai que ce que tu fais est héroïque.
Les murmures de soulagement se soulevèrent parmi les habitants.
Une jeune fille s’approcha alors timidement.
Elle tira doucement sur la manche du kimono de Lucy, ses grands yeux brillants d’une lueur d’espoir fragile.
— Vous resterez vraiment ? demanda-t-elle d’une petite voix.
— Vous… vous ne disparaîtrez pas dans la nuit ?
Lucy sentit quelque chose se briser doucement dans sa poitrine.
Elle s’accroupit, posa une main légère sur l’épaule de la fillette et lui offrit un sourire rassurant.
— Je resterai, murmura-t-elle tendrement.
— Jusqu’à ce que vous n’ayez plus besoin de moi.
Les yeux de la fillette s’illuminèrent comme des étoiles.
Sans la moindre hésitation, elle se jeta dans les bras de Lucy, l’enserrant dans une étreinte courte mais incroyablement chaleureuse — la toute première d’une longue série à venir.
Lucy resta un instant figée… puis referma doucement un bras autour de la petite.
Derrière elles, le vieil homme poussa un profond soupir, comme si un poids immense venait de glisser de ses épaules. Son visage se détendit pour la première fois depuis la catastrophe.
Kyojuro observait la scène, un sourire approbateur aux lèvres, les yeux brillants d’une douceur sincère.
Il s’avança d’un pas et adressa un signe de tête à Lucy.
— Je vais rentrer, alors !
Lucy se redressa doucement après l’étreinte, et récupéra le petit garçon endormi dans les bras de Kyojuro.
Le petit se blottit aussitôt contre elle, comme un chaton cherchant une chaleur familière.
Elle serra instinctivement sa petite silhouette contre son cœur.
Kyojuro poursuivit, son sourire prenant une nuance espiègle.
— …Oh ! Et Muichiro voudra sans doute savoir où tu es.
Devrais-je lui donner ta position à mon retour ?
Lucy sentit ses joues chauffer légèrement.
— Uniquement s’il n’a pas d’autres devoirs, dit-elle en ajustant le garçon contre elle.
— Et… qu’il ne se mette pas en danger sur le chemin.
Kyojuro hocha la tête, satisfait.
Lucy eut alors une idée. Elle jeta un coup d’œil à Koriha, qui était occupé à picorer les cheveux d’une fillette éclatant de rire.
— Koriha ! appela-t-elle doucement.
— Va avec Kyojuro. Tu guideras Muichiro jusqu’à moi.
Le corbeau releva la tête, comme s’il n’attendait que ça.
Il émit un « KROO ! » motivé et s’envola immédiatement vers Kyojuro.
Ce dernier éclata d’un rire flamboyant.
— Oh, ne t’en fais pas ! Je lui rappellerai : pas de bêtises !
Puis il leva le menton vers le corbeau.
— Tu as compris, petit oiseau ?!
— Croa ! répondit Koriha en déployant ses ailes avec un panache théâtral, complètement dans son élément.
Lucy rit doucement à cette scène à la fois ridicule et adorable.
— Fais bonne route, Kyojuro. Et… fais attention à toi.
Il leva le poing avec son éternel sourire éclatant.
— Toi aussi, Lucy !
Il commença à marcher, puis s’exclama en riant alors qu’il disparaissait entre les arbres :
— ET NE TE LAISSE PAS EPUISER PAR CES ENFANTS !
Son rire résonna encore un moment dans la forêt.
Puis le silence doux de la nuit reprit sa place.
Lucy baissa les yeux vers le garçon endormi contre elle.
Autour d’elle, les villageois la regardaient…
Non pas avec crainte.
Ni méfiance.
Mais avec espoir.
Reconnaissance.
Soulagement.
Confiance.
Elle n’était plus seulement un démon.
Ou un Hashira déchue.
Ou une anomalie.
Elle était leur protectrice.
Et pour la première fois depuis longtemps…
Cela lui fit du bien.
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Après quelques instants à contempler le petit garçon endormi dans ses bras, Lucy releva doucement les yeux vers les villageois qui l’entouraient, encore tremblants mais pleins d’espoir.
— Bien. Montrez-moi les dégâts.
Le doyen hocha la tête et fit signe aux autres de suivre.
Ils la guidèrent à travers le village dévasté.
Les maisons éventrées laissaient sortir des courants d’air glacés.
Les jardins autrefois soignés étaient réduits à de la terre battue et des branches brisées.
Les portes pendaient, les murs étaient noircis, les outils renversés au sol.
Malgré l’espoir revenu, une lourde tristesse empoisonnait encore l’air.
Dans ses bras, le petit garçon remua faiblement.
Ses petites mains se crispèrent sur le tissu de son kimono, s’y agrippant comme à une ancre.
Mais il ne se réveilla pas.
Sur le chemin, des mains se tendaient.
Certaines effleuraient ses manches.
D’autres touchaient simplement la pointe de son kimono.
Quelques doigts timides frôlaient son bras.
Comme si les villageois avaient besoin de vérifier qu’elle n’allait pas s’évaporer.
Qu’elle était réelle.
Qu’elle était là pour eux.
Puis un cri éclata, traversant les ruelles comme une déchirure.
— Tatsuya !!
Une femme surgit en courant, les cheveux défaits, le visage ravagé d’inquiétude.
Ses yeux fixèrent instantanément le petit garçon.
Son souffle se bloqua.
Lucy n’attendit pas qu’elle pose la question.
Elle s’avança et lui tendit l’enfant.
— Il va bien. Il est seulement épuisé…
Les jambes de la femme fléchirent.
Son visage se décomposa — sous le soulagement, pas la douleur — et deux larmes roulèrent sur ses joues.
Elle prit son enfant contre elle, l’étreignant comme si elle craignait qu’il disparaisse de ses bras.
Autour d’eux, les murmures montèrent comme un chœur :
— Un ange…
— Notre héroïne…
— Par les dieux, merci…
— Merci… merci…
Les remerciements coulaient comme une pluie tiède.
Des hommes, sans doute maris, frères, fils ou pères, continuaient d’ôter les décombres — mais tous s’arrêtaient un instant quand elle passait, fascinés par sa présence.
Les enfants, eux, la suivaient en file indienne derrière elle.
Certains chuchotaient, émerveillés.
D’autres essayaient de toucher la manche de son kimono avant de se cacher derrière leurs mains en gloussant.
Une petite fille blond pâle imitait ses pas comme une ombre miniature, marchant derrière Lucy avec un sérieux qui fit sourire quelques villageois malgré la détresse ambiante.
Lucy entra dans une maison à moitié éventrée.
L’air y était lourd, chargé de poussière et d’humidité.
Une poutre maîtresse, brisée en son milieu, grinçait sinistrement.
Sa base fissurée tanguait dangereusement, menaçant d’emporter tout le toit dans un effondrement brutal.
Les villageois se figèrent derrière elle, comme si un simple souffle pouvait déclencher la chute.
Ils retenaient leurs respirations… car elle s’approchait de la poutre comme on approche un animal sauvage.
Lucy attrapa une petite chaise en bois et la plaça sous la poutre.
Elle grimpa dessus — la chaise gémit sous son poids mais tint bon — pour compenser sa petite taille.
Même devenue démon, elle n’avait rien gagné en hauteur : toujours son mètre soixante, mais désormais une force surhumaine.
Elle leva les bras.
Ses doigts se refermèrent sur le bois massif.
Et elle souleva la poutre.
Sans effort apparent.
Un silence se répandit dans la maison.
Puis un murmure.
Puis plusieurs.
— Par les dieux…
— Elle la porte… comme si c’était rien du tout…
— Incroyable…
Un homme laissa même échapper un sifflement admiratif, oubliant complètement la peur qu’il ressentait quelques minutes plus tôt.
Lucy remit la poutre en place dans un THUNK sourd qui résonna jusqu’aux poutres encore debout.
La tension dans l’air s’évapora instantanément.
Un petit garçon, resté en retrait, s’avança timidement jusqu’à elle.
Ses yeux scintillaient, grands comme des lunes, de pure admiration.
Lucy descendit de la chaise et ébouriffa ses cheveux, doucement, comme on apaise un chaton.
Puis elle se tourna vers un adulte, probablement un responsable ou un chef.
— Avez-vous un champ qui nécessite de l’attention ? J’aimerais… expérimenter quelque chose.
L’homme hocha la tête si vite que sa nuque craqua presque.
Un soulagement immense passa dans ses yeux.
— Bien sûr ! Le champ commun… suivez-moi, s’il vous plaît.
Il lui fit une légère révérence avant de l’inviter à le suivre à travers le village.
Les enfants se mirent à la suivre comme une volée de canetons, captivés par sa silhouette calme et sa présence apaisante.
Certains marchaient à côté d’elle.
D’autres juste derrière.
Quelques-uns trottinaient en avant pour mieux la regarder.
Elle arriva finalement devant les champs.
Des rangées entières de cultures fragiles… étouffées par des mauvaises herbes hautes, épaisses, insidieuses.
— Si vous pouviez nous aider, ce serait une bénédiction… dit le chef d’une voix fatiguée.
Lucy acquiesça, paisible.
— Je ne garantis pas que cela fonctionnera… mais je vais essayer.
Elle posa un pied au bord du champ.
Les villageois retinrent encore leur souffle.
Une attente silencieuse.
Presque sacrée.
Lucy glissa sa main dans la petite sacoche accrochée à son poignet.
Elle en sortit une minuscule fiole de verre, remplie d’un liquide transparent et froid comme le cristal.
Un « poc » léger accompagna l’ouverture du bouchon.
Elle versa une seule goutte sur la terre.
La réaction fut immédiate.
Une onde de givre jaillit du sol, serpentant comme une créature vivante, s’enroulant autour des mauvaises herbes.
Un frisson blanc parcourut tout le champ.
Les herbes indésirables gelèrent instantanément.
Leurs feuilles devinrent translucides.
Puis craquelèrent.
Puis se désagrégèrent en poussière glacée dès que la brise les effleura.
Les vraies cultures…
intactes.
Illuminées par un halo glacé mais préservées comme si le froid les ignorait volontairement.
— W-WOAH !!
Les villageois poussèrent un cri collectif.
Certains reculaient d’un pas, stupéfaits.
D’autres s’avançaient, touchant les mauvaises herbes désormais friables qui se réduisaient en neige sous leurs doigts.
Les enfants accoururent, riant aux éclats.
— C’est froid !!
— Ça craque !!
— On dirait de la glace magique !!
Le chef porta une main tremblante à sa poitrine, submergé par l’émotion.
— Incroyable… !
Vous nous avez épargné des semaines de travail acharné en quelques secondes !
Il tomba presque à genoux, s’inclinant profondément.
— Nous vous serons éternellement reconnaissants, Lucy-sama !
Lucy porta une main à sa bouche, embarrassée par ce geste si solennel.
— Allons… ce n’est pas nécessaire…
Mais le chef secoua immédiatement la tête, très sérieux.
— Si… c’est nécessaire.
Vous avez accompli en un jour ce que nous n’aurions pas pu faire en un mois.
Vous avez sauvé nos vies… et maintenant notre futur.
Les villageois, autour, acquiescèrent vivement, leurs regards brillants, remplis d’une admiration presque sacrée.
— Lucy-sama…
— Notre protectrice…
— Un miracle…
Lucy resta immobile, émue, presque bouleversée.
Dans leurs yeux, elle ne vit ni peur…
ni dégoût…
ni méfiance.
Juste de la gratitude.
Et cela…
lui fit plus mal que n’importe quelle blessure.
Parce qu’elle ne s’était jamais sentie aussi peu monstrueuse qu’à cet instant précis.