Twisted Tales: ROBIN DES BOIS

Chapitre 2 : La taverne sans nom

2368 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 01/02/2021 19:32

Une semaine s’était écoulée depuis la mort de Robin des Bois, les cieux d’Angleterre pleuraient de nouveau et le matin se levait sur une vieille taverne sans nom… Une immense chope de bière taillé dans le bois, son unique enseigne, pendait par le seul morceau de chaine qui la retenait a la devanture. Pendard et Niquedouille, les deux vautours attendaient leur chef patiemment a l’abris dans la calèche, contrairement au ordre du Shérif, qui avait explicitement interdit aux compères de « coller leurs plumages détrempés sur les cuirs de son carrosse! »… Les chevaux quant eux, deux boulonnais grisâtres qui les avaient péniblement trainé jusqu’ici, pouvaient bien prendre l’eau, le vieux loup n’en aurait pas pour longtemps… Bien que la taverne fut dépeuplé, le Shériff glissa l’énorme pièce d’or de son collier sous sa tunique rouge et rose, ôta son chapeau, et d’une voix claire s’adressa au tenancier derrière le comptoir vermoulu:

« -Excuse moi mon brave… Je suis attendu…

-Dans l’arrière salle. Coupa la belette d’une voix fatigué. C’est qu’vos histoires m’ont fait lever aux aurores. Si vous pouviez avoir l’obligeance de faire court…

-Oui! Oui! Oui! Coupa a son tour le canidé bedonnant, en jetant une bourse sonnante sur le bar. Tiens pour ta peine, et qu’on ne nous dérange pas… »

Il contourna le zinc, poussa une porte a battant. C’est dans un petit recoin, éclairé par une triste fenêtre que Tony dégustait un plat de haricot en sauce dans lequel baigné une tranche de lard. L’impressionnant taureau Highland l’observa au travers le fin rideau de crinière qui lui tombait sur son large museau, et de sa voix forte et calme:

« -Installez-vous. Si vous n’avez pas déjeuner les haricots sont succulent… »

Le sheriff tira une chaise d’une table voisine et s’installa face au bovin. Il était large et musclé, ses fines cornes étaient d’une impressionnantes longueur, un veston a manche courte qui laissait apparaitre sur une épaule un tatouage, un cœur au centre duquel était joliment calligraphié « maman ». La dague planté a la vertical a droite de l’assiette avait une poigné en bois finement travaillé. Et les manières de l’animal était minutieuse.

« -Vous avez donc besoin de mes services, Shérif?

-… Effectivement, acquiesça le loup après une courte pause, décontenancé par son interlocuteur. Nous voudrions voir un petit problème disparaitre, si vous m’suivez…

-Un assassinat? Je n’ai pas exercer depuis longtemps. Mais c’est envisageable. Le Prince en aurait il après son frère?

-Mais comment diable pouvez vous savoir?! S’étonna l’homme de loi.

-Il n’y a que le Prince qui puisse vous faire lever de si bon matin pour une telle affaire. Robin des Bois n’étant plus un problème… J’ai peut être l’air bovin, mais je ne suis pas bête a manger du foin, voyez vous… »

Il déchira d’un un morceau de lard d’un coup de croc, et voyant qu’il avait piqué au vif l’intérêt du balourd, repris:

« -Vous me demandez donc, de traverser deux pays, de me rendre en Terre Sainte, d’infiltrer l’armée la plus puissante du monde, soyons chauvin, et d’en éliminer la tête pensante: le souverain adoré du peuple Anglais…? »

Le Shérif était décontenancé par tant d’aplomb:

« -Oui, grosso modo, oui… C’est le plan. 

-Bien… Tony sembla réfléchir… Oubliez tout ce que vous pensiez me payer pour une telle entreprise… Lorsque je réussirait, c’est une réelle preuve de gratitude que j’attendrai de la part du Prince Jean.

-Voyez vous cela! S’amusa le canidé en se croisant les bras sur la bedaine. Et qu’avez-vous donc en tète mon ami? Quelle récompense pourrait vous convenir? 

-Un titre, un poste de gradé dans l’armée du roi. Pourquoi pas une parcelle de terrain. »

Le taureau était impassible. Bien que n’ayant que très peu de confiance dans le plan dangereux du Prince Jean, le Shérif se prêtait au jeu, il commençait même a s’amuser:

« -J’vais t’dire mon bonhomme. Si tu réussit, tu l’auras amplement mérité, on sera même plutôt content d‘t‘avoir avec nous, tiens! J’en parlerai a ce bon vieux Prince Jean, et je suis sur qu’on te trouvera quelque chose. Topes là! »

Les deux complices échangèrent une poignée de main entendu. Tony récupéra sa dague, se leva et la glissa dans un petit fourreau a sa ceinture. 

« -Vous entendrez parler de moi d’ici quelques mois. Je vous le garantie. »

Puis, toujours avec une certaine élégance, il quitta les lieux. Le loup gris renifla l’assiette de bois vide avec dédain, puis repassa la petite porte a battant. Derrière son comptoir, le tavernier, visiblement content d’un si bon chiffre d’affaire en si peu de temps lança au Shérif qui s’apprêtait a sortir:

« -N’hésitez pas a revenir autant qu’il vous plaira Mon Seigneur!

-J’y penserai. Mais méfie toi l’ami, que je ne revienne pas avec pour envie de manger de la belette… »


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La mâtiné était bien avancé, et le soleil commencé a chauffé. Les rayons du jours s’étalait en doux reflet sur la mer calme qui entourait le fier navire du Capitaine Roland de Ridel qui emplissait ses poumons de l‘air marin. Dans la force de l’âge, ce vieux chat roux, immobile et calme sur le pont du Douce Brise, avait belle allure dans son uniforme. Il avait toute confiance dans sa petite nef, si les voiles restaient gonflé, ils atteindraient rapidement Barfleur en Normandie . Cela faisait des années qu’il naviguait avec son équipage entre les divers ports de la manche, transportant marchandise et dignitaire, et parfois même comme lors de la dernière escale, ils embarquaient un voyageur discret, s’acquittant de la traverser et de l’anonymat par un pochon de pièce d’or. Bien que ce passager avait demander de la discrétion, il avait passé les dernières soirées a distraire équipage et voyageurs de sa guitare et de ses chansons. Roland aperçu le dit voyageur en contre bas, accoudé, regardant l’horizon. Curieux, le capitaine alla a la rencontre du coq. Le félin traversa le pont: un enfant jouait avec sa mère, un voyageur, assis contre le mat couvert d’une peau de bête, dormais encore… Roland approcha du volatile en chantonnant les paroles de l’une des ritournelles de la veille:

« -Quel beau jour vraiment…  

-Ho, bien le bonjour Capitaine. Fit Adam de La Halle en sortant de ses rêveries. Pas de souci en vue?

-Aucun tant que les voiles serons gonflées. Nous devrions atteindre les côtes Normandes d’ici un jour ou deux. Puis je me permettre une indiscrétion? Vous avez demandé explicitement a rester anonyme, mais il semblerai que vous n’arrivais pas a faire profil bas…

-Je dois malheureusement l’admettre. Voyez vous, un ami m’a confier une mission de la plus haute importance, sous le sceau du secret, hors je n’ai guère l’habitude de ces jeux… C’est que je suis ménestrel, et mon outil de prédilection c’est ma guitare…

-Je peux vous garantir, mon ami, que votre secret ne sera éventé ni par mes hommes, ni par moi-même. Mais je ne peux répondre pour le reste des voyageurs…

-Vous avez entièrement raison Capitaine. Je veillerais a mettre une sourdine. » Conclu le volatile sur le ton de l’humour.

Après quelques politesses le roux félin retourna a ses obligations, laissant le triste chanteur a ses pensés. Une mouette cria dans le lointain, la terre n’était plus si loin désormais. Bientôt la France, et après encore quelques jours, Adam rejoindrai l’auberge de son cousin en Normandie. Une étape de plus dans le long périple qu’il entreprenais pour la bonne cause.


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Le voyage retour semblait plus long que l’aller au Shérif. L’odeur de vautour mouillé ne voulait plus quitter l’intérieur de la calèche et l’humeur du loup gris n’en était que plus affecté. En cette fin d’après midi, le ciel était toujours grisâtre, l’air humide, les bois sombres. Les sabots et les roues soulevaient des volutes de boue sur le passage de la triste compagnie. Les deux vautours se partageaient les rênes a tour de rôle, mais cela n‘empêchait pas Pendard de garder sa vieille arbalète chargée tout contre lui. Niquedouille n’était pas aussi guilleret qu’a l’accoutumé:

« -C’est un long voyage… J’aime pas les longs voyages…

-Nous serons bientôt de retour a Nottingham. Rétorqua son compère, agacé. Et puis ce sont les ordres. On obéis aux ordres…

-Vous avez bientôt finit, là, dehors. Se plaignit le Sheriff depuis l’intérieur du véhicule… 

-Oui, mais les routes ne sont pas sur, ces derniers temps. J’aime pas quant les routes sont pas sur…

-On ne craint rien: j’ai ma vieille Bertha. Rassura Pendard en tapotant sur sa vieille arbalète.

-Dites ça va durer longtemps, là, dehors!?

-Je disait que nous ne craignons rien mon Seigneur! » Pendard se pencha afin de montrer sa petite fierté au Shérif. « C’est qu’ma vieille Bertha et moi on en a vu!

-Pointes ce truc là ailleurs veux tu? S’emporta le loup en éloignant la pointe de la flèche que le vautour venait de lui mettre sous le nez.

-Mais puisque je vous assure… » 

Le volatile déplumé n’eu pas le temps de terminer son explication que l’arme s’enclencha, et la flèche alla se planter a l’intérieur du carrosse, sifflant entre les oreilles du loup au passage. Dans un grognement énervé, le Sheriff arracha la pièce de musée de main de Pendard et la jeta au loin entre les arbres.

« -Mais enfin mon Seigneur! S’interloqua le vieux vautour. C’est pas correct ça!

-Vous regardez la route! Et que je ne vous entendes plus! »

Il arracha la flèche des dorures, et l’envoya rejoindre la vieille Bertha dans les buissons. Dans un lourd soupire, il s’enfonça dans le fauteuil de la calèche tout en pestant contre ses deux commis. Le silence se fit, accompagné durant quelque minutes par le grincement des roues, puis le charme fut brisé par la voix nasillarde de Niquedouille:

« -Non… C’était pas correct, non… Et j’aime pas ça, moi, quant c’est pas correct… 

-Dites?! Hey! La barbe vous deux!»

Soudain, dans un bruit effrayant le carrosse se déséquilibra. Pendard eu a peine le temps de voir une masse d’arme frapper violement les rayons de la roue qui éclata en morceau sur sa droite. L’essieu s’enfonça dans la boue, et le véhicule se coucha sur le coté, immobilisant les puissants Boulonnais, laissant choir les deux vautours et emprisonnant le Shérif dans sa calèche. Niquedouille se releva a grand peine, le Sheriff grommelait a l’intérieur, et Pendard semblait assommé. Une silhouette massive sorti des ombres, le vautour le reconnu aussitôt. Le puissant ours brun, le regard empli de colère, se frottait l’épaule droite. Sa première attaque lui avait été douloureuse. Doucement, tout en s’approchant des vautours, Petit Jean sorti du fourreau sa longue épée luisante, et la brandit au dessus de sa tête. Niquedouille eu a peine le temps d’implorer que la lame frappa. Abasourdi, il regarda les deux chevaux s’enfuir comme des furies: Petit Jean venait de trancher les rênes. Et d’un coup de pommeau l’ursidé envoya le pauvre témoin rejoindre son comparse évanoui. Puis l’assaillant escalada l’imposante carcasse boueuse aux écussons royale, et ne put retenir entre ses dents:

« -A nous deux… »

Il planta ses griffes dans la petite porte qu’il arracha de ses gonds. Il rengaina sa lame et plongea le bras dans les entrailles de ce symbole de prestige souillé. Dans un cri de douleur il en tira par le col le loup obèse et le laissa tomber lourdement au sol. Ce dernier était toujours hagard.

« -Mais bon sang! Sur quoi on a roulé? »

Jean sauta a terre, dégaina a nouveau son épée, sorti les crocs:

« -Vous avez roulé sur la justice! Piétiné la paix! Bafoué la bonté et l’honnêteté de notre bon peuple! Vous êtes une honte pour tout ce que vous êtes censé représenter! Mais aujourd’hui, c’est terminé. »

La lame vengeresse frappa en ligne droite, en plein cœur. Le Sheriff de Nottingham eu a peine le temps de comprendre, qu’il expira son dernier souffle. Petit Jean retira a grand mal la lame, et la pointa ensanglantée vers les deux vautours qui revenaient a eux.

« -Dites a votre Roi de Mauvais Aloi que son règne touche a sa fin! » 

Puis tranquillement, l’épée pendante, il disparu entre les arbres. Niquedouille et Pendard s’approchèrent du corps de l’homme de loi. Niquedouille s’agenouilla, et ne compris pas tout de suite que son compagnon passa son chemin, continuant a dandiner le long da la route.

« -Mais ne t’éloigne pas! J’aime pas quant tu t’éloignes!

-J’m’éloigne pas. Rétorqua Pendard en remettant sa capuche en place. J’vais récupérer ma Bertha… Puis il ronchonna: C‘était pas correct. Non, pas correct…»


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