La petite voleuse de cookies

Chapitre 4 : L'inconnue du Tardis-Express

4485 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour 10/11/2016 01:08

CHAPITRE IV

LE DOCTEUR

La tête lui tournait quand il atteignit la salle de contrôle. Il s'appuya contre l'ouverture en haut des escaliers pour essayer d'affermir sa posture. Perché là où il était, il apercevait de dos un alien penché sur la console, les coudes nonchalamment posés sur des commandes extrêmement sensibles, qui chantonnait tout en balançant la partie la plus ronde de son anatomie... L'une de ses mains était plongée dans sa boîte à cookies, les enfournant avec enthousiasme à un rythme effarant. L'autre feuilletait distraitement les pages de ce qui avait bien l'air d'être… son journal intime !

Il ouvrit la bouche sous le choc puis plissa les yeux en comprenant que cette boîte, comme le journal, étaient directement sortis de sa planque secrète (croyait-il) qui avait été forcée au pied de biche. Il s'agissait non seulement d'une intrusion très inquiétante mais de surcroît, aggravée d'un double crime impardonnable de vol de cookies ET de données strictement personnelles et confidentielles…

Vous ! cria-t-il d'un ton vibrant de fureur.

L'alien poussa un cri de frayeur en se redressant vivement, cachant bien maladroitement les preuves de son forfait dans son dos. Sa respiration s'était accélérée tandis que ses yeux écarquillés le fixaient alors qu'il s'approchait en imitant le pas chaloupé glissé des grands fauves déterminés. Il vint se saisir de la boîte à cookies avec rapacité : en regardant à l'intérieur, il constata qu'elle était… vide.

Vous ! Qu'est-ce que vous faites dans mon vaisseau ! Vous allez me dire immédiatement comment vous avez pu monter à bord !

Seigneur ! La façon dont elle le regardait ! C'était hilarant. Il avait dû réussir son coup pour une fois et apparaître authentiquement impressionnant... Les joues de la créature muette aux yeux immenses étaient pour l'instant rouges de confusion et il lisait dans son regard une sorte de choc. Elle déglutit avec peine et ouvrit la bouche où quelques miettes de ses pauvres cookies engloutis témoignaient de sa forfaiture.

― Je suis désolée, j'avais très faim…

Il jeta la boîte métallique sur la console avec fracas, exprès pour la faire sursauter.

― De toute évidence, rétorqua-t-il sèchement en détaillant son visage inconnu. Comment êtes-vous entrée ?

Elle tira nerveusement sur les pans de son châle devant elle et fit un pas décidé en avant.

― Ecoutez. J'ai pas mal réfléchi à la façon dont je pourrais essayer de formuler ça. Il n'y en a pas tant. Première option, je vous dis l'entière vérité mais il y aura des conséquences potentiellement graves pour vous et pour moi puisqu'il est question du futur. Deuxième option, je vous dis juste ce que vous avez besoin de savoir pour éviter ces conséquences mais avec le risque que vous ne vouliez pas me croire, et m'aider, car j'ai vraiment besoin de votre aide.

Le Docteur se mit en mouvement pour marcher autour d'elle lentement ce qui la rendit encore un peu plus nerveuse manifestement. Très bien ! Il allait continuer. Ce n'était pas parce qu'elle était ravissante qu'elle pouvait tout se permettre.

― Dites-moi tout immédiatement ou je vous flanque dehors.

― Docteur, vous ne suivez donc jamais vos propres règles ? soupira-t-elle.

― Pour satisfaire ma curiosité, j'ai les moyens de m'accommoder des conséquences dont vous parlez. Tâchez d'être synthétique…

Elle eut un petit sourire en pensant « Très résumé » mais il ne comprit pas pourquoi. Ni pourquoi il entendait si bien ses pensées alors qu'il ne la touchait même pas.

― Cela va probablement vous surprendre mais dans le futur, vous allez reprendre les voyages. Certains avec moi. De mon point de vue, nous venons tout juste d'être séparés au beau milieu d'une situation euh… une situation du même genre que d'habitude… dont j'ai été éjectée ici à votre insu. Je veux dire, à l'insu de votre futur vous. Quand j'ai compris où et quand je me trouvais, et parce que je connais un peu de votre passé, j'ai réalisé que je pouvais vous recontacter immédiatement puisque vous étiez déjà sur place, plutôt que d'essayer de faire venir le vous qui me connaît déjà... Je pensais que vous pourriez me ramener à mon époque où je serai plus à l'aise pour attendre… euh… l'autre.

― Parce que je vous fais attendre ? Attendre ne sert à rien : j'ai une machine à voyager dans le temps ! Enfin. Vous auriez mieux fait de suivre votre première impulsion qui était bonne et ne pas chercher à mettre le bazar dans ma ligne temporelle…

― Je le sais, acquiesça-t-elle avec un regard navré et un peu coupable.

― Alors pourquoi l'avez-vous fait quand même ?

― Parce que mon ami me manquait, répondit-elle simplement.

― Votre ami ?

― C'est de vous dont je parle, idiot. Au début, nous étions très bons amis.

― Plus maintenant ? Serait-ce parce que vous me traitez trop souvent... d'idiot ?

― Il n'y a aucun moyen que je puisse discuter de cela avec vous sans, comme vous dites, « mettre le bazar dans votre ligne temporelle »… répondit-elle avec une once de tristesse.

Il resta un moment silencieux à peser ce qu'elle venait de lui dire. Son sentiment venait de changer à son égard, peut-être à cause du regret qu'elle montrait. Il y avait quelque chose d'autre qui avait la saveur d'un épais mystère.

― Est-ce que c'est quelque chose que j'ai fait ? Je sais que je peux être parfois un peu… maladroit.

Elle haussa une épaule tout en le considérant avec un étrange regard plein de douceur et d'affection, et puis eut l'air de se secouer intérieurement et elle reprit sans lui répondre vraiment :

― Alors, est-ce que vous êtes d'accord pour me déposer, disons dans 125 ans, en centre-ville ? J'ai bien compris que vous étiez occupé avec une affaire ici et je n'avais pas l'intention de vous déranger. Ce petit saut ne vous prendra pas longtemps et je suppose que votre futur vous se sentira soulagé quand je pourrai lui dire que je suis saine et sauve…

― Nous pouvons faire ça avec le papier psychique. C'est quasiment immédiat. Où que je me trouve, j'aurai le message si j'ai le portefeuille sur moi, bien sûr…

Elle le regarda en lui adressant un sourire déjà plus confiant.

― Quand je pense que je voulais écrire une lettre normale et la confier à la Poste !

― Vous savez ce qu'est le papier psychique ?

― Oui je sais, quoique d'habitude vous l'utilisiez pour tromper les gens sur votre identité... Mais je me demande comment vous allez faire en sorte que le message n'atteigne pas des versions passées de vous-même… Imaginez que vous vous mettiez tous à rappliquer ici d'un coup, on se retrouverait avec une invasion de Reapers monumentale…

Il ouvrit la bouche un instant, comme hésitant à prendre la parole et la considéra avec encore plus de curiosité, si c'était possible.

― Oh, dites-moi très mystérieuse intruse, voleuse de mes cookies et de mes secrets… Pourriez-vous être une Dame du Temps ?

― Non Docteur, sinon j'aurais pu lire votre journal en gallifréen… Vos secrets sont bien gardés, le détrompa-t-elle.

― Il y a pourtant deux ou trois choses à votre propos qui sèment le doute dans mon esprit.

― Hum, vous voulez probablement parler de l'aura temporelle ?

― Le fait que vous sachiez quelque chose là-dessus, ainsi que sur les Reapers, m'impressionne chaque minute davantage…

Elle secoua la tête en baissant la tête modestement, en réalité pour essayer de ne pas lui montrer qu'elle souriait. Tout ça, c'était son autre lui qui lui en avait parlé. Ce serait vraiment fou si elle pouvait le convaincre grâce à cela...

― C'est uniquement parce que vous êtes seul depuis trop longtemps, il va bien falloir que vous l'admettiez. Il m'a semblé, à vous entendre parler avec cette femme un peu plus tôt, que la simple idée de vous retrouver en compagnie de brillants esprits, avec l'un des plus grands mystères de cette époque à résoudre, vous rendait particulièrement téméraire. J'espère qu'elle parviendra à vous réfréner un peu.

― Et vous m'espionniez en plus ? Helen est une femme excellente et fort brillante, mais je ne suis pas sûr qu'elle puisse vraiment s'occuper d'endiguer ma « témérité » à plein temps. Elle est fiancée et me le rappelle tout le temps.

― Docteur ! s'amusa Clara. Elle le fait parce que vous lui plaisez beaucoup.

― Que… quoi ? Comment savez-vous que je lui plais ?

― Et c'est vous, le télépathe !… soupira-t-elle avec un petit rire. Je ne suis pas là pour me mêler de votre vie sentimentale, vous devrez vous débrouiller comme un grand là-dessus…Vous n'aviez pas parlé de me permettre d'écrire un mot sur le papier psychique ?

― Si, mais j'aurais souhaité que vous m'accordiez une faveur en échange.

― Et bien ça dépend vraiment du genre de « faveur »… A quoi pensiez-vous au juste ? A ce que je regarnisse votre planque à gâteaux, sûrement ?

― Oh, c'est une excellente idée ! s'enthousiasma-t-il soudain dans son plus pur style avec un large sourire approbateur. Mais ce n'est pas ce à quoi je pensais… Je voudrais que vous restiez ici pendant soixante-douze heures…

― Et vous voulez me boucler dans le Tardis parce que… ?

― Non, pas « enfermée »… Si je comprends bien, vous avez l'habitude d'être avec moi et vous me connaissez… même si, ce n'est pas mon cas. J'ai l'impression que nous nous entendons bien, que nous nous entendrons bien… Helen n'est pas disponible, Vastra… et bien, je préférerais éviter… Je voudrais que vous m'assistiez durant ce laps de temps car je pourrais être potentiellement un peu plus fou et plus euh… téméraire que d'habitude.

― Ce qui ne serait pas peu dire ! Vous avez donc fait cette foutue injection, n'est-ce pas ? Mais que faites-vous des risques soulevés par notre rencontre trop précoce ? Si je vous révélais accidentellement quelque chose que je n'aurais pas dû ? Ou si en enquêtant avec vous, je causais un effet papillon ?

― Enquêter avec moi ? Est-ce que c'est quelque chose que nous faisons ?...

Il fit une pause pour l'observer en plissant un peu les yeux et reprit :

― Je ne sais pas pourquoi, je ne vois pas de changement majeur dans votre ligne. Comme si notre rencontre n'avait rien changé du tout pour vous. C'est très troublant.

― Il doit y avoir une explication parfaitement logique à tout cela… Il vient ce papier psychique ?

Il sortit aussitôt le portefeuille de la poche intérieure de sa somptueuse redingote cintrée en velours noir qu'il portait sur un pantalon droit beige, un gilet damassé et sa chemise outrageusement ouverte sur la poitrine. Il le lui tendit avec un crayon et elle y griffonna un court mot avant de lui rendre le tout.

Il brûlait d'envie de lire ce qu'elle avait écrit. Sous ses doigts, il avait la sensation nette de ce picotement qui se produisait quand un message venait d'arriver. Ça n'avait pas traîné ! Il pouvait comprendre parfaitement toutefois qu'elle puisse manquer à quelqu'un mais c'était bizarre que ce quelqu'un puisse être lui-même…

― Est-ce que vous êtes d'accord pour que je vous ramène chez vous après que les effets de l'injection se seront dissipés ? Je peux compter sur votre aide en échange de la mienne ?

― Je serais d'accord si je savais exactement à quels dangers je m'exposais…

Il vint près d'elle, à moitié hypnotisé par la façon dont les lignes du Temps semblaient danser autour d'elle, se croiser, se courber, comme dans un kaléidoscope où il croyait discerner un poème calligraphié en gallifréen… Mais une fois qu'il fut près d'elle, ça ne s'arrangea pas tellement. Entre les cookies qu'elle avait mangés, son parfum de cerise burlat bien mûre mâtiné de quelque chose comme du musc blanc, et les entêtantes bouffées de phéromones qu'elle émettait… Il avait besoin de toute son emprise sur lui-même pour ne pas s'approcher davantage…

― Mais vous êtes courageuse… Vous êtes sûre que vous n'êtes pas une Dame du Temps ?

― Certaine. 100% terrienne, 37°, zéro télépathie. Pourquoi me regardez-vous de cette façon ?

― Votre aura est particulièrement fascinante… par son ampleur et sa beauté. Elle se déploie si gracieusement…

― Hum, je parie que vous dites ça à toutes les filles que vous voulez garder à bord…

― Seulement celles qui sont jolies… plaisanta-t-il distraitement.

Il baissa les yeux vers son cou nacré et velouté qu'il avait une furieuse envie d'embrasser à pleine bouche...Alors ça c'était nouveau ! Il se connaissait assez pour savoir que c'était rarement quelque chose qu'il faisait de but en blanc, pour ne pas dire jamais. Il aurait bien aimé pouvoir commencer par quelque chose de beaucoup plus doux et romantique plutôt que par cet improbable désir sauvage et affamé, où il y avait bien trop de langue et… de dents ! Une seule image inopportune, insistante et impérieuse revenait encore et encore : embrasser, mordiller, mordre et… boire son sang.

En analysant ce à quoi il venait de penser, ses yeux s'écarquillèrent de surprise. Il inspira à fond et fit un pas précipité en arrière. Elle n'avait rien dit et s'était contentée de le regarder comme si elle avait conscience qu'il se battait contre lui-même mais sans paraître avoir peur. Elle aurait dû. C'était effrayant.

― Je dois remonter… là-haut un instant, expliqua-t-il un peu confus. M'allonger quelques minutes.

― Vous avez besoin que je vous accompagne ?

― Non, NON ! répondit-il un peu trop vite. Mais… je n'aurais rien contre un peu de thé et d'autres gâteaux… Il doit y avoir une boite de Jammie Dodgers dans l'une des cuisines du Tardis...

― Ça va, j'ai compris, je m'en occupe.

― Vous avez mon éternelle reconnaissance… murmura-t-il en la regardant s'éloigner.

.°.

CLARA OSWALD

Après avoir déposé le plateau contenant le thé et les gâteaux près de lui sur un guéridon de sa grande chambre où elle n'était jamais entrée, elle resta un instant hésitante. Elle ne l'avait jamais vu dormir, sauf peut-être après la régénération.

L'endroit était surprenant. La pièce était meublée intégralement dans le goût du siècle, avec des caractéristiques qui relevaient déjà de l'Art Nouveau dans les lignes et les motifs empruntés à la nature. Vu la date, ce devait être donc « hypermoderne » pour un observateur extérieur, alors qu'à ses yeux cela avait juste l'air hyper daté. Elle se demanda si cette chambre n'avait pas été meublée ainsi par courtoisie envers sa visiteuse précédente, pour la mettre plus à l'aise et l'aider à accepter le vaisseau et la nature par ailleurs extraordinaire de son occupant… Le lit où il s'était allongé tout habillé était étroit. Un lit de célibataire. Il y avait un bureau, une petite bibliothèque, deux coffres, un banc au pied du lit et le guéridon où elle avait posé le plateau. C'était tout.

Elle n'avait aucune envie de le déranger mais aurait bien aimé savoir si elle avait eu une réponse à son message sur le papier psychique, qu'elle parvint à subtiliser dans sa poche sans l'éveiller.

Par prudence, elle avait juste écrit : « Mon cher Archim Boldo, si vous voulez retrouver votre assistante en vie et entière, apportez une pleine rançon de cookies et rendez-vous chez elle le lendemain du jour où vous l'avez emmenée en Sibérie. PS : Venez sans Katep Helt ».

Quand elle ouvrit en deux le vieux portefeuille de cuir, la zone vierge à l'intérieur laissa apparaitre les mots suivants qui la firent tressaillir de joie et de soulagement :

« Est-ce vraiment vous, Clara ? ».

Emportant le tout dans un sourire, elle alla chercher un stylo sur le bureau qui se trouvait dans un angle de la chambre. Elle s'y assit pour écrire plus confortablement.

« Oui, 'papa'. Mes allusions codées n'étaient pas assez claires ? ».

« Combien de fois vous ai-je dit de ne pas vous éloigner ? Il va falloir que je vous attache ! ».

Elle eut un petit sourire retors et se félicita de n'avoir pas du tout l'esprit mal tourné.

« Je ne suis pas vraiment certaine que cette idée me plaise autant qu'à d'autres… ».

« Arrêtez de jouer. J'étais mort d'inquiétude. Dites-moi où vous êtes que je vienne vous chercher ».

« Ne vous inquiétez plus. Je suis dans l'endroit le plus sûr du monde… ».

« Un endroit où il y a du papier psychique manifestement ».

« Brillant esprit de déduction !... Le magicien chinois est-il avec vous finalement ? Parce j'avais entièrement raison à son propos, vous savez. »

« Pas pour l'instant. Oui je sais, il a avoué être responsable de ce qui vous est arrivé. Et il n'en éprouve aucun remord ».

« Et à part menacer les crapules sans scrupule pour les faire avouer, vous faites quoi ? »

« Figurez-vous que je vous cherchais ! »

« Je suis dans le Tardis, avez-vous vraiment bien regardé partout ? :-) ».

« Je m'en doute… Ce que je ne sais pas c'est avec lequel. Ni… pourquoi votre ponctuation semble devenue folle ».

« Quand vous vous déciderez à avoir un téléphone, vous saurez pourquoi !… »

« Cessez vos enfantillages. J'arrive tout de suite ».

« Oh, mais est-ce donc que je vous manquerais ? »

« … mphmhph ».

« J'achète une voyelle :-D »

« Vous recommencez. Comment est le taux d'oxygène dans la pièce où vous trouvez ? »

« Je n'en sais rien. Comment est-il dans votre chambre d'habitude ? ».

« Clara ! Que… Que faites-vous dans ma chambre ? Il n'est pas très... vraisemblable que je vous y ai invitée ».

« Vous non, mais cette version de vous m'a presque suppliée de rester quelques jours. Et je vous garantis qu'il n'y a plus une seule molécule de toxine de Reaper sur moi… »

« Je vous rappelle que vous aviez promis de ne pas vous moquer de moi à ce sujet... »

« Je ne me moque pas. Il a juste besoin d'une infirmière, c'est tout. Pas la peine de paniquer ».

« Je ne panique pas, petite impertinente… Quels sont les symptômes ? ».

« Vous voulez vous auto-diagnostiquer à distance ? »

« Et pourquoi pas ? »

« Parce que j'ai une autre question plus importante pour vous ».

« Dites toujours »

« Et bien je suis actuellement avec vous de toute évidence, et ce 'vous' vient de me demander de l'assister dans une expérience (dangereuse et stupide de mon point de vue limité mais passons). Alors, pourquoi ne vous en souvenez-vous pas ? Trois jours avec une mystérieuse inconnue affamée que vous trouvez dans la salle de contrôle en train de dévaliser vos gâteaux… ça ne vous dit rien ? Ou vous en souvenez-vous mais… sans me l'avoir jamais dit ? ».

« Donc vous êtes dans mon passé ».

« Vous auriez préféré que je vous dise que j'étais en compagnie d'une future incarnation ? »

« J'aurais préféré que le Maître ne vous fasse aucun mal ».

« Le Maître ? »

« Le magicien chinois, c'est le Maître. En quelque sorte ».

« Je croyais qu'il était mort ? ».

« Aucun commentaire désobligeant ou sarcastique, je vous prie… ».

― A qui écrivez-vous ?

Clara sursauta et en relevant le nez vers le Docteur. Son sourire amusé s'effaça, voyant que le onzième s'était redressé de son lit et la considérait avec une attention étonnée et un peu troublée.Pas l'habitude de trouver une fille dans votre chambre au réveil, Docteur ? se demanda-t-elle. Il devait bien y avoir trouvé sa femme quelquefois pourtant…

― A vous… Vous êtes en train de me demander vos symptômes…

― Je vais mieux, répondit-il en se levant. Que faites-vous là ?

― Je vous ai apporté du thé et des gâteaux, comme vous me l'avez demandé, répondit-elle avec un coup d'œil sur le plateau, posé à quelque distance.

― Est-ce que vous m'avez pris le papier psychique ? C'est une manie chez vous de vous approprier mes affaires !

Clara sourit d'un air un peu figé, mais au lieu de les lui rendre immédiatement, se rua pour écrire une dernière phrase : « Zut, je suis grillée ! Il réclame son portefeuille séance tenante, et n'a pas l'air content. A bientôt cher vieux grincheux ».

Eleven marcha à grandes enjambées vers elle et lui reprit son bien en un tour de main jaloux.

― Sortez d'ici ! exigea-t-il en tendant son bras vers la porte sans la regarder.

Elle se dépêcha de partir sans demander son reste.

.°.

LES DOCTEURS

Dès qu'elle fut hors de vue, il s'empressa d'ouvrir le portefeuille pour examiner sur le papier les derniers mots écrits qui s'effaçaient et qui disaient seulement : « cher vieux grincheux ». Bon, c'était vrai qu'il était vieux. Mais il était surpris que leur relation soit de cet ordre.

Il saisit le crayon qu'elle avait abandonné sur la table et ajouta une note à l'intention de son futur lui :

« Si j'apprends un jour que tu as tout fait foirer avec celle-là aussi, je te promets que ça va chauffer pour ton matricule ! »

Une réponse cinglante arriva sans attendre :

« Tu règleras ça avec le onzième, si ça ne te fait rien ! »

« Hey ! C'est moi le onzième ! Et d'abord, pourquoi parles-tu de nous à la troisième personne ? »

« Le onzième ? J'espérais une autre incarnation... Hem. Que puis-je te dire d'autre, que tu puisses apprécier à sa juste mesure, sinon... 'spoilers, Sweetie' ? ».

.°.

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