Les belles histoires du Père Makarof, ou Fairy Tail en trente-et-un mots

Chapitre 10 : Sang d'encre

1306 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour 12/11/2020 11:48

Sang d'encre



–        Jubia, mon Dieu, c’est terrible !


La mage d’eau, en train de consulter le tableau des missions, afficha une expression surprise en apercevant Ever Green accourir vers elle, vraisemblablement complètement paniquée et tenant ce qui ressemblait à une lettre dans sa main droite. Habituellement, Ever Green restait souvent avec l’unité Raijin, auprès de Bixrow, Fried et Luxus ; il était rare de la voir « gambader » ainsi toute seule, et surtout, il était rare de la voir aussi affolée.


–        Que se passe-t-il ? demanda Jubia, tâchant de ne laisser filtrer aucune panique dans le ton calme qu’elle employa.

–        C’est Grey, il a eu un problème !

–        Quoi ?! Monsieur Grey est en danger ?!


Ever Green rajusta ses lunettes et acquiesça d’un air sombre, faisant monter la terreur dans le cœur de la jeune mage d’eau. Personne à Fairy Tail n’ignorait en effet que cette dernière était très amoureuse de Grey, et que si la moindre chose arrivait au jeune homme, elle ne s’en remettrait à coup sûr pas.


Maintenant qu’elle y pensait, Jubia n’avait pas vu son âme sœur de la journée. Encore plus terrorisée par cette pensée qu’elle ne l’était déjà, l’adolescente arracha sans ménagement la lettre des mains d’Ever Green, qui poussa un cri de surprise face à ce geste si féroce. Sur le papier blanc était écrit : « SOS. Besoin aide ville Marguerite. Blessé, envoyez renforts ». Marguerite… Ce doit être la ville où Monsieur Grey est parti en mission. Quant aux lettres qui formaient le message, elles avaient toutes étaient tracées en rouge, avec une substance que Jubia devinait être le sang de l’homme qu’elle chérissait. Il s’était donc servi de son sang comme encre…


Les larmes commencèrent à monter aux yeux de la jeune femme, bien qu’elle fît tout pour n’en rien laisser paraître. Monsieur Grey aimait les femmes fortes et sûres d’elles, pas les pleurnicheuses qui se morfondaient dans leur coin, c’était certain. Ne vous inquiétez pas, Jubia va venir vous sauver ! songea-t-elle d’un air résolu en froissant le papier entre ses mains, avant de le jeter dans une poubelle avoisinante. Il était temps de préparer ses affaires.


–        Jubia doit partir immédiatement. Monsieur Grey court un grave danger, et Jubia veut aller lui apporter son aide !

–        A–Attends un peu, Jubia ! l’interpella Ever Green en lui attrapant le bras. Ce n’est pas la peine d’y aller, une autre équipe est déjà partie pour lui porter secours !


L’intéressée se mordit la lèvre. D’un côté, elle avait terriblement envie de tout plaquer pour aller sauver l’élu de son cœur, quitte à aller au-devant du danger en se moquant des conséquences, mais de l’autre, si un groupe était en route, cela risquait d’être inutile. Après tout, elle n’était pas si forte que ça, elle le savait bien, et elle risquait de gêner plus qu’autre chose, même si ses actions partaient d’une bonne intention au départ.


–        Vraiment ? Tu en es sûre ?

–        Oui, oui, vraiment ! affirma son interlocutrice nerveusement. Et puis, je suis sûre que Grey ne voudrait pas que tu te mettes en danger pour lui comme ça ! Attends-le donc ici et repose-toi un peu.


Un peu – beaucoup – à contrecœur, Jubia accepta, la mort dans l’âme. Elle ne parvint pas à rester en place, et plus les secondes passaient, plus elle se faisait un sang d’encre pour son cher Monsieur Grey, dont elle n’avait plus aucune nouvelle. Et à force de tourner en rond et de se ronger autant les sangs, ses jambes finirent par ne plus pouvoir la porter et ses forces l’abandonnèrent, si bien qu’elle tomba évanouie au milieu de la salle, gagnée par l’angoisse et la fatigue. On la monta jusqu’à sa chambre, à l’étage, afin qu’elle pût récupérer au mieux.


Mais elle n’était pas la seule à être minée par la peur. Lorsque Grey revint enfin, quelques heures plus tard, il était à bout de souffle, comme s’il avait couru le cent mètres, et paraissait être fortement anxieux, tout comme l’avait été la mage d’eau avant lui.


–        Est-ce que… Jubia va bien ? articula-t-il difficilement, tentant de reprendre une respiration aussi normale que possible. Je venais de terminer ma mission et Reby et les Shadow Gear sont venus m’avertir qu’elle était tombée dans les pommes à cause de moi. Qu’est-ce que c’est que cette histoire ?


Ever Green, qui était la personne à qui le mage de glace venait de s’adresser, croisa les bras sur sa poitrine d’un air gêné.


–        On l’a montée dans sa chambre, mais elle dort encore. Je… Je suis désolée Grey, ajouta-t-elle, avant de poursuivre devant son air interrogateur. Il était simplement question de lui faire une blague en écrivant un message avec du ketchup, mais elle a pris ça pour du sang, et… Je ne pensais pas que ça irait si loin, conclut-elle dans un soupir.


Elle osa un regard timide dans sa direction, et ce qu’elle vit la fit lentement déglutir. Grey fulminait, littéralement, et même s’il n’était pas connu pour être un des membres les plus calmes de la guilde, elle ne l’avait jamais vu être aussi contrarié, et c’était là un doux euphémisme.


–        Une « blague » ? Tu te moques de moi ? Est-ce que l’idée venait vraiment de toi ?


Son interlocutrice ouvrit la bouche pour lui répondre, mais il la coupa court en secouant la tête, et se retrouva en face d’elle en quelques enjambées.


–        En fait, non, je ne veux même pas le savoir. Là maintenant, je vais monter voir Jubia, et il vaudrait mieux pour toi et tous ceux impliqués qu’elle aille bien. Si ce n’est pas le cas…


Il pointa un index menaçant sur la pâle poitrine de la jeune femme.


–        Je vous congèlerai dans un bloc de glace et je vous y laisserai jusqu’à que vous perdiez connaissance à cause de l’hypothermie. Ce sera une mort lente, froide et douloureuse, tu peux en être sûre.


Il retira son doigt fin, et passa comme une flèche à côté d’elle, criant le nom de Jubia tandis qu’il montait quatre à quatre les escaliers vers l’étage et les dortoirs, laissant derrière lui une Ever Green qui tremblait encore de tous ses membres face aux paroles qui lui avaient été dites, et elle tomba à genoux. Lorsque Grey se faisait un sang d’encre pour quelqu’un, il ne faisait pas semblant.


La prochaine fois, elle y réfléchirait à deux fois, avant de faire une mauvaise blague. Surtout si cela concernait Jubia.

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