Mortem Regis

Chapitre 2 : Détour à Vopaqua

4041 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour 25/01/2021 20:51

La matinée était bien entamée au royaume de Vopaqua, au sud de celui de Redfir. Le soleil était radieux en ce jour, la température était agréable et une brise légèrement humide rafraîchissait les terres de cette nation, bordée de toute part sauf au nord par les océans.


Emerald.


Tel était le nom de la capitale de ce pays que la plupart des étrangers qualifiaient d'exotique. Les ruelles de cette cité étaient remplies de marchands en tous genres, et nombreux étaient les habitants et les touristes qui arpentaient ces rues. Ce lieu, en plus d'être magnifique à voir, était vivant et très animé, notamment par des bardes et des troubadours qui chantaient joyeusement, ou contaient des légendes. L'architecture des maisons était élégante, et les coraux qui les décoraient leur donnaient un côté atypique et exotique. Plusieurs fontaines d'eau fraîche et claire étaient dispersées dans les différents quartiers que comptait cette citadelle. Chacune des rues qu'on pouvait emprunter débouchait systématiquement sur l'une d'entre-elles. A l'ouest et au sud s'étendait un océan paisible avec sa surface qui reflétait magnifiquement le soleil. Des ports et des docks étaient aménagés, et les bateaux de pêcheurs qui s'y trouvaient pouvaient se compter par dizaines. En observant vers le nord de la ville, on pouvait voir une colline s'élever. Et en son sommet se dressait un majestueux château. C'était le palais royal.


Portant une cape de voyage brune, le visage à moitié dissimulé sous une capuche qui le protégeait du soleil et de l'humidité, Seven avait les yeux rivés sur ce château. Plusieurs fois par semaine, il avait l'habitude de se rendre là-bas pour une raison personnelle. Et aujourd'hui, il comptait bien y retourner encore. Il aurait pu se reposer après le régicide qu'il avait commis la veille au soir. Mais il avait choisi d'utiliser sa faculté spéciale de déplacement rapide pour faire la route entre Redfir et Vopaqua durant la nuit. Il aurait tout le temps de se reposer plus tard, après tout.


D'un pas décidé, il s'avança dans la ruelle qui s'étendait devant lui, se mêlant ainsi à la foule. Le jeune homme n'était pas quelqu'un qui aimait particulièrement avoir autant de monde autour de lui. Et il aimait encore moins attirer l'attention sur lui. Il se fit discret, tout en slalomant entre les passants, prenant soin de ne bousculer personne, et se frayant ainsi un chemin vers sa destination. Tout en marchant, il jeta un rapide coup d'oeil sur les marchands et les articles qu'ils proposaient. Des tissus, de la nourriture, des bijoux, des fleurs, des objets artisanaux, des peintures... N'importe qui pouvait trouver son bonheur dans ces différentes boutiques. Le commerce était vraiment un point fort du royaume de Vopaqua. Personne à Kaärann ne pouvait nier ce fait.


Mais soudain, perdu dans ses pensées, Seven ne put éviter quelque chose qui lui avait foncé droit dessus, le faisant tomber au sol et lui ôtant sa capuche, révélant ainsi son visage et sa longue chevelure attachée en une queue de cheval.


« Putain... » grogna-t-il alors qu'il fusillait ce qui l'avait poussé d'un regard aussi noir que ses yeux et ses cheveux. Il vit en face de lui une personne qui était également tombée au sol.


« Désolé... C'est ma faute... » s'excusa l'inconnu qui se révéla être un garçon légèrement plus jeune que l'assassin. Ce dernier, exaspéré par le fait que ce petit incident avait attiré des regards indiscrets sur lui, se releva bien vite. Il observa ensuite le jeune homme au sol d'un air un peu blasé. Il aurait bien voulu le laisser au sol comme cela, et s'en aller loin de lui pour lui apprendre à faire plus attention. Mais finalement, Seven s'était décidé à lui tendre la main pour l'aider à se relever. Le plus jeune, d'abord surpris, accepta tout de même l'aide, et se remit debout grâce au plus âgé. Celui-ci dévisagea alors l'autre: C'était encore un adolescent, il n'y avait pas de doute là-dessus. Il était plutôt fin, et mesurait une bonne dizaine de centimètres de moins que l'assassin, qui n'était pas non plus excessivement grand. Néanmoins, ce garçon était d'une beauté qui ferait rougir les jeunes demoiselles. Sa peau bronzée, ses cheveux noirs en bataille qui lui arrivait au niveau des épaules, son visage raffiné, ainsi que ses yeux aux iris cramoisis se mariaient à merveille. Il était vêtu d'une tunique simple blanche, mais avec des motifs colorés plutôt jolis. En le regardant de cette manière, Seven se rendit compte de quelque chose de plutôt curieux: Les traits physiques de cet individu, à savoir sa peau, ses cheveux et ses yeux, étaient des caractéristiques propres à un peuple particulier de Kaärann. Ceux et celles qui étaient originaires de l'empire de Xen, à l'extrême est du continent.


« Un Xenois à Vopaqua ? » s'était étonné l'assassin qui demeurait silencieux, alors que l'adolescent s'était légèrement incliné devant lui, à la fois pour s'excuser de l'avoir accidentellement bousculé, et pour le remercier de l'avoir aidé à se relever:


« Je vous promets de faire plus attention à l'avenir ! »


Il s'était ensuite redressé, avant d'adresser un léger sourire à Seven. Celui-ci haussa un sourcil d'un air las. Ce n'était pas qu'il n'appréciait pas les excuses qu'on lui présentait, mais il trouvait que ce jeune Xenois en faisait un peu trop. D'ailleurs, une question vint à l'esprit de l'assassin aux cheveux d'ébène: Qu'est-ce qu'un habitant de Xen comme lui faisait à Vopaqua ? Vopaqua et Xen étant deux nations se situant aux extrémités de Kaärann, ce n'était pas commun de voir une personne originaire de la nation des sables dans ce royaume.


« Quelque chose ne va pas ? » demanda alors le plus jeune, qui observait Seven avec étonnement. L'assassin ne s'était pas rendu compte qu'il continuait de le déshabiller du regard sans rien dire. L'adolescent devait probablement trouver cette attitude étrange de sa part. Toutefois, le plus âgé lui avait fait volte-face en remettant sa capuche en place.


« Rentre chez toi, petit. » lui conseilla-t-il alors qu'il commençait à s'éloigner de lui sans lui adresser un regard de plus. Le Xenois resta bouche-bée devant une telle réaction. Il ne comprenait pas trop pourquoi il lui avait dit cela. Mais il ne chercha pas à le retenir, et se contenta de regarder Seven s'éloigner de lui, avant de reprendre sa propre route.



Pendant ce temps, dans la cour du palais royal, deux jeunes soeurs semblaient jouer à un jeu particulier. La plus jeune des deux, qui était encore une enfant, courait en rigolant, et en essayant d'éviter des jets d'eau que lui envoyait la plus âgée, qui ressemblait plutôt à une adolescente. Les deux avaient la particularité d'avoir des cheveux bleus azur, trait qui était caractéristique des natifs de Vopaqua, tout comme la faculté de pouvoir manipuler la magie de l'eau.


« Tu m'as encore loupée ! fit la benjamine des deux en tirant la langue à la plus grande pour la narguer gentiment.

– Tu as beaucoup de chance, c'est tout ! » répliqua l'autre jeune fille, alors qu'elle avait envoyé un autre jet d'eau que la plus jeune avait évité en sautant joyeusement sur le côté. Tout cela, sous les yeux d'une troisième jeune fille qui semblait être une jeune adulte, et qui était assise en retrait sur une rambarde en pierre. Tout comme les deux soeurs qui s'amusaient, celle-ci avait également les cheveux bleus, mais d'un bleu légèrement plus foncé. Elle observait les deux plus petites d'un air bienveillant.


« Fiona, attention à ne pas baisser ta garde ! conseilla-t-elle à la plus jeune.

– Ne t'en fais pas, grande soeur ! rassura la dénommée Fiona avec un large sourire qui se voulait moqueur vis à vis de celle qui la poursuivait. La magie d'Irina n'est pas suffisamment puissante pour me faire flancher !

– Je te demande pardon ? s'indigna alors ladite Irina. Tu vas voir si ma magie n'est pas puissante ! »


Motivée par l'envie de rabattre le caquet à sa petite soeur, Irina se concentra quelques secondes sur sa magie, afin de faire apparaître un jet d'eau plus gros que les autres. Vu qu'il était plus épais et plus vif que les précédents jets qu'elle avait invoqués jusqu'à présent, Fiona ne pouvait pas utiliser sa méthode habituelle pour l'esquiver. Tout en hurlant, elle se prit le sort dans la figure, qui la fit glisser sur quelques mètres au sol. Face à un tel spectacle, la jeune fille assise ne put s'empêcher de rigoler:


« Je crois que tu as parlé trop vite, ma petite Fiona.

– Ma magie n'est pas puissante tu disais, hein ? » enrichit Irina qui avait positionné ses mains sur ses hanches, arborant un air fier, et en regardant sa cadette qui était au sol. Celle-ci, toute trempée s'était redressée pour se retrouver assise en tailleur, et avait croisé les bras en boudant.


« Ça c'était un coup bas... » murmura-t-elle, toutefois suffisamment fort pour que les deux plus grandes l'entendent. Irina rigola un bon coup suite à cela, avant de s'approcher de sa petite soeur pour l'aider à se relever et à se sécher. Au même moment, un jeune homme grand vêtu de noir, et aux cheveux blonds lui arrivant au niveau des épaules arriva près de la plus âgée des trois, avant de lui adresser un sourire.


« Je vois que vous vous amusez bien, toutes les trois !

– Voir mes petites soeurs faire ce genre de jeu peut être très marrant, parfois.

– J'aurais bien voulu contempler un tel spectacle à tes côtés Ewen, répliqua le jeune homme. Mais votre père m'envoie te chercher. Il souhaite te parler immédiatement.

– Ah bon ? s'étonna la concernée. C'est à propos de quoi ? Il te l'a dit ? »


Mais le blond secoua la tête pour répondre négativement à la question. Néanmoins, il avait confié à la jeune fille que son père semblait assez nerveux depuis son réveil.


« Je ne sais pas de quoi il veut te parler, continua-t-il, mais je pense que ça doit être grave.

– Harvay, est-ce qu'on peut venir nous aussi ? » demanda alors Irina au jeune homme, alors qu'elle s'était rapprochée du duo avec Fiona. Les deux plus jeunes soeurs, qui avaient tout entendu, affichaient à présent un air inquiet. Elles voulaient savoir pourquoi leur père était aussi agité en ce jour.


« Il a principalement réclamé la présence d'Ewen, répondit l'homme en noir en souriant tendrement, mais je ne pense pas que votre présence le dérangera. Bien au contraire. »


Irina et Fiona furent ravies d'entendre cela. Ewen se leva alors, et demanda à Harvay de les emmener jusqu'à leur père, chose qu'il fit.



Quelques instants plus tard, le groupe débarqua dans la salle du trône du Palais. Celle-ci était véritablement spacieuse et bien aménagée. Un tapis de couleur bleu roi était déroulé sur un carrelage éclatant depuis l'entrée jusqu'au trône qui se trouvait en face, et légèrement surélevé grâce à quelques marches d'escaliers. Sur chaque côté de cette salle se dressaient de grandes et hautes fenêtres décorées par des rideaux de la même couleur que le tapis central. Les vitres laissaient passer les rayons du soleil, ce qui offrait une très belle luminosité à l'endroit.


Harvay conduisit les trois jeunes filles jusqu'au trône. Un homme d'âge mûr, aux longs cheveux bleus azur attachés en une queue de cheval s'y trouvait assis. L'armure légère rouge et bleu marine qu'il portait, ainsi que la cape assortie accrochée sur ses épaules lui donnaient un certain charisme et une allure plutôt imposante. Il s'agissait d'Othéo Vopaqua, le roi du royaume de Vopaqua qu'on appelait également la nation des océans. Il avait l'air de quelqu'un de plutôt amical, mais inspirait toutefois le respect. A sa droite, une femme se tenait debout. Il s'agissait de Saya, l'épouse du roi, et la mère d'Ewen, d'Irina et de Fiona. Elle avait les cheveux dont la couleur était semblable à ceux d'Ewen, et était vêtue d'une longue robe bleue canard simple mais élégante.


« Papa. Maman. » fit alors Ewen en souriant et en s'inclinant légèrement devant eux en guise de salutation et de respect. Elle fut aussitôt imitée par ses soeurs et par Harvay. Cette politesse à leur égard fit sourire les deux parents, mais le père reprit rapidement son sérieux. Il échangea ensuite un regard avec son épouse, avant de s'adresser à ses deux plus jeunes filles, à savoir Irina et Fiona.


« Je ne pensais pas qu'Harvay vous aurait amenées ici vous aussi, mais c'est une bonne chose que vous soyez là, affirma-t-il. J'ai quelque chose de très important à vous révéler.

– Quoi donc ? » demanda Irina, qui ne comprenait pas trop pour l'instant. Un silence long de plusieurs secondes se fit ensuite entendre. Tour à tour, le roi observa ses enfants, puis Harvay, et termina par sa femme, qui hocha doucement la tête, lui faisant ainsi signe de leur révéler la raison de leur réunion dans cette salle.


« Le roi Moreh est décédé. »


A l'entente de ces mots, les princesses ainsi qu'Harvay s'étaient figés sur place, les yeux écarquillés d'effroi.


« Attendez... Quoi ? fit Ewen, qui n'était pas sûre d'avoir bien entendu.

– Son altesse royale de Redfir a été assassiné la nuit dernière, raconta Othéo. Sa fille, son épouse et ses gardes l'ont retrouvé dans l'une des pièces de leur palais, gisant sur le sol avec la gorge tranchée.

– Par les dieux... Quelle horreur... » murmura Irina, terrorisée devant une telle annonce. Et elle n'était pas la seule. Ewen affichait un air horrifié tant elle n'en revenait pas. La famille royale de Vopaqua avait d'excellentes relations avec celle de Redfir. Alors apprendre brusquement la mort du roi Firois lui avait fait un grand choc. Il en était de même pour Fiona, qui était attristée, et dont les larmes coulaient le long de ses joues. Mais la personne qui semblait la plus affectée par une telle annonce était Harvay. Contrairement à la famille royale qu'il servait actuellement, il était originaire de la nation des flammes, qui n'était autre que le royaume de Redfir. De plus, il avait personnellement connu le roi Moreh, et avait grandement apprécié et admiré cet homme. Mais en apprenant sa mort soudaine, Harvay ne savait pas comment réagir. Il était à la fois choqué, triste, et terriblement en colère envers la personne qui avait commis un tel meurtre.


« Bon sang... murmura-t-il en serrant ses poings et en détournant son regard de tout le monde.

– Comment vont Dame Nefer et Liz ? demanda alors Ewen.

– La reine Nefer est encore sous le choc, répondit doucement sa mère. Mais elle va bien. Liz par contre a très mal pris cet évènement, et est actuellement inconsolable. »


Ewen baissa alors la tête, l'air attristé. Les pauvres... Qu'avaient-ils fait pour que le sort s'acharne ainsi sur eux ?


« Est-ce qu'on sait quelque chose au sujet du meurtrier ? demanda ensuite l'aînée des trois princesses.

– Non Ewena, nous ne connaissons pas encore son identité, répondit le roi, mais grâce à Liz qui l'a brièvement aperçu, nous savons deux choses sur lui. La première est qu'il s'est servi d'une petite lame pour trancher la gorge de Moreh. La seconde, c'est qu'il possède des cheveux longs et noirs.

– Des cheveux longs et noirs ? répéta avec étonnement Harvay qui regardait à présent le roi. Serait-ce... une personne originaire du royaume de Vegario, le meurtrier ?

– C'est une possibilité, affirma Othéo en croisant les bras, l'air pensif. Mais il n'y a pas que les Vegarions qui peuvent avoir cette particularité sur ce continent. Une enquête est en cours pour retrouver l'assassin, et la sécurité à Redfir a été renforcée depuis. Je pense renforcer celle de Vopaqua de la même manière. »


Les princesses et le garde du corps furent un peu surpris par une telle décision sur le coup. Le roi aux cheveux bleus leur expliqua alors:


« Ce meurtrier qui a tué Moreh, il peut tout aussi bien s'en prendre à n'importe quel autre dirigeant de Kaärann, dont moi... ou même l'une d'entre vous. »


Cette phrase avait jeté un froid dans la salle. Mais tous les gens présents dans cette salle étaient forcés de l'admettre: le souverain de Vopaqua avait raison. La mort de Moreh, en plus de provoquer une panique générale à Redfir qui se propageait peu à peu sur le reste du continent, n'était peut-être que le premier régicide sur d'autres à venir. Désormais, les dirigeants de chacune des autres nations de Kaärann, à savoir Vopaqua, Norte, Grendia, Vegario et Xen, devaient se montrer plus vigilants que jamais, non seulement pour leur survie, mais aussi pour la protection de leurs familles et de leurs peuples respectifs.


« J'ai peur... » murmura Fiona qui s'était accrochée au bras d'Harvay, alors que celui-ci tentait de la rassurer.


« Papa, maman, les appela alors Ewen. Permettez-moi de me rendre au palais royal de Redfir. Je voudrais présenter mes condoléances à Dame Nefer et à Liz, et j'aimerais me joindre à l'enquête pour retrouver l'assassin du roi Moreh.

– Quoi ? fit Irina avec surprise.

– Tu n'y penses tout de même pas, ma chérie ! intervint sa mère, qui n'était pas vraiment enchantéê à l'idée de laisser partir sa fille aînée.

– Je pense que je peux aider, affirma l'aînée des princesses. Pour tout vous dire, j'ai peut-être même une piste concernant cette affaire.

– Une piste ? s'étonna le roi. Qu'est-ce que tu veux dire ? »


Sous les yeux étonnés des autres, la princesse Ewena exposa certaines recherches qu'elle avait entrepris depuis quelques semaines. Bien que c'était la première fois qu'un souverain se faisait tuer, de nombreux meurtres visant des personnes de sang noble, ou issues de familles influentes ont été commis. Et à chaque fois, l'assassin n'avait jamais été démasqué jusqu'à maintenant.


« J'ignore si ces crimes ont été commis par la même personne, mais j'ai l'intime conviction que tous ces meurtres sont liées, expliqua la jeune fille.

– Vu sous cet angle, il est vrai que c'est une piste à ne pas négliger, approuva Othéo. Mais le plus important est de retrouver l'assassin de Moreh, et le mettre hors d'état de nuire le plus rapidement que possible.

– En fait... » hésita alors Ewen. En vérité, elle avait un suspect potentiel en tête. Mais n'étant pas sûre qu'un tel suspect soit réellement coupable, et surtout n'ayant aucune preuve à son encontre, elle ne pouvait rien affirmer. Elle voulait continuer ses recherches avait de tirer des conclusions hâtives.


« Non, fit-elle finalement. Laissez tomber, je divague un peu. Mais j'aimerais tout de même me rendre à Redfir.

– Ewena... fit son père.

– S'il vous plait ! »


Les deux parents s'échangèrent un regard. Ils ne s'attendaient pas à ce que leur fille s'entête ainsi à vouloir se rendre au palais Firois. Fiona et Irina étaient également stupéfaites par la volonté de leur aînée à vouloir aller dans le lieu où un roi avait été assassiné. C'est alors qu'Harvay s'avança de quelques pas vers le roi, avant de s'incliner devant lui.


« Votre majesté. Si vous accordez votre autorisation à Ewen, alors permettez-moi de l'accompagner.

– Harvay, c'est trop dangereux aussi bien pour Ewen que pour toi, répondit la reine Saya. Je sais que vous vous inquiétez tous les deux pour la famille royale Redfir, mais... »


Soudain, Othéo avait levé sa main, faisant signe à sa femme de ne pas dire un mot de plus.


« Ewena, je peux voir de la détermination dans tes yeux, et je dois avouer être très admiratif. Toutefois, ta mère a raison. Ce n'est pas prudent de te rendre là-bas. Et même si Harvay t'accompagnait, cela ne rendrait pas ton voyage moins dangereux pour autant.

– Je comprends ton inquiétude, papa. Mais tu m'as appris à me défendre. Je pense pouvoir m'en sortir. »


En voyant que sa fille aînée était aussi têtue, le roi poussa un profond soupir, avant d'afficher un léger sourire.


« Si on m'avait dit que ma plus grande fille serait une véritable tête brûlée... Enfin ! Je vais réfléchir plus calmement à ta proposition. Je te donnerai ma réponse ensuite. Mais pour le moment, je préfère que tu restes ici, en attendant que l'agitation provoquée par la mort de Moreh se calme un peu. »


En voyant que le roi allait reconsidérer son idée, Ewen lui retourna son sourire. Suite à cela, et après une mise en garde concernant le renforcement de la protection du palais, les trois princesses, ainsi qu'Harvay, sortirent de la salle du trône.



Plusieurs heures passèrent ensuite. Chacune des princesses s'occupa comme elle le pouvait. Fiona, qui était encore secouée par les récents évènements, se reposait dans sa chambre sous la surveillance d'Harvey. Irina, de son côté, se promenait dans les jardins du château pour se changer les idées. Quant à Ewen, elle était dans ses appartements, assise à son bureau en train d'écrire dans un carnet.

Perché sur la branche d'un arbre qui donnait vue sur sa fenêtre, quelqu'un observait discrètement la jeune fille. C'était Seven. A chaque fois qu'il revoyait cette princesse, des tas de souvenirs lui revenaient en tête.


« Ewen... »


Le jeune assassin avait connu et côtoyé cette fille il y a très longtemps, bien avant qu'il ne devienne un assassin du Mortem Regis. Mais de nombreuses années ont passé, et pas mal d'évènements ont eu lieu, dont un qui a failli leur coûter la vie à tous les deux. En se remémorant ainsi ce passé qu'il avait en commun avec Ewen, l'assassin aux cheveux d'ébène serra ses poings. Une certaine frustration mêlée à de l'amertume était facilement lisible dans ses yeux. Il venait et revenait sur cette branche chaque semaine depuis plusieurs mois maintenant. Il voulait revoir le visage de cette princesse qu'il avait connu, fréquenté et apprécié. Il aurait aimé pouvoir se montrer à elle, lui parler de nouveau. Il souhaitait renouer cette relation qui s'était trop brusquement brisée autrefois. Malheureusement, et pour de nombreuses raisons, il ne le pouvait pas. Et cela le frustrait encore plus qu'il ne l'était déjà.


Il poussa alors un profond soupir, avant de reprendre un visage impassible.


« J'en reviens pas de me ramollir à ce point à cause d'elle... » pensa-t-il, alors qu'il venait de sortir une pierre orangé de sa besace. Il la contempla ensuite. Cet artefact que le boss de son organisation lui avait confié servait à le téléporter jusqu'au quartier général du Mortem Regis. Son regard se tourna alors une dernière fois vers Ewen. Seven aurait voulu que les choses en soit autrement. Mais aujourd'hui, il devait faire une croix sur son passé, et se concentrer sur les tâches qu'il devait accomplir. Faisant volte-face à la princesse aux cheveux bleus, il activa la pierre de téléportation qu'il tenait dans sa main, et il disparu instantanément.




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