Mortem Regis

Chapitre 7 : Guerre de convictions

4240 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour 02/02/2021 20:55

Seven venait de se téléporter au quartier général du Mortem Regis. Il ne l'avait pas fait par gaité de coeur, mais il voulait avoir une discussion avec le boss. Il appréhendait le fait que ce dernier allait le réprimander sur l'échec de sa mission, mais soit ! L'assassin aux cheveux d'ébène était prêt à y faire face. De toute façon, il était trop en colère pour y penser. Oui. Seven était en colère. Même s'il ne laissait rien transparaître, il était plus qu'agacé par l'attitude du chef de l'organisation. Celui-ci semblait masquer ses véritables intentions liées aux meurtres du prince Aelan et du roi Moreh, et le jeune homme n'aimait pas cela.


Traversant rapidement un couloir, il avait croisé la route de divers autres membres. Il pouvait entendre leurs chuchotements, et voir leurs airs surpris lorsqu'il passait devant eux. Visiblement, son échec de la tentative d'assassinat d'Ewen avait fait le tour du Mortem Regis. Mais Seven s'en fichait. Arrivé devant la porte du boss, il ne prit même pas la peine de toquer. Il ouvrit violemment et sans scrupule la porte d'un gros coup de pied. Le boss, assis à son bureau, avait levé sa tête pour le regarder. Et il n'était pas seul. Un homme au teint pâle avec les cheveux courts argentés, tout vêtu de blanc, portant des lunettes, et un peu plus âgé et imposant que Seven, se tenait debout devant le bureau. Alors qu'un léger sourire s'était dessiné sur le visage de ce nouvel individu suite à l'entrée fracassante de l'assassin aux cheveux noirs, ce dernier s'était avancé vers le boss, et avait posé violemment ses mains sur la table.


« Depuis le début, tu cherches à déclencher une guerre générale à Kaärann, pas vrai ?! » s'écria Seven en fronçant les sourcils, et en regardant dans les yeux du masque du boss. Le chef demeura silencieux quelques instants, avant de rigoler légèrement devant une telle attitude.


« En voilà des manières, mon cher Seven ! Tu viens de me prouver une fois de plus que toute ton éducation est à refaire.

– La ferme ! fit l'assassin en vert, agacé. J'en reviens pas que tu nous ais caché une chose pareille. Tu disais que Mortem Regis tuait les nobles pour libérer Kaärann de leur joug, et rétablir l'équilibre social !

– Et c'est ce que cette organisation fait, se défendit calmement le supérieur. C'est juste que j'ai décidé d'accélérer les plans en visant directement les familles royales et impériales.

– Avec la mort du roi Moreh, le conflit qui existait entre Redfir et Norte risque de s'intensifier ! Avec celle du prince Aelan, la même chose arrivera entre Vegario et Xen ! Toutes ces nations pourraient entrer en guerre à cause de toute cette merde ! Et si ça arrive, je ne pense pas que la population s'en sortira indemne !

– Oh... Tu te soucis à ce point du bien-être du continent, mon petit Seven ? Moi qui croyais que tu n'étais qu'un loup solitaire qui se fichait royalement des autres, et qui se contentait d'obéir aux ordres ! »


Seven n'avait qu'une seule envie en cet instant: sauter à la gorge du boss pour lui régler son compte. Même s'il savait qu'il ne faisait pas le poids face à lui, il aurait bien voulu le frapper, l'étrangler, ou pourquoi pas le tuer. Tandis qu'il bouillonnait intérieurement de rage devant l'attitude du chef de l'organisation, l'homme à la longue chevelure corbeau sentit une main se poser sur son épaule droite. C'était l'individu qui se trouvait déjà devant le boss, juste avant l'arrivée de Seven.


« Ton énervement ne t'apportera rien de bon, parla l'argenté à son adresse. Un assassin doit savoir contrôler ses émotions pour agir convenablement face aux différentes situations qu'il peut rencontrer. Aurais-tu oublié mes enseignements à ce sujet ? »


Seven observa le plus âgé du coin de l'oeil, avant de s'écarter de lui pour lui faire ôter sa main de son épaule.


« Lâche-moi, Four, lui conseilla-t-il. Ne te mêle pas de ça.

– Four, parla alors le boss à l'adresse du concerné. Tu peux disposer, pour le moment. Comme tu peux le constater, il faut que je m'entretienne en urgence avec Seven. Je te rappellerai, lorsque j'en aurai terminé avec lui.

– Très bien. » répliqua le dénommé Four en s'inclinant par respect devant le boss. Puis, il fait un signe de salutation de la tête à Seven, avant de quitter la salle. Le boss se tourna de nouveau vers le numéro sept de son classement.


« Tu aurais pu te montrer plus aimable envers celui qui t'a pris sous son aile lorsque tu as intégré l'organisation.

– Je n'ai rien demandé à personne, grogna l'assassin. Et puis n'essaie pas de changer de sujet ! A quoi riment toutes ces conneries ? Qu'est-ce que tu cherches à faire, bordel ?! »


Son supérieur ne répondit pas. Ou du moins, pas tout de suite. Il était très surpris par cette réaction de la part de Seven. Celui-ci avait toujours été loyal envers le Mortem Regis, et avait toujours rempli ses missions avec brio. Mais depuis le jour de l'assassinat de Moreh, il avait l'air méfiant, et moins enclin à accomplir ses missions. Le boss se disait qu'il devait impérativement remédier à cela, s'il ne voulait pas que l'attitude du jeune homme entrave tous ses plans. Et il savait exactement comment s'y prendre.


« C'est un joli bracelet que tu as là. » se contenta-t-il de répliquer, à l'étonnement de Seven, qui ne s'attendait pas à ce quelqu'un remarque ce détail.


« Tu l'as acheté à Kalora ? » demanda le boss. Seven détourna le regard, et resta un instant silencieux, avant de finalement répondre:


« Je l'ai trouvé sur le sol au milieu des plaines de Redfir. »


Devant une telle justification de sa part, le masqué se mit à rigoler, alors qu'une aura blanche commençait à envelopper son corps.


« De qui te moques-tu, petit idiot ? »


C'est alors qu'une puissante bourrasque se mit à souffler dans toute la pièce, envoyant Seven se cogner violemment contre un mur. Des papiers avaient également volé dans la même direction, et se déposaient doucement au sol, tout autour de l'homme en vert. Celui-ci, un peu sonné, reprit peu à peu ses esprits, et essaya tant bien que mal de se relever. Le boss, quant à lui, s'était levé de son siège, et s'avançait à pas lent vers lui, son aura toujours visible.


« Tu peux... utiliser ton aura... de jour ? » parvint à demander Seven malgré son état de choc, et la douleur qu'il ressentait suite à l'impact qu'il avait subi. Mais arrivé près de lui, le boss l'attrapa par le cou en l'étranglant, et le plaqua violemment contre le sol.


« Je pense que tu as besoin d'une petite leçon, Seven. Tu as beau faire partie de mes dix meilleurs assassins, tu n'as pas ton mot à dire sur les ordres que je te donne. Ta mission était très claire: tu devais éliminer la princesse héritière de Vopaqua. Mais bien évidemment, tu as choisi de l'épargner... Je me rends compte que je t'avais surestimé. »


Au fur et à mesure de ses mots, il étranglait l'assassin de plus en plus fort. Celui-ci commençait à suffoquer alors qu'il essayait en vain de se débattre. Au même moment, il aperçut une brume épaisse qui commençait à envahir la pièce. C'était probablement à cause de l'aura climatique de son supérieur.


« Un bracelet trouvé sur les plaines de Redfir... Tu me prends pour qui ? Tu pensais vraiment que je goberais une débilité pareille ? N'oublie pas que je suis le boss du Mortem Regis. Certains de mes assassins me servent également d'espions à travers tout Kaärann ! Et il se trouve que l'un d'entre eux gardait un oeil sur toi pendant ta mission. »


Malgré sa situation désavantageuse, Seven tilta rapidement. Four. C'était probablement de lui dont parlait le boss. Ce qui signifiait que ce dernier...


« Je sais que tu t'es fait un nouvel ami à Garnet. Un jeune Xenois nommé Shira. »


L'assassin aux cheveux noirs était frustré. Lui qui ne voulait pas qu'on apprenne que quelqu'un lui était venu en aide, voilà qu'il découvrait que le boss était déjà au courant de cette histoire. Grimaçant toujours de douleur sous l'étranglement du boss, il cessa néanmoins de se débattre et ferma les yeux, abandonnant toute tentative de résistance. En remarquant cela, le chef du Mortem Regis lâcha prise, et la brume qui commençait à s'installer disparaissait peu à peu en même temps que son aura. Puis, il se releva silencieusement, et retourna s'installer devant son bureau presque comme si rien ne s'était passé. Seven, lui, s'était redressé en toussant et en haletant. Il n'arrivait toujours pas à croire que son supérieur était aussi fort. En plus de pouvoir utiliser son aura de jour comme de nuit qui lui permettant contrôler le météo n'importe où, il était doté d'une force physique impressionnante. Le boss du Mortem Regis était sans aucun doute l'une des personnes les plus puissantes de Kaärann, si ce n'était pas la personne plus puissante.


Après avoir passé une minute à retrouver une respiration normale, le jeune homme se releva avec quelques courbatures.


« Ah Seven... soupira finalement le boss en le regardant. Tu me déçois beaucoup sur ce coup là. Mais comme je suis d'assez bonne humeur aujourd'hui, je te laisse une seconde chance pour assassiner la princesse Ewena. Et en prime, je vais te donner une motivation.

– Une... motivation ?

– Ce jeune garçon qui t'a sauvé, ce Shira... S'il t'a offert ce bracelet que tu portes, c'est parce qu'il t'apprécie, n'est-ce pas ? Et si tu as accepté un tel présent, je suppose que c'est parce que tu l'apprécies également, je me trompe ? »


Seven ne répondit pas, et se contenta de jeter un regard froid à son supérieur en serrant ses poings.


« Si tu parviens à tuer la princesse Vopaquine, le jeune Shira sera épargné. Mais dans le cas contraire...

– Tu ne peux pas tuer Shira, le coupa alors l'assassin. Mortem Regis ne tue que les personnes de sang ou de rang noble. J'imagine mal cette organisation assassiner un citoyen innocent, surtout pour une raison aussi stupide ! »


Mais contre toute attente, le boss rigola suite à cette phrase.


« Comme tu es naïf, Seven ! Qui te dit que Shira n'est pas un noble, lui aussi ?

– Quoi ?

– Tu fréquentes des personnes dont tu ignores tout, mon grand ! C'est bien le comble pour un assassin, tu ne crois pas ? »


Seven ne voulait pas croire ce que le boss disait en cet instant. Shira ? Un noble ?


« Ce soi-disant Shira, si je me fie à la description qu'on m'en a faite, se nomme en réalité Ashira. Il est le dernier fils de l'empereur Edeus, et donc l'un des deux princes de l'empire de Xen ! »


L'assassin aux cheveux d'ébène demeura bouche-bée devant une telle révélation. Shira ? L'un des princes de Xen ? Il ne voulait pas y croire. Mais d'un autre côté, il comprenait mieux la réaction qu'avait eu l'adolescent en apprenant que l'empereur de Xen, donc son père, était le principal suspect dans le meurtre du prince de Vegario.


« Ce prince est un véritable cachottier, on dirait ! s'amusa le boss en voyant la tête abasourdie de son employé. Mais je suppose qu'il a caché son identité aux yeux de tous pour circuler plus facilement à travers le continent. C'est très malin de sa part. Malheureusement pour lui, il ne peut pas tromper Mortem Regis avec ce stratagème. »


Seven ne répondit rien, et avait même détourné son regard du boss en serrant un peu plus ses poings. Shira risquait à présent d'être une cible de l'organisation à cause de lui. S'il avait su, il se serait téléporté directement au Mortem Regis avant que le prince Xenois ne le sauve. Mais alors qu'il était en train d'y penser, une question arriva à l'esprit de Seven: Qu'est-ce qui lui prenait de penser à tout cela ? C'était à peine s'il connaissait Shira ! L'éventuelle mort de celui-ci devrait le laisser indifférent, normalement ! Pourtant, l'assassin ne pouvait s'empêcher de s'inquiéter de son sort.


« Ewena ou Shira ? lui posa alors le boss, ce qui tira Seven de ses pensées. Le choix est tien ! Mais choisis vite, et choisis bien. L'un des deux ne sera pas épargné de toute manière, et tu sais de qui je parle.

– Va te faire foutre... » murmura l'assassin en fixant son supérieur avec des yeux furieux. Il en était sûr, désormais: il haïssait le boss du plus profond de son coeur. Hélas, il avait beau le détester, il restait tout de même son supérieur. Et celui-ci lui avait fait comprendre qu'il n'avait pas le droit à un second échec. Sans lui adresser le moindre mot, Seven décida de quitter son bureau, sous les yeux du chef qui souriait sournoisement derrière son masque.


L'homme à la longue chevelure noire se mit à parcourir de nouveau les couloirs du quartier général, mais une voix masculine et familière l'interpella:


« Pas trop de casse suite à cette entrevue, Seven ? »


Le concerné fusilla du regard l'homme qu'il avait croisé quelques instants plus tard.


« Fous-moi la paix, Four !

– Toujours aussi adorable envers tes aînés, à ce que je vois ! Tu t'es beaucoup trop endurci pendant ces dernières années. »


Seven ne répondit pas, et préféra ignorer ces paroles, tout en s'éloignant de l'argenté. Toutefois, celui-ci l'interpella:


« Je n'ai pas spécialement envie d'être celui qui tuera ce garçon. Alors fais ce que tu as à faire, et fais-le correctement. »


Suite à ces mots, Four fit volte-face à Seven et s'en alla, laissant l'homme aux cheveux noirs seul, qui avait arrêté d'avancer et qui avait froncé les sourcils. Il ne s'était pas retourné pour voir Four partir. Mais il avait compris où voulait en venir le plus âgé: S'il ne tuait pas Ewen, le boss enverrait Four tuer Shira.


« Tch ! Que des enfoirés dans cet endroit... » pensa l'assassin en reprenant sa marche, à la fois énervé et troublé.



Pendant ce temps, au Palais royal de Redfir, la reine Nefer avait convoqué Ewen et Harvay à la salle du trône. Elle avait reçu un message de la part du roi de Vopaqua, qui désirait voir sa fille revenir auprès de lui.


« Je m'en doutais, répliqua la princesse en croisant les bras, soupirant presque. Mon père se fait décidément trop de soucis pour moi.

– Sa réaction est normale et compréhensible, affirma la reine Firoise. Surtout après ce qui t'est arrivée, et avec tous ces événements tragiques qui ont eu lieu. Je pense que tu devrais l'écouter, et rentrer chez toi. Tu y seras plus en sécurité qu'ici.

– Je ne serai en sécurité nulle part, contredit la bleue. Aucun d'entre nous ne le sera ! Que je sois ici, ou ailleurs, cet homme qui a tenté de me tuer pourrait recommencer. Je ne sais pas ce qui se passe en ce moment, mais si on a réussi à tuer le roi Moreh et le prince Aelan, n'importe qui dans les familles dirigeantes peut y passer aussi.

– Je suis d'accord, confia Harvay. Mais ton père a aussi raison, quelque part. Si jamais ce tueur ou quelqu'un d'autre t'attaque, mieux vaut être au palais de Vopaqua à ce moment là. Non seulement nous y serons mieux préparés, mais en plus nous pourrons mettre en place un stratagème pour le piéger et le capturer. Ainsi, il pourrait nous révéler ses motivations pour commettre de tels crimes. A mon avis, toutes les familles dirigeantes de Kaärann devraient procéder de cette façon. » avait-il continué en se tournant vers la reine.


Si cette dernière partageait l'avis du blond, Ewen demeurait dubitative. Les palais royaux et impériaux étaient censés être surprotégés de base. Même si on renforçait encore plus cette protection, est-ce que cela allait être suffisant pour protéger les familles dirigeantes de ces meurtriers ? Non. Plus personne n'était en sécurité depuis ces tueries. La seule façon d'arrêter cette catastrophe était de mettre la main sur les auteurs de ces massacres.


« Harvay, Dame Nefer, parla la jeune fille en les regardant tous les deux. Je vais écouter mon père, et rentrer pour Vopaqua. Mais avant, j'aimerai me rendre à Vegario.

– Ewena ! fit Nefer devant une telle décision. Tu n'y penses pas, tout de même !

– Le royaume de Vegario est très loin d'ici ! lui rappela son serviteur. Il nous faudrait traverser la république de Grendia. Et puis il n'est pas prudent de s'aventurer dans les forêts Vegarionnes avec les tribus et les clans hostiles qu'on peut croiser !

– Je le sais, répondit Ewen qui s'attendait à une telle réticence de leur part. Mais tout comme je suis venue ici pour enquêter sur la mort de sa Majesté Moreh, j'aimerais aussi en savoir plus sur celle de son Altesse Aelan. D'ailleurs, j'ai déjà rédigé un message à l'adresse du roi Aeren pour l'informer de ma venue à Vegario. »


Les deux autres n'en revenaient pas. La princesse de Vopaqua était vraiment inconsciente sur ce coup. Ils voulaient lui faire comprendre qu'un tel voyage était trop dangereux pour elle, mais la jeune fille s'entêtait à vouloir se rendre à la nation des forêts pour continuer ses recherches.


« Écoutez, je pense avoir une piste sérieuse au sujet de tous ces meurtres qui ont eu lieu, non seulement envers le roi de Redfir et le prince Vegarion, mais aussi envers tous ces nobles qui ont été assassinés bien avant eux.

– Et quelle est donc cette piste dont tu parles ? » lui demanda la souveraine à la chevelure de feu.


Mais Ewen se tut et détourna le regard. Ce n'était pas qu'elle ne voulait rien leur révéler, mais elle se disait qu'il était encore un peu tôt pour exposer ce qu'elle avait trouvé. Et puis, leur révéler une telle information pouvait potentiellement les mettre en danger. Nefer poussa un profond soupir:


« Ton entêtement te perdra jeune fille. C'est moi qui te le dis...

– Vous vous inquiétez trop pour moi, lui fit comprendre Ewen. Et j'en suis touchée. Mais cet homme qui m'a attaquée, et les personnes qui ont tué le prince Aelan... Je veux les retrouver. »


Harvay ne savait pas quoi faire. D'un côté, il souhaitait que la princesse soit en sécurité chez elle auprès de sa famille. Mais d'un autre, lui aussi souhaitait découvrir la vérité au sujet de toute cette histoire. Et il désirait également faire payer à l'assassin de Moreh ce qu'il avait fait. Il se détendit alors, avant d'adresser un sourire à sa princesse.


« Dois-je envoyer un message à sa Majesté Othéo pour l'informer de la suite imprévue de notre voyage ? »


Alors que Nefer affichait un air surpris devant le choix d'Harvay, Ewen sourit à ce dernier, heureuse de voir que son serviteur la soutenait.


« Vous êtes aussi fous l'un que l'autre... » murmura la reine Firoise, qui avait abandonné toute tentative de les raisonner d'avantage.



Quelques heures plus tard, un cheval attelé à charrette venait de traverser la frontière qui séparait Redfir de la république de Grendia à l'est. C'était un simple paysan transportant du foin qui se dirigeait vers Rass, la village Grendien la plus proche de sa position.


« Nous sommes bientôt arrivés, fiston ! » dit-il en souriant à un jeune garçon à la peau bronzée qui était assis dans la charrette sur le foin. Cette personne n'était nulle autre que Shira, qui avait revêtu une tunique à motifs rouge foncé, et d'une cape de voyage brune. Le Xenois rendit son sourire au berger en lui répliquant:


« Merci de m'emmener jusque là-bas !

– Je ne pouvais quand-même pas laisser un enfant comme toi s'aventurer tout seul sur ces terres ! Tu es drôlement courageux pour voyager ainsi tout seul ? Tu as quel âge ? Douze ans ?

– J'en ai seize. Bientôt dix-sept, même.... répondit Shira, qui était un peu vexé d'être pris pour un enfant, mais qui ne laissait tout de même rien paraître.

– Eh bah, mon p'tit ! Tu ne les fais pas ! rigola son interlocuteur.

– Vous exagérez un peu, monsieur... » murmura le plus jeune d'un air blasé.


Mais tout à coup, le paysan fut forcé d'arrêter son cheval, ce qui manqua de faire tomber Shira qui s'était accroché in-extremis.


« Qu'est-ce qui se passe ? » demanda le jeune garçon. Mais la réponse lui vint immédiatement en voyant une bande de cinq hommes, chacun armés d'une dague ou d'une hache, qui barraient la route et qui avançaient vers eux.


« Voyez-vous ça ? parla l'un d'entre-eux avec un sourire sournois. Un vieil homme et un pisseur ! Vous devez vraiment être stupides pour venir ici seuls et sans rien pour vous défendre.

– Je ne suis pas si vieux que ça ! » se défendit le paysan avec un sourire niais aux lèvres. Shira, lui, fronça les sourcils. Il n'avait pas du tout prévu de confronter des bandits en ce jour. L'un d'entre-eux avait fait descendre le conducteur de la charrette de force, et avait pointé sa dague près de sa gorge.


« Donne-moi ton argent tout de suite, si tu ne veux pas crever aujourd'hui ! » le menaça le brigand.


Un autre avait saisi Shira par le bras pour le faire descendre de la charrette de la même manière. Mais en le tenant ainsi, il remarqua deux larges et magnifiques bracelets en or, décorés par des pierres précieuses rouges accrochés aux poignets du Xenois.


« Hey les gars ! Visez-moi un peu ça ! » fit le bandit en montrant ces bijoux au reste de sa bande.

– Eh bien ! fit un troisième voyou en marchant en direction de Shira. Qu'est-ce qu'un nabot comme toi fabrique avec deux bijoux qui pourraient facilement nous rapporter cinq-mille Gharils chacun ?

– Cinq-mille Gharils... répéta Shira qui dévisageait chacun des bandits. Vous avez vraiment une piètre estimation de ces bracelets, messieurs. »


Tous furent surpris par une telle réplique, et observèrent le garçon d'un air abasourdi. Celui qui tenait le Xenois le tira vers lui et le regarda dans les yeux avec un sourire effrayant.


« T'as une grande et belle gueule, petit. Ça me plaît bien ! J'ai toujours apprécié le côté exotique des natifs de Xen ! »


Celui qui avait menacé le paysan avait lâché celui-ci, et toute la bande s'était rapprochée de Shira.


« Je pense qu'on tient le gros lot, les gars ! affirma l'un d'entre-eux. Avec ce gamin et ces bracelets, on peut gagner beauc... »


Malheureusement pour lui, le brigand n'eut pas le temps d'achever sa phrase. Il hurlait à présent de douleur, son corps consumé par des flammes. Shira avait tendu son bras libre en sa direction, et les pierres qui ornaient son bracelet s'était mises à luire.


« C'est quoi cette merde ?! » paniquèrent les autres. Mais Shira tendit son bras vers la jambe de celui qui le tenait, et des flammes apparurent depuis sa main pour se diriger vers ce membre qui brûla. Le bandit lâcha le garçon, et hurla sous l'effet de la douleur, alors que le feu se répandait rapidement sur tout son corps. Après quelques secondes, les deux voyous brûlés s'écroulèrent au sol, sans vie. Shira se tourna alors vers les trois bandits restants:


« Ne m'obligez pas à recommencer, et allez vous-en ! »


Les trois concernés s'échangèrent un regard, puis reculèrent de l'adolescent, avant de finalement prendre leurs jambes à leurs cous, laissant derrière eux les cadavres calcinés de leurs deux semblables. Shira les regarda fuir lâchement, avant de tourner ses yeux vers les deux bandits qu'il venait de brûler. Il n'était pas spécialement fier d'avoir fait cela, mais sur ce coup, il n'avait pas eu le choix. Mettant sa peine de côté, il se tourna vers le paysan, et s'avança vers lui.


« Vous n'êtes pas blessé ? » lui demanda-t-il avec un sourire qui se voulait rassurant. Le berger tremblait de tous ces membres face au spectacle qu'il venait de voir:


« Qui... Qui es-tu ? »


Le sourire de Shira s'agrandit, alors qu'il répondit presque joyeusement:


« Juste un simple garçon béni par les dieux ! »



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