La dernière âme
L'aube se levait et pour la première fois depuis longtemps, Foxy avait eu l'autorisation de rester dans son corps mécanique. Cela avait quelque chose d'étrange, il n'avait plus vraiment l'habitude d'être actif la journée sans faire semblant d'être un robot normal, comme autrefois. Un peu à l'écart du salon en effervescence avec les fantômes de ses amis, il regardait la Marionnette et Vincent Afton travailler main dans la main pour décharger les robots du camion. L'opération avait été chaotique, Springtrap s'était pointé et avait posé des problèmes. Circus Baby, l'objet du litige, était très nerveuse. Elle se tenait à côté de Foxy qu'elle dépassait de facilement deux tête et jonglait d'un pied sur l'autre, mal à l'aise. Chica et Bonnie semblaient assez méfiants à son encontre, ce qui avait également rendu méfiant l'ours et le renard.
"Voilà, tout est prêt, lâcha Vincent."
Devant eux, trois robots flambants neufs se tenaient droits, comme s'ils saluaient la foule. Ils avaient une bonne bouille, un peu plus mâture que les derniers corps qu'ils avaient empruntés. Freddy ressemblait davantage à un ours en peluche jovial, Bonnie avait les traits un peu plus carrés et le visage plus expressif, sa guitare rouge toujours dans les mains dans un style plus rock. Quand à Chica, elle était davantage féminine mais arborait un air assez dur, comme un pirate. Elle tenait deux maracas colorées dans les mains. Les trois robots avaient une étoile jaune vive sur leur torse de plastique, qui remplaçait désormais la fourrure. Logique, quand on voyait l'état de celle de Foxy. Le renard se sentait un peu triste d'être mis à l'écart de ce nouveau groupe, mais appréciait les nouveaux costumes. Chica, Bonnie et Freddy tournaient autour de leurs nouveaux corps avec une joie non-dissimulée, ce qui amusa la Marionnette.
Cette dernière leva soudainement le bras et les trois âmes furent aspirées par les robots. Les animaux mécaniques se mirent à trembler et à spasmer de manière incontrôlable avant de se stabiliser, les yeux brillants d'une lueur blanche anormale.
"Enfin ! lâcha Freddy. Ça fait du bien de rentrer à la maison.
— Vous ressembler presque chanteurs, se moqua Foxy.
— Oh, j'ai presque oublié, les coupa Vincent Afton."
Il s'approcha du renard et passa une main hésitante dans son torse. Foxy eut un mouvement de recul nerveux avant de se laisser faire. En quelques minutes, l'homme détacha son modulateur de voix et le remplaça par un modèle plus récent, sous les yeux inquiets de ses compagnons. Foxy donnait l'impression de pouvoir exploser au moindre cliquetis étrange de son endosquelette, mais tout se passa plutôt bien finalement. Satisfait, le père de Violet recula et admira son travail. Il invita ensuite Foxy à parler.
"Yaaarr, Foxy est de retour avec une nouvelle voix !"
Il en aurait presque sauté de joie. L'intonation était différente mais faisait plus pirate que jamais. Même si le reste de son costume n'était pas spécialement assorti, ce changement lui plaisait grandement. Alors que les robots discutaient entre eux, ravis de se retrouver "physiquement" ensemble, un fauteuil roulant passa le pas de la porte, poussé par Prune. Michael Afton sourit à la vue des nouveaux robots.
"Ah, comme ça m'avait manqué. Enfin de vrais robots. Tu t'améliores, Vincent. Même si je persiste à dire que la fourrure est mieux. Freddy a l'air tout maigre.
— On est plus en 1980, la fourrure est interdite partout, Papa.
— Certes, certes. Mais je préférais tout de même les anciens. Ils avaient quelque chose de plus impressionnant et imposant. La tête de ce Freddy est dérangeante, presque trop gentille. Je ne suis même pas sûr d'avoir peur si je me retrouve enfermé de nouveau dans un bureau face à lui. Il m'a presque eu une fois, tu sais Prune ? L'horloge a sonné juste avant qu'il ne m'explose le crâne avec un vieux costume de Golden Freddy.
— Coup de bol, grogna l'ours, à moitié vexé."
Michael se rapprocha de la Marionnette et leva la tête vers elle.
"Je suppose que Vincent t'as parlé de notre "accrochage" avec William ? J'ai perdu mon plus beau fauteuil, mais ça en valait la peine. Je pense qu'on a pleinement son attention désormais. Elisabeth, dit-il à l'attention de Circus Baby, je sais que tu es inquiète, mais ne t'inquiète pas, tout va bien se passer.
— Je ne veux pas lui faire de mal, affirma celle-ci, sur ses gardes.
— Si tout se passe bien, on n'aura pas à le faire. C'est pour ça que j'ai ramené ces trois-là, dit-il en pointant les robots derrière lui. Ils ont peut-être l'air un peu bêtes dans ces nouveaux costumes, mais je t'assure qu'ils sont fiables et... plutôt tenace quand on leur confie une tâche. Tu peux leur faire confiance.
— Je ne sais pas, avoua t-elle."
La Marionnette la regarda un moment avant de s'approcher à son tour.
Je sais que tu es perdue et que ce que t'as révélé ton frère t'as bouleversée. Mais crois-moi, nous sommes dans le même camp. Je ne veux pas spécialement le blesser non plus, il ne serait plus là depuis longtemps si c'était le cas. Nous voulons simplement l'empêcher de recommencer ce qu'il a fait à Violet. Et pour ça, on doit le garder sous contrôle, tu comprends ? Ton père... N'est pas quelqu'un de bien. Même s'il pense se battre pour toi, la manière dont il le fait n'est pas bonne. Il fait plus de mal encore et il ne s'arrêtera pas parce qu'il aime ça. Je ne te demande pas de m'aimer, ou de te joindre à notre cause, je te demande simplement de me faire confiance jusqu'à ce qu'il soit en sécurité. On ne peut pas le laisser seul dehors, pour son bien comme pour celui de tous les enfants là dehors.
Elle lui tendit la main.
Tu veux bien me laisser une dernière chance, s'il te plaît ? Je ne peux pas t'obliger à nous aider, à approuver nos méthodes. Mais je peux te promettre qu'on l'empêchera de faire du mal à d'autres enfants comme nous, comme Violet.
"Elle a raison, intervint calmement Freddy, puisque ses amis hésitaient à faire le premier pas. Même si tu as du mal avec ce qu'on fait, on est tous dans la même galère, coincés ici sans possibilité de partir. Même mort, ton père continue de nous faire du mal. A nous, mais aussi à toi. J'étais comme toi, avant. Tout comme Bonnie, Chica, Foxy. On ne voulait pas faire de mal, à personne. Mais personne ne nous a entendu, et il a continué. Il a fait de plus en plus de mal, il continue même après sa punition à faire du mal autour de lui. On voudrait tous partir, pour ne pas avoir à endurer ça. Mais avant, on veut s'assurer qu'il ne sera plus un danger."
Le clown resta un moment silencieux, avant de serrer la main de la Marionnette à contre-coeur, ce qui rassura les autres robots. Elle était instable, mais l'avoir de leur côté était indéniablement un plus. Prune, qui avait observé la scène, prit la deuxième main d'Elisabeth.
"Si tu ne le fais pas pour eux, fais-le pour Violet, dit la fillette."
Elle hocha la tête. Michael sourit.
"Bien. Je ne pense pas que mon cher père viendra ce soir, ce qui laisse la journée à Foxy pour sympathiser avec Violet. Prune, je compte sur toi pour l'aider. Charlie, Vincent et moi allons préparer le plan pour l'arrêter. Les autres... Faites ce que vous vous voulez mais ne traumatisez personne, merci. Et..."
Un ours doré apparut au milieu de la pièce, sous les regards écarquillés des trois membres de la famille Afton. Les Animatroniques devinrent un peu nerveux. Golden Freddy dégageait une aura de contrariété et de colère puissante qui les frappèrent immédiatement. Le fantôme regarda surpris les humains, puis les robots, avant de faire volte-face vers la Marionnette qui attendait, inquiète, qu'il explique son arrivée.
J'ai retrouvé sa trace, dit-il dans les esprits de tout le monde. Il a décimé une famille entière, puis a tué une femme et manqué d'abattre ses deux fillettes de sang froid parce qu'on lui a pris Elisabeth. Il est très remonté et incontrôlable. Ça ne sert à rien de le suivre dans l'immédiat, continua t-il à l'attention de Bonnie qui s'agitait déjà pour le prendre en chasse. Il n'obéira pas et la moindre contrariété pourrait lui faire commettre une autre catastrophe. Je vais le suivre à distance pour le garder à l'oeil.
"Bon dieu, jura Michael. Mais il ne s'arrête jamais ?
— Et tu veux que je laisse entrer ça dans ma maison ? demanda Vincent, nerveux. Ce n'est pas une bonne idée. Si on ne parvient pas à l'arrêter, il va nous tuer, tous.
— Il est trop tard pour reculer.
— On peut lui rendre sa fille ! C'est ce qu'il veut, non ?"
La Marionnette le fit taire d'un mouvement de bras.
Il est à combien de temps d'ici ? On a encore le temps ?
Non, répondit Golden Freddy. Il est à moins d'un kilomètre, et il est sur les traces de sa fille. Plus rien ne l'arrêtera. Je peux essayer de brouiller les pistes mais...
Non, trancha la Marionnette. Au contraire, guide-le jusqu'ici ce soir. Arrange-toi pour qu'il soit assez tard, quatre ou cinq heures du matin, afin qu'on réussisse à l'immobiliser avant six heures. On a jamais été aussi proche de l'avoir, ne laissons pas passer cette opportunité.
"Je suis d'accord, approuva Michael. Il ne m'a pas reconnu sur le parking, mais je pourrais aussi peut-être réussir à le raisonner un peu, pour gagner du temps. Cela nous laisse le reste de la journée pour mettre au point notre plan, il n'y a plus une seconde à perdre. Merci, Georges."
L'ours hocha la tête. Il se tourna vers Elisabeth, inquiète.
Viens avec moi, lui dit l'ours. Je dois te parler de quelque chose.
L'ours fit sortir le fantôme de sa soeur de son costume et les deux âmes quittèrent la maison, sous le regard inquiet et interrogateur de la Marionnette. Elle se reconcentra cependant bien vite. Ce soir, Springtrap arrêterait enfin sa folie.