La cour des grands

Chapitre 49 : Olliver

7336 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour 04/02/2018 13:32



Olliver



Il fut difficile de deviner si c'était les jointures ou les planches de bois qui avaient cédé en premier sous les coups du bélier des Lannister. Toujours est-il que la porte ne bloquait plus l'entrée de la cité. Quand le premier lion entra dans l'enclos, les choses bougèrent très vite à Viergétang. Les habitants les plus proches de la porte tentèrent de s'enfuir et de se barricader dans le château. Ceux qui étaient les plus loin regardaient d'un œil inquiet ce qu'il se passait dans la ville basse. Ils ne tardèrent pas à comprendre le pourquoi de ce raffut et prirent le minimum vital, dont tout ce qui pouvait servir d'arme, comme des couteaux de cuisines ou des fourches, et essayèrent de trouver une échappatoire quelconque, un abri ou une sortie oubliée. Cent Lannister étaient entrés dans le fort et cent soldats de Viergétang les empêchaient d'avancer plus avant. Les archers tirèrent à vue et les hommes armés s'engagèrent au corps à corps contre leurs ennemis communs. Ils étaient tous commandés par Azénor, une intendante dans l'armée, choisie exclusivement par Anduil, le commandant des armées de Viergétang. Elle était habile à la hache et avait acquis une splendide réputation parmi la garde jusqu'à se faire repérer par Anduil et donc, de se retrouver à commander la troupe de défense contre les Lannister. Son armure de plate avait été faîte sur mesure pour elle et cette bataille. Elle avait hâte d'en tester la solidité. Quand les Lannister entrèrent, elle s'occupa vite de prendre son rôle au sérieux. Elle organisa la résistance, enfila son casque et s'engagea elle-même dans la bataille. Sa hache tranchait chaque ennemi sur son passage. Étant plus habile avec une arme dans chaque main, elle se dépêcha de piquer une deuxième hache à un Lannister et fut désormais prête à en découdre. Les Lannister qui avaient la chance de ne pas se retrouver sur son chemin et qui réussissaient à traverser le tas de soldats qui s'entassait à l'entrée en profitaient pour tuer tous les civils présents. Ogma leur avait répété de mettre la ville à sac et de la rendre hors d'état de nuire. Des civils se faisaient donc massacrer sous les lames des lions. Les plus téméraires prenaient une arme, servant plus souvent à l'agriculture ou à la cuisine qu'à la guerre, et se défendaient. Acte qu'ils regrettèrent certainement lorsque les lames traversaient leurs corps. Certains ne trouvant ni abri, ni sortie, décidaient de monter sur les remparts et de sauter par dessus les murs. Ceux qui y arrivaient se retrouvaient à l'atterrissage avec au moins un os cassé, souvent au niveau de la jambe. Il y avait aussi ceux qui décidaient de se cacher le mieux possible dans leur maison comme dans une armoire ou sous le lit. Ces cachettes étant très connus des soldats qui ont l'habitude de participer à un saccage, cette solution de repli était assez inefficace. Enfin, il y avait ceux qui voulaient entrer et se réfugier derrière les murs du château. La porte était fermée et de nombreux habitants frappèrent dessus en espérant que quelqu'un s'y trouve derrière. Et en effet, quelqu'un s'y trouvait. Le mestre Kyren regardait d'un œil triste la porte. Il voulait ouvrir la porte mais derrière lui, Ronmac lui tonnait de ne pas le faire.


Mestre Kyren, ces gens vont mourir, qu'on leur ouvre ou pas! Lui cria Ronmac. Mais si on leur ouvre, les Lannister feront tout pour passer et nous mourrons avec eux. C'est ça que vous voulez?!


-En fin de compte, Olliver avait raison. Expira Kyren en baissant la tête et en se retournant vers Ronmac. La violence permet aux cons de fermer leur gueule.


Sur ces mots, Kyren donna le plus merveilleux coup de poing qu'il pouvait réaliser à son âge dans le visage de Ronmac. Celui-ci se tînt fermement le nez. Il saignait. Kyren était content et il partit ouvrir la porte. Une foule d'habitant, riche comme pauvre, s'empressa alors de la traverser. Les deux seuls gardes qui étaient restés au château laissèrent les civils entrer tout en faisant attention qu'aucun Lannister ne bénéficie de la porte ouverte pour continuer leur génocide. Ronmac, lui, partit se nettoyer le nez dans ses appartements et jeta un regard noir à Kyren.


Tandis que la chaos régnait dans les rues de la ville, au loin, le port de Viergétang était le théâtre de duels éprouvants. Il ne restait que quatre soldats du Nord, chacun étant au prise avec un soldat Lannister. Lord Karyl était en train de gérer deux ennemis à la fois et il venait d'en tuer un. La fatigue l'envahissait cependant et le combat était rude pour lui. Olliver, lui, affrontait toujours le général Ogma sur le port, envoyé par Tywin Lannister afin de commander la troupe qui prendrait l'armée du nord à revers. Olliver se rendait compte qu'Ogma était plus expérimenté et plus fort que lui. Son bouclier était massif, il possédait une force incroyable pour pouvoir le manier aussi aisément. Il maîtrisait sa lance comme personne et savait bien l'allier avec son bouclier. Sa technique était plus avancée qu'Olliver. Celui-ci savait que ce combat était loin d'être gagné d'avance. Il regarda autour de lui. Il examinait la pièce le plus rapidement possible tout en vérifiant comment s'en sortait ses alliés. De toute évidence, ceux-ci ne pouvaient lui venir en aide. Il vit alors derrière lui les escaliers qui menaient au bureau de Frenrir Hillman, le gérant du port, avec qui il avait eu quelques différents. Vu sa notoriété auprès de lui, détruire ou non son bureau ne changerait rien à leur relation. Le port lui-même était déjà saccagé de toute manière. Olliver monta vite les escaliers et entra dans le bureau désert de Frenrir. À vrai dire, il n'avait pas de plan prévu mais son instinct lui disait d'éloigner son adversaire de ses alliés et de le combattre dans un endroit plus isolé.


Ogma, qui ne comprenait pas pourquoi son ennemi fuyait ainsi dans une autre pièce, le suivit car, au fond, «ce n'est qu'un jeune seigneur imbécile», pensait-il. «Il ne sait pas ce qu'il fait». Et Ogma avait raison. Olliver n'avait pas de suite à son plan. Il examinait tous les éléments présents dans le bureau, savoir s'il pouvait se servir de l'agencement de la pièce mais à part un bureau, des étagères et des livres de comptes barbants, il n'y avait rien d'autre. Ogma apparut dans l'encadrement de la porte. Il n'avait même pas pris la peine de courir pour arriver tellement le combat lui semblait être une perte de temps. Le seigneur de BelAccueil, lui, était sans doute un meilleur combattant malgré la fatigue de ce dernier. Olliver pointa Ogma de son épée et proclama:


-Tu es un bon combattant, je dois l'admettre. Mais je te jure que tu vas perdre.


Ogma transforma son visage habituellement impassible en une expression moqueuse.


-Par les Sept! S'exclama-t-il. J'ai connu nombre d'ennemi dans ma vie mais jamais je n'en ai vu de si arrogant et si naïf. Moi qui pensait que la jeunesse commençait à se démarquer à notre époque, tu me déçois. Allez, finissons-en.


Ogma mit son bouclier devant lui, il pointa sa lance sur son adversaire et couru vers lui. Olliver n'avait qu'une seule seconde pour savoir quoi faire. Il sauta alors par-dessus le bureau, prit la chaise en bois qui s'y trouvait devant et la projeta sur la lance qui dévia de sa trajectoire. Olliver empoigna de toutes ses forces l'arme de son ennemi et tenta de marteler de son épée ensanglantée Ogma, ou plutôt le bouclier qui le protégeait, espérant peut-être le déstabiliser. Mais le général resta impassible, tout comme son bouclier qui ne laissait apparaître que de simples rayures dues aux coups de «Samwell». Olliver sauta une nouvelle fois sur le bureau et tenta de toucher la tête d'Ogma en l'air. Encore une fois, Ogma para le coup et projeta Olliver avec sa lance que son adversaire tenait. Olliver tomba au sol. Il se releva le plus vite possible avant qu'Ogma ne l'attaque. Il esquiva un autre coup de lance, puis deux, puis trois. Il percuta une étagère qui faillit tomber sur lui. Ce combat était d'autant plus difficile qu'il faisait nuit et que les seules sources de lumières existantes venaient d'une petite lanterne à huile et des flammes qui brûlaient à l'extérieur. Olliver ne cessait d'esquiver tant bien que mal les attaques d'Ogma. Il faisait tomber des étagères sur lui, en vain. Quand il le put, il prit la lanterne et la jeta sur le bouclier. L'huile prit feu pendant un temps mais se dissipa vite. Cette attaque était cependant la première à avoir eu effet sur son adversaire qui ne s'attendait pas à trouver du feu sur son bouclier. Olliver en profita pour donner un coup d'épée dans le seul angle mort de son adversaire qu'il pouvait toucher: son épaule. De toutes ses forces, il frappa cet angle mort qu'Ogma n'eut pas le temps d'esquiver. La lame traversa l'armure et atteignit la chair. Ogma poussa un cri étouffé et recula. En retirant son épée, Olliver réussit à élargir l'entaille. Ogma, pour la première fois depuis le début de la bataille, exprimait un sentiment de colère féroce envers son ennemi. Il tenta de l'attaquer avec sa lance mais sa douleur à l'épaule le ralentit. Olliver n'eut aucun mal à parer le coup et à riposter mais Ogma n'avait pas encore dit son dernier mot. Celui-ci donna un coup de tête dans celle d'Olliver qui tomba à la renverse derrière le bureau. Le temps qu'il se relève, Ogma avait pris son élan et lui asséna un violent coup de bouclier dans le buste. Projeté, Olliver passa à travers la fenêtre qui se brisa très facilement et tomba lourdement à l'extérieur, sur le pont un étage plus bas. Il avait du mal à respirer. Il tapait du poing sur les planches. Il suffoquait à en devenir rouge. Il remarqua que le bois s'était un peu brisé sous la chute et qu'il avait eu de la chance de ne pas être passé au travers. Mais il vit très vite qu'il avait perdu quelque chose. Son épée «Samwell» avait disparue. Il voyait flou et il entendait un horrible grésillement dans ses oreilles. Peu à peu, il revint à lui. Son épée n'était plus là. Il regarda alors au-dessus de lui. À la place de la fenêtre se trouvait désormais Ogma qui le fixait. Il tenait entre ses mains son épée. Il lui sourit et jeta alors l'épée dans l'eau, sous les yeux paniqués d'Olliver. Il vit «Samwell» s'immerger dans la mer, juste devant lui. Quand il se retourna pour dévisager l'enfoiré qui venait de jeter son arme, celui-ci n'était plus là. Il n'allait pas tarder à revenir l'achever. Ou alors allait-il s'occuper de Karyl alors que celui-ci était occupé avec d'autres soldats Lannister?


Pendant ce temps, Azénor essayait de tuer les derniers Lannister qui restaient. Ils n'étaient plus qu'une vingtaine mais les gardes de Viergétang aussi. Les ennemis qui avaient survécu étaient ceux qui allaient assassiner les civils. Azénor ordonna à sa troupe de se disperser et chercha elle-même à son tour, dans chaque maison, dans chaque angle, le moindre Lannister qui aurait la malchance d'être aperçu par elle. Elle regarda de tous les côtés et vit alors cinq de ses ennemis rebrousser chemin face à la porte close du château. Il lui sembla qu'elle avait entendu les Lannister parler du bélier. Il ne lui fallut qu'une seconde pour comprendre leur plan. Comprenant qu'elle était toute seule, elle jongla avec ses deux haches dans ses mains et se mit face à ses ennemis. Ceux-ci s'arrêtèrent et dégainèrent. L'un d'eux avait un énorme marteau de guerre. C'était sans doute un commandant car celui-ci ordonna à ses quatre camarades d'attaquer la guerrière. Azénor ne se sentait pas encore fatiguée. Avec une dextérité étonnante, elle esquiva tous les coups qu'on lui donnait. Après avoir évité chaque coup, elle en profitait pour tuer quand elle le pouvait ses pauvres ennemis. En même pas trente secondes, ses ennemis étaient à terre. Après avoir éliminé le dernier, elle enchaîna en lançant une de ses haches sur le commandant qui la prit sur le torse. Son armure étant assez épaisse. Ce lancer ne lui fit qu'une petite entaille et il n'eut aucun mal à en retirer la hache qu'il jeta le plus loin possible. Il se jeta alors sur Azénor, marteau levé. Malgré le certain poids de ce marteau, il le maniait avec habileté autant qu'Azénor avec ses haches. Celle-ci reculait à chaque coup de marteau que son adversaire lui destinait. À chacun de ceux-ci, la terre se retournait. Lorsqu'il s'agissait de pavé sur le sol, les dalles de pierre s'enlevaient d'elle-même et se fracturaient souvent. Dos au mur d'une maison en bois, Azénor se baissa pour éviter le coup suivant. Le marteau toucha alors un pilier de bois qui se tordit. Lentement, le pilier se brisa et tout une partie du toit en bois et en chaume s'écroula sur les deux adversaires qui ne purent s'échapper à temps. Azénor sortit la première du tas qui les avait enseveli et atterrit dans la maison désormais démolie. Elle tourna la tête et vit deux petites filles apeurées et en pleurs cachées sous le lit. Un miracle leur avait permis de survivre. Elle vit alors le corps d'un homme adulte égorgé sur le sol et celui d'une femme tout aussi âgé en train de brûler dans un coin de la pièce. De rage, elle attendit que sorte son ennemi du tas de gravats. Quand elle vit de la paille s'élever, elle s'empressa de sauter sur son ennemi. Malheureusement, c'était le bout de son marteau qui sortait et non sa tête. Son ennemi sortit alors tout entier et lui asséna un violent coup de poing à la figure. Elle tomba à terre et elle vit que son ennemi avait entendu un bruit sous le lit. Celui-ci se baissa, se retourna vers Azénor et lui lança un sourire sadique. Leur combat recommença de plus belle. Azénor, ne voulant pas voir le pire arrivé, hurla de rage. Elle évita un nouveau coup de marteau, elle agrippa le manche pour se donner de l'élan et brandit sa hache pour l'abattre sur la tête du commandant. Du sang lui éclata à la figure. Elle venait de trancher le cerveau de son ennemi en deux et elle n'arrivait plus à enlever son arme de son crâne. Le commandant tomba à terre, suivit d'elle-même, qui s'offrait le luxe d'une petite pause. Elle regarda les deux petites filles d'un œil attendri et leur dit en souriant:


-Ne vous inquiétez pas. Je tuerais tous les hommes qui oseront vous faire du mal à présent.


Au port, Olliver prit la première arme qu'il trouva sur son chemin, en l'occurrence une épée, bien moins tranchante que «Samwell», et couru dans l'entrepôt. Ogma venait de descendre les escaliers. Karyl avait tué son adversaire et aidait les deux derniers soldats du Nord à s'en sortir. Aucun des alliés d'Olliver n'avait remarqué la présence d'Ogma qui fonçait sur eux.


-Karyl, attention!!! Cria-t-il.


Le seigneur de BelAccueil se retourna et vit le général des Lannister se diriger vers lui en courant. Celui-ci avait entendu Olliver et s'était également retourné vers lui. Il devait choisir qui tuer en premier entre Karyl et Olliver. Ce dernier l'ayant bien énervé il y a peu de temps, il prit son choix et couru vers le seigneur de Viergétang. Olliver espérait cela mais il était faible. Sa chute l'avait endolori et ses mouvements demandaient chacun un petit effort non négligeable. Cependant, l'entaille qu'il avait provoqué sur l'épaule d'Ogma avait aussi affaibli son adversaire. Ogma arriva très vite auprès de lui. Il leva sa lance et, malgré la douleur qui se lisait sur son visage, il l'abattit sur Olliver qui l'esquiva. Comprenant que son bouclier le ralentissait, il le laissa tomber et empoigna sa lance de son autre main. Olliver et Ogma se livrairent alors un nouveau duel sans merci. Chacun esquivant, parant ou frappant l'autre du mieux qu'il pouvait. Ogma donna un coup de poing à son ennemi qui tomba au sol. Olliver en profita pour entailler la jambe d'Ogma qui fléchit sous la douleur. De colère, le général des Lannister hurla. Il baissa violemment sa lance sur son adversaire. La trajectoire de la pointe de son arme passa à travers la joue gauche et le bras gauche d'Olliver. Le seigneur de Viergétang s'écroula et lâcha son épée pour stopper le sang qui coulait. Ogma se releva difficilement et s'apprêta à donner le coup de grâce. Olliver n'eut d'autre choix que de rouler sur le sol pour tomber dans l'eau. Il sortit vite sa tête de la surface et vit alors la silhouette de Karyl trancher la tête d'Ogma d'un coup sec. Le corps du général tomba au sol et sa tête plongea à côté d'Olliver. En regardant la tête de son ennemi disparaître dans les eaux, une certaine déception se lisait sur son visage. Il aurait tellement voulu réussir à le tuer. La douleur occupant cependant son esprit à l'heure actuelle, il ne put laisser sa déception s'exprimer et il tenta tant bien que mal de nager vers la rive. Non loin, les derniers Lannister venaient de mourir dans l'entrepôt grâce aux deux derniers soldats encore en vie. Dans la forteresse, Azénor s'était occupée avec les derniers Lannister également. La bataille de la Baie des Crabes était enfin terminée.


Il restait seulement deux soldats du Nord sur les mille sept cents mobilisés en tout au début. Du côté de la cité, huit gardes sur les cent autres avaient survécus. En tout, si l'on compte les morts parmi les Lannister, presque quatre milles deux cents hommes ont perdu la vie ce soir-là. Anduil avait également rendu l'âme ainsi que lord Darry. Cette bataille aura été un véritable génocide. Olliver réussit à atteindre la berge boueuse. Des corps gisaient de partout. Le sel de la mer avait accentué la douleur d'Olliver qui n'arrivait pas à comprendre comment il faisait pour ne pas hurler. Il grinçait des dents et était au bord de l'évanouissement. Jamais il n'avait eu d'entaille si profonde. Sa vue se brouillait et il lui sembla même perdre connaissance un court instant. Lorsqu'il sentit ses sens revenir à la normale et sa douleur s'atténuer, il entendit une voix familière:


-Je crois que vous avez perdu ça, seigneur.


À ses côtés, le corps meurtri et transpercé par deux flèches de Lord Darry lui montrait l'épée «Samwell» qu'il tenait entre ses mains.


-Merci, Lord Darry. Sourit Olliver. J'avais peur de l'avoir perdu à jamais. Et heureux que vous soyez en vie.


Les deux hommes étaient détruis par la fatigue et la douleur. Après de longues minutes, Olliver réussit à se lever en s'appuyant sur «Samwell» et grâce à l'aide de Darry qui avait une ténacité assez incroyable pour tenir debout sans appui. Lorsqu'ils revinrent sur la plaine, ils virent les deux derniers soldats du Nord en train d'aider Karyl qui s'était écroulé de fatigue. Les survivants traversèrent alors la plaine et trébuchèrent parfois sur les cadavres qui la couvraient. Ils mirent environ une demi-heure à atteindre les portes de Viergétang. Quand ils arrivèrent sur la rue principale qui menait au château, ils furent frappés par la désolation. Lannister, gardes, civils. La ville avait connu la même tragédie que la plaine. Ils furent soulagés lorsqu'ils virent d'autres survivants, notamment des civils qui avaient sautés par-dessus les remparts ainsi que ceux qui avaient réussis à bien se cacher et certains, plus rares, qui s'étaient défendus. Les civils fixaient les derniers combattants à la fois d'un regard noir, certainement à destination d'Olliver, et d'une expression triste. Olliver se sentait minable d'avoir autant échoué dans cette bataille et une certaine rage bouillait en lui. Quand enfin ils arrivèrent devant le château, le mestre Kyren leur ouvrit. Il appela des guérisseurs qui prirent en charge les combattants. Amenés vers l'infirmerie, ils virent sur le chemin Azénor qui s'occupaient de deux petites filles, Ronmac qui avait le nez rouge et une trentaine de civils qui étaient regroupés dans le grand hall. Le chaos avait laissé une marque à Viergétang qui ne s'éteindra pas avant longtemps. Il faudra des années pour panser toutes les plaies de cette désolation. Dans ses plus sombres pensées, Olliver se répétait «J'ai échoué» avant de s'endormir sur son lit, les guérisseurs recousant ses plaies dans son sommeil.


Quand Olliver rouvrit les yeux, il faisait jour. La lumière du soleil passait à travers l'interstice des volets. Il mit un temps à se souvenir de la raison pour laquelle il était triste. Il passa une main sur sa joue. De la petite ficelle avait permis de recoudre sa peau, couvert par un pansement de tissus. La même chose se trouvait sur son bras gauche. Lorsqu'il essaya de plier ce bras, il ressentit une douleur assez vive et il cessa de bouger. Sur son lit de plume, il fixa le plafond. Il pensait à l'avenir. Comment allait-il pouvoir réparer les dégâts, pas que matériels mais aussi humains et psychologiques, de cette bataille? Il repensa à Ogma, cette adversaire qu'il n'a pas pu vaincre seul. Il frappa sur son lit, grinça des dents. Tous ces événements provoqua en lui quelque chose dont il avait honte. Il pleurait de rage et de désespoir. D'un point de vue objectif, il avait peut-être gagné la bataille mais d'un point de vue personnel, c'était sa première défaite. Il resta au moins une heure à se remémorer sans cesse chaque seconde de la bataille. Il pensait aux coups qu'il aurait pu donner, à une stratégie pour vaincre à lui seul Ogma même s'il était bien trop tard. Soudain, il se secoua la tête et se leva. Son bras lui faisait mal mais peu importe. Il ne pouvait pas supporter de rester dans cette chambre une minute de plus. Doucement, il marcha de plus en plus normalement. Combien de temps avait-il dormi ? Les réparations avaient-elles commencé ? Qui avait dirigé le fort en son absence ? Lord Darry a-t-il survécu à ses blessures ? Il arriva alors dans le Grand Hall. Les civils étaient rentrés chez eux et la salle était déserte. Alors il se dirigea vers un balcon qui avait une vue panoramique sur la baie des Crabes. Il se tint à la rambarde et examina le triste paysage. Sur la plaine, une énorme tâche noir s'étalait. Plusieurs personnes s'attroupaient pour ramasser les cadavres et les placer dans une brouette. Les corps des Lannister étaient brûlés derrière une colline et les corps des soldats du Nord étaient amenés vers leur famille dont certaines tenaient à ramasser elles-même le cadavre de leur mari, de leurs enfants ou de leur père. Au loin, l'on pouvait voir d'ici les dégâts subis dans le port. Les navires des Lannister avaient été repoussés sur la berge pour laisser les marchands s'amarrer sur le pont. Olliver alla à un deuxième balcon où il pouvait voir la ville dans son intégralité. Les habitants s'entraidaient pour réparer les dégâts. De la fumée s'élevait par-ci par-là, certainement la trace des proches brûlés dans le jardin de leur demeure. Olliver retourna dans le Grand Hall, toujours désert, et s'assit sur son trône. Il s'étirait, fermait les yeux, les rouvrait, expirait, inspirait pour tenter de retrouver la forme, se réveiller et reprendre les choses en main. Alors, le mestre Kyren entra dans le Grand Hall et vit Olliver sur son trône.


-Je vous cherchais, seigneur. J'ai vu que vous n'étiez plus dans votre chambre. Dit-il en s'approchant.


-Bonjour, Kyren. Dîtes-moi. Combien de temps s'est-il déroulé depuis la bataille?


-Deux jours, seigneur.


-Comment vont Lord Karyl et Lord Darry?


-Lord Darry est encore cloué au lit mais les guérisseurs ont bien fait leur boulot. Lord Karyl s'est réveillé hier soir. Depuis, il part convaincre les habitants de regagner espoir, en eux et surtout en vous.


-Comment cela? Interrogea Olliver, interloqué.


-Et bien, beaucoup de civils vous en veulent depuis la bataille : d'avoir laissé les Lannister franchir l'entrée de la cité. Expliqua Kyren. La perte de leurs proches a accentué ce sentiment, il faut les comprendre. Lord Karyl et moi-même essayons tant bien que mal de les soulager.


-D'accord, merci. Qui dirigeait à ma place?


-Azénor, seigneur. Une héroïne que j'ai vue combattre de ma fenêtre qui mérite, je pense, de remplacer notre regretté camarade Anduil dans sa fonction de commandant des troupes civiles.


-Bien, je verrais avec elle. Écoutez, je… je voulais vous dire que je suis désolé, mestre,d'avoir assassiné si froidement mon prédécesseur. Excusez-moi.


Kyren ne s'attendait pas à de telles excuses et Olliver lui-même fut surpris d'avoir sorti ces mots. La bataille aura donc fait subir à son esprit de grands changements.


-Je… J'accepte totalement vos excuses. Annonça Kyren avec un sourire. Lord William n'était pas un si bon seigneur et je suis persuadé que vous êtes meilleur que lui. Votre règne aura connu la malchance de subir une bataille horrible mais je sais que vous êtes le seigneur qu'il nous faut pour remonter la pente.


-La pente, hein…. Répéta Olliver qui se plongea dans ses pensées. «Il est bon de suivre sa pente pourvu que ce soit en montant». C'est ce que m'as dit Lord Karyl, un jour. Avec cette bataille, la pente a eu une sacré chute. Je vous promets que je ferais tout mon possible pour la redresser.


-Si vous avez besoin d'aide, vous savez où me trouver. Répondit Kyren qui s'en alla à l'extérieur du château.


Pendant qu'il passait la porte principale, Karyl en profita pour entrer et fut heureux de retrouver son ancien écuyer assis sur son trône.


-Ah notre cher Olliver est réveillé. S'exclama-t-il. Comment te sens-tu?


-J'ai connu des jours meilleurs. Répondit Olliver avec un petit sourire.


-Moi aussi, je dois dire. J'ai parlé avec presque tous les civils qui ont survécu. Je dois dire que ça fait du boulot. Je ne te cache pas que certains rêvent de ton abdication.


-Oui, le mestre m'a prévenu. Je pense faire un discours dans les jours qui viennent.


-Le plus vite possible, alors. Ils sont à cran.


-Je ferais mon possible.


-J'ai envoyé une lettre à Robb ce matin. Je lui ai fais le triste bilan de la bataille.


-Quand comptez-vous retourner auprès de lui?


-Certainement en fin de semaine. On a récupéré quelques blessés sur le champ de bataille dont certains de mes hommes. J'attends qu'ils se remettent pour repartir.


-Bien.


Karyl se mit alors à fixer Olliver avec un grand sérieux. Quand le seigneur de Viergétang croisa son regard, il comprit bien vite de quoi il voulait parler.


-Vous allez parler de ce qu'il s'est passé, n'est-ce pas? Demanda Olliver.


-Oui. Répondit Karyl avec un ton à la fois dur et déçu. J'ai vu beaucoup de combattants différents dans les batailles où j'ai participé. Des pleurnichards, des enragés, des rieurs nerveux, des gymnastes et j'en passe. Même Lord Darry est unique en son genre. Il a un physique si fin et pourtant, il manie avec brio sa lourde hache.


-Je parie que vous allez me ranger dans la case des enragés?


-Non, des fous.


Olliver fut étourdi sur le moment.


-Je sais que c'est dur d'entendre cela de ma bouche mais je préfère être franc. Ton regard, tes braillements, tes gestes. Tout en toi respirait la folie du sang et l'excitation. J'ai vu quelques fous excités dans certaines batailles. Aveuglés, ils ont souvent mal finis. C'est pourquoi je te le dis aujourd'hui. Ne finis pas comme le Roi Fou et, à la prochaine bataille, fais en sorte que cela ne se reproduise plus.


-On croirait entendre mon frère. Lui aussi a peur que je me mette à cacher des caves de feu grégeois sous ma ville et ainsi, brûler tout le monde, moi compris. Vous savez, lord Karyl, vous et mon frère êtes bienveillants envers moi et je ne vous ai jamais remercié. Je ne me suis jamais inquiété lorsque vous avez bravé des dangers mortels. Excusez-moi, alors, mais je n'y peux rien. Tout ce qui m'intéresse, c'est de savoir quel est mon destin avant de savoir quel est le vôtre. Suis-je égoïste? Non, c'est plus compliqué que ça. Je suis perdu. Je ne peux aider les autres si je n'arrive pas à m'aider moi-même. Alors, je me suis réfugié dans cette excitation pour ne pas vous dévoiler mon problème. Car un bon seigneur ne doit-il pas montrer l'exemple? Il vaut mieux être un Roi Fou qu'un roi qui ne sait pas ce qu'il veut. Quand j'ai entendu le cor des éclaireurs, et Ogma se précipiter vers ses renforts, je ne savais plus quoi faire et j'avais déjà échoué dans mon esprit. C'est à ce moment là, je crois, que j'ai compris que je n'avais pas l'étoffe d'un seigneur. Si vous me le permettez, je rends mon titre et je pars pour le Mur. Galmar m'attend.


Jamais Olliver n'aurait songé prendre une telle décision alors qu'il était seigneur de Viergétang. En vérité, il s'était décidé durant son discours. Il se leva de son trône, s'approcha de Karyl et lui tendit la main, en guise d'amitié et de remerciement. Karyl regarda la main de son ancien écuyer, devenu désormais si mature. Il sourit et sembla sortir quelque chose de sa poche. C'était un parchemin, qu'il plaça ensuite dans la main d'Olliver.


-Je suis heureux de ces mots, Olliver. Cependant, en disant tout cela, tu ne fais que confirmer ce que je savais déjà. Tu es un vrai seigneur. Jeune, certes, il te reste des choses à apprendre, mais tu es meilleur souverain que la moitié de ceux de Westeros tout entier. Ton frère verra que tu as mûri, j'en suis certain.


Karyl, après avoir soigneusement déposé le parchemin dans la paume du seigneur de Viergétang, s'en alla en direction des chambres. Olliver regarda son ami s'éloigner, réfléchissant sur ses paroles, et déplia le parchemin. Après l'avoir lu, il s'assit sur son trône en murmurant «Qu'il est stupide». Il lut une nouvelle fois et plongea sa tête entre ses mains. Il souriait mais quelque chose en lui l'effrayait. Cette lettre de Galmar annonçant sa désertion de la Garde de Nuit et son arrivée prochaine à Viergétang avait de quoi le bousculer émotionnellement. Il allait enfin revoir son frère mais celui-ci allait être poursuivi pour désertion. Galmar risquait la mort pour venir le retrouver. Trahissant son serment face à la Garde Nuit, sa tête allait être mise à prix et des soldats du Nord allaient se mettre à sa recherche. Si cette lettre était tombé entre de mauvaises mains, il aurait dévoilé sa destination à ses poursuivants. Olliver déchira le papier, se dirigea au balcon et en jeta les bouts dans le vide. Il fixa le port quelques secondes et eut une idée.


Il retourna dans sa chambre, prit son épée, commanda à deux gardes de l'accompagner et sortit du château. Il traversa les rues jusqu'à la porte de la ville et en profita pour jeter un œil sur l'état de sa cité. Certains habitants lui jetaient un regard noir et Olliver leur envoyait en retour un air compatissant mais ils ne semblaient pas en être réceptifs. Ayant peur qu'une émeute éclate, il fut soulagé de voir qu'il arrivait sur la plaine sans encombre. Il parcourra le champ de bataille abandonné et arriva très vite sur le port. Celui-ci était démoli et plusieurs constructeurs s'attelaient à réparer tous les dégâts. Les corps avaient été dégagé et les dernières traces de sang étaient en train de disparaître. La vie avait bien vite repris son cours comparé à la ville. Au loin, les navires des Lannister étaient rangés pour qu'ils ne gênent pas les bateaux marchands qui s'amarraient au port. Olliver entra dans l'entrepôt et, sans passer par l'accueil, monta les escaliers et frappa à la porte du bureau de Frenrir Hillman. Jusqu'à ce que Frenrir l'invite à entrer, il regardait autour de lui et essayait de se remémorer les derniers combats qui avaient eu lieux ici. Olliver entendit Frenrir l'inviter et il entra dans le bureau, toujours accompagné de ses deux gardes. Quand le gérant du port reconnu l'identité de son invité, il laissa échapper une grimace. Olliver s'approcha du bureau. Autour de lui, les étagères avaient été remises en place, des planches de bois avaient remplacées la fenêtre brisée et la salle était éclairée de plusieurs lanternes à présent. Olliver ordonna à ses deux gardes de rester devant la porte car il voyait bien qu'il était intimidant avec eux, ce dont il ne voulait pas avoir l'air. Olliver demanda la permission de s'asseoir, ce qui étonna Frenrir qui accepta.


-Écoutez, nous avons eu un désaccord par le passé et je sais que vous êtes loin de me porter dans votre cœur. Commença solennellement Olliver. Je m'excuse pour le tort que je vous ai causé. J'ai envie d'être rapide car ma ville m'attend. Je ne vais donc pas passer par quatre chemins. Je viens de me réveiller de deux jours de sommeil, je n'ai pas pris le temps de manger et je vous avoue que j'ai eu un réveil troublé donc pardonnez-moi d'avance si mes mots ne sont pas bien choisis. Après cette bataille, je pense qu'il est temps de tout remettre à zéro. Je parle de la Baie des Crabes. La ville, comme le port.


-Comment cela? Demanda Frenrir qui semblait convaincu par la prestation d'Olliver.


-Je veux que le port appartienne une bonne fois pour toutes à Viergétang. Cela permettra à la ville de se reconstruire plus rapidement, de mieux nous en sortir financièrement et de remettre la cité à flot. D'un autre côté, le port sera plus sécurisé, elle recevra des aides pour des constructions futures. Bref, nous sommes gagnants tous les deux.


-Je ne crois pas non. Répliqua Frenrir qui venait de perdre une nouvelle fois la petite étincelle de confiance envers le seigneur de Viergétang. Ce que je gagne est risible par rapport à ce que vous gagnez. De plus, vous oubliez de mentionner les taxes que je devrais payer. Je perds plus que je ne gagne en réalité.


-S'il vous plaît. Ce port ne peut pas rester seul et indépendant. Il faut qu'il…


-...vous appartienne pour toucher de l'argent dessus. Coupa Frenrir. Non merci, mon ami. Je ne suis pas un manche en ce qui concerne les finances. J'ai 25 ans d'expérience en la matière.


-Alors ça veut dire que vous avez eu 25 ans pour comprendre que votre port ne dépasserait pas le niveau actuel sans une structure qui la présiderait.


Cette affirmation rendit muet Frenrir un moment. En effet, son commerce était régulier et il n'y a pas beaucoup d'investissement important à faire sur un port de cette région, à part pour ses dernières réparations. Cependant, à bien y réfléchir, accepter son offre lui ferait prendre des risques. Et si Viergétang se faisait de nouveau attaquer? Si les Lannister gagnent la guerre des Cinq Rois, ils reviendront certainement ici. Les risques étaient trop grands et il ne voulait pas voir son port détruit une nouvelle fois.


-Les Lannister reviendront ici, lord Frey. Il faut y songer.


-Cela m'étonnerait. Lord Tywin a sacrifié trop d'hommes pour renvoyé des troupes ici.


-Et s'il gagne la guerre? Ne reviendra-t-il pas ici?


Olliver fut interloqué. Dans son esprit, le Nord avait déjà gagné car leur cause est juste, et, pour lui, ce sont toujours les causes justes qui triomphent à la fin. Mais Frenrir le força à réfléchir sur ce point. Et si le Nord perdait? Non. Le Nord gagnait bien plus de batailles que leurs ennemis dans cette guerre. Les lions étaient en position de faiblesse. Comment pouvaient-ils gagner?


-Le Nord vaincra, je peux vous le promettre. Le lion est déjà à notre merci.


-Sauf qu'on ne peut jamais apprivoiser un lion, Lord Frey. Surtout par un loup.


-En tout cas, ne vous en faîtes pas. Répondit Olliver qui sentait sa voix augmenter toute seule. Je vous demande une seule chose. Laissez Viergétang profiter de votre port. Si vous ne le faîtes pas pour moi, faîtes-le pour les habitants qui ont vu leurs proches mourir, leurs maisons saccagées, leurs vies réduites à néant.


-Et à cause de qui? Est-ce vraiment à cause des Lannister ou de votre goût pour la guerre? Tout le monde sait que vous auriez pu les laisser passer et ainsi épargner des milliers de vies.


-Je sers le Roi du Nord. Proclama Olliver en se levant. Vous auriez préférez que je laisse ses ennemis le prendre à revers.


-Oui. Répondit Frenrir qui se leva à son tour. Cela aurait sauvé la vie de beaucoup de gens, y compris celle de mon frère. Il voulait «jouer au soldat» parmi vos rangs et cela l'a tuer. J'ai emmené ma femme et ma fille loin par précaution mais lui voulait servir «Le Jeune Seigneur» comme il s'amusait à vous appeler. Il détestait votre père et quand vous êtes arrivé en ville, il a vu en vous celui qui ravira le flambeau de la pitoyable maison Frey. Mais il s'est trompé. Sinon, vous auriez sauvé ces gens au lieu de vouloir servir aveuglément les ordres de vos supérieurs. J'ai toujours détesté les militaires.


Olliver frappa par reflex sur le nez de Frenrir qui saigna sur le coup.


-Ma maison n'est pas pitoyable. Seul mon père l'est. Sachez que je porterais toujours en mon cœur l'estime de votre frère pour moi. S'engagea Olliver tout en contournant le bureau et s'approchant de Frenrir. Je suppose que vous m'obligez à faire une croix sur une possible alliance entre nous. Mais que vous le vouliez ou non, votre port sera à moi.


-Vous pouvez toujours rêver!


Frenrir cracha alors au visage d'Olliver. Celui-ci se nettoya d'un revers de manche. Il savait que ce à quoi il pensait n'était pas une bonne idée. Il s'était promis de redevenir quelqu'un de sain et de bon. Mais il fallait bien l'admettre, ce cher monsieur Hillman avait été trop loin dans ses gestes et ses paroles. Alors, il sortit une dague et la plaqua sur le cou de Frenrir. Ce dernier prit alors bien vite un teint pâle.


-Non, s'il vous plaît! Supplia-t-il. Vous n'allez pas me tuer?! Vous ne le pouvez pas! J'ai une femme et une fille, s'il vous plaît!


-Elles survivront, c'est déjà ça. Entre vous et la réparation de centaines de vies dans ma ville, je n'hésiterais pas une seconde. Et puis, ce n'est pas moi qui vais vous tuer, non. Mais le temps. Celui que vous mettrez à étouffer et à vous vider de votre sang.


Ainsi, Olliver le prit par le col et le jeta dans une armoire. Pris de panique, Frenrir ne comprenait pas. Olliver trouva un bout de tissus qui pouvait servir de baillons et le mit dans la bouche de Frenrir. Avec sa dague, il trancha une veine du poignet de sa victime. Il ferma alors l'armoire avec la clé qui se trouvait sur la serrure, il la déplaça précautionneusement pour ne faire aucun bruit et fit en sorte de la déposer à l'horizontale malgré sa douleur au bras, de sorte que Frenrir ne puisse jamais sortir, la porte bloquée par le sol. Olliver entendait Frenrir se débattre frénétiquement dans cette cage de bois. Il s'agenouilla auprès de l'armoire et dit à Frenrir:


-Nous n'aurions jamais dû en arriver là. J'avais promis de faire taire mes excès de colère et vous venez de m'obliger à briser cette promesse. Quand les gens sauront où vous êtes, il sera trop tard. Et le port sera à moi. L'argent permettra à de pauvres civils de retrouver une vie normale. Dîtes-vous que vous mourrez pour une bonne cause, comme votre frère.


Olliver se releva et chercha la clé de la pièce. Quand il la trouva, il se dirigea vers la porte et la ferma derrière lui tout en entendant les coups d'épaules de Frenrir Hillman sur le bois de l'armoire.


Olliver, non content en réalité d'avoir eu recours à cette extrémité, bien qu'ayant une pointe de soulagement, retourna au château, accompagné de ses deux gardes qui n'avaient rien vus de ce malheureux incident. À son retour, il partit voir Azénor et lui annonça qu'elle était dorénavant la nouvelle commandante des troupes civiles de Viergétang. Celle-ci était ravie et promit à Olliver d'être aussi bonne qu'Anduil. Le corps de ce dernier fut brûlé le soir même devant un hommage solennel. Olliver s'attela ensuite à prononcer un discours devant tous les civils. Bien que son discours eut moins d'impact que celui qu'il avait fait en arrivant en ville, il perçu tout de même dans son public des visages devenir moins amers. Le lendemain, le corps de Frenrir Hillman fut découvert. Olliver dût jouer la comédie en apprenant la nouvelle et proclama alors qu'il s'occuperait du port «en hommage». Ronmac, dont le nez redevenait opérationnel, s'attelait alors à faire circuler l'argent entre le port et la ville. Moins d'une semaine après, Lord Darry put se lever et recommencer à marcher normalement. Dans le même temps, Karyl prépara une dizaine d'hommes pour rejoindre Robb et fit ses adieux à Olliver.


-À notre prochaine rencontre, Olliver. Soit le meilleur seigneur que ta maison ait connue et salut ton frère de ma part. Je sais ce qu'il encoure en tant que déserteur et je ne dirais rien à Robb ni à qui que ce soit. Allez, nous nous retrouverons à la dernière bataille de cette guerre, j'en suis sûr.


-Certainement, Karyl. Portez-vous bien.


Olliver regarda alors au loin Karyl disparaître derrière la colline et murmura:


-Et pardonnez-moi.


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