Survivre à Gantz

Chapitre 4 : Le début d'une nouvelle mission

5561 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour 10/06/2020 20:06

Quelques jours passèrent encore après ma soirée avec le couple. Je n'eus plus de nouvelles de leur part et c'était certainement pour le mieux. Ils étaient sympas et ils m'avaient bien préparés à ce que j'allais devoir affronter, mais je n'avais pu m'empêcher de sentir chez eux un détachement certain. J'étais presque persuadé que, si nous venions à vivre une situation particulièrement difficile, ils chercheraient à se protéger l'un l'autre plutôt que de me venir en aide. Me donner toutes ses informations était pour eux une sorte de coup de pouce afin que je puisse me débrouiller tout seul. Ils n'avaient plus à se sentir responsables de moi. J'adoptais donc le même état d'esprit, prêt à me battre pour sauver ma peau. La seule question qui subsistait dans ma tête, la chose qui me tourmentait, c'était de savoir si oui ou non j'allais venir en aide aux nouveaux. Lucie et Roman, à leur façon, essayaient un tant soit peu de les aider, ils nous avaient parlés des combinaisons et des armes lors de leur arrivée dans la salle et brièvement expliqué ce qui allait se passer et ce que nous devions faire. Je les avais même vu travailler en équipe avec les deux hommes louches. Peut-être que je pouvais moi aussi donner un coup de main, faire la différence de façon à ce que certains survivent. Je fus soudainement frappé par une réalité amère...si Lucie et Roman utilisaient leurs points pour revenir à la vie et qu'ils ne revenaient plus dans la pièce, je me retrouverais seul. A moi alors de diriger les nouveaux, a moi de les aider autant que possible durant les missions, à moi de répondre à leurs questions autour d'un verre après les missions. C'était une lourde responsabilité que je ne me sentais pas prêt à endosser. Pourtant, je devrais certainement m'y mettre plus tôt que prévu.


J'étais dans le métro lorsque je sentis une sorte de courant d'air frais sur ma nuque suivi d'une sensation de brûlure froide, comme si l'on m'avait frotté un glaçon dans le cou. Je me souvenais bien sûr de ce que le couple m'avait dit, cette sensation n'avait rien de naturel...c'était le signe. Je restais tranquille, assis au milieu de la foule. Je portais la combinaison sur moi, planquée dans mon sac de cours. Même si je n'avais pas le temps de l'enfiler, je serais transféré avec mon sac et la combinaison. Pourtant, j'eus le temps de rentrer chez moi et de me préparer. Je m'installais sur mon canapé, entièrement vêtu de cette armure étrange, en profitant un instant pour me regarder dans un miroir. Je n'arrivais pas à dire si je me trouvais ridicule ou classe en portant ce truc. Tout du moins, à travers ce tissu particulièrement collant à la peau je remarquais que j'avais pris du muscle grâce à mes bonnes habitudes prises depuis ma résurrection. Et me voir avec un corps plus agréable qu'avant, c'était déjà pas mal. Enfin, au milieu de ma contemplation, le transfert commença. Je sursautais presque en voyant mon reflet disparaître avant de me souvenir de tout ça. Mes yeux passèrent lentement du confort de mon appartement à celui horrifiant, et pourtant déjà très familier, de la pièce à la sphère noire.


- Salut Alessio, me fit aussitôt une voix sur le coté.


Je me tournais pour faire face à Roman, je le saluais à mon tour. A mon grand soulagement, ils étaient arrivés avant moi et fort heureusement avaient commencé à expliquer ce qui se passait. Lucie me salua brièvement avant de se concentrer sur les nouveaux arrivants. Ils n'étaient pas très nombreux...et à ma grande surprise, la plupart d'entre eux étaient jeunes, certainement de mon âge. Hormis Roman, Lucie et moi, je comptais seulement quatre autres personnes. Le plus vieux était un homme d'âge mur portant un costume un peu usé et qui commençait à se dégarnir au dessus des tempes. Autour de lui se tenait trois jeunes. Le premier était un grand gaillard, particulièrement costaud, brun, les cheveux coupés très courts, et une sorte de regard violent qui ne m'inspirait pas confiance. Les deux autres étaient des filles. L'une était petite, assez potelée, des cheveux mi longs, roux foncés et portait d'épaisses lunettes. L'autre était en revanche assez grande et plutôt fine. Elle avait un look assez branché, les cheveux châtains, extrêmement longs et de grands yeux trop maquillés à mon goût. Puis, derrière le grand gars costaud, je vis une cinquième personne, une fille elle aussi. Elle portait des chaussures à talons aiguilles, un jean slim lui allant à merveille et couvrant ses longues jambes galbées. Elle portait un simple haut laissant deviner un léger décolleté et une poitrine assez fine ainsi qu'une taille de guêpe. Elle avait un visage assez long, un petit menton, un nez aquilin et des yeux en amande couleur noisette. Elle portait les cheveux longs, tombant légèrement en dessous des ses épaules et châtains foncés. Le plus beau chez elle était sa bouche, elle avait une taille harmonieuse avec le reste de son visage mais était naturellement pulpeuse. Une bouche qui semblait si agréable que l'on s'imaginait aussitôt l'embrasser...voir ce que ça pourrait donner si on la voyait autour de son sexe. Elle était particulièrement belle...tout à fait mon style...ou tout du moins ça aurait put l'être... Car il y avait un gros problème avec cette fille, je la connaissais, et elle me connaissait aussi.


- Alessio...


Elle se dégagea de derrière le petit groupe et s'avança vers moi.


- C'est bien toi !

- Oui...salut Déborah...ça fait bizarre de se revoir dans ce genre de circonstances.


Elle s'appelait Déborah, une fille que j'avais rencontré au lycée. Le hasard des classes à la rentrée de seconde ainsi que le choix de nos options avait fait que nous avions passé nos trois années dans la même classe. C'était une fille pétillante, assez excentrique et pleine de vie, et dotée d'une grande intelligence. Je l'avais toujours trouvée particulièrement sympathique et drôle...sans compter que, tout comme en cet instant, je l'avais toujours trouvé particulièrement belle. Pourtant étrangement elle était restée célibataire pendant tout notre passage au lycée. Elle et moi avions créé un lien particulier, nous étions des amis assez proches et nous aimions à nous asseoir à côté en cours pour parler de tout et n'importe quoi. Sans parler des nombreux délires que l'on avait elle et moi. Une fois, lorsque nous étions en Terminale, sentant que j'avais certainement des sentiments pour elle, je lui en fit part...et elle me repoussa. Je n'eus pas le cœur brisé, mais je me sentis un peu triste. Pourtant, fidèle à elle même elle garda notre amitié intacte et ça jusqu'au bout du lycée. C'était vraiment une personne d'une gentillesse rare. Mais malgré ça, nous avions rapidement perdu contact après notre arrivée à l'université. Je ne savais même pas qu'elle se trouvait dans la même ville que moi. La revoir à cet instant me fit quelque chose. Elle était encore plus belle qu'avant pour sûr...


- C'est vrai ce qu'ils nous ont dit, me demanda Déborah en tournant son regard vers Lucie et Roman.

- Oui malheureusement...vous êtes tous morts dans cet accident...je suis moi même mort il y a presque un mois, et je me suis retrouvé dans cette pièce comme vous. Croyez moi, tous ce qu'ils vous ont dit ou vont vous dire est vrai, alors faîtes ce qu'ils vous disent.

- Si...si tu le dis.


Naturellement, comme je l'avais parfois fait avec elle pour l'aider ou pour lui remonter le moral, je lui posais une main sur l'épaule.


- Ne t'en fais pas, tout va bien se passer.


Je savais pertinemment que ça ne serait pas le cas, mais je me sentais pousser des ailes de sauveur. Voilà que malgré moi j'oubliais la première règle donné implicitement par Lucie et Roman, ne pas trop m'attacher aux gens. Mais c'était Déborah, c'était une amie ! Certes on ne s'était pas vu ni parlé depuis presque trois ans mais ce n'était pas n'importe qui. Le grand gars costaud s'approcha de nous et d'un air peu sympathique poussa simplement ma main et la prit dans ses bras.


- Pas de familiarités tu veux, me dit il.

- Ne t'en fais pas John, c'est un vieil ami.


Je regardais le fameux John qui me dominait d'une bonne tête avec un regard farouche. A les voir enlacés l'un l'autre je devinais aussitôt la nature de leur relation.


- Je me présente, Monsieur Favard, Professeur à l'université de...

- Ce n'est pas le moment de faire les présentations, la musique dont nous vous avons parlé va bientôt retentir, dit Roman en coupant le professeur.


Et, comme il venait de le prédire, la même chanson que la dernière fois retentit, créant de nouveau chez moi ce sentiment étrange de l'avoir entendu quelque part. Si je survivais à cette soirée je me fis la promesse d'aller faire des recherches dessus. J'étais ce genre de personne qui bloquais parfois sur un détail, capable de me prendre la tête jusqu'à ce que je me remémore enfin ce qui jusque là m'échappait. Je vis Déborah se cramponner à son John et les deux autres filles s'approcher d'eux. Ils devaient former un groupe d'amis, ou peut-être de travail vu qu'ils semblaient être morts tous ensemble avec ce professeur.


- Regarder bien l'écran et mémorisez le visage de la cible, dit Lucie.


Ce groupe, bien plus discipliné que le précédent, se plaça devant la sphère. Il y eut quelques commentaires lorsque Gantz qualifia nos vies de pathétiques et qu'elles étaient désormais entre ses mains. Le grand John dit même quelque chose de puéril du genre « Putain si ce n'était pas une machine je lui aurais déjà cassé la gueule. » Pour une raison étrange je n'éprouvais que mépris pour ce type. Je ne le connaissais ni d'Eve ni d'Adam, ne l'avait jamais croisé avant et pourtant rien ne m'inspirait chez lui. Je n'aimais pas sa gueule, je n'aimais pas sa voix, je n'aimais pas sa façon de regarder les gens...et il fallait bien l'avouer je n'aimais pas que Déborah, une personne aussi intelligente, aussi gentille, aussi réfléchie, ait jetée son dévolu sur lui. Je reniais pourtant cette jalousie pour me concentrer sur la cible du soir. Le monstre avait une apparence presque humaine. On aurait dit un enfant particulièrement laid. Il n'avait que très peu de cheveux sur le crâne, comme si on les lui avait rasés de force, de longues dents de devant et un horrible double menton trop prononcé pour être vrai. On aurait presque dit une opération de chirurgie esthétique ratée.


- Mais qu'est-ce que c'est que ça, demanda l'une des deux filles que je ne connaissais pas.

- La cible de ce soir...comme on vous l'a dit, ce « jeu » si on peut le qualifier ainsi vous donne une deuxième chance, expliqua Lucie, il va falloir chasser et tuer ce monstre afin de pouvoir rentrer chez vous en vie dès ce soir.


Une forme d'incrédulité passa sur le groupe malgré les explications de Lucie et Roman ainsi que ma propre intervention auprès de Déborah. Pourtant je ne voulais pas qu'ils nous prennent pour des fous. Aussi dingue que puisse sembler la réalité à partir de cet instant, c'était quand même la réalité. Ils risquaient leurs vies et je ne voulais pas les voir mourir. Ou plutôt, à ce moment, je ne voulais pas voir Déborah mourir. Elle devait me croire. C'est pourquoi je m'approchais d'elle.


- Croyez moi ça peut sembler dingue, mais ce qu'ils disent est vrai. Dans quelques secondes cette sphère va s'ouvrir, il y aura des valises à vos noms avec des combinaisons comme les nôtres ainsi que des armes...


Comme si tout ceci n'était qu'un scénario prévu à l'avance, la sphère s'ouvrit soudainement, montrant son étalage de valises et d'armes. L'une des filles dit alors.


- Ah il y a nos noms dessus.


Je pensais fortement « Ben oui connasse, je viens de te le dire ! » Mais je gardais cette pensée pour moi.


- Enfiler les combinaisons, elles ont la capacité de vous rendre plus forts et plus rapides, et surtout elle vous protégeront, continuais-je dans mes explications, bientôt nous serons téléportés à l'endroit où il faudra se battre.


Sans rien ajouter, Lucie et Roman me regardèrent prendre les rênes de ce petit groupe. Étrangement, les nouveaux écoutèrent mes instructions, mais à mon avis c'était seulement parce que Déborah me connaissait, et que eux la connaissaient elle. Ils attrapèrent aussitôt leurs valises, et, me passant à côté, John me poussa violemment pour atteindre la sienne. J'en tombais presque au sol.


- Fais attention !

- Je t'avais pas vu...


Mais qu'est-ce que c'était que ce connard antipathique ? Il était jaloux ou quoi ? Et pourquoi d'abord, que je sache c'est lui qui se tapait Déborah. Elle me considérait juste comme un ami, je ne l'avais jamais enlacé, ni embrasser, ou quoi que ce soit ! C'était juste un gros con rempli de jalousie, voilà ce que c'était. Roman indiqua au groupe la direction de la petite pièce où ils pouvaient se changer. Ils quittèrent bientôt tous la pièce et Lucie s'approcha de moi.


- C'est une bonne chose que tu connaisses quelqu'un...on dirait que ce groupe là nous croit. Au moins, si ils mettent les combinaisons ils auront plus de chance de s'en sortir.

- Peut-être...ça dépendra des capacités de l'alien que l'ont va affronter.

- Alien...alors toi ta théorie c'est que l'on affronte des petits bonhommes de l'espace, sembla-t-elle se moquer.

- C'est à cause de la technologie employée, des combinaisons et des armes futuristes, de la téléportation, des bombes dans le cerveau...j'ai vraiment plus l'impression d'être dans un film de SF que dans un livre de fantasy.

- Dit comme ça, ça se tient.


Roman revint soudainement, il semblait étrangement courroucé.


- Dit moi, il s'est passé un truc entre toi et cette Déborah, où c'est juste que son mec est un enfoiré ?

- Rien de plus que ce qu'elle a dit, on était amis autrefois, au lycée...je crois juste que c'est un enculé.

- Et pourquoi tu dis ça, demanda Lucie.

- Tu n'as pas vu comment il a poussé Alessio...et moi il m'a violemment fermé la porte au nez lorsque je leur ai montré la pièce, il croit quoi, que j'allais mater...surtout qu'il a laissé entrer le professeur.

- Allons, allons, moi non plus il ne m'inspire pas vraiment, mais restez concentrés sur ce que nous avons à faire, dit Lucie.


Elle avait raison. Je profitais de l'absence des autres pour m'approcher du râtelier d'armes, prenant cette fois ci celle ressemblant plus à un fusil. Si je me souvenais bien des explications que le couple m'avait donné l'autre soir, alors c'était une sorte de fusil à pompe à courte portée, mais pouvait aussi servir de sniper grâce à sa lunette. Je tournais alors la tête vers l'intérieur de la sphère, pensant y voir d'autres armes, ou tout du moins un mécanique complexe...mais j'y vis un homme à la peau blanche, dépourvu de pilosité, entièrement nu, et respirant par un masque. Je tombais à la renverse en poussant un cri. Roman s'approcha, un peu embêté.


- Tu l'as vu, on a justement oublié de t'en parler...il y a un gars dans la sphère...c'est plus lui qu'on appelle Gantz que la sphère elle même.

- C'était quand même un gros détail, dis-je particulièrement surpris, qu'est-ce que c'est que ce type !

- On ne sait pas, continua Roman, il ne bouge jamais, ne répond pas quand on lui parle, il semble dans une sorte de coma. La machine en elle même, vu qu'il est à l'intérieur, doit être à moitié mécanique et à moitié biologique.


Je me relevais, ne posant pas plus de questions. A ce stade là j'étais prêt à croire beaucoup de choses. Les deux filles revinrent à ce moment dans la pièce, et j'en profitais pour me poser dans un coin. Le professeur suivit bien assez vite et les trois se mirent à choisir leurs armes sur les conseils de Lucie et Roman. Enfin, Déborah revint avec son mec. La combinaison lui allait comme un charme, révélant tous les détails de sa silhouette. Je devais la regarder un peu trop longtemps et avec un peu trop d'insistance, car John s'approcha de moi, particulièrement menaçant.


- Qu'est-ce que tu regardes comme ça ?


Je levais les yeux vers lui.


- Un idiot qui ferait bien de prendre une arme si il veut pas crever ce soir.


C'était sorti tout seul. Il s'approcha alors de moi, portant presque la main sur moi jusqu'à ce qu'un cri attire son attention. Non loin de là, le professeur qui venait de prendre l'arme en forme de triangle commençait à être téléporté.


- Surtout ne vous éloignez pas de là où vous serez envoyés, dit Lucie.


Tour à tour nous fûmes transférés et je vis, amusé, le fameux John être envoyé avant moi sans que celui ci ne prenne d'arme. Constatant ce fait, je trouvais plaisante l'idée de le voir mourir, mais aussitôt je me sentis horrible d'y avoir pensé. Enfin, ce fut à mon tour, et je me retrouvais dans un quartier que je connaissais bien.


Nous nous retrouvions tous sur les quais de la ville, connus pour leurs épiceries un peu mal famées, ses bars et ses boîtes de nuit. Ce n'était pas vraiment un quartier que l'on recommandait généralement mais qui attirait chaque nuit bon nombre de personnes, en particulier des jeunes, en raisons des boîtes de nuit et de la drogue qui y était vendue. Je n'avais jamais été un grand fan des drogues, je ne cachais pas bien sûr le fait que j'en avais testé plus d'une, mais je n'avais jamais accroché. Je préférais boire...à outrance bien souvent, mais je me sentais toujours mieux à être saoul qu'à être défoncé. Je n'étais pas non plus un grand fan des boîtes, mais j'y avais été souvent entraîné par des potes pendant des soirées. Quoiqu'il en soit, le coin m'était familier, mais il l'était aussi aux nouveaux. En réalité, seul le prof regarda autour de lui, ne sachant trop où il était tombé. Soudain, nous vîmes devant nous tout un groupe de jeunes, sortant certainement à peine du lycée, venir dans notre direction. D'un mouvement presque commun, le groupe de Déborah s'avança vers eux, commençant à leur demander si ils pouvaient leur emprunter leur téléphone...mais la voix soudainement autoritaire de Lucie obligea tout le monde à s'arrêter.


- Pas la peine d'essayer de leur parler, ils ne peuvent pas nous voir ni nous entendre.


Voilà une chose que je ne savais pas. Mais je la cru sur parole, ces deux là ne m'avaient pas menti jusque là et ils savaient bien mieux que quiconque ce que nous traversions. Je supposais qu'ils ne m'en avaient pas parlé car, lors de la dernière mission, nous n'avions croisé personne. Par conséquent, je n'avais moi même pas posé de questions à ce sujet. La réplique de Lucie sembla tous les refroidir, hormis un, ce gros con de John. Ce dernier continua de s'approcher du groupe, beuglant comme pas permis et bougeant ses bras dans tous les sens comme un imbécile. A mon grand énervement, Déborah s'approcha de lui, comme s'accrochant au maigre espoir que son imbécile de copain arrive à se faire voir par le groupe. Mais non, malgré ses gesticulations, malgré nos tenues excentriques et malgré les armes que nous portions, le groupe passa au milieu du nôtre sans nous remarquer. A cet instant, John s'approcha de Roman.


- C'est quoi ce délire...vous êtes sûrs qu'on est pas mort ? Ça existe ça, un monde dans lequel les gens ne nous voient pas...comme des putains de fantômes ?

- Durant le temps de la mission, nous, ainsi que les créatures que nous affronterons, sommes invisibles aux yeux des gens normaux. On ne nous voit pas et on ne nous entend pas. C'est comme ça...ne me demande pas pourquoi, ce n'est pas moi qui ai créé toute cette opération.


Je pouvais sentir l'agacement de Roman, mais Lucie aussi. Tant et si bien qu'elle s'approcha de lui et reprit la parole.


- Restez tous bien groupés et souvenez vous du visage de la cible. Si jamais vous entendez une sorte de sonnerie, revenez sur vos pas. Le terrain est limité par une barrière invisible...et si vous la franchissez, vous mourrez.

- Comment ça, demanda la fille petite et potelée.

- On a tous une sorte de bombe implantée dans la tête qui doit aussi servir de balise GPS. En somme, si on s'éloigne trop de la zone où on est sensé se battre, on meurt, dis-je très froidement.


Les filles et Déborah me regardèrent d'un air horrifié. Le professeur, seul véritable adulte du groupe semblait être le plus paumé de tous, et John...ce gros con, continuait de nous regarder comme si il ne croyait toujours pas à tout ça même si il n'avait que des preuves sous les yeux.


- Écoutez, restons ensemble, trouvons la cible, abattons là et on pourra tous rentrer chez nous ce soir, termina simplement Roman.


Il sortit un objet de sa ceinture, une sorte de radar qui lui indiqua aussitôt une position.


- Regardez, dit-il, les points verts c'est nous, et ce point rouge c'est notre cible. Lucie et moi passerons devant, suivez nous mais faîtes attention.


Je ne contestais pas ses ordres, le couple était après tout plus expérimenté. Je leur emboîtais le pas aussitôt et fut ravi de voir que Déborah fut la première à me suivre. Elle fut bientôt suivie par le gorille qui lui servait de copain et les deux filles. Seul le professeur restait un peu à la traîne, mais ne sachant quoi faire d'autre il nous suivit lui aussi. Nous passâmes plusieurs petites rues pour débouler sur une sorte de cul de sac. Il n'y avait là que des résidences à l'exception d'un côté occupé par une enseigne fermée. C'était une grande porte noire sur laquelle était accrochée un panneau de vente. Roman regarda une dernière fois le radar et s'assura que l'ennemi se trouvait bien à l'intérieur. Il tenta d'ouvrir la porte du bâtiment désaffecté, et à sa grande surprise elle s'ouvrit. Silencieusement, il nous intima de le suivre d'un simple geste de la main. Nous entrâmes dans un petit couloir sombre. Sur la droite dans le fond il y avait un guichet, et sur la gauche un grand vestiaire. A n'en pas douter, cet endroit devait être une ancienne boîte de nuit. Et je ne m'y trompais pas car, au bout du couloir, nous arrivâmes dans une salle bien plus grande et complètement vide. Sur un côté, un bar immense en bois massif prenait presque la totalité du mur, quelques tabourets étaient encore présents ainsi que de vieilles bouteilles sur des étagères accrochées au mur. Au fond, une estrade où on avait entreposé un tas énorme de cartons. En m'avançant sur l'ancienne piste de danse, je remarquais un étage, avec plusieurs balcons ainsi qu'un autre couloir donnant certainement sur une autre salle. Roman, toujours aussi silencieux, nous rassembla au milieu de la piste.


- Le signal sur le radar n'est pas assez précis, la cible se trouve quelque part dans le coin. Lucie, Déborah, John et moi on va fouiller cette pièce ainsi que l'étage. Alessio, tu prends ce couloir avec le prof et les filles.


J’acquiesçais aussitôt, bien que j'aurais pu m'énerver si je n'avais pas un peu appris à connaître le couple. Ces deux là préféraient rester ensemble, et je ne les blâmais pas. Et même si j'aurais aimé que Déborah m'accompagne, j'étais au moins content de ne pas avoir John sur le dos. Sans compter que j'étais plutôt flatté qu'il me donne la responsabilité d'un groupe...mais après tout, n'avais-je pas survécu à une mission. Je n'étais pas un bleu. Je me tournais vers mon groupe qui, pour continuer de me flatter, sembla totalement prêt à suivre mes ordres. Tu parles, pensais-je, le prof et les deux gonzesses devaient être terrifiés à l'idée de se retrouver seuls. L'idée de se retrouver avec moi qui savait ce qui se passait devait être réconfortant pour eux. Je leur fis signe de me suivre tandis que je m'engouffrais dans le couloir. Celui ci n'avait rien de spécial, hormis une porte sur le côté donnant sur une petite salle qui sentait le renfermé et au sol jonché de mégots de cigarettes. Et au bout, une ouverture, donnant sur une nouvelle piste de danse, mais celle ci était plus petite que celle de l'entrée. Il n'y avait là qu'un petit bar, une scène minuscule et pas d'étage. Par contre elle était pleine de merde. Il y avait tellement d'objets entreposés que l'on pouvait croire que les anciens propriétaires y avait stocké tout ce dont ils n'avaient plus besoin.


- On reste ensemble, si vous voyez quoi que ce soit, tirez dessus, ne vous posez pas de questions.


Heureusement pour moi, Lucie avait déjà expliqué aux nouveaux le fonctionnement des diverses armes juste avant que l'on soit envoyé, je n'avais pas à m'en charger.


- Dis moi, est-ce que cette mission est aussi dangereuse que ce qu'on nous a dit, me demanda le professeur.


D'une part je le trouvais trop bruyant et d'autre part avait-il encore des raisons de douter après tout ce qu'on lui avait dit. Je me tournais vers lui et vit que les deux autres filles attendaient elles aussi une réponse. Mais à quoi ils pensaient à vouloir une réponse alors que l'ennemi pouvait nous tomber dessus d'une seconde à l'autre.


- La dernière fois, hormis Lucie et Roman, on était huit à apparaître dans la pièce...je suis le seul à avoir survécu.


A entendre ma réponse, la potelée se mit à sangloter...un sentiment de pitié m'envahit, j'interrompais alors ma recherche pour venir la rassurer.


- J'ai survécu grâce aux combinaisons que l'on porte, elles sont très efficaces pour nous protéger....alors ne t'en fais pas. Maintenant, concentrez vous.


Certes je mentais un peu, la femme en tailleur elle aussi portait une armure mais ça ne l'avait pas empêchée de mourir. Et je savais que les armures, si elles accumulaient trop de dégâts, devenaient inutilisables. Mais ce n'était pas le moment de faire paniquer le groupe dont j'avais la charge. Je vis que je leur avais donné un peu de courage et reprenais mes recherches. Lentement mais sûrement, je regardais à travers les tas de cartons et les vieux meubles pour voir si l'alien ne se cachait pas au milieu. Pourtant nous eûmes beau bouger la plupart des fournitures présentes dans la pièce, nous ne vîmes pas notre cible. J'en venais à penser que Roman s'était peut-être trompé en regardant le radar. Depuis que nous étions entrés il n'y avait pas eu de signe de vie, pas le moindre bruit, personne ne nous avait attaqué. Rien qu'à tendre l'oreille nous pouvions constater que les choses semblaient aussi calmes pour l'autre groupe. Cependant le compteur continuait de tourner, la moitié du temps était déjà écoulé en réalité.


- Cette chose est-elle vraiment ici, vint me demander la grande fille trop maquillée.

- Normalement oui...mais je n'en suis plus très sûr.


Le groupe se rassembla autour de moi, comme pour décider ensemble de la marche à suivre. Mais, le destin jouant avec nous avec un brin d'humour noir nous donna soudainement tort. Comme pour se moquer de nous, un son nous fit soudainement tous sursauter. C'était comme un crissement, une note de musique particulièrement fausse. On se tourna tous et nous le vîmes. Posé tout en haut du tas d'objets se trouvait notre ennemi. Il n'était pas bien grand, mesurant un mètre tout au plus. Il portait une sorte de costume de cérémonie noir et blanc, mais à l'ancienne avec une veste en queue de pie. Il tenait dans une main un violon qui semblait plus grand que la normale en raison de sa petite taille et un archet dans l'autre.


- Le spectacle commence, annonça le monstre d'une voix aiguë et nasillarde.

- Que le spectacle commence, reprit une autre.


Je me tournais, dans un coin de la pièce, un autre, parfaitement semblable, venait de faire son apparition, mais celui ci tenait un triangle. Puis un autre apparut soudainement posé sur le mini bar, armé d'une flûte traversière. Finalement, un quatrième et dernier nous bloqua la sortie du couloir, armé celui ci de maracas. On se retrouva tous dos à dos, fixant chacun un ennemi différent. L'esprit d'équipe était bon car nous avions pris cette position sans même nous concerter. Nous étions si proches les uns des autres que je pouvais presque sentir leurs tremblements contre mon dos. Ces étranges ennemis nous regardèrent un instant, les yeux vides, produisant parfois quelques sons avec leurs instruments, mais jusque là ils semblaient inoffensifs. On aurait dit des minis chefs d'orchestre avec leurs tenues étranges. Mais ils bougeaient à peine, se contentant de nous regarder. Mon instinct me dit de tirer, de dire à mon groupe d'en faire de même. Nous n'avions pas de temps à perdre...et pourtant je refusais de tirer. Mon corps sentait le danger, il avait envie d'attaquer. Mais mon esprit ne voyait que quatre êtres trop petits pour être dangereux, des allures d'enfants un peu difformes, et surtout quatre adversaires qui jusque là n'avaient encore rien fait. C'est pourquoi, à ma grande surprise, je donnais cette consigne à mes partenaires.


- Attendez qu'ils bougent, on ne sait pas comment ils vont nous attaquer.


Ces monstres là contrastaient vraiment avec les aliens obèses de la première mission. Je me rappelais distinctement les deux gros monstres d'alors. Mais la peur était réelle et elle finit par gagner la fille potelée. Elle faisait face au petit alien qui tenait les maracas. Elle fit feu avec son arme, je me tournais au même instant. Je vis alors l'alien secouer ses instruments et ce fut comme si le son prenait vie. Face à lui, en un instant, une sorte d'onde se propagea sur laquelle l'attaque de l'arme se brisa...mais l'onde continua son chemin et nous traversa. La sensation fut désagréable mais pas douloureuse, un peu comme si nos corps avaient été pris d'un spasme soudain. Les autres, firent tous résonner leurs instruments, créant chacun le même genre d'onde avant que nous ayons le temps d'attaquer. Les trois nouvelles ondes nous frappèrent à nouveau mais cette fois ci, en plus d'être plus nombreuses, elles étaient plus fortes. Je sentis mon corps tout entier se mettre à trembler ainsi qu'être parcouru d'une douleur soudaine mais faible, comme un léger coup dans le entre. Nous avions attaqué les premiers et les aliens commençaient à se défendre...la mission commençait réellement. Le peur se mit à me saisir tout autant que mes partenaires, en particulier parce que je ne comprenais pas quel genre d'attaque ces monstres utilisaient contre nous. D'une voix forte comme pour rassembler notre courage je donnais un ordre simple mais essentiel.


- Tirez ! Tuez les tous !

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