Réécriture de contes à la Ghost Whisperer

Chapitre 20 : La brunette prisonnière de la sorcière

11128 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour 02/09/2025 13:27




Voici la référence du conte : « Raiponce », dans Jacob et Wilhelm Grimm, Les contes – Kinder – und Hausmärchen, tome I, texte français de présentation par Armel Guerne, Paris, Éditions Flammarion, 1986 [© 1967], d’après l’édition de 1812, p. 79 à 83.




Il était une fois un mari, Thomas Gordon, un procureur adjoint à la cour, et sa femme, Elizabeth, une fleuriste qui voyait les esprits errants(1), qui avaient depuis longtemps désiré avoir un enfant, quand enfin la femme fut dans l’espérance et pensa que le Bon Dieu avait bien voulu accomplir son vœu le plus cher. Sur le derrière de leur maison, ils avaient une petite fenêtre qui donnait sur un magnifique jardin où poussaient les plantes et les fleurs les plus belles ; mais il était entouré d’un haut mur, et nul n’osait s’aventurer à l’intérieur parce qu’il appartenait à Greta Hanson, une sorcière douée d’un grand pouvoir et que tout le monde craignait, car elle avait commerce avec des esprits des ténèbres, les Ombres(2).


Un jour donc que Elizabeth Gordon se tenait à cette fenêtre et admirait le jardin en dessous, elle vit un parterre planté de superbes raiponces avec des rosettes de feuilles si vertes et si luisantes, si fraîches et si appétissantes, que l’eau lui en vint à la bouche et qu’elle rêva d’en manger une bonne salade. Cette envie qu’elle en avait ne faisait que croître et grandir de jour en jour. Mais comme elle savait aussi qu’elle ne pourrait pas en avoir, elle tomba en mélancolie et commença à dépérir, maigrissant et pâlissant toujours plus. En la voyant si bas, son mari s’inquiéta et lui demanda d’une voix douce :

— Mais, Beth, que t’arrive-t-il donc ?

— Ah ! lui répondit-elle, je vais mourir si je ne peux pas manger des raiponces du jardin de derrière chez nous !

Thomas aimait fort sa femme et pensa Plutôt que de la laisser mourir, je lui apporterai de ces raiponces, quoi qu’il puisse m’en coûter !


Le jour même, après le crépuscule, l’homme escalada le mur du jardin, y prit en toute hâte une pleine main de raiponces qu’il rapporta à son épouse. Elizabeth s’en prépara immédiatement une salade, qu’elle mangea avec une grande avidité. Mais c’était si bon et cela lui avait tellement plu que le lendemain, au lieu que son envie fût satisfaite, elle avait triplé. Et pour la calmer, il fallut absolument que son mari retournât encore une fois dans le jardin. 


Au crépuscule, donc, Thomas Gordon fit comme la veille, mais quand il sauta du mur dans le jardin il se figea d’effroi car la sorcière était devant lui.

— Quelle audace de vous introduire dans mon jardin, comme un voleur, lui dit-elle avec un regard furibond, et de venir me voler mes raiponces ! Vous allez voir ce qu’il va vous en coûter !

— Oh ! supplia-t-il, ne voulez-vous pas user de clémence et préférer miséricorde à justice ? Si je l’ai fait, si je me suis décidé à le faire, c’est que j’étais forcé : ma femme, ma chère Elizabeth, a vu vos raiponces par notre petite fenêtre, et elle a été prise d’une telle envie d’en manger qu’elle serait morte si elle n’en avait pas eu.

Greta fit taire sa fureur et dit : 

— Si c’est comme vous le prétendez, je veux bien vous permettre d’emporter autant de raiponces que vous voulez, mais à une condition : vous me donnez l’enfant que votre femme va mettre au monde. Tout ira bien pour lui et j’en prendrai soin comme une mère.

Thomas, les yeux écarquillés de frayeur, pensa Comme si j’avais le choix ? Ah, mon Dieu, protège mon enfant à naître !

Il balbutia, en regardant d’un air craintif son interlocutrice : 

— Oui, j’accepte ce que vous me proposez, Madame Greta Hanson(3).

— Très bien ! s’exclama la redoutable sorcière en agitant sa robe noire.



Et quelques semaines plus tard, quand Elizabeth Gordon accoucha, la sorcière arriva aussitôt, donna à l’enfant le nom de Melinda(4) et l’emporta avec elle.

Cet enlèvement attrista beaucoup ses parents. Ils abandonnèrent alors toute autre tentative d’avoir un autre enfant, par crainte que la sorcière Greta ne vienne l’enlever aussi. Thomas, alors, était plus à la cour d’appel de la ville qu’à la maison, tout comme Elizabeth était dans sa petite boutique de fleuriste, pour oublier l’absence de leur chère fille(5)



Melinda était une fillette et la plus belle brunette qui fût sous le soleil. De plus, elle avait hérité de sa mère le don de voir les esprits errants. Sauf qu’elle n’avait personne pour lui dire comment vivre avec son don ; la fille devint en autodidacte une passeuse d’âmes(6)



Lorsque l’enfant eut douze ans, la sorcière l’enferma dans une tour qui se dressait, sans escalier ni porte, au milieu d’une forêt. Et comme la tour n’avait pas d’autre ouverture qu’une minuscule fenêtre tout en haut, quand la sorcière voulait y entrer, elle appelait sous la fenêtre et criait :


Melinda, Melinda,

Descends-moi tes cheveux.


Melinda avait de longs et merveilleux cheveux qu’on eût dit des fils de cuivre(7). En entendant la voix de Greta Hanson, elle défaisait sa coiffure, attachait le haut de ses nattes à un crochet de la fenêtre et les laissait se dérouler jusqu’en bas, à vingt-trois mètres(8) au-dessous, si bien que la sorcière pouvait se hisser et entrer.



Avec le temps, la jeune passeuse d’âmes discuta avec les esprits qui hantèrent la tour où elle vivait. Ainsi, elle parvint à les convaincre avec beaucoup de douceur de partir dans la Lumière — nom que Melinda donnait à l’au-delà(9).



Quelques années plus tard, il advint qu’un fils de roi, un certain Jim Clancy(10), qui chevauchait dans la forêt passa près de la tour et entendit un chant si adorable qu’il s’arrêta pour écouter. C’était Melinda — alors une jeune femme en âge de se marier — qui se distrayait de sa solitude en laissant filer sa délicieuse voix. Depuis qu’elle avait réglé les cas des différents esprits errants, elle s’ennuyait toute seule et elle ne voulait pas vivre dans un silence religieux(11). Le fils du roi, qui voulait monter vers elle, chercha la porte de la tour et n’en trouva point. Il tourna bride et rentra chez lui ; mais le chant l’avait si fort bouleversé et ému dans son cœur, qu’il ne pouvait plus laisser passer un jour sans chevaucher dans la forêt pour revenir à la tour et écouter. Il était là, un jour, caché derrière un arbre, quand il vit arriver Greta Hanson appeler sous la fenêtre : 


Melinda, Melinda,

Descends-moi tes cheveux.


Alors Melinda laissa se dérouler ses nattes et la sorcière grimpa.

Si c’est là l’escalier par lequel on monte, je veux aussi tenter ma chance, se dit-il. Je serai assez curieux de savoir qui est cette Melinda à la voix si divine(12).



Le lendemain, quand il commença à faire sombre, Jim Clancy alla au pied de la tour et appela :


Melinda, Melinda,

Descends-moi tes cheveux.


Les nattes se déroulèrent aussitôt et le fils du roi monta. Sur le premier moment, la jeune passeuse d’âmes fut très épouvantée en voyant qu’un homme était entré chez elle. 

Elle balbutia, en se tordant nerveusement les mains : 

— Monsieur, qui êtes-vous ?

Jim l’observa attentivement et l’aima au premier regard. 

Comme elle est belle ! pensa-t-il. Ne serait-ce pas une sorcière qui garde cette demoiselle prisonnière ? Dommage qu’elle reste seule jusqu’à la fin de ses jours !

Avec son plus beau sourire, le prince répondit d’une voix chaleureuse : 

— Je suis Jim Clancy, prince du Royaume de Centerville, fils du roi Aiden Clancy et de la reine Faith Clancy(13).

— Comment êtes-vous parvenu jusqu’ici ?

— J’ai traversé la forêt et les pas de mon cheval m’ont amené jusqu’à la tour. Et j’ai entendu votre merveilleuse voix…

Voilà que le prince me fait des compliments, pensa Melinda avec dédain en passant sa main droite dans ses cheveux.

Elle le regarda attentivement.

C’est vrai qu’il est mignon avec ses yeux bleus, pensa-t-elle. 

— Merci…, murmura-t-elle, en baissant les yeux, gênée.

Il reprit : 

— Et j’étais curieux de savoir qui vous êtes…

Un silence plana entre eux pendant plusieurs minutes.

Jim murmura : 

— Gente demoiselle, comment vous appelez-vous ?

La brunette releva lentement sa tête. Elle remarqua à la droite de son interlocuteur un esprit errant, à savoir celui d’un jeune homme aux mêmes yeux bleus et aux mêmes cheveux noirs que lui, sauf qu’il était vêtu de vêtements argentés et dorés. Lorsque le regard de la femme extraordinaire se déposa sur lui, le revenant cligna des yeux, étonné d’être vu par une personne vivante. Il balbutia :

— Vous me voyez ?

Elle bougea lentement sa tête en un mouvement positif.

Intrigué de son attitude, Jim demanda :

— Mademoiselle, qu’est-ce qui vient de se passer pour vous mettre dans un tel état ?

La brunette murmura, en ramenant son attention sur le prince :

— Rien, Votre Altesse Clancy…

— Votre Altesse Jim Clancy, prince du Royaume de Centerville, la corrigea-t-il.

— Vous avez compris…

Jim confirma sa compréhension d’un mouvement de tête, puis enchaîna d’une voix douce :

— Mademoiselle, je ne connais que votre prénom… Car je l’ai entendu de la vieille femme…

Avec son plus beau sourire, elle précisa :

— Ma mère-marraine, Greta Hanson… Une sorcière que tout le monde craint…

Il pensa Oh là, là ! C’est bien ce que je pensais ! Une pauvre demoiselle prisonnière d’une sorcière ! Mon honneur serait de la délivrer et de faire d’elle mon épouse !

— Quel est votre nom de famille ?

— Pour être honnête, je ne sais pas qui sont mes parents… Madame Greta Hanson m’a dit qu’ils sont morts à ma naissance…

— Désolé, murmura d’une voix chaleureuse le prince, ému.

— C’est correct…, répliqua Melinda avec son plus beau sourire en clignant des yeux. Vous ne pouvez pas le savoir…

— Bon, reprit-il, puis-je alors vous poser une autre question ?

— Oui…

— Que faites-vous ici, seule dans cette tour ?

Melinda soupira. Elle remarqua que l’esprit qui suivait le prince disparut de sa vue.

Elle déglutit puis répondit : 

— Ce que je fais ici ? Et bien, c’est le seul environnement que je connaisse… J’ai grandi dans cette tour… Autant que je puisse me souvenir…

Melinda fit un grand geste des bras puis continua : 

— … toujours ces mêmes murs gris-beige… 

Ramenant ses bras vers elle, elle dit d’une petite voix : 

— J’ignorais même qu’il y avait une forêt… De la fenêtre, je ne vois pas grand-chose…

Jim, les traits tendus, prit en pitié la belle femme.

La pauvre, à vivre enfermée dans cette haute tour ! pensa-t-il. Quel triste destin ! Mais pourquoi ? Sans doute parce que ses parents ou elle-même ont contrarié la sorcière ou Dieu-sait-quoi encore…

Melinda continua, en faisant un geste de sa délicate main vers lui : 

— De sorte que grâce à vous, je sais maintenant que je suis perdue dans une tour qui se trouve dans une forêt…

Il s’éclaircit la gorge puis demanda d’une voix douce :

— Avez-vous jusqu’à maintenant reçu de la visite ?

— Non… Vous êtes le premier être vivant que je rencontre… La seule personne qui vient à tous les jours est ma mère-marraine Greta…

Le prince pensa, affligé en son âme, Pauvre Melinda ! Ne pas socialiser ! Ça doit être ennuyeux !

Elle soupira et ajouta :

— Et bien, voulez-vous, Votre Altesse Jim Clancy, revenir demain ? Avec votre compagnie, je me sens moins seule…

— Avec plaisir ! Je n’ai jamais rencontré de femme aussi belle, élégante et plaisante que vous ! 

Il se dirigea vers la fenêtre et redescendit en s’accrochant aux nattes de Melinda. Il sauta sur son cheval et revint au palais de ses parents. La jeune femme refit sa coiffure(14).



Le prince Jim Clancy vint ainsi lui rendre visite chaque soir. Ils discutèrent de tout et de rien, pour apprendre à se connaître. Après plusieurs mois de tentatives de séduction, ils se déclarèrent leur flamme d’amour mutuelle. Melinda pensa, les yeux brillant de joie, il est certain que Jim m’aimera sûrement mieux que ma vieille mère-marraine Greta(15).



Par la suite, le prince vint passer ses nuits avec elle. Tous les deux étaient heureux de se retrouver après leur longue journée. Après un an de vie commune secrète, Melinda avoua son don à Jim, qu’il accepta avec une joie presque enfantine. Elle engagea ainsi la conversation avec l’esprit qui le suivait et elle apprit qu’il était le frère aîné de son bien-aimé, le prince Daniel, mort des effets de l’art de la cousine de Greta Hanson(16).

La passeuse d’âmes demanda d’une voix douce au revenant, qui se trouvait alors à la droite de Jim :

— Excusez-moi, Monsieur Daniel Clancy, mais pourquoi restez-vous auprès de votre frère ?

— Je veux qu’il soit en sécurité avec une femme qui l’aime sincèrement et qu’il aime.

Émue, Melinda se tourna vers son bien-aimé et dit :

— Jim, ton frère veut que tu sois en sécurité auprès d’une femme qui t’aime et que tu aimes…

L’interpellé serra ses délicates mains entre les siennes et l’embrassa sur ses lèvres pour la faire taire. 

Elle l’embrassa en retour en pensant qu’il est certain que je serais sa femme ! Mais je le demanderai pour en être certaine…

La jeune femme s’éclaircit la gorge puis murmura :

— Veux-tu devenir mon époux et avoir des enfants avec moi ? 

— Oui ! s’exclama-t-il d’un air enjoué.

— Et si nos enfants ont un don, les accepterais-tu quand même ?

— Oui ! Avec ou sans un don, nos enfants sont nos enfants !

Il l’enlaça ; elle se blottit contre lui, émue de son soutien indéfectible. Des larmes lui montèrent aux yeux, que Melinda s’empressa de sécher(17)

Elle ajouta aussitôt :

— Jim, je voudrais bien partir avec toi, mais je ne saurais pas comment descendre. Si tu viens, alors apporte-moi chaque fois un cordon de soie : j’en ferai une échelle, et quand elle sera finie, je descendrai et tu m’emporteras sur ton cheval(18).

— C’est correct, Mel ! Sans problème ! répliqua-t-il en la serrant plus près contre lui. 


Sur ces mots, Jim Clancy la quitta pour revenir dans le château de son père, qui se demandait bien où allait son fils la nuit. En espérant qu’il ne fréquente pas une fille peu recommandable ou une fille de sorcière, pensa Aiden, inquiet. Lorsque le roi essayait d’aborder le sujet avec lui, il éludait la question. Aiden Clancy envoya un messager surveiller le prince. Il sut ainsi que son fils se rendit près d’une tour. Et il se demanda bien quelle sorte de femme il fréquentait, mais il ne put le savoir. Le roi en discuta avec sa femme et ils convinrent de lui donner un verre de vin pour que, un peu ivre, ils parviendront afin à savoir ce qu’il fait de ses nuits. Avec la complicité du sommelier et du cuisinier de la cour, ils parvinrent à enivrer un peu le prince. Ce dernier avoua ainsi rendre visite à Melinda prisonnière d’une sorcière, qu’il aimait beaucoup et qu’il voulait marier. Lorsque Jim se retira dans sa chambre pour se reposer de l’effet du vin qui lui embruma l’esprit, ses parents discutèrent dans leurs appartements privés, loin des oreilles indiscrètes des serviteurs. Ils s’assirent à une table en cerisier plaquée or, sur des chaises rembourrées en bois de noyer plaquées argent avec des coussins brodés d’or.

— Faith, dit Aiden d’une voix inquiète, je ne sais pas si nous devons approuver le mariage de notre fils avec une femme dont il ne connait pas les parents… Et quoi s’il s’agit d’une fille peu recommandable ? Ou de la fille d’un obscur personnage du royaume voisin ?

— Je comprends ton point de vue… Mais si notre fils l’aime, pourquoi l’empêcher de la marier ? Après tout, notre bru ne doit pas nous plaire… L’important est qu’elle plaise à Jim ?

— Ouais, tu as raison… marmonna à contre-cœur Aiden.

— Dans ce cas, je te propose…

Elle s’interrompit elle-même, mine pensive. Elle ajusta sa robe de lin doré et poursuivit, en regardant droit dans les yeux son époux : 

— … de faire une demande officielle de mariage auprès de la demoiselle… Et on pourrait essayer de savoir, si elle a un parrain ou une marraine, l’identité de ses parents…

Un silence plana entre eux. 

Le roi ôta sa couronne d’or sertie de pierres précieuses, qu’il déposa sur la table devant lui. 

Il murmura :

— C’est vrai, Faith, tu as raison… On doit en informer Jim afin qu’il puisse marier cette Melinda dans notre royaume…

— Et ainsi nous serons assurés d’être grands-parents ! ajouta-t-elle, ses yeux bleus brillant de joie.

— Tu es géniale ! répliqua-t-il en se levant de sa chaise, s’avança vers son épouse, puis en l’enlaçant tendrement. Le roi remit sa couronne sur sa tête(19).


Heureusement pour le prince, l’effet du vin se dissipa rapidement et il arriva, comme d’habitude, passer la nuit dans le lit de Melinda.



Le lendemain, Jim Clancy, lorsqu’il revint au palais de son père, un garde vint à lui, s’inclina respectueusement puis dit :

— Votre Altesse Royale Jim Clancy, votre père, Son Altesse Royale Aiden Clancy et votre mère, Son Altesse Royale Faith Clancy, m’ont chargé de vous suivre afin de voir votre fiancée…

— Comment, demanda le prince, les sourcils levés, mes parents m’ont trouvé une fiancée ? Qui est-elle ?

Il pensa tristement je veux me marier qu’à ma Melinda !

Le garde, en faisant un geste négatif de sa main droite, répliqua : 

— Non, non ! Pas du tout !...

— Alors ?

— Hier, après avoir pris un verre de trop…

Devenu blême, Jim pensa, ses yeux bleus agrandis de peur, Zut ! C’est certain que j’ai dû dire au sujet de ma Melinda ! Qu’est-ce que mes parents peuvent bien penser d’elle ? Ils peuvent s’y opposer, parce qu’elle n’est pas une princesse… Mais pour moi, ma Melinda reste ma Melinda, peu importe son statut social ! Si elle ne leur plaît pas, je n’aurai qu’à la marier discrètement, sans grande pompe… 

Le garde poursuivit, comme s’il n’avait pas remarqué la réaction de son interlocuteur :

— …vous avez dit avoir passé vos nuits avec une certaine Melinda… une jeune brunette qui voit les esprits… Elle est, selon vos propos, prisonnière d’une sorcière… Et vous cherchez un moyen pour la faire sortir de la haute tour où elle s’y trouve depuis des années…

— Oui, c’est exact, balbutia Jim en baissant la tête, honteux d’avoir été découvert.

— Et bien, reprit son interlocuteur d’une voix chaleureuse, vous n’avez pas, Votre Altesse Royale, à vous sentir coupable de votre amour pour cette demoiselle…

— Sérieux ? murmura-t-il, en relevant aussitôt la tête, les sourcils levés.

— C’est sérieux ! D’autant plus que votre père, Son Altesse Royale Aiden Clancy, viendra aujourd’hui avec vous, pour faire les démarches officielles de demande de mariage avec Melinda… 

Jim, dont les yeux brillèrent d'une joie indescriptible, se retint de donner une solide accolade masculine au garde.

Dieu soit loué ! Je marierai enfin ma Melinda ! pensa-t-il, en levant ses yeux au plafond.

Le garde lui sourit gentiment puis ajouta :

— Par ailleurs, on y va maintenant, car tout est prêt… Vous n’avez qu’à nous guider vers votre dulcinée !


Le prince, sur son cheval, suivi par un carrosse doré dans lequel se trouvait son père et deux gardes du corps, se rendit devant la tour.

Étonné, le roi dit :

— Et alors ? Où est la porte ?

Jim répondit :

— Tous mes respects père, mais il n’y a pas de porte…

— Alors, comment monter ?

— Laisse-moi faire !

Le prince s’approcha de la tour et cria :

 

Melinda, Melinda,

Descends-moi tes cheveux.


Les nattes se déroulèrent aussitôt et le fils du roi monta. Contente de le voir, la jeune brunette l’enlaça et le questionna :

— Tu sembles soucieux… Qu’est-ce qui te préoccupe ?

Une voix se fit entendre derrière Melinda :

— Ah ! Scélérate ! Moi qui croyais t’avoir isolée du monde entier, et tu m’as pourtant flouée !

Les deux jeunes, étonnés, se retournèrent vers la direction de la voix. C’était nulle autre que la sorcière Greta Hanson. Jim enlaça Melinda en un geste protecteur contre lui.

Il répliqua :

— Madame, je suis Jim Clancy, prince de Royaume de Centerville, fils du roi Aiden Clancy et de la reine Faith Clancy.

— Enchanté, Votre Altesse, dit Greta d’une voix traînante. Mais vous devez savoir que je ne consens pas à donner Melinda, ma protégée, en mariage.

— Pourtant, mon père est venu pour faire une demande officielle de mariage.

— Et pourquoi devrai-je y consentir ? Parce qu’il est un roi ? Pourtant, Melinda n’est pas une princesse !

Un silence suivit en guise de réponse. 

Jim murmura à l’oreille de sa bien-aimée : 

— Veux-tu, s’il te plaît, laisser monter mon père ?

Elle approuva ses propos et jeta à nouveau ses cheveux, de sorte que le roi arriva dans la tour.

Son fils lui expliqua ce qui s’était passé. La sorcière promena son regard du père au fils, sans mot dire.

Au moins, pensa-t-elle, je suis à peu près certaine que le roi refusera de marier son fils à une fille sans nom… Et si j'ajoutais qu’elle est une bâtarde ? Garanti qu’elle restera avec moi ! 

— Madame, intervint Aiden en se retournant vers Greta, savez-vous qui sont ses parents ?

— Oui, mais ils sont tous les deux défunts depuis très longtemps. Son père n’était qu’un procureur adjoint sans importance de la petite ville près d’ici.

— Mais quel était son nom ?

— Ça n’a pas d’importance, puisqu’elle est une bâtarde(20)

— Quoi ? s’exclamèrent à l’unisson Aiden, Jim et Melinda.

— Parce que ta mère, ma chère, dit la sorcière en regardant la brunette, avait été infidèle à son mari…

— Mais, gémit la jeune femme, pourquoi ne pas me l’avoir dit plus tôt ?

— Toutes les vérités ne sont pas bonnes à dire, mon enfant…

Un silence plana parmi les quatre vivants.

Aiden regarda tour à tour son fils et la brunette en pensant Ah ! Quel déshonneur pour notre fils de s’amouracher d’une telle femme ! Il est certain qu’elle sera la risée du royaume !


Derrière ce petit groupe, sans que personne ne le remarqua, un esprit observa la scène d’un air sérieux. C’était Cassidy Peyton, une fillette de onze ans, aux cheveux châtain cendré qui tombaient sur ses épaules, vêtue d’une ample chemise blanche, de pantalons blancs et d’espadrilles blanches. Elle n’était pas un esprit ordinaire, mais un Lumineux, c’est-à-dire qu’elle était une enfant qui avait passé dans la Lumière et qui avait la permission de revenir sur Terre(21).


Greta s’avança vers le roi et dit : 

— Par ailleurs, Votre Altesse Royale, il est absolument indigne d’un prince royal d’épouser une telle femme qui ne lui arrive même pas à la cheville…

— Mais je l’aime et c’est ce qui compte, intervint Jim, ses yeux bleus lançant des éclairs de colère.

— Tu oublies, mon fils, que je dois donner mon consentement à ton mariage, précisa son père d’une voix sévère. Car je te rappelle que tu es mon héritier à ma mort ! Et tu sais qu’il est hors de question que tu te maries à une fille aux origines inconnues ! 

Jim soupira mais n’osa rien ajouter.

Greta s’approcha d’Aiden et s’exclama : 

— Votre Altesse, il me semble plus approprié que votre fils, le prince, se marie à une princesse…

Elle continua d’une voix suppliante, en s’avançant vers lui :

— D’autant plus que je ne voudrais pas perdre ma protégée, car elle est une fille pour moi… Ça me briserait le cœur de la savoir loin de moi et dans un royaume inconnu…

Le roi, se méfiant des propos de la sorcière, recula de quelques pas. Comme elle s’avançait encore vers lui, il se rendit jusqu’à la fenêtre. Jim lâcha Melinda pour tendre sa main vers son père, sauf que celui-ci recula encore et la sorcière le poussa par-dessus la fenêtre. Le pauvre homme tomba raide mort sur les ronces qui se trouvaient en bas. 

Greta se retourna et poussa la jeune brunette rudement du côté opposé de la fenêtre et se dirigea vers le prince, qui s’était dégagé de la fenêtre, mais elle le saisit fermement, malgré qu’il essaya vainement de s’opposer, pour le jeter à son tour par-dessus la fenêtre. La brunette, impuissante, fit un mouvement des bras vers la fenêtre, et hurla : « Jim ! Non ! »

Avec un sourire carnassier au visage, la sorcière se retourna vers elle puis s’exclama :

— Voilà, ma Melinda, le sort qui attend ton bien-aimé ! 

Puis elle éclata d’un rire diabolique, qui fit frémir et pleurer la passeuse d’âmes.

La jeune femme pensa tristement en cachant son visage entre ses mains, appuyée contre le mur, raide comme une statue Ah ! Mon Dieu, mon cher Jim est mort ! Dans ce cas, mon échelle de cordons de soie est vaine ! Qu’ai-je fait pour avoir un destin si cruel ?



***



Le roi, dont l’âme fut sortie de son corps, regarda autour de lui. Il salua son fils aîné, qui affichait une mine inquiète. Jim, lui, sous le choc de la chute, sortit de son corps. Il remarqua qu’il se trouvait sur un autre corps, celui de son père. L’âme du prince soupira et murmura tristement « Père, je ne voulais pas que tu meures… Je suis vraiment désolé… Tu sais que je ne l’ai pas fait exprès… que… »

Une voix familière à sa droite l’interrompit :

— Bien sûr, Jim, que j’ai compris que tu voulais me sauver d’une mort certaine !

Intrigué, il regarda rapidement vers sa droite pour remarquer que Aiden était là.

Le prince balbutia : 

— Père ?

— Oui, fils ! dit-il avec un faible sourire aux lèvres.

Un autre esprit apparut à la gauche de Jim : son frère aîné.

Daniel ajouta :

— Jim, s’il te plaît, reviens vite dans ton corps avant qu’il ne soit trop tard !

— Pour Melinda ! Oui ! répliqua l’interpellé, lueur d’inquiétude dans ses yeux bleus.

— Et pour ta pauvre mère qui est sans doute la plus triste dans toute cette histoire, ajouta leur père.

Le roi, en joignant ses mains devant lui, supplia son benjamin en ces termes :

— Jim, tu es notre seul et dernier espoir pour que la lignée des Clancy ne s’éteigne pas…


L’interpellé ne se fit pas répéter deux fois. Il revint aussitôt réanimer son corps au moment où les deux gardes, qui étaient sortis du carrosse, se saisirent de celui-ci.

Jim serra les dents pour ne pas crier de douleur, en raison du choc de la chute. Il ferma les yeux pour se reposer.

Les gardes le déposèrent sur l’un des sièges arrière du carrosse et à côté de lui, le corps de son défunt père. Ils pensèrent qu'est-ce qui a bien pu se passer là-haut pour qu’ils se jettent ainsi par la fenêtre ?

Au moment où l’un d’eux monta le cheval de Jim, Greta arriva devant eux et les interpella : 

— Messieurs ! Comment va le roi ? Et le prince ?

Le garde demanda d’un air sérieux :

— Madame, pouvez-vous nous expliquer ce qui s’était passé ? Avec un mort et un blessé en mauvais état…

Donc, le prince n’est pas mort ? pensa-elle, étonnée. Je dois m’en assurer en lui donnant un petit sort supplémentaire…

— Oui, bien sûr, car j’ai vu de mes yeux vu ! dit Greta, les mains sur sa poitrine. Votre prince et votre roi se sont battus près de la fenêtre, car le roi ne voulait pas qu’il marie ma protégée. Le prince a alors poussé le roi par-dessus la fenêtre, sauf que celui-ci lui a saisi fermement les bras, l’entraînant dans sa chute…

— Merci de votre témoignage, Madame…

— Madame Greta Hanson.

Elle fit une courte pause puis ajouta d’une voix triste :

— Avant que vous partez, permettez-moi de rassurer ma protégée, ma pauvre Melinda, qui est sans doute terrorisée par la scène du rixe entre père et fils… 

— Oui, bien sûr, Madame Hanson, répliqua poliment le garde en faisant un geste de la main.

— Pourrais-je aussi voir le prince ?

Pour lui jeter le sort décisif afin qu’il soit défunt d’ici quelques jours, pensa-t-elle.

— Pourquoi ? demanda-t-il, les sourcils levés.

— Pour l’enduire d’une pommade qui accéléra sa guérison.

— Vous êtes herboriste ?

— Oui, il faut l’y être pour pouvoir survivre dans ce coin du pays…

— Allez-y, mais faites vite, Madame !

L’autre garde ajouta :

— Chaque minute est importante !

La sorcière se rendit d’un pas rapide dans la tour, car Melinda défit rapidement ses nattes lorsqu’elle l’appela. Elle se rendit dans son laboratoire privé, au sous-sol de la tour, sortit un vieux grimoire et prépara un terrible sort qu’elle plaça dans une petite fiole. La sorcière revint vers le carrosse et elle enduisit les mains de Jim du sort. 


Le carrosse revint en vitesse dans le royaume, où le prince fut confié aux mains des meilleurs médecins. Les gardes informèrent aussitôt la reine de la situation. La période de deuil fut proclamée dans tout le royaume. Faith Clancy, après quarante jours, attendait, inquiète, que son benjamin se rétablisse. En raison de l’effet du sort de Greta Hanson, l’état du blessé fut critique pendant un mois. Il était entre la vie et la mort, mais il demeura parmi les vivants en raison du soutien de Cassidy Peyton et de son petit groupe de Lumineux. Jim se rétablit après deux mois.



Une fois sorti de sa chambre, le prince vit sa mère, les traits tendus, lui annoncer qu’il était le successeur, car son père était défunt par sa faute.

Étonné, Jim lui expliqua alors ce qui s’était vraiment passé dans la tour. 

Faith le crût, car elle savait que son fils était honnête. Elle lui proposa de devenir roi à la place du défunt. Jim répliqua :

— Mère, pas de couronnement avant de trouver une épouse !

La reine-mère le bénit et il partit sur son cheval. Jim prit la route vers la forêt. 


Au moment où il allait arrêter sa monture près de la tour, car il croyait que sa bien-aimée était encore là, un esprit apparut devant le cheval : Cassidy. La fillette murmura en caressant doucement sa tête : « Gentil cheval, tu vas me suivre. Je sais où se trouve Melinda. Mon ami Carl l’Observateur(22) me l’a dit. » 

La bête, comme si elle comprit ses paroles, agita doucement ses oreilles.

Jim, étonné de son comportement — car il ne vit point le Lumineux — flatta doucement le cou de sa monture et murmura :

« S’il te plaît, je veux aller voir ma Melinda, qui doit s’inquiéter beaucoup pour moi… Et elle est là, dans la tour que nous voyons… »

Pour toute réponse, le cheval se cabra, manquant peu de renverser son cavalier s’il ne s’était pas fermement tenu au guide du harnais.

Cassidy s’avança, suivie par le cheval que Jim peinait à diriger.

Mais enfin, pensa-t-il avec humour, on dirait le monde à l’envers ! Au lieu que ce soit moi qui dirige mon cheval, c’est lui qui m’entraîne je ne sais où…


***


Au cours des journées suivantes, depuis la chute de Jim, Melinda était très triste, voire mélancolique. Elle mangeait peu et espérait au moins voir l’âme de son bien-aimé, car elle était convaincue qu’il était défunt. Elle ne chantait plus et ne regardait plus par la fenêtre, car les souvenirs de Greta poussant Jim par-dessus la fenêtre lui revenaient de temps en temps. De plus, elle dormait peu, car l’absence du prince la faisait pleurer à chaudes larmes.




Trois mois plus tard, Melinda Gordon remarqua que son ventre s’était arrondi. 

Elle pensa, contente : Enfin ! Que Dieu soit loué ! C’est vrai que je n’ai pas eu de règles depuis quelques semaines… Ça s’explique ! Jim serait content d’être père ! 

À cette pensée joyeuse en succéda une autre : Dommage qu’il ne soit plus parmi les vivants… Et c’est sûr alors que je peux dire au revoir le mariage… Personne ne voudrait de moi avec un enfant… Mais au moins, c’est le dernier cadeau que j’ai pu avoir de Jim…

Elle soupira. Mais comment camoufler ma grossesse à ma vieille mère-marraine Greta ? Hmm… En la faisant passer pour une prise de poids ! C’est une bonne idée !


La vieille Greta remarqua le ventre arrondi de sa protégée. Et elle entra dans une fureur.

Quoi ? Melinda enceinte sans doute de trois mois ? Mais avec qui ? Sans doute avec son prince !? Arh !


Un jour, lorsque sa colère était passée, la sorcière demanda d’une voix mielleuse :

— Ma chère Melinda, qu’est-ce qui se passe ? Serais-tu enceinte ?

La jeune passeuse d’âmes baissa la tête, en pensant Je suis fichue ! Mais je ne peux pas trahir Jim ! La vieille mère-marraine Greta est tellement méchante qu’elle serait capable de me faire avorter… Ah non ! Je voudrais surtout ne pas perdre ce qui me reste de mon cher Jim… Seigneur, aide-nous !

Elle releva la tête et répondit : 

— Non, pas du tout… C’est sans doute une prise de poids…

Greta s’exclama d’une voix courroucée :

— Menteuse ! Tu es enceinte ! C’est tellement évident ! 

Melinda sursauta malgré elle, en plaçant ses mains sur son ventre, en pensant Merde ! À quoi dois-je m’attendre ? Seigneur, protège-moi ! 

La sorcière continua avec un sourire carnassier : 

— Alors, dis-moi avec qui ? Avec ton défunt prince ?

Melinda demeura silencieuse et la fixa avec inquiétude, les larmes aux yeux en pensant aux souvenirs de la mort de son bien-aimé.

La sorcière continua, rouge de colère, en agitant ses mains vers elle :

— Ah ! Scélérate ! Moi qui croyais t’avoir isolée du monde entier, et tu m’as pourtant flouée ! Une telle attitude mérite une punition exemplaire !

Elle sortit aussitôt. Greta revint le soir lui apporter son repas du soir, en prenant soin de préparer une décoction de pin et de menthe, afin d’être certaine de provoquer un avortement. Cassidy, qui avait vu les préparatifs, renversa la tasse au moment où Melinda la prit entre ses mains tremblantes.

La future jeune mère pensa, en fronçant des sourcils, qu'il doit y avoir sans doute un esprit… 

Elle regarda autour d’elle, mais comme elle ne voyait pas le Lumineux. 

Pourtant, je ne vois personne… Et pourquoi ? A moins que ce soit Jim ? Peut-être suis-je trop affectée par… sa mort pour que… je le vois…

Elle cligna des yeux pour réprimer en vain des larmes et soupira.

Moi qui pensais que tu étais… parti dans la Lumière ! Pourquoi te fais-tu invisible ? Pourquoi restes-tu encore parmi… les vivants ? Jim, veux-tu me répondre ?...

Comme Cassidy ne répondit pas, Melinda pensa Ah, Mon Dieu, aide-moi !


Le soir, Melinda eut dans un rêve la réponse à ses questions. Cassidy lui montra la cérémonie et le rituel de Greta lorsqu’elle avait préparé le breuvage abortif. Elle lui conseille de vider par-dessus la fenêtre les breuvages préparés par sa mère-marraine.


À son réveil, la brunette décida de suivre ce conseil. Par ailleurs, Cassidy et son groupe de Lumineux amenèrent à la tour de l’eau d’une source pure, parfois une tasse d’infusion de gingembre pour calmer les nausées de la femme enceinte.



Quelques jours plus tard, remarquant que Melinda n’avait pas fait de fausse-couche, la sorcière la transporta sur son balai magique, à Grandview, une petite ville perdue du royaume. 



Le lendemain, la jeune femme se réveilla, étonnée d’être allongée sur un banc dans un parc inconnu. Elle décida de s’établir dans cette ville, ne sachant pas où aller. Melinda parvint à trouver un petit appartement. Évidemment, l’arrivée de cette belle inconnue ne manqua pas d’être l’objet de rumeurs : une jeune femme enceinte et non-mariée. Sans doute qu’elle est une fille de basse condition, disaient les uns. À moins qu’elle soit une sorcière qui avait tué son amant, disaient les autres. D’ailleurs, ajoutaient d’autres, qui sait qui est le père de son enfant ? Un médecin ? Un marchand ? Peut-être qu’elle ne le sait pas elle-même, disaient les plus cyniques. D’autant plus qu’elle ne se présente qu’avec son prénom, ce qui est la preuve de sa fuite. De qui se cache-t-elle ? D’un père trop strict ? De son amant ? Mais pourquoi ? Elle a sans doute peur d’être emmurée.

Ces rumeurs ne dissuadèrent pas pour autant les coureurs de jupons invétérés de la ville de s’approcher de la brunette. Parmi eux, Samuel Lucas, un architecte, était particulièrement tenace, d’autant plus plus qu’il avait l’aide des philtres magiques de la sorcière Greta Hanson. Même si la grossesse de Melinda était de plus en plus évidente, il lui faisait la cour et lui écrivait des lettres d’amour. Elle ne lisait même pas les lettres, car elle voulait demeurer fidèle à la mémoire de Jim et n’était guère intéressée à trouver un autre homme dans sa vie. Son absence ne faisait que lui peser de plus en plus lourd, tout comme son futur enfant à naître. Melinda, fidèle à elle-même, aida les esprits errants qu’elle rencontrait au marché ou dans le parc. Aussi, elle décida d’entreprendre des démarches pour ouvrir une boutique d’antiquités, afin de s’assurer une source de revenu. La jeune future mère passa ainsi trois mois dans l’attente de l’approbation du maire de la ville. Mais toutes ses lettres demeuraient sans réponse, ce qui l’exaspéra beaucoup.


***



Pendant ce temps-là, Jim, toujours sur son cheval qui suivait en galop Cassidy, traversait maintes forêts. Il se nourrissait de quelques baies cueillies au passage ou encore de quelques écureuils attrapés dans un piège improvisé qu’il cuisait sur un feu. Il arriva ainsi jusqu’à Grandview, une petite ville dirigée par Alexander Milio(23). Le prince laissa son cheval à l’entrée et se promena dans la ville, dans l’espoir d’apercevoir sa chère Melinda. Il déambula dans les rues, puis dans le parc, mais sans la voir. 


Un jour, dans le marché de la petite ville, Jim Clancy aperçut une brunette vêtue d’une très ample robe brune. Étant donné le gros ventre qu’elle avait, elle était en fin de grossesse. En l’observant attentivement de profil, il pensa Mais c’est Mel ! Quoi ?! Est-elle enceinte ? Suis-je le père de son enfant ? La dernière fois que je l’ai vu… c’était… Il y a sept ou huit mois… Dans ce cas, oui, je suis père ! Oh, Dieu que je suis comblé !


Le cœur cognant très fort dans sa poitrine, le prince s’approcha d’elle, alors qu’elle regardait les produits sur un étalage, et dit : 

— Mel, que fais-tu ici ?

La jeune femme, rouge comme une pivoine, pensa Jim ? Enfin tu t’es manifesté ! Voilà huit mois que tu me manques…

Elle se retourna pour constater à sa grande surprise que son bien-aimé était vivant.

Melinda le regarda de la tête aux pieds puis balbutia, les yeux écarquillés de surprise :

— Jim ?

— On dirait que tu doutes que je suis vivant ? plaisanta-il. Pourtant je suis bien devant toi en chair et en os…

De joie, elle pleura et sauta à son cou autant que son état lui permettait. Il l’enlaça puis le prit tendrement sa main gauche qu’il caressa doucement. 

Tous les deux demeurèrent silencieux pendant plusieurs minutes en se regardant ainsi droit dans les yeux, comme pour s’assurer de bien être en présence de l’autre. Ils avaient l’impression que le temps s’était tout à coup arrêté. Ils ne prêtèrent plus attention aux autres gens qui les entourèrent : là des marchands qui regardaient avec curiosité leurs retrouvailles ; près d’un étalage, des passants qui s'attroupaient pour chuchoter entre eux sur ces deux nouveaux.


Melinda murmura d’une voix cassée : 

— Mon amour… Mon Jim…

— Oui… 

Il fit une courte pause puis ajouta :

— Comment es-tu venue ici ?

Remarquant du coin de l’œil les badauds indiscrets qui passèrent derrière son bien-aimé en tournant la tête vers eux, elle murmura à son oreille : 

— Je te l’expliquerai plus tard, si tu veux venir avec moi… 

— Avec plaisir ! s’exclama-t-il d’une voix enjouée.

— Je viens de faire les commissions…, dit-elle en lâchant sa main.

— Fais attention à toi, ma chérie, je vais les apporter… murmura Jim d’une voix chaleureuse.


Et voilà Melinda et Jim qui se rendirent jusqu’à l’immeuble de l’appartement où la jeune femme vivait. Les passants qu’ils croisèrent sur leur chemin ne manquèrent pas de les regarder indiscrètement jusqu’à les perdre de vue. Certains chuchotaient entre eux « La sorcière s’est trouvé un nouvel amant… » ; « Sans doute pour pouvoir se nourrir, elle et son enfant à naître », ajoutaient d’autres ; « On dirait qu’elle s’est trouvé un prince, vu ses vêtements… » faisaient remarquer les plus fins observateurs ; « Que Dieu protège le jeune homme ! » murmuraient les plus pieux.


Devant la porte principale de l’immeuble, Samuel Lucas, un jeune homme aux cheveux châtains presque blonds et aux yeux bleus, regarda d’un air intéressé la brunette. Cette dernière soupira et elle dit à Jim à quel point l’architecte l’ennuyait avec la cour qu’il lui faisait depuis son arrivée dans la ville. 

Le prince, vert de jalousie, déposa brusquement les deux sacs de commissions qu’il tenait dans chaque main et s’avança vers le prétendant en disant d’une voix forte :

— Monsieur Samuel Lucas, Veuillez immédiatement arrêter de courtiser ma femme !

— Pourtant, elle n’a pas de bague… commenta, étonné, l’interpellé.

— Mais nous nous marierons ! Et elle est mienne !

— Elle ne m’a rien dit…

— C’est faux ! intervint Melinda, les larmes aux yeux, en faisant un grand geste des mains vers eux.

Les deux hommes tournèrent leurs têtes vers elle, surpris de son commentaire.

Samuel commença à paniquer. Merde ! pensa-t-il. Comment sortir de cette impasse ?

Jim répliqua :

— Mel, je t’en prie, ne te mêles pas à notre histoire… Laisse-nous régler entre hommes…

Il se retourna vers l’architecte et dit d’un ton sévère, les yeux lançant des éclairs : 

— Monsieur, si je vous revoie une fois de plus près de ma femme, vous tâterez mon épée !

Le prince sortit à moitié son épée de son fourreau. Melinda tourna dos aux hommes en poussant un cri d’horreur. Par précaution, elle cacha ses yeux avec ses mains tremblantes.

Samuel comprit tout le sérieux de la situation. Des sueurs froides coulèrent dans son dos. Il déglutit rapidement sa salive. Les pupilles dilatées par la peur, les mains tremblantes, il balbutia :

— C’est correct, Monsieur…

— Son Altesse Royale Jim Clancy, prince héritier du Royaume de Centerville, corrigea son interlocuteur en rangeant son épée. 

— J’ai compris…

L’architecte, de peur, marcha à reculons en longeant l’immeuble et, une fois dans le coin, il se retourna et courut aussi vite que ses jambes le permettaient. Jim s’approcha de la face latérale, pour s’assurer qu’il était parti. 


Rassuré, il revint vers Melinda et dit d’une voix douce, lueur de joie dans ses yeux :

— Tout est beau, Mel… Ton prétendant est parti pour de bon.

— Tu ne l’as pas… tué ? demanda-t-elle en se retournant vers Jim, qui saisit ses mains entre les siennes.

— Non, ma chérie, je l’ai seulement effrayé, pour être sûr qu’il ne reviendra plus jamais te déranger.

— En tous cas, tu m’as fait peur… murmura-t-elle.

— Désolé…

Il lui fit un baise-main puis murmura :

— Alors, ma chérie, veux-tu me conduire jusqu’à ton appartement ?

Melinda balbutia : 

— Oui, oui… 

Et ils se rendirent dans l’appartement de la brunette, où le jeune homme l’aida à ranger la plupart des achats.


Une fois que tout était bien rangé, Jim rejoignit sa bien-aimée, confortablement assise sur un fauteuil, et s’assit sur un canapé en face d’elle.

Il demanda :

— Alors, Mel, que fais-tu ici ? Pourquoi ne m’as-tu pas dit…

— … que j’étais enceinte ? termina l’interpellée en un souffle, les mains sur son ventre.

Elle baissa les yeux, demeura silencieuse pendant plusieurs secondes puis reprit d’une petite voix :

— Parce que je te croyais… mort…

À nouveau, un silence planait entre eux.

Jim pensa tristement, en fixant sa future épouse, les yeux dans le vague, Ça explique sa réaction au marché… Je la plains de penser que je suis mort de la chute…

Il soupira, cligna des yeux pour se ressaisir et murmura d’une voix rauque aux souvenirs de ses mois de réhabilitation :

— J’ai été longtemps en rétablissement de la chute… Mais j’ai survécu…, termina-t-il avec un bref sourire.

Il s’éclaircit la gorge puis reprit d’une voix émue, les larmes aux yeux :

— Une fois rétabli, j’ai appris… de ma mère… que mon père… est défunt…

— Oh, mon Dieu ! s’exclama Melinda, qui commença à pleurer.

— De sorte que… je…je succède… à mon père…

Je comprends que tu ne veux pas une telle position sans moi… pensa-t-elle en séchant ses larmes.

Le prince la regarda droit dans les yeux et ajouta :

— Seulement, je ne voulais pas être couronné avant de t’avoir trouvé…

— Comme tu es adorable !

— Surtout maintenant que nous serons bientôt parents…. 

Il s’interrompit lui-même puis demanda d’une voix douce :

— Avant de penser au mariage, que je compte improviser…

Il fit un clin d’œil complice puis ajouta :

— Je voudrais savoir ce que tu fais ici… Il me semblait que tu étais dans la tour avec ta méchante sorcière… 

— Oui, mais voilà… cinq ou six mois, je ne sais plus exactement…

Petit sourire aux lèvres, elle murmura :

— Désolée, je n’ai plus la conscience du temps qui passe…

— Ce n’est pas grave… la rassura Jim de sa voix douce.

— Depuis ce temps-là, je suis dans cette petite ville… Je me suis réveillée un matin allongée sur un banc dans le parc…

Melinda soupira.

— Mais avant, lorsque j’ai compris que j’étais enceinte…

— Pourquoi ne pas me l’avoir dit ? Tu auras pu dépêcher un messager… commenta-t-il.

— Dans la tour, il n’y a que ma mère-marraine, répliqua-t-elle. Et par ailleurs, elle a aussi compris dans quel état je me trouvais… De plus, j’étais…

Elle termina d’une voix brisée :

— … certaine que… tu… n’as pas… survécu à la chute…

La jeune femme éclata en sanglot.

Jim, gêné de la peine qu’elle ressentait, s’approcha d’elle, derrière le fauteuil pour déposer ses mains sur ses épaules pour la rassurer. Il demeura dans cette position le temps que Melinda se calma.

Le prince, penché au-dessus d’elle et murmura d’une voix douce :

— Tu vois bien que malgré tous les coups bas de ta marraine, je suis vivant…

Melinda approuva positivement.

— Dans ce cas, nous pouvons nous marier…

— Et tes parents ? balbutia-elle.

— Peu m’importe ! L’important, c’est toi, ma tendre moitié ! s’exclama-t-il en l’enlaçant par les épaules en un geste protecteur.

Émue, des larmes de joie perlèrent les yeux de Melinda.

— S’il te plaît, ne pleure pas…

Elle s’empressa de sécher ses larmes.

— Mel, on se marie demain, annonça-t-il en arrivant face à elle.

— Comment ? murmura-t-elle, les sourcils levés d’étonnement.

Pourtant, nous n’avons rien organisé… Et un mariage ne s’improvise pas du jour au lendemain, pensa-t-elle.

— Simple, répondit Jim d’un air assuré, lueur de joie quasi enfantine dans ses yeux clairs. Nous achèterons aujourd’hui les bagues et ta robe de mariée…

— Une robe ? fit-elle, dubitative. Tu n’as pas vu de quoi j’ai l’air avec ce gros ventre ? Je doute que….

Il coupa court :

— Que je ne t’entends pas te plaindre ! Je te trouverai une robe pour toi, un point c’est tout ! Le mariage, ce n’est qu’une fois dans ta vie !

Jim fit une courte pause puis reprit d’une voix douce :

— Les témoins, je les trouve aujourd’hui, ainsi que le prêtre… Je détermine l’endroit et le tour est joué !

— Tu es génial ! s’exclama d’un air enjoué Melinda en écartant ses bras pour enlacer son fiancé.

Il l’aida à se lever doucement, puis l’enlaça tendrement. 


Et ils partirent dans une boutique spécialisée pour trouver une robe à Melinda puis dans une bijouterie pour le choix des alliances. Après, Jim alla voir un prêtre pour lui dire d’être présent demain au marché de la ville. Chemin faisant, le fiancé trouva deux témoins, à savoir Delia Banks, une agente immobilière, et Eli James, un professeur de philosophie et de psychologie à l’université locale.


Le lendemain soir, comme convenu, eut lieu le mariage princier le plus discret de toute l’Histoire. Jim, dans son complet blanc, et Melinda, dans sa belle robe blanche, échangèrent leurs anneaux en présence du prêtre et de leurs deux témoins, à l’entrée du marché, qui était à cette heure-là vide. Mais ils n’étaient pas tout à fait seuls : Cassidy Peyton et ses amis les Lumineux étaient derrière le couple et les témoins, et lancèrent des bénédictions aux nouveaux mariés. À la fin de la cérémonie, les esprits disparurent.


Le lendemain de leur mariage, Jim Clancy décida d’entreprendre des études en médecine, question de pouvoir exercer un métier socialement acceptable dans la ville de Grandview. Aussi, il encouragea sa femme à ouvrir sa propre boutique d’antiquités, The Same It Never Was Antiques, afin d’aider les différents esprits rattachés aux anciens objets. Cette fois, Melinda Clancy obtint enfin une réponse positive. Entre-temps, Aiden et Daniel Clancy partirent dans la Lumière, heureux que Jim fut marié à une femme qui l’aime et qui s’occupe bien de lui.



Un mois après leur mariage, Melinda accoucha de jumeaux, un garçon prénommé Aiden, et une fille, prénommée Maryann. La petite famille vivait dans une maison que Jim avait achetée peu après leurs noces, afin que leurs enfants aient de la place pour jouer. Melinda alternait son temps entre leurs enfants, sa boutique et l’aide aux différents esprits errants. Jim, lui, travaillait comme médecin. Évidemment, ils n’étaient point épargnés des rumeurs, sauf qu’ils les ignoraient. Certains disaient que la sorcière s’était trouvé un prince devenu médecin, parce qu’elle dépensait beaucoup d’argent pour être belle. D’autres disaient que le prince-médecin servait à la sorcière pour lui éviter d’être une mère monoparentale et acceptait comme les siens des enfants d’un autre… Après, que personne ne notait la ressemblance de Maryann avec Jim, ce n’était qu’un détail. Jim, lui, ne doutait pas qu’il était le père.


La petite famille vivait ainsi à Grandview pendant cinq ans. Le prince proposa alors à sa femme de revenir au Royaume de Centerville, qui était restée depuis la mort de son père sans roi. Il lui affirma être prêt pour le couronnement, maintenant qu’il était marié et père de famille. Melinda accepta, car, dit-elle, mon rôle est de suivre son époux. Jim loua une voiture et ils quittèrent définitivement Grandview. Ils arrivèrent directement au palais des Clancy, où les gardes les accueillirent avec respect. Le prince héritier se présenta et ils le laissèrent entrer. Sa mère, très surprise de le voir, pleura de joie, car elle le croyait mort. 

Dans un entretien privé, la reine mère apprit que son fils était marié et père. D’ailleurs, il présenta sa femme et ses enfants à Faith. Cette nouvelle réjouit cette dernière, car elle avait pensé depuis un certain temps que la lignée des Clancy s'éteindrait inexorablement.


Entre-temps, la sorcière Greta Hanson mourut, jetée par ses Ombres, en bas des escaliers secrets qui menaient jusqu’au sous-sol de la tour, car elle n’avait pas réussi à garder Melinda auprès d’elle. Étant un esprit errant, elle hantait la tour, se promenant de haut en bas, sans but, dans l’attente de l’arrivée d’un vivant pour se manifester plus bruyamment.


Deux mois après le retour de Jim avait lieu le couronnement, ce qui fut annoncé dans tout le royaume. Même les villes et villages des royaumes limitrophes savaient la nouvelle. Thomas et Elizabeth Gordon, curieux, décidèrent de venir au Royaume de Centerville pour y assister. Lorsqu’ils reconnurent leur fille, leur chère Melinda, qu’ils croyaient morte, ou pire, devenue une redoutable sorcière, ils étaient les parents les plus heureux du monde. Après la cérémonie, le juge et la fleuriste se présentèrent à Jim Clancy, qui était étonné. S’ensuivit alors une conversation au cours de laquelle Thomas et Elizabeth expliquèrent à leur fille et à leur gendre la vérité sur l’enlèvement de Melinda par la sorcière Greta Hanson. Et tous vécurent heureux jusqu’à la fin de leurs jours(24).




————————



(1) Cette description est conforme aux personnages respectifs de Ghost Whisperer. Seulement, nous considérons que Elizabeth accepte son don, ce qui n’est pas le cas dans la série.


(2) Greta Hanson est l’esprit d’une pseudo-voyante qui retenait dans sa maison des esprits des enfants afin de ne pas être emportées par les Ombres. Elle n’apparaît que dans le seizième épisode de la cinquième saison de Ghost Whisperer, Old Sins Cast Long Shadows — La Maison hantée. C’est seulement pour la commodité du conte que nous faisons d’elle une sorcière et qu’elle est vivante. Par ailleurs, les Ombres sont des esprits informes, comme des fumées noires, qui influencent les vivants lorsqu’il y a culpabilité et autres mauvaises actions.


(3) Nous avons ajouté la pensée et la réponse de Thomas, car dans le conte, il est seulement mentionné que le mari accepta sans discuter.


(4) Petite entorse par rapport à la généalogie de Melinda, en la présentant comme la fille d’Elizabeth et de Thomas Gordon, alors que celui-ci n’est que son beau-père. Mais c’est par nécessité pour le conte que nous devons considérer que Thomas est son père.


(5) Nous avons ajouté ces phrases pour rendre compte de la situation de notre Melinda-Raiponce, à savoir d’être l’enfant unique du couple Gordon. Mais aussi de l’éloignement de ses parents par rapport à elle.


(6) Bien que nous respectons la transmission de génération en génération du don de Melinda, l’aspect autodidacte est absolument contraire à la série. La protagoniste de Ghost Whisperer a appris à gérer son don avec le soutien de sa grand-mère maternelle. La transposition dans le conte nous oblige à la faire autodidacte, puisque la sorcière ne les voit pas.


(7) Dans le conte, les cheveux de Raiponce sont comparés à des fils d’or, ce qui signifie qu’elle était blonde. Nous avons changé la comparaison pour mieux correspondre avec la description de Melinda, qui a les cheveux bruns. Or, un métal de cette couleur est le cuivre.


(8) Nous avons converti les 20 aunes du conte en mètres, ce qui donne 22,86 m, mais nous arrondissons à 23.


(9) Nous avons résumé d’une manière très succincte ce que fait Melinda Gordon dans Ghost Whisperer.


(10) Dans Ghost Whisperer, Jim Clancy est le mari de Melinda. Bien sûr qu’il n’est pas qu’un prince, mais un ambulancier.


(11) Nous avons ajouté la dernière phrase, en raison du fait que Melinda est passeuse d’âmes. L’âge de la femme est précisé pour concorder avec son âge de mariage dans la série américaine.


(12) Nous avons ajouté la dernière phrase du prince, qui est absente du conte, pour rendre compte du fait qu’il est charmé par la voix de la jeune femme.


(13) Centerville est le nom de l’une des villes aux environs de Grandview dans la série Ghost Whisperer. Nous en faisons un royaume pour la cause du conte. En ce qui concerne les parents de Jim, nous respectons la série américaine sur ce point.


(14) Nous avons développé cette partie du conte, qui n’est résumée qu’en deux phrases, pour mieux rendre compte du premier échange entre Melinda et Jim. En plus de souligner leur amour réciproque, afin de respecter la série américaine sur ce point.


(15) Nous avons un peu modifié la pensée de Raiponce, pour mieux cadrer avec notre réécriture. Par ailleurs, cette pensée de la jeune fille figure dès leur première rencontre, ce que nous avons un peu décalé, par réalisme.


(16) Nous avons inventé la cause du décès du frère de Jim.


(17) Nous avons ajouté ce dialogue pour rendre compte du soutien inconditionnel de Jim pour Melinda dans Ghost Whisperer. Et la proposition de mariage est décalée par rapport au conte, car il n’y a aucune information concernant la durée de la relation de Raiponce avec le prince.


(18) Cette phrase est reprise du conte.


(19) Nous avons ajouté la réaction des parents de Jim, par réalisme.


(20) Allusion à la découverte du vrai père de Melinda au cours des dix-septième et dix-huitièmes épisodes de la troisième saison de Ghost Whisperer, Stranglehold — Le Visage derrière le masque - première partie ; Pater Familias — Le Visage derrière le masque - deuxième partie. En fait, dans la série, elle apprendra que Paul Eastman était son père, l’homme auquel sa mère était fiancée et enceinte. Sauf qu’il était en prison car faussement accusé de la mort d’un petit garçon. Et elle était alors en contact avec Thomas Gordon, le procureur adjoint qui s’occupait du cas de Paul. Les deux se sont rapprochés puis mariés. Elizabeth avait caché l’identité de son vrai père à sa fille. Seulement, nous avons attribué de tels propos diffamatoires à la sorcière, et non pas que Melinda soit réellement née d’une union extra-conjugale.


(21) Cassidy Peyton est un Lumineux à la fin de la cinquième saison de Ghost Whisperer. Mais la première fois que Melinda la rencontre, soit au cours du seizième épisode de la cinquième saison, Old Sins Cast Long Shadows — La Maison hantée, Cassidy n’était qu’un simple esprit errant qui avait peur de Greta Hanson. C’est seulement pour notre réécriture que nous faisons directement d’elle un Lumineux. Par ailleurs, la description que nous en donnons est conforme à la série, à l’exception de son âge, car elle n'avait que huit ans au moment de sa mort. Pour la cause du conte, nous l’avons vieilli.


(22) Dans la série, Carl l’Observateur, de son vrai nom Carl Sessick, est un Observateur familier à Melinda Gordon vers la fin de la quatrième saison puis tout au long de la cinquième saison.


(23) Alexander Milio est le maire de Grandview dans la série américaine.


(24) Changement par rapport au conte, dans lequel la sorcière surprend Raiponce qui lui demande pourquoi elle pesait si lourd lorsqu’elle montait, alors que le prince se hissait rapidement en haut. Fâchée, la sorcière coupa les cheveux de la jeune femme puis la déposa dans une solitude désertique, où elle vécut misérablement. Lorsque le prince arriva dans la tour, il fut surpris de trouver en face de lui la sorcière. Cette dernière lui dit que Raiponce n’est plus ici et qu’il ne devra plus jamais la voir. Fou de douleur, le prince se jeta par la fenêtre et tomba sur les ronces, ce qui lui creva les yeux. Devenu aveugle, il vécut dans une grande pauvreté dans la forêt, marchant ainsi à tâtons. Il se rendit jusqu’à l’endroit désertique où vivaient Raiponce et les deux jumeaux qu’elle avait accouché, un garçon et une fille. Le prince la reconnut à sa voix ; elle le reconnut et lui sauta au cou en pleurant. Deux de ses larmes tombèrent sur ses yeux et il recouvrit la vue. Le prince ramena sa bien-aimée dans son royaume et ils vécurent heureux pendant de très longues années.

Nous avons modifié ce qui arrive à Jim et à Melinda afin de reprendre dans les grandes lignes les principaux événements qui surviennent dans les quatrième et cinquième saisons de Ghost Whisperer. Nous reprenons aussi la trame générale de la série : le couple vit à Grandview et Melinda est la propriétaire d’une boutique d’antiquités, tandis que Jim est un ambulancier qui devient plus tard médecin. Et ils ont un fils prénommé Aiden. C’est en raison du conte que nous leur ajoutons une fille. Aussi, nous ne considérons pas que l’âme de Jim reprend vie dans le corps de Sam Lucas, mais que ce dernier est un personnage indépendant.



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