Love Ineffably

Chapitre 6 : Quand Crowley retrouve Aziraphale

3858 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 17/12/2023 19:00

Dining at the Ritz, we'll meet at nine

(One, two, three, four, five, six, seven, eight, nine o'clock) precisely

I will pay the bill, you taste the wine

Driving back in style, in my saloon, will do quite nicely

Just take me back to yours, that will be fine


Come on and get it

Ooh, love (there he goes again)

Ooh, lover boy (he's my good old-fashioned lover boy, ooh)

What're you doing tonight?

Hey, boy

Everything's all right, just hold on tight

That's because I'm a good old-(fashioned, fashioned) lover boy

Good Old-Fashioned Lover Boy, Queen


Crowley attendait la venue de son acolyte angélique, appuyé contre la portière de sa Bentley. Ils s'étaient téléphoné quelques minutes plus tôt et avaient convenu d'un rendez-vous dans un petit café à quelques rues de la librairie. Ses lunettes de soleil masquaient sa nervosité grandissante. L'air devenait de plus en plus irrespirable et il redoutait qu'Aziraphale ne croise la roule de Kelen. Après le départ de Shax, il était resté un long moment, les mains crispées sur son volant, pour tenter de remettre de l'ordre dans ce chaos. La voiture avait diffusé en continu des informations inquiétantes : une augmentation significative des températures – on annonçait même plus de vingt degrés du côté d'Aberdeen –, un pic d'érotisme avait été observé chez le couple de pandas du zoo de Londres et une brusque vague de crimes passionnels – quelle curieuse façon de nommer un meurtre pour en atténuer l'horreur ! – avait déferlé sur le pays : le dernier recensé étant celui commis par Mrs. Maloney qui avait assommé son époux à coups de gigot. Le démon avait fini par éteindre la radio lorsque celle-ci avait retranscrit dans une série de grésillements, l'ultimatum lancé par le président belliqueux à l'ennemi repoussant ses multiples propositions matrimoniales : la guerre ou la paix.


Crowley releva la tête et se mit à humer l'air où l'étrange odeur se faisait de plus en plus insistante et que Shax, dépourvue de toute sensibilité, n'avait pas ressentie. Il aperçut Aziraphale s'avançant vers lui de sa démarche sautillante. L'ange passa près de deux gamins s'affrontant à coups de pistolets à eau. Crowley le vit exécuter un petit geste discret vers le duo dont les armes fictives se changèrent en fleurs en plastique. Les deux morveux jetèrent un regard intrigué à leur nouveau jouet avant de commencer à s'invectiver, s'accusant mutuellement de ce très mauvais tour de passe-passe. Crowley ne put réprimer un rictus : depuis une certaine nuit de 1941, Aziraphale avait un « léger » contentieux avec les armes à feu. Il le vit tapoter la poche de son manteau – il faudrait bien plus que vingt-cinq petits degrés pour forcer l'ange à laisser tomber son vêtement –, avant de traverser la rue. Une voiture manqua de le renverser. Des insultes portées à la mère inexistante d'Aziraphale jaillirent de l'habitcale. L'ange se contenta d'esquisser son plus beau sourire ; le chauffard passa la tête par la fenêtre et lui souhaita une excellente journée.


Lorsqu'il fut face à lui, Crowley détailla son compagnon avec minutie, cherchant à discerner un quelconque changement, mais il était bien Aziraphale, avec son odeur si particulière... quoique l'odeur de son Eau de Cologne semblât bien plus prononcée. Il laissa glisser son regard sur son cou. Son nœud de papillon paraissait repassé avec plus de soin. Ses yeux remontèrent jusqu'à ses petites bouclettes angéliques mieux définies qu'à l'accoutumée.


– Tu promènes encore ces pauvres plantes ? s'enquit Aziraphale en jetant un coup d'œil à l'intérieur de la Bentley.

– Ouais, marmonna le démon, tout en faisant mine de s'intéresser aux deux morveux s'arrachant les cheveux, plutôt qu'à la silhouette de son compagnon occupé à flatter la croupe de sa voiture.


Crowley ne lui avait jamais révélé qu'il avait été chassé de son appartement. Il savait que l'ange n'aurait pas hésité à lui faire une place dans sa librairie, mais il s'y refusait par fierté, et surtout parce qu'ils étaient toujours surveillés par leurs deux camps. Il mettait toujours un point d'honneur à s'éclipser de l'ambassade céleste aux premières lumières de l'aube, afin d'éviter toute rencontre déplaisante. Ils avaient beau avoir été mis « hors service », il serait naïf de sa part de croire qu'ils étaient pour autant libres de leurs mouvements. Il tourna la tête vers Aziraphale adressant des petits signes amicaux à ses plantes vertes. Il devait se contenter de ces quelques miettes de liberté, même s'il lui était de plus en plus difficile de quitter la librairie sur la pointe des pieds et par une porte dérobée. L'ange se redressa et le démon fut frappé par l'intensité de son regard. Les yeux d'Aziraphale constituaient à eux seul, un plaisant mystère qu'il s'évertuait à déchiffrer depuis plus de six millénaires : il avait appris à en saisir toutes les tonalités et à les associer à une émotion en particulier ; ce matin-là, il était incapable de se décider. Il eut un frisson lorsqu'un souvenir lui revint en mémoire...


– On y va ? proposa l'ange en ouvrant la marche, j'ai une faim de tous les diables ! Enfin, se reprit-il, tu comprends ce que je veux dire...


Le démon acquiesça et maudit sa fâcheuse tendance à la dramatisation. Il s'était fourvoyé et les yeux de l'ange ne flambaient nullement de cette étincelle qui avait suffi, une certaine nuit, à lui faire perdre toute dignité. Crowley avait, semble-t-il, oublié le pouvoir que pouvait dissimuler un regard céleste. Lorsque J'avais donné vie à Mes anges, J'avais fait en sorte de placer toutes les nuances du ciel naissant dans leurs yeux, reproduisant à l'imperfection, les couleurs du premier regard – LE SIEN – sur lequel mes yeux encore neufs s'étaient posés. Au fil du temps, les yeux de Mes anges avaient fini par perdre de leur éclat et leurs prunelles étaient devenues aussi vides que les longues salles d'attente aux murs immaculés du Paradis. Rares étaient les anges qui étaient parvenus à conserver cette étincelle. Je Me demande souvent, lorsque la solitude devient trop insupportable et le manque de LUI intolérable si, chez LUI aussi, cette lueur finira par s'éteindre. Lors de nos rares rencontres à travers les âges et les méandres de l'Histoire, J'ai pu constater qu'en dépit de la haine L'animant, cette flamme bien que mourante est toujours là, cette flamme qui M'avait inspirée celle que J'avais insufflée dans les yeux de Mes anges.


Aziraphale et Crowley pénétrèrent dans le Neige Rouge, Blanche Pomme, peu animé à cette heure de la journée. Ils s'avancèrent dans le coquet café qu'Aziraphale aimait surtout pour ses nappes en dentelle et sa décoration rococo. Près d'un tableau représentant une femme tenant une pomme d'un rouge suspicieux, une radio d'aspect vintage diffusait cette musique pop dont Crowley avait une sainte horreur. Le démon s'apprêtait à remplacer la chanson par une plus à son goût mais Aziraphale l'en dissuada et tous deux se dirigèrent vers une table isolée, dissimulée derrière un pommier artificiel, tandis que George Michael proposait à son objet de désir de « lui montrer le Paradis ».


Crowley retira ses lunettes, Aziraphale ôta son manteau.


I watch your fingers working overtime (overtime)

I've got to thinking that they should be mine.


Le démon laissa tomber sa veste, l'ange fit sauter les boutons de son veston.

I'd love to see you naked, baby

I'd like to think that sometime, maybeTonight, if that's alright, yeah


Le serviteur du Diable déplia ses longues jambes, le soldat de Dieu écarta les siennes.

Hey, you're just too funky for me

I gotta get inside of you (won't let you go)I won't let you, no-no


Ils se penchèrent l'un vers l'autre, leurs mains se frôlèrent et leurs haleines s'entremêlèrent. Aziraphale darda un bout de langue qui n'avait rien d'angélique ; Crowley s'humecta les lèvres et dans un mouvement labial synchronisé, ils engagèrent la conversation. Ils échangèrent quelques banalités, sur le marché de Noël, la hausse des températures et cette guerre qui n'aurait sans doute pas lieu. Le regard de l'ange ne cessait d'aller et venir entre son compère et la petite assiette remplie de délicieux chocolats à la liqueur de pomme posée sur la table. Crowley remarqua son manège et poussa la nourriture tentatrice vers l'ange.


– Vraiment, protesta celui-ci sans grande conviction, ce n'est guère raisonnable.

– La raison est du côté du Paradis, mon ange.


Aziraphale ne put qu'acquiescer avant de s'emparer d'un chocolat, le plus petit pour moins culpabiliser, et le porta à ses lèvres. Il ferma les yeux pour mieux en déguster la saveur. Un peu de bave glissa le long de ses lèvres et vint se perdre au creux de son menton. Il croqua un deuxième morceau et laissa échapper un petit cri de contentement qui lui aurait à coup sûr, attiré les foudres des quelques ligues de vertu circulant actuellement dans Londres plongée en pleine frénésie licencieuse. Il acheva de manger son chocolat dans un délicieux bruit de succion laissant place à toute votre imagination et surtout, à celle du démon assis face à lui.


– Bon, reprit l'ange en se léchant le pouce, pourquoi m'as-tu contacté ?

Le démon se cala contre le dossier de sa chaise en ramenant ses jambes à lui.

– Attends ! s'écria Aziraphale avant qu'il ne puisse ouvrir la bouche. Il faut absolument que je raconte ! Ce matin, alors que je m'apprêtais à lire un Conte de Noël, tu savais que Charles Dickens collectionnait les timbres ? Il avait une collection tout à fait admirable ! Quel dommage qu'elle se soit perdue après son décès. Il me disait tout le temps : Mon vieil Aziraphale...

– Tu digresses, mon ange, l'interrompit son acolyte. Quand tu te lances dans de longues et interminables digressions, en ouvrant des parenthèses dans les parenthèses et en plaçant des tirets dans les tirets, c'est que tu me caches quelque chose.

– Je suis un ange ! Je ne peux pas mentir.


Crowley laissa échapper un ricanement qu'Aziraphale ne put qu'interpréter comme un rappel de la liste des mensonges qu'il avait pu semer tout au long de son existence. Liste non exhaustive – le démon n'étant pas au courant de la totalité de ses « petits arrangements avec la vérité » –, qui avait débuté avec le « prêt » de son épée dans le Jardin d'Eden et s'était conclue, pour le moment, par un pied de nez magistral adressé au Paradis.


– Gabriel est venu dans ma librairie, avoua l'ange dans un chuchotement précipité.

– GABRIEL EST VENU DANS TA LIBRAIRIE !?

– Mon cher, l'emploi des lettres capitales n'est absolument pas nécessaire.


Les pupilles reptiliennes s'agrandirent avant de se dilater à l'extrême afin d'occuper tout l'espace blanc de l'œil démoniaque. Le jaune de l'iris s'accentua, devenant plus menaçant, révélant tout le pouvoir contenu de cette enveloppe abritant l'âme d'un démon qui fut jadis pas n'importe quel ange.


L'arrivée de la propriétaire des lieux épargna à Crowley toute manifestation de colère trop enflammée. Il se saisit de ses lunettes et les replaça sur son nez. Aziraphale se tourna vers elle et échangea quelques amabilités tout en éteignant en toute discrétion, les feuilles du pommier artificiel commençant à se consumer.


– Je vais vous prendre votre délicieuse pomme au four sur lit de gelée à la compote de pomme agrémentée d'une petite pointe de chantilly. Oh, et je me serais bien tenté par une crêpe aux pommes.

La femme, une jolie fausse blonde entre deux âges nota la commande et se tourna vers le démon qui sembla d'un coup, s'intéresser à sa présence.

– A propos, demanda Aziraphale d'un ton courtois, comment va votre belle-fille ?


L'espace d'un instant, le sourire affable se changea en un regard capable de tuer même un ange. Elle retrouva néanmoins son visage amical comme il sied à tout commerçant de Soho qui, contrairement à Aziraphale, a fait vœu de se dévouer corps et âme aux Commandements du Capitalisme.

– Elle se porte à merveille. Et pour votre ami, Mr. Fell ?

– Dandy au Calvados, intervint Crowley dans un français parfait, sans la quitter du regard. J'espère que les morceaux ont été découpés avec soin.


La femme blêmit. Elle parut sur le point de commettre un nouvel assassinat mais se contenta d'inscrire la commande sur son calepin et de briser la pointe de son crayon. Aziraphale se tourna vers son compère et arqua un sourcil interrogateur auquel il répondit par une grimace : ils avaient bien d'autres démons à fouetter !


– Donc, reprit Crowley qui s'était calmé pendant ce petit intermède, tu as laissé Gabriel entrer dans ta librairie ?

– Techniquement, il est encore mon supérieur hiérarchique et cette librairie est une ambassade céleste.


Crowley se mit à se balancer sur sa chaise. Les néons au-dessus de leurs têtes s'éteignirent et se rallumèrent à la vitesse d'un cosmonaute propulsé dans l'exosphère par un canon surpuissant. Le démon cessa son manège et retrouva une position plus convenable, avant d'appuyer ses coudes contre la table. La serveuse leur apporta leur commande et s'en retourna à son comptoir dans un claquement de talons meurtrier. Crowley s'empara de son verre et le but d'un trait.


– C'est la matinée des visites indésirables, marmonna-t-il tandis que son verre se remplissait à nouveau, à croire qu'ils se sont filé le mot pour nous pourrir la vie !

– Que veux-tu dire ?

– Avant, répliqua le démon tout en s'enfilant son deuxième Dandy, dis-moi tout à propos de notre cher Archange Gabriel.


La détestation – naturelle – du démon envers Gabriel s'était muée en véritable haine suite à la mise à mort qu'il avait dû subir en tant qu'Aziraphale. Crowley avait dû faire appel à toute son affection pour son compagnon pour ne pas dévoiler sa véritable apparence et faire ravaler ses paroles fileuses à l'Archange Suprême. Les pensées meurtrières qui lui avaient traversé l'esprit lorsqu'il avait fait face à cet être bouffi d'orgueil, étaient les plus démoniaques qu'il n'eût jamais éprouvées. À cette haine, s'ajoutaient les reliques d'un mépris plus ancien que Crowley n'avait pas totalement occulté de sa mémoire.


Je veille à ce que tout se passe bien entre mes employés. Il M'est déjà arrivé d'avoir à organiser, cela remonte à un petit moment d'ailleurs, des temps de médiation afin de permettre à deux anges d'échanger et de régler leurs différends. Lors de la mise en place de cet espace de parole, le Déchu ne faisait déjà plus partie de nos effectifs et Je n'avais pu désamorcer ce conflit latent. Gabriel jalousait à raison le talent et la créativité de Celui-Qui-Fut-Ange qui lui, faisait fort peu cas des êtres éthérés l'entourant. Il avait mis d'ailleurs mis plus d'un siècle – enfin à ce qui pourrait s'apparenter à un siècle –, avant de comprendre que l'Archange se nommait Gabriel et non Galadriel. Cette rivalité, n'existant que chez l'un, l'autre étant trop occupé pour s'y abaisser, avait atteint le point de non-retour lorsque à Gabriel avait échu l'annonce des naissances et la protection de la Poste et à son rival, la création du firmament.


Pourtant, Crowley n'avait jamais avoué à Aziraphale que ses collègues célestes n'avaient jamais organisé de procès et l'avaient de suite condamné au feu infernal. Les démons eux, avaient eu au moins la décence d'organiser une parodie de procès. Habitué aux tortures infligées par les membres de son camp pour le punir de son trop-plein de bienveillance, incompatible avec son statut, il n'avait été guère surpris d'apprendre qu'un bain d'eau bénite aurait dû achever son existence. Ce dernier coup de canif au contrat démoniaque avait définitivement rompu son pseudo-attachement à l'Enfer, mais Aziraphale, lui... Le stupide angelot avait la Foi envers son camp chevillé au corps et à l'âme ; et bien que Crowley mourût d'envie de lui ouvrir les yeux sur le compte du Paradis, il ne pouvait s'y résoudre : il aimait aussi Aziraphale pour ses maudits principes.


– Il m'a confié plus ou moins une mission, confessa son compère tout en portant sa cuillère à sa bouche. Ce n'est pas très clair et je ne dois pas en référer aux autres Archanges. Ça concerne, enfin, tu sais...


Il pointa sa cuillère vers le sol, code que le démon comprit. Son instinct ne s'était donc pas trompé, un drôle d'événement s'était produit En-Bas et cela expliquait pourquoi le temps s'était détraqué, que le taux de morts avait drastiquement baissé au cours de ces quelques heures, qu'une vague d'érotisme avait frappé Londres et ses alentours, et qu'un couple de pandas en était déjà à son vingtième coït ininterrompu.


– Je dois prêter attention aux interférences « démoniaques ».

– IL semble avoir disparu, révéla Crowley tout en descendant son troisième Dandy en moins de vingt minutes.

– IL ? répéta un Aziraphale incrédule, IL comme IL !?

– Celui-là même ! et ce n'est pas tout.


Sans entrer dans les détails, Aziraphale n'avait pas besoin de savoir que le démon en question s''était montré dans le plus simple appareil, Crowley lui raconta son entrevue avec Kelen puis avec Shax, toute aussi infâme mais beaucoup moins désirable. Soufflé, l'ange en laissa même refroidir sa pomme au four à peine entamée.

– Un duel infernal, parvint-il à balbutier lorsque Crowley se tut, mais dans quel but !?

– Je ne sais pas.


Des rires gênés éclatèrent dans la salle. La musique avait laissé place à l'interview d'un médecin de St Mary qui, d'une voix troublée, recommandait aux patients de prendre toutes leurs précautions, car les services des différents hôpitaux de la capitale étaient confrontés depuis plus d'une heure, à une épidémie de maladies vénériennes.

– Vénériennes ? s'interrogea Aziraphale tout en se creusant la cervelle pour retrouver la définition de cet adjectif rendant grâce aux offrandes de Vénus.


Par un petit tour de passe-passe de Mon invention, j'avais fait en sorte que le sens de certains mots échappassent à cet ange à la curiosité que trop dévorante. Il avait su néanmoins au fil des siècles, grâce à son intelligence, déjouer Mes manigances et il connaissait depuis bien longtemps, les doubles sens et autres petites cachotteries de mots en apparence innocents. J'avais abandonné la partie, lorsqu'il avait découvert le sens de « gourgandiner » et « folichonner l'as de trèfle ».


– C'est... peu importe, maugréa le démon peu enclin à partager son savoir à ce sujet. Ça craint, vraiment.


L'ange étouffa un rire mutin révélant qu'il venait de retrouver la signification du mot en question dans les tréfonds, immenses et emplis de savoirs fort peu chastes, de son esprit.

– Nous allons devoir mettre ce démon hors d'état de nuire, surtout s'il est lié à tout ce chaos, décréta Aziraphale en s'attaquant enfin à sa pomme qui était de nouveau chaude.


– Je m'occupe de lui botter le cul à ce fumier et à lui faire passer l'envie de revenir ici ! Toi, tu ne te mêles pas de ça !

– Hors de question ! répliqua l'ange en avalant un morceau de pomme. Nous sommes... comment tu dis déjà ? Un duo ? Un groupe de deux personnes ?

– Partenaires de crimes ? proposa Crowley avec malice.


Ils échangèrent un sourire et poursuivirent leur discussion bien trop longue à relater ici alors vous devrez vous contenter de l'imaginer. Celle-ci dura toutefois plus longtemps que l'action du panda mâle du zoo de Londres qui honora sa compagne pour la vingt-deuxième fois consécutive – un record chez cette espèce fort peu réputée pour son appétence charnelle.


Les deux compères / groupe de deux personnes / partenaires de crimes s'apprêtaient à quitter le café après une dizaine de verres pour Crowley et à ce qui s'apparentait à un troisième petit-déjeuner pour Aziraphale, lorsque deux policiers firent irruption dans la salle, accompagnés d'un jeune homme : Mr. Charming, Prince de son prénom et non de son état, propriétaire d'une petite salle de sport. Ils s'avancèrent jusqu'au comptoir où Aziraphale payait leurs consommations. L'un des représentants de la loi demanda à la propriétaire si elle avait des informations à leur communiquer au sujet de sa belle-fille, une dénommée Blanche, travaillant dans une école maternelle, lèvres comme le sang, peau couleur d'aspirine et cheveux noirs comme l'ébène, qui ne s'était pas présentée à son poste.


La marâtre prit un air affligé et leur répondit que sa belle-fille ne lui avait pas donné signe de vie depuis la veille. Crowley donna un petit coup de coude discret au policier ne menant pas l'interrogatoire et lui glissa dans un sifflement de serpent :

– Allez voir dans le frigo. J'espère que vous avez des sacs poubelle avec vous.


Comme sous l'emprise d'une hypnose exécutée par un magicien ayant obtenu de bons résultats au concours d'entrée de son école de magie, le jeune policier se tourna vers la belle-mère et lui annonça qu'ils allaient procéder à une fouille en règle, en commençant par inspecter la cuisine de son établissement. Le bruit d'un verre qui se brise fut la seule réponse qu'il obtint. 


Notes et autres blablas 

1. L'ambiance "pommier" de ce café est inspiré d'une nouvelle "Neige, verte et pommes" écrite par Neil Gaiman, qui est une réécriture sanglante du conte Blanche-Neige

2. Je suis passionnée par le XIXe siècle et j'aime les mots argotiques ou désuets de cette époque. Le terme "gourgandiner" vient de la langue verte, nommée ainsi car l'absinthe (alcool prisé de cette époque) avait une couleur verte bien particulière et était associée aux "personnes de mauvaise vie" plus enclines à employer cet argot. Quant à "folichonner l'as de trèfle", c'est une expression que l'on retrouve dans une lettre écrite par l'écrivain Théophile Gautier. 

3. Le Dandy au Calvados est un cocktail à base de pomme. 

4. Contrairement à Crowley, j'aime beaucoup la pop anglo-saxonne des années 80 // début des années 90. La chanson de George Michael utilisée ici a pour titre "Too funky". 

5. Je présente toutes mes excuses au couple de pandas du zoo de Londres. 

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