Mad Love (Jerome Valeska)

Chapitre 6 : Tâches de rousseur

1672 mots, Catégorie: K+

Dernière mise à jour 30/11/2016 13:17

Salut tout le monde ! Juste pour vous dire que dans cette partie, Jerome et Kaysha ont entre 11 et 12 ans :) Bonne lecture !




Les deux enfants avaient l’impression de se connaître depuis toujours. C’est bien souvent ce qui arrive avec les jeunes enfants, ils se rencontrent, et deviennent rapidement proches. Jérôme et Kaysha se sentaient bien l’un avec l’autre, loin des histoires incongrues qui planaient sur leur famille respective.

Jérôme avait pour la première fois apprit à connaître quelqu’un. Kaysha était une jeune fille drôle et amusante, qui souriait la plupart du temps. Elle était aussi un véritable garçon manqué, aux allures corporelles masculines pour la plupart. Elle portait très souvent une casquette dans laquelle elle dissimulait ses cheveux bruns. Ses yeux noisette étaient rieurs et malins. Elle avait toujours une idée stupide derrière la tête. Il apprenait avec elle plus qu’avec personne. Elle arrivait toujours à trouver le drôle là où il n’était pas, parfois à trouver la tristesse où les autres riaient. Il adorait l’entendre parler, lorsqu’elle lui expliquait des choses, qu’elles soient vraies ou fausses, elle savait toujours comment amener les autres à la croire : elle mentait sans aucune difficulté.


Pourtant, parfois Jérôme se sentait de trop. Kaysha était excentrique, se battait comme un garçon, et ne laissait personne lui dire ce qu’elle devait faire ou penser. Tout le contraire de lui. Il se trouvait bien ridicule à côté d’elle, et il se demandait si finalement il n’était pas destiné à être un raté jusqu’à la fin de sa vie.


-         Blah blah blah « prends soin des chevaux », blah blah blah « faudra t’y habituer » gniagniagnia.


Les premiers mots que Jérôme entendit alors qu’il était assis devant leur coin secret. C’était un endroit reculé du cirque, installé alors dans le Mississipi, en pleine période estivale. Il faisait chaud, et Kaysha portait toujours du court. Son short déchiré, ses chaussettes trop hautes dans ses baskets plates, et ses hauts trop larges. Devant lui coulait un petit ruisseau aux sons agréables.


-         J’en ai marre de ses canassons, dit-elle en s’asseyant à côté de Jérôme après avoir buté dans une pierre qui se plongea dans le ruisseau. Et quand ils seront trop vieux et malades, je ferai quoi moi, hein ?

-         Clown à mi-temps avec Caleb, répondit-il.


Elle le secoua doucement en s’empêchant de rire.


-         T’étais passé où, Rouquin ? on t’a pas vu de la journée.


Il détourna la tête discrètement pour qu’elle ne le voie pas rougir. Il posa une main sur son flanc, en retenant une grimace. Sa mère lui avait vraiment fait mal cette fois-ci. Il avait un énorme bleu sur le côté, et s’était caché pour pleurer.


-         Pas grand-chose, répondit-il. J’ai du vider quelques poubelles, comme d’hab’.


Kaysha lui lança un regard suspect, mais ne releva pas. Elle savait de source sûre que si les gens cachaient des choses, il valait mieux ne pas les savoir. Pendant un moment, en tout cas. Elle s’étendit sur le sol, faisant craquer les brindilles sous elle, pour se laisser masser par les rayons chauds du soleil. Ils pouvaient rester là, à ne rien faire, l’un à côté de l’autre, perdu dans leurs deux mondes différents et pourtant si semblables. Plus qu’ils pouvaient se le permettre de croire. Jérôme resta assis, à regarder négligemment loin devant lui, tenant une herbe qu’il écrabouillait entre ses doigts tâchés et le soleil lui aveuglant de temps à autre les yeux.


-         Kaysha ?

-         Oui ? répondit-elle sans bouger et en gardant les paupières fermées.

-         Est-ce que mes tâches de rousseur te font peur ?


Kaysha se releva sur ses coudes, et allait rire, mais remarqua que le garçon était tout à fait sérieux. Elle fronça les sourcils, et se leva, sous l’étonnement de ce dernier. Elle se dirigea directement vers le ruisseau et prit de la boue entre ses doigts. Elle les porta à son visage. Jérôme resta interdit. Elle se retourna vers lui, un grand sourire aux lèvres, le nez et les joues couvertes de boue. Il ne pu rien dire et un léger rictus gêné se dessina sur son visage. Elle vint se rasseoir à côté de lui, et mit ses yeux dans les siens.


-         Et moi ? demanda-t-elle.


Son regard reconnaissant fut la seule réponse. Elle se rapprocha de lui et posa son front sur le sien, une main sur son épaule. Ils se voyaient aussi proches qu’ils ne l’avaient jamais été, les yeux assombris par la proximité.


-         Laisse jamais personne te faire croire des choses débiles, dit-elle.


Elle se rallongea, la boue toujours étalée sur son visage. Jérôme se sentait étrangement serein. Il se sentait vidé de toute inquiétude. Il en avait si peu l’habitude qu’il mit du temps avant de comprendre que ce sentiment lui était bénéfique.


-         Mon père veut que je fasse les représentations avec lui, d’ici la semaine prochaine. Ou la semaine d’après.

-         Tu n’en a pas envie ?


Il l’entendit inspirer. La réponse était non, vraisemblablement.


-         T’as de la chance, dit-il.

-         Tu trouves ?

-         T’as une fonction dans ce cirque de débiles, et un père qui s’occupe bien de toi.

-         Tu pourrais être surpris… marmonna-t-elle.


Rien ne fut ajouté. Jérôme ne voulait pas que la conversation continue, et Kaysha ne paraissait pas vouloir la voir s’étendre non plus. Il est des sujets que les enfants n’oublient pas, mais qu’ils évitent, en espérant les voir disparaitre. Car ne pas parler d’une chose, c’est la rendre inexistante, et ne lui donner aucun crédit. Les enfants savent ces choses, inconsciemment. Et Jérôme et Kaysha avaient bien compris ce principe.


-         Qu’est-ce qu’il fait chaud, se plaignit Kaysha en se relevant.


Jérôme tourna soudainement son regard vers elle. Elle s’arrêta dans son mouvement pour le regarder. Il sourit avec franchise, et s’aida de ses mains pour se lever. Sans plus attendre, Kaysha fit la même chose et le rattrapa alors qu’il courait vers le ruisseau. Il prit de l’eau entre ses mains pour lui lancer dessus, et les deux enfants se lancèrent dans une bataille sans merci. Sans arriver à s’arrêter, ils se retrouvèrent assis dans l’eau, leurs rires se mêlant aux sons de l’onde coulante.


-         On prend un bain en amoureux, les pédés ?


Kaysha et Jérôme se retournèrent en même temps. Leurs sourires s’effacèrent aussitôt. Kaysha se leva, laissant tomber l’eau depuis ses vêtements, dissimulant une pierre dans la paume de sa main. Toujours assis, Jérôme la remarqua, mais ne dit rien. Il se leva tout doucement, en regardant la jeune fille. Sa casquette était tombée et ses cheveux étaient libres.


-         T’es joli en fille, Wade, ajouta Cole.

-         Et toi t’es plutôt pas mal en garçon. T’es tout seul ? très étonnant, je pensais pas que t’étais aussi courageux.

-         Fais pas la belle, Wade, je pourrais te noyer la dedans, dit-il en désignant le ruisseau d’un mouvement du menton.


Un léger rictus vint chatouiller le visage de Kaysha. Elle allait sûrement répondre quelque chose de cinglant, mais Cole fut plus rapide.


-         Je suis juste venu te dire que le directeur voulait te voir.


Cole fit demi-tour en évitant les branchages. Kaysha laissa tomber sa pierre qui provoqua quelques éclaboussures.


-         On se voit demain, dit-elle à Jérôme sans lui adresser un regard.


Il ouvrit la bouche pour lui reprocher son départ, mais il ne dit rien. Il voyait pourtant qu’à son comportement et à la façon dont son visage avait changé d’expression qu’il aurait du intervenir. Mais il n’avait pas encore ce réflexe humain, qu’il n’avait jamais vu nulle part, et qui lui était familier que depuis qu’il connaissait Kaysha. Perdu dans ses pensées, il resta un long moment les pieds dans l’eau, avant de s’en extirper et de prendre le chemin de sa caravane.


Laisser un commentaire ?