Bellatrix, une autre vie.

Avril 1981 

Bellatrix était fatiguée, elle n'arrivait presque plus à se lever. Elle avait mal, si mal. Le petit être dans son vente s'était mis à bouger et l'avait réveillé. Tom n'était pas couché à côté d'elle, il n'y était jamais. Toutes les nuits il s'en allait discrètement et revenait le matin avant qu'elle ne se réveille, croyant sûrement qu'elle ne remarquerait rien. Elle aurait pourtant aimé qu'il soit là à côté d'elle, qu'elle puisse lui faire sentir les petits coups de pied que leur enfant donnait, comme n'importe quel autre couple un minimum sain. Mais il n'était pas là, il n'était jamais là.

Bellatrix se sentait infiniment seule. Tom ne voulait plus non plus qu'elle sorte de l'appartement, il avait trop peur pour la santé de la jeune femme qui s'affaiblissait de jour en jour. Elle ne voyait donc plus Sirius, et n'arrivait à voir ses sœurs que très rarement.

Parfois elle voulait partir, s'échapper loin de lui tant qu'elle en avait l'occasion. Mais elle n'y arrivait jamais. Elle continuait de croire qu'un jour ou l'autre tout reviendrait dans l'ordre et que Tom l'aimerait encore, encore.

Elle retira les couvertures et se leva doucement. La fenêtre lui paraissait tellement loin. De ses petites jambes engourdies de la nuit elle se porta du mieux qu'elle le put, avançant un pied après l'autre et s'aidant du mur. Elle tira les rideaux, le jour commençait à se lever. Elle s'assit sur le rebord, toujours plus proche du vide, là où elle pouvait sentir l'air et le vent emporter ses cheveux, piquer ses yeux et remplir ses narines, là où elle pouvait se sentir vivante. Le soleil venait de passer au dessus de l'immeuble d'en face et se mit à caresser doucement son visage, il était chaud et réconfortant face aux pensées tourmentées des sombres nuits. Le petit lui donna un nouveau coup et la tira de ses pensées. Elle lui sourit et déposa sa main sur son ventre, là où il l'avait appelé.

« Ne t'inquiètes pas, le soleil est toujours là pour nous.» lui murmura-t-elle.

C'était son moment préféré de la journée : l'heure à laquelle le monde se réveillait. Du haut de sa petite fenêtre elle pouvait tout voir et elle commençait à connaître toutes les petites habitudes des voisins. Au premier il y avait la vielle dame italienne qui tout les matins se levait, allumait sa musique et préparait son café. Juste au-dessus il y avait un jeune homme célibataire et négligé qui se réveillait toujours en retard et se dépêchait de descendre de l'immeuble avant d'enfourcher son vélo et de partir à toute vitesse, totalement décoiffé. Mais son préféré de tous, resté le petit garçon du quatrième. Vers huit heures et demi il descendait avec sa maman, ballon à la main et sac à dos sur les épaules, et se mettait à courir dans la petite rue tranquille, attirant l'attention des passants. Sa maman, exaspérée, lui courait toujours après criant gentiment :

- Michael reviens ! Tu vas te faire mal.

Et souvent le petit tombait puis se mettait à pleurer. Bellatrix avait toujours été impressionnée par le calme de cette mère, même après que son enfant lui ait désobéi, elle venait vers lui et le consolait jusqu'à ce que son chagrin soit passé, lui parlant le plus calmement possible.

C'était rassurant pour la jeune sorcière de pouvoir chaque jour observer ces Moldus dans leur vie quotidienne avec leurs soucis et leur bonheur. Tant qu'ils étaient là elle se sentait bien, la vie était toujours normale, le monde ne tournait pas encore totalement à l'envers.

Parfois, elle en venait même à s'imaginer à leur place, tenant son petit garçon par la main, se disant qu'aujourd'hui elle allait pouvoir lui apprendre de nouvelles choses fabuleuses comme le bruit que faisait un canard ou l'intérêt de dire « merci » ou « s'il vous plaît ». Toutes ces petites choses insignifiantes dont elle se sentait privée du haut de son donjon.