Dramione : le Feu et la Glace

Chapitre 15 : Triste Noël

5664 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 14/06/2019 11:13

Dans le chapitre précédent, Drago ne semble pas prêt à assumer le baiser qu’il a partagé avec Hermione le soir du bal, se dispute avec Pansy et couche avec Astoria. Hermione, elle, se pose bien des questions auxquelles elle n’a toujours pas de réponses quand elle s’en va chez ses parents pour les vacances.



POV HERMIONE


Mes parents vivent dans une campagne proche de Londres, une petite quinzaine de minutes les séparent de la grande ville. Ils travaillent tous deux en centre, mais préfèrent vivre à l’extérieur, ce qui personnellement me déplaît. Je ne conçois pas d’être si loin de mon lieu de travail en cas de besoin, ce qui est probablement dû au fait que je vive à l’intérieur de mon école depuis maintenant six ans. Notre maison n’est ni trop petite, ni trop grande. Elle ressemble à toutes les autres du quartier, comme ça se fait beaucoup par ici. La façade bleue et blanche de celle-ci m’est synonyme de sérénité, puisque chaque fois que je pénètre à l’intérieur, le monde des sorciers m’est bien loin. Je peux me resourcer et recharger paisiblement mes batteries, bien qu’évidemment, ma tête, elle, ne cesse jamais d’approfondir ses hypothèses, ou bien d’analyser ses angoisses. Mes parents sont charmants et aimants, ils travaillent beaucoup mais trouvent toujours du temps pour moi au cours de mes visites. Depuis que je suis arrivée, nous avons fait de nombreuses balades au parc rural (oui, mes parents sont dentistes, donc des médecins, ils ne prennent pas les promenades de santé à la légère) ainsi que beaucoup de jeux de société dans la joie et la bonne humeur, et surtout nous avons décoré la maison pour les fêtes. Noël chez les moldus est tout aussi sérieux et apprécié que chez les sorciers, si ce n’est plus : c’est le seul moment de l’année où il y a de la magie dans l’air. Ils s’autorisent à croire aux miracles, persuadent leurs plus jeunes enfants qu’un Père-Noël leur apportera des cadeaux - à condition qu’ils soient sages - et se réunissent entre amis et familles pour célébrer l’amour environnant. Avant de partir de Poudlard, j’avais pris le soin d’envoyer au Terrier tous mes cadeaux pour la famille Weasley ainsi que celui de Harry, histoire d’être certaine qu’ils les aient dans les temps. 


-         Tu me passes mon tablier chérie, s’il-te-plaît ? demanda mon père alors que nous commencions à préparer les sablés de Noël en famille.


C’est notre tradition mais je ne crois pas que ce soit universel pour autant. D’habitude, mon grand-père y participe, il dirige les opérations et délègue à mes parents et moi. Pour la première fois depuis qu’il est partit, je ressens réellement son absence. La réelle et dure absence qu’impose la mort. Avoir connu quelqu’un, l’avoir aimé et choyé, et que soudain il ne soit plus. Je sentis mon cœur se serrer dans ma poitrine, et les larmes monter à mes yeux. Ma gorge se fit sèche et je déglutis de façon tout à fait audible, ce qui interrogea ma mère à juste titre. Elle se retourna vers moi en posant le rouleau pâtissier, essuya ses mains sur son tablier bleu tandis qu’elle m’adressait un sourire emplein de tristesse de ses lèvres peintes en rose.


-         Oh, chérie… prononça-t-elle difficilement, tentant de contenir les larmes dans sa voix.


Elle s’approcha alors de moi et me prit dans ses bras, sachant parfaitement quelle était la cause de ma peine. Mon père, à son tour, se tourna en notre direction, un peu en retard. Il eut une mine de tristesse, mais laissa ma mère me réconforter un moment sans s’en mêler.


-         Il me manque beaucoup aussi… ajouta-t-elle, cette fois en larmes.


Je pleurais à mon tour à chaudes larmes tandis qu’elle caressait mes cheveux en soutenant ma tête sur son épaule. La mort est si radicale, elle est si brutale et violente, elle fait si mal… Finalement, mon père se joignit à nous, nous enlaçant toutes deux dans ses bras pas si musclés, comme pour nous protéger des possibles agressions extérieures.


-         Tu sais, on n’est pas obligés de faire des sablés cette année… proposa-t-il.

-         Non… murmurai-je. Nous devrions faire des sablés… Il serait triste s’il n’y en avait pas pour Noël.


Nous avons donc fait nos sablés dans le silence, honorant sa mémoire et regrettant sa présence. Ce soir-là, nous étions le 25 décembre, et nous passions un moment dont je ne m’étais pas rendue compte d’à quel point j’avais besoin. Nous avons tout simplement dîné le festin que nous avions préparé, discuté de choses et d’autres de la vie, chanté quelques chants culte de Noël, rigolé à s’en tordre l’estomac, et rien sur Terre n’était comparable au calme intérieur que je ressentais en cet instant. Ça aussi, c’était de la vraie magie. Nous avons par la suite ouvert nos cadeaux en fin de soirée, au pied du sapin, pendant que nous buvions du lait chaud près de la cheminée flamboyante. J’avais reçu beaucoup de livres de la part de mes amis mais également de ma famille, ce qui ne manquait jamais de me rendre heureuse. Mes parents, eux, m’offrirent les mémoires de mon grand-père Edgar, le père décédé de ma mère. Il n’avait jamais rédigé de testament de son vivant, mais ma mère jugea qu’ils devaient me revenir, et aucun membre de la famille ne l’avait contesté. De toute évidence, j’ai beaucoup pleuré, et puis beaucoup lis, parce qu’il m’apparaissait que j’avais entre les mains un trésor qui ne pouvait avoir de prix.


-         Il te reste un cadeau que tu n’as pas encore ouvert chérie, m’annonça ma mère en me tendant un petit paquet proprement emballé.

-         De qui est-il ? je demande puisque ce n’est pas précisé sur l’emballage, et qu’aucune carte n’accompagne le paquet.

-         Je ne sais pas, il était dans la boîte-aux-lettres ce matin, me répond-t-elle.


J’observe de plus près le petit paquet à la recherche d’indices, mais il n’y a rien. Je déchire alors le papier cadeau de couleur noir avec de légères touches de brillant argenté, pour découvrir un petit étui qui ne présente pas non plus de signe distinctif particulier. Je n’en ai pas reçu beaucoup dans ma vie, mais je reconnais là un étui à bijou, possiblement une bague étant donné la taille. L’étui n’a pas non plus de marque, ni de nom, rien qui indique où l’objet a pu être acheté. Je finis donc par ouvrir l’étui et y découvre avec une intense surprise de petites boucles d’oreilles fines et discrètes, comme je les aime, avec une pierre ronde de couleur verte au centre, ornée de fins petits strass transparents.


-         Elles sont splendides ! C’est tout de même idiot que je ne sache pas de qui elles viennent ! Je me plains, souhaitant remercier avec politesse la personne qui m’a adressé ce cadeau.


Ma mère manifesta son envie d’observer de plus près les boucles en me tendant une main. Elle les regarda quelques instants, tapota même sur les pierres et finalement répondit :


-         Waw, chérie... Ce n’est pas de la fantaisie ! Ce sont des émeraudes ! Et elles sont… entourées de diamants ! s’exclama-t-elle en regardant mes nouvelles boucles comme si elles étaient le Saint Graal.

-         Mais non enfin maman ! Ce n’est tout bonnement impossible, je réplique tentant de lui faire comprendre à quel point ce qu’elle racontait était dénué de sens.

-         Hermione, je sais différencier les vrais bijoux des faux !


Elle passa ensuite une des boucles d’oreilles à mon père, qui sortit ses lunettes de sa poche de chemise pour l’observer de plus prêt. Son père était bijoutier et mon père passait beaucoup de temps dans son atelier avant de devenir dentiste. Longtemps, il a même hésité à reprendre l’affaire familiale, mais finalement il s’est rendu compte que ce n’était pas fait pour lui. Il observa quelques secondes la boucle, comme ma mère, il la tapota, la tourna et retourna, et finit par donner son verdict :


-         Ta mère a raison, c’est une émeraude, et ce sont bien des petits diamants qui l’entourent.

-         Bien sûr que j’ai raison ! s’exclama-t-elle à nouveau. C’est quand même dingue, qui aurait pu t’envoyer un tel cadeau et ne même pas dire de qui il vient ?


La simple formulation de la part de ma mère m’imposa la réponse à sa question de la façon la plus évidente qu’il soit : Malfoy.


POV DRAGO.



Poudlard était étrangement vide, comme je ne l’avais jamais vu. Je n’étais auparavant jamais resté au château pendant les vacances, bien au contraire. Je rentrais avec hâte, me faisait traiter quelques temps comme le Prince que je suis, m’éloignait de toutes ces énergumènes polluant l’air que je respire à l’école, et je passais du temps avec ma famille. Je ne vais pas le nier, je ne peux d’ailleurs pas le nier, je suis quelqu’un pour qui la famille a une importance primordiale et il est fort probable que jamais rien ni personne ne puisse changer ça. C’est ancré au plus profond de mon être, ça fait non seulement partit de comment on m’a éduqué et des valeurs qu’on m’a inculquées, mais ça fait aussi parti de ma personnalité. Quoi de plus important que son sang ?


Je passais donc le plus clair de mon temps à tenter de réparer cette putain d’armoire à disparaître, ce qui me prenait un temps et une énergie que je n’aurais pu imaginer. A présent, je commençais à réellement penser que je n’arriverais peut-être pas à la réparer, et que de ce fait, je n’arriverais probablement pas à tuer Dumbledore. Je dois me montrer ingénieux et surtout intelligent, on parle du seul sorcier que Lord Voldemort craint, ce n’est pas peu dire. Je vais donc devoir réfléchir à de nouvelles options, parce qu’échouer n’en est évidemment pas une.


Aujourd’hui nous sommes le 25 décembre. Jamais, de toute mon existence, je n’ai passé un Noël seul, et me voilà, à Poudlard, entouré par quelques imbéciles d’élèves, à manger un repas certes très appréciable, mais bien loin de ce qu’est Noël chez les Malfoy. Notre elfe de maison cuisine plusieurs jours pour ce repas, il va sans dire qu’il s’agit des aliments les plus divins qui soient sur Terre. La décoration est imposante, sans parler d’à quel point elle est magnifique. Ma mère aime la faire elle-même, ça la rend heureuse apparemment. Ma mère. Seule. Je n’y avais pas vraiment pensé ainsi. C’est Noël, et ma mère n’a ni son fils, ni son mari à ses côtés. Bien sûr, elle a toujours sa tarée de sœur, et reçoit probablement pour l’occasion d’autres Mange-morts, mais nous ne sommes pas là. Plus je pense à elle, plus j’ai un pincement au cœur, mais je me rassure en me disant que je lui ai envoyé un cadeau qui m’a coûté très cher et qui lui plaira très certainement. Ce raisonnement m’amena ensuite à Granger. Elle aussi, je lui ai fait un petit cadeau. L’avait-elle apprécié ? Avait-elle compris qu’il venait de moi où est-ce que quelqu’un d’autre avait dit qu’il le lui avait offert en s’attribuant mes mérites ? Les portaient-elles en ce moment même ? Était-elle heureuse ? Avais-je bien fait de lui offrir quelque chose ? Après tout, je suppose que c’est devenu banal, d’offrir des cadeaux à Noël. Cela ne signifie plus rien, et de toute évidence, c’est un acte anodin qui n’a pas besoin d’être relevé. Bien sûr, j’ai dû soudoyer Rogue pour obtenir l’adresse de Granger, à laquelle il m’avait étrangement facilement laissé accès. Peut-être pensait-il que cela faisait partie de ma mission, et qu’ainsi il m’apportait une aide précieuse. Conneries.


Bref, ma mère, elle, m’avait envoyé tout un carton de sucreries, sans parler de la pile de cadeaux, à laquelle elle avait joint une lettre :


Mon chéri,


J’espère de tout mon cœur que tu passes un agréable Noël à Poudlard même si tu n’es pas à la maison. Je t’écris cette lettre pour te dire à quel point tu me manques mon cœur, mais je comprends pourquoi tu dois rester. J’espère juste que tu fais très attention à toi, et que tu ne refuses pas d’aide quand on t’en propose, tu ne te rends pas compte à quel point tu pourrais en avoir besoin… Comment se porte Blaise ? Est-il resté avec toi à l’école ou est-il rentré chez lui ? Et Pansy ? Où en êtes-vous tous les deux ? J’imagine que tu es allé au bal avec elle, tu t’es bien amusé ? Je serais ravie de l’accueillir à nouveau à la maison, mais bien sûr ne te presse pas, tu as assez de pression en ce moment. D’ailleurs comment tu gères toutes ces choses mon chéri ? Tu ne me parles pas beaucoup ces derniers temps, je sais que tu as beaucoup à penser et à faire, mais si tu pouvais rassurer ta mère… Je t’en serais plus que reconnaissante. Ecris-moi chéri.


A la maison tout va bien. Je n’ai toujours pas de nouvelles de ton père, mais je garde bon espoir, ça va finir par arriver. Le Seigneur des Ténèbres se prépare, il n’attend plus que chacun remplisse sa part du contrat, comme tu le sais trop bien... Bella vit à la maison depuis que tu es retourné à Poudlard, elle me tient compagnie et je peux sans exagérer te dire que ce n’est pas tous les jours de tout repos… Mais le geste est appréciable. Pour le reste, je ne veux pas que tu t’inquiètes. Je crois en toi, on croit en toi, et on sait que tu vas t’en sortir, et si tu ne le fais pas toi-même, ce n’est en rien un problème. Ce qui compte c’est que tu ailles bien, d’accord ? L’important c’est que tu t’en sortes. Quoi que tu fasses, cette guerre aura lieu, et dans tous les cas, de bien meilleurs jours sont à venir pour nous, nous tous. Nous allons y arriver, et tu ne dois pas te tuer à la tâche, tu as compris ? J’ai besoin de savoir que tu es très prudent, et que tu ne dépasseras pas une certaine limite. Tu dois être très réfléchis, et si tu peux superviser et trouver quelqu’un pour faire le travail pour toi, fais-le. Tu es précieux Drago, tu es bien trop précieux pour mettre ta vie en danger, tu entends ? Tu dois à tout prix te protéger, il ne doit rien t’arriver. Ne laisse rien t’abîmer.


Tu me manques mon chéri, écris-moi. Je t’aime si fort…


Maman


Trois petites goûtes séchées trahissaient son état émotionnel sur le papier. Elle avait pleuré en m’écrivant cette lettre, et connaissant le perfectionnisme de ma mère, elle a probablement recommencé la manœuvre plusieurs fois, tentant de cacher sa peine. Je suppose qu’elle n’était pas parvenue à ne pas pleurer du tout. Moi aussi, les larmes me montaient à présent aux yeux. Je ressentais le besoin de me blottir dans les bras de ma mère, qu’elle me dise à haute voix que tout irait bien et que j’allais y arriver. Sentir son odeur, la chaleur de son amour, rentrer à la maison, être sous sa protection. Mais rien de tout ça n’était possible, et rien de tout cela ne serait plus jamais possible. Je suis maintenant un homme, et je ne peux plus me permettre ce genre de comportements enfantins. J’ai une réputation à tenir, une famille à entretenir, et un nom de famille à sauver. Malheureusement pour elle, ma mère ne peut plus rien pour moi. Je suppose que son travail me concernant est terminé, je dois maintenant métriser mon propre destin, faire ce qui doit être fait par moi-même, et prendre mes responsabilités. Je dois faire les choses seul. On a toujours tout fait pour moi, tout ce dont j’avais besoin, on me l’apportait sur un plateau en argent. Jamais je n’ai eu à faire quoi que ce soit par moi-même, hormis mes notes en classe, et encore, parfois je fais faire mes devoirs par d’autres élèves. Je suis actuellement à un tournant de ma vie, je le sais. J’ai deux chemins, et aucune route n’est tracée pour une fois. C’est moi qui choisis. Soit je réussis et je récupère mon statut de favori et de Prince, soit j’échoue et ma famille et moi sommes bon pour pourrir en enfer. Tout cela ne dépend plus que de moi, et moi seul.


Au fur et à mesure que mes pensées suivaient leur cour, je sentais une nouvelle crise d’angoisse monter en moi. Mon estomac noué, ma respiration se faisant plus que difficile, des vertiges, cet affreux sentiment d’oppression, la sueur qui coule le long de mon front, et même parfois des nausées. Pris de panique, je me levai le plus rapidement possible de ma table presque vide, n’emportant que la lettre de ma mère, de peur qu’elle soit lue par des yeux indiscrets. Aussi vite que je le pouvais, je traversai les bien trop longues tables de la Grande Salle sans faire attention à si on me remarquait ou non, je suppose que le peu de cons qui sont ici doivent être occupés avec leurs cadeaux. A court d’air, je commençais à défaire les boutons devenus trop serrés de ma chemise, cherchant une option pour mieux respirer. Alors que ma vue se troublait dorénavant, je pouvais sentir une fine et pourtant si lourde larme couler le long de ma joue. Je ne lui laissai pas le temps de terminer son voyage tout au long de mon visage, je l’essuyai d’un rapide coup de main, il est hors de question que qui que ce soit me voit pleurer.


Mon cerveau n’arrêtait pas de réfléchir, il ne faisait que de ressasser que je n’y arriverais pas, que je n’étais pas assez doué, pas assez débrouillard, pas assez intelligent, pas assez fort. Assez rien du tout, que ma seule option c’est le suicide et que je ferais peut-être mieux de me tuer maintenant en faisant passer ça pour un meurtre avant d’humilier ma famille avec un nouvel échec. Je ne cessais de revoir les petits yeux noirs injectés de sang de Voldemort me répéter « Je suppose que nous saurons bien assez tôt si j’ai eu tord d’avoir de l’espoir en toi durant toutes ces années Drago. Tu ne voudrais tout de même pas me décevoir ? » « Tu crois que tu peux faire ça, ce n’est pas trop difficile pour toi ? Ton père n’est pas un exemple à suivre, tu n’as pas été gâté par la nature. » « Ce serait dommage que tu échoues… Le manoir ne serait pas le même sans les Malfoy pour l’habiter. » Pas à pas, je montais les escaliers, me cramponnant à ses derniers, tentant de ne pas tomber dans les pommes avant d’atteindre ma destination. Je montais marche par marche en essayant de faire taire ma tête, mais je ne pouvais penser à rien d’autre que tout ce qui me terrorisait, tout ce qui rendait ma vie impossible ces derniers temps. J’arrivais finalement aux toilettes des filles du deuxième étage, ceux où il n’y a jamais personne parce que personne ne peut blairer Mimi Geignarde. Moi, elle m’est utile depuis quelques temps. Je peux pleurer, ça ne la gêne pas, au contraire, et je sais qu’elle ne le dira à personne, parce que personne ne lui parle. Je me laissais alors tomber par terre, dans une cabine de toilettes inondée comme souvent par Mimi, qui ne tarda pas à sortir de sa cachette en soupirant : « Oh Drago… ». Alors que je sanglotais à même le sol, elle prit place à mes côtés comme si elle pouvait réellement s’assoir par terre, me regarda avec des yeux compatissants, et continua :


-         Qu’est-ce qu’il t’arrive… ?

-         … Je n’y arriverais pas… Je… Je n’y arriverais pas…

-         De quoi parles-tu ? tenta-t-elle pour la énième fois, comme si j’allais lui raconter.

-         Je te l’ai déjà dit ! Je ne peux pas en parler ! m’énervais-je, frustré de devoir me répéter.

-         Ça compte si tu en parles à quelqu’un qui est mort ? Essaya-t-elle en esquissant un sourire tout à fait répulsant. 


Je la foudroyai du regard afin de lui montrer que l’humour n’était clairement pas la solution à mon état émotionnel, et que si elle continuait à me courir sur le système je n’allais pas tarder à m’énerver contre elle. Elle acquiesça, exprimant ainsi sa compréhension envers ma situation. Je la voyais observer, intriguée, la lettre de ma mère que je tenais toujours fermement dans ma main droite, mais elle eu la présence d’esprit de ne pas poser de question à ce sujet.


-         Quoi que ce soit que tu as à faire, je suis certaine que tu vas y arriver. Je ne vois pas bien comment quoi que ce soit puisse te résister… Ajouta-t-elle en essayant d’user de ses charmes inexistants.

-         Ouais… Et puis, il y a cette fille… Je ne sais pas ce que je fous, je suis complètement paumé, je devrais travailler comme un acharné et… Elle est là et je la vois, ou elle n’est pas là mais je la vois quand même dans ma tête et je… Putain mais qu’est-ce que je fous…

-         Cette fille ? S’inquiéta-t-elle clairement, sans tenter de dissimuler la déception dans sa voix.

-         Ouais… Cette fille…


J’essuyai maintenant les larmes le long de mes joues : elles avaient cessé de couler. D’un revers de manche, je me débarrassai de la sueur sur mon front et passa une main tremblante dans mes cheveux pour les remettre en ordre. Ma chemise blanche était devenue transparente, trempée par ma transpiration. Je me pris la tête entre les mains, reprenant tant bien que mal le peu d’esprit qu’il me restait.


-         Qui est-ce ?

-         Qui ? Je demande, ayant perdu le fil de la conversation.

-         La fille, répondit-elle sèchement, j’avais clairement heurté sa sensibilité à vomir.

-         Personne. Elle n’est pas importante. Je dois y aller, et sans me retourner, je laissai les toilettes de Mimi Geignarde pour une bonne douche brûlante.


La Marque des Ténèbres. Toujours là, à jamais là, dans ma peau. Pour toujours. Je la vois chaque fois que je me douche, que je me couche, que je suis nu. Elle me nargue, me rappelle tout ce que je dois faire, ce que je ne dois pas faire, elle me regarde et ri. Elle se fou royalement de moi, elle me cri à quel point je suis à la ramasse et comment je perds la boule. « Ah je te fais peur, hein ! » « Ce n’est pas rien, de me porter ! Je suis en toi, pour toujours Drago… TOUJOURS ! » « Ma noirceur est littéralement EN toi maintenant, tu ne peux plus faire marche arrière, petit bon à rien ! ». Parfois je jurerais l’entendre rire, quand je cherche de nouvelles idées pour terminer la vie de Dumbledore, ou lors de mes crises d’angoisse. Elle se rit de moi, elle me provoque et me rappelle chaque jour que je ne mérite pas de la porter. Et pourtant elle est là, tous les jours, et elle ne s’en va pas. Je ne lui demande pas de rester, elle pourrait très bien disparaître, si elle n’est pas bien là, au lieu de m’obséder. Rien ne la force à me coller, à mettre de l’espoir en moi, à attendre des choses de moi, elle pourrait tout aussi bien m’abandonner. Ne pas chercher du bon en moi, ne pas chercher à me rendre meilleur, ne pas chercher à me connaître. Elle pourrait être libre, me laisser tranquille, m’enlever un poids immense en s’en allant, mais elle ne le fait pas, elle est toujours là, et même lorsqu’elle ne l’est pas, elle… De quoi je parle ? Qu’est-ce que je raconte putain. Je suis dingue. Je deviens dingue, je perds la boule, je perds la tête, tout ce qu’on veut. Je suis timbré putain.


Ne trouvant de repos ni dans ma tête, ni dans mon lit, je m’allongeai, prêt à dormir, avec mon livre des Contes de Beedle le Barde dans les mains, que je feuillette de temps à autres. Il me rappelle mon enfance, quand j’étais petit garçon et que ma mère me les lisait pour m’aider à dormir. C’est ridicule, inutile de le préciser, mais parfois ça m’apaise, et me permet de trouver enfin le sommeil.


Quelques jours passèrent, je ne saurais dire exactement combien, peut-être deux ou trois. Je passais mon temps dans la Salle sur Demande, évitant tout contact humain, tentant de sauver ma pauvre peau. Je me sentais comme un fantôme, un être sans âme, sans passion, sans désir, sans avenir, une âme en peine, un pauvre fou essayant d’obéir à un autre fou. Je déambulais dans les couloirs sans même sentir mes pieds s’appuyer sur le sol, j’évitais les miroirs comme la peste : je ne ressemblais plus au Prince des Serpentard que je fus autrefois. Ma peau était plus blanche qu’elle n’avait jamais été, à la limite du transparent, mes yeux étaient cernés de violet, mes lèvres blanchâtres et mes cheveux ternes. Je perdais du poids à la vitesse de la lumière, mes joues se creusaient un peu plus chaque jour et mon regard était vide. Je n’avais rien, rien à quoi me raccrocher, pas d’avenir, pas de présent, pas de passé, comme si c’était le néant, et pourtant je m’y accrochais, à ce putain de néant.


La nuit était déjà tombée lorsque je passais devant la Grande Salle pour rejoindre ma chambre, éreinté de fatigue, pressé de retrouver mes draps, lorsque je l’aperçue, là, en face de moi. J’interrompu ma marche, restant planté là, au milieu du couloir, me demandant si je n’avais pas une hallucination, ces derniers jours ça ne m’aurait pas étonné. Pourtant elle était bien là, devant moi, immobile aussi, sa malle à la main. Ses cheveux étaient attachés, elle portait un pull gris dans lequel était tricoté quelques ridicules flocons de neige, et un pantalon noir qui moulait ses jolies jambes. Elle me regardait, droit dans les yeux, ne sachant visiblement pas si elle devait sourire ou s’enfuir. Elle était là. Timidement, elle s’approcha de moi, tirant derrière elle la malle presque plus grosse qu’elle, regardant à tour de rôle le sol puis mes yeux. Je sentis mon cœur battre plus vite, plus fort, le sang couler plus rapidement dans mes veines, ma tête brûler, mon estomac me titiller, mes lèvres devenir sèches et mes mains moites. Elle était là.


-         Bonsoir…


Sa voix était hésitante, pourtant douce et délicate, comme si elle chantait. Je l’observais toujours, ses cheveux relevés me permirent de remarquer qu’elle portait les boucles d’oreilles que je lui avais offertes. Elles lui allaient à merveille, évidemment. Le vert lui va parfaitement bien. Je me forçai à ouvrir la bouche pour parler mon tour :


-         Qu’est-ce que tu fais là ?


Je remarquai la maladresse de ma question en observant sa réaction : elle était visiblement offusquée que je demande ce qu’elle pouvait bien foutre là. Sans plus attendre, je modifiai mes propos :


-         Je veux dire… Pourquoi es-tu rentrée si tôt ? Tu ne devais pas passer toutes les vacances chez tes parents ?


Elle prit une grande inspiration semblable à un soupir, se donnant visiblement du courage pour parler de quelque chose de pas facile pour elle, ce qui piqua ma curiosité :


-         Ce n’était pas… Ce n’était pas pareil, sans mon grand-père. J’ai… J’ai préféré rentrer plus tôt. Réviser. Il y a moins de monde ici et je…

-         Tu veux aller boire un verre ? Je l’interrompis sans vraiment comprendre ce que je venais de proposer.

-         Bo… Boire un verre ? Répéta-t-elle, hésitante.

-         Euh, c’est les vacances et je… Je peux sortir et rentrer du château comme bon me semble, à peu près. Et puis, personne ne viendra nous embêter si nous allons au Trois Balais en début de soirée. Si… Si tu veux parler de… Tu sais, ton grand-père ?

-         Oh, eh bien je…

-         Personne ne nous verra, de toute façon. Il n’y a personne, rajoutai-je, pensant qu’il s’agissait probablement d’un argument convaincant.

-         D’accord, répondit-elle doucement. Je… Je vais aller mettre ma malle dans ma chambre et je…

-         Je t’attendrais devant les portes, je vais aller me changer.


Elle partit alors de son côté, et moi du mien, sachant qu’au bout du chemin, nous allions nous retrouver. 


J'espère que ce chapitre vous aura plu ! Si c'est le cas ou non, je serais raaaavie de le lire dans les commentaires ! Merci à Kitsune-aux-amandes de me corriger ! Bonne soirée, LivStivrig


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