Les Premiers Chasseurs

Chapitre 35 : XXXIV Les Eternels

7088 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour 27/01/2024 14:45

CHAPITRE XXXIV : LES ÉTERNELS


Philippe avait vu son ami brutalement repousser du donjon et ne pas se relever. Déjà, des hommes de main de Taran marchaient vers lui, les armes à la main. Il souhaitait se porter à son secours, mais lui-même était encerclé.

Un mercenaire profita de son inattention pour lui lancer un sortilège de désarmement, lui arrachant sa baguette. Le comte voulut se jeter pour la récupérer, un maléfice de bloque-jambes l’en empêcha. Et alors que plusieurs baguettes pointaient sur lui, la voix de Taran se fit entendre :

— Attendez !

Le druide s’approcha du comte, il mit la pointe de son épée sur sa gorge.

— Votre ami va mourir, monsieur le comte, dit Taran, c’est inéluctable. Il ne tient qu’à vous de ne pas l’accompagner dans la tombe. Rejoignez-moi, et vous vivrez, vous et votre épouse.

— Et vivre dans le déshonneur ! contra Philippe. Non, merci ! Mon père ne m’a pas appris à courber l’échine devant le mal.

— Je vois… En cela, vous et les Corvus n’êtes pas différents. Bien… Je respecte votre choix, et je vais vous faire l’honneur de vous tuer moi-même.

Taran leva son épée haut et l’abattit sur le comte qui s’efforça de ne pas cligner des yeux. Un éclair rouge salvateur vint frapper la lame, la faisant sauter de sa main. L’épée vint se planter à quelques mètres du druide. Il se retourna pour voir qui avait osé intervenir, Oscar se tenait au milieu des hommes de main, la baguette toujours tendue vers le Maître.

Une fille se tenait au côté d’Oscar, les autres enfants Corvus s’étaient portés au secours de leur oncle, s’interposant entre lui et les mercenaires. Les hommes de main, surpris, attendaient que leur maître leur indique ce qu’ils devaient faire.

— Ainsi, vous vous retournez contre moi, dit lentement Taran. Moi qui vous ai appris la vérité et vous ai guidé sur le bon chemin, ce que les vôtres vous ont caché.

— Vous disiez que vous nous protégiez, contredit Oscar, mais vous vous servez de nous. Vous n’avez pas hésité à vous servir de moi comme bouclier. Mon oncle n’aurait jamais fait ça. Mon grand-père disait que ce ne sont que les gens malhonnêtes et les lâches qui se cachent derrière les autres.

— Tu me traites de lâche ! s’emporta le druide.

Oscar soutint le regard flamboyant de haine de Taran. Il savait qu’il ne faisait pas le poids face à un tel ennemi, tout comme il savait qu’il ne pourrait pas fuir.

Taran récupéra son épée. Cette situation lui rappelait la trahison des Brandrez à son encontre, mille six cents ans plus tôt, à croire que ce clan ne pouvait être soumis. S’il ne pouvait les avoir sous sa coupe, alors qu’ils meurent. Il ne commettrait pas deux fois l’erreur de les laisser en vie.

— Tuez-les, ordonna Taran. Je me passerai des Corvus.

Oscar et sa cousine se mirent dos à dos alors que le cercle des hommes de main de Taran se refermait sur eux. Plus loin, ils levaient leurs armes vers les autres Corvus. Les visages des enfants exprimaient l’effroi, leurs mains tremblaient. Ils savaient qu’ils allaient mourir.

Taran se désintéressa de cette scène pour porter de nouveau son attention sur Philippe d’Estremer qui gisait encore sur le sol.

— Où en étions-nous ? fit-il en levant de nouveau son épée.

Il frappa, mais encore une fois, sa lame manqua sa cible, arrêtée nette par une autre arme. L’épée en forme de cédille était tenue par une femme à la peau bronzée et aux yeux couleur miel, ceux-ci exprimaient rage et calme à la fois, une expression que seuls les guerriers peuvent connaître. Elle repoussa Taran et se redressa.

Autour d’eux, les mercenaires ne bougeaient plus, figés dans leur dernière posture. Un disque bleu apparut au pied de chacun et ils disparurent sans laisser de trace, les cadavres et Hector Tiergill également.

— Je pensais que vous ne vous montreriez pas, dit Taran. C’est un plaisir de vous revoir, mes vieux amis.

— Ne sois pas si obséquieux, cracha la femme aux yeux de miel.

— Néféri, je sens que ça te démange depuis longtemps de croiser le fer et les sorts avec moi. Je me suis beaucoup amélioré depuis notre dernière entrevue, veux-tu le voir ?

Néféri allait se jeter sur Taran, mais une intervention l’arrêta :

— J’ai l’impression que tu ne comprends pas la situation, Taran. Nous sommes sortis de notre réserve, cela veut dire que nous ne pouvons te laisser continuer sur cette voie.

— Hermès, tu m’as offert l’éternité, car tu croyais en moi, tu penses t’être trompé ? questionna le druide.

— Oui, en effet, si j’avais su que tu ne pourrais jamais te dépêtrer de ta haine, jamais je ne t’aurais offert un éclat de la Pierre Philosophale. Je ne puis malheureusement voir l’avenir. C’est une erreur que je compte bien voir réparer.

Percevant du mouvement près de Mathias Corvus, Taran y porta son regard et vit Chan occupée à soigner Mathias.

— Les quatre Éternels réunis, ce n’était pas arrivé depuis mille ans…

— Et maintenant de la fausse nostalgie ! s’écria Néféri. Crois-tu être capable de survivre seul contre nous trois ?

— Oh ! Car vous allez m’attaquer tous les trois ! Je croyais que ton sens de l’honneur t’obligerait à un duel.

— Hermès, il veut un duel, permets-moi d’accéder à sa requête, sourit l’Égyptienne d’un air de défi. Tu devrais mettre ces enfants et le comte à l’abri.

D’un geste, Hermès fit réapparaître les jeunes Corvus et Philippe sur le parvis du donjon. Lui-même s’y était transporté, ainsi que Chan et Mathias. Voyant que le comte essayait de se traîner vers son ami, il le désenvoûta.

— Qui êtes-vous ? demanda-t-il.

— Je m’appelle Hermès.

— Celui qui a aidé maître Flamel dans sa quête de la Pierre Philosophale !

— Mon aide fut des plus minimes, Nicolas avait déjà presque tout découvert la concernant.

— Va-t-il s’en sortir ? questionna Philippe en se penchant sur Mathias.

— J’ai soigné ses blessures, informa Chan. Il vivra, s’il en a la volonté.

— Mon oncle… geignit Oscar. Je suis désolé…

— Votre amie va-t-elle réussir à vaincre Taran ? interrogea le comte.

— Si c’était son rôle, elle le ferait… répondit Hermès.

— Que voulez-vous dire ?

Hermès ne répondit pas, les premiers chocs entre le khépesh de Néféri et l’épée de Taran résonnaient dans la cour. Philippe ne put s’empêcher d’être subjugué par le niveau des passes d’armes que s’échangeaient les deux combattants. L’Égyptienne se montrait enflammée dans la moindre de ses attaques, littéralement, car sa lame se nimba de flammes ardentes. Le druide n’était pas en reste, plus sobre dans ses déplacements et ses mouvements, il ne pouvait, malgré tout que reculer devant l’intensité des assauts de son adversaire.

Taran parvint à briser l’élan de Néféri en bondissant suffisamment en arrière. Il leva son épée au-dessus de sa tête, psalmodiant une litanie étrange. Descendant du ciel, la foudre vint s’enrouler autour de sa lame. Et lorsqu’il la pointa sur son ennemi, la foudre fondit sur elle. De là où ils étaient, les spectateurs la virent être frappée sans avoir pu esquiver.

Lorsque la poussière retomba, ils eurent la surprise de la voir toujours debout, entourée d’une aura de flammes ardentes à laquelle s’était mêlée la foudre de Taran. Un torrent de feu et de foudre vrombit en direction du druide. Pour parer cette attaque mortelle, il fit surgir un mur de pierre du sol. La chaleur était telle que la roche fut vitrifiée.

Le mur vola en éclat lorsque Néféri le frappa de son khépesh pour passer au travers. Taran ne dut son salut qu’à un réflexe extraordinaire où il parvint à parer le coup qui s’abattit sur lui et à projeter son adversaire derrière lui. Elle se réceptionna sur ses pieds avec une souplesse féline.

— En effet, tu t’es amélioré… dit-elle.

— Je sens que tu vas me dire que ce ne sera pas suffisant malgré tout, répliqua-t-il. Laisse-moi te dire que tu ne me battras pas.

— Peut-être… D’une certaine manière, je commence à comprendre ce que Chan et Hermès m’ont dit avant d’intervenir : je te combattrai, mais te vaincre n’est pas mon rôle, celui-ci revient à quelqu’un d’autre.

— Je ne comprends pas.

— Moi non plus, je te l’ai dit, je ne fais que commencer à comprendre, et je n’aurai pas le temps d’aller au bout de ma réflexion pour le moment. Je vais profiter de ce combat, et donc, faire quelque chose que je n’ai pas fait depuis des siècles…

Aussitôt, Néféri jeta son khépesh qui se planta à quelques mètres, puis elle se transforma en une sorte d’énorme léopard avec un cou plus long couvert de piquant et semblant gonfler à chacune de ses respirations. Philippe n’en croyait pas ses yeux, il n’avait vu cette créature qu’en gravure dans ses livres à Beauxbâtons : un nundu[1].

— Comment a-t-elle fait cela ? demanda-t-il.

— D’après vous, monsieur le comte ? fit Hermès.

— De l’animagie, c’est une animagus ! Je ne savais pas qu’on pouvait se transformer en créatures magiques ! Mes professeurs pensaient la chose impossible.

— Comme la plupart des Sorciers… En fait, nous quatre sommes des animagi. C’est pour ainsi dire, ce qui nous a rapprochés. L’animagie est déjà difficile en soi, mais le faire en créatures magiques est encore plus difficile, voire impossible pour la plupart, c’est un don rare. Je ne sais pas pourquoi nous y sommes parvenus alors que nous ne sommes en aucun cas supérieurs aux autres à la base.

— Vous n’êtes donc pas nombreux pouvant réaliser un tel prodige…

— Actuellement, en dehors de nous quatre, je n’en connais aucun. Par le passé, nous en avons croisé d’autres, aujourd’hui disparus, comme un sorcier pouvant prendre la forme d’un dragon, par exemple.

Philippe n’ajouta rien, que pourrait-il bien dire ? Il fut de nouveau happé par la joute entre Néféri et Taran quand celui-ci se muta en cerbère. Ainsi donc, la bête qui s’était jetée sur eux lors de leur première rencontre avec le druide, les manquant de peu, n’était ni une invocation ni une illusion, c’était Taran lui-même. Il se demanda en quelle créature se transformaient les deux autres, il ne posa pas la question, sachant qu’ils ne répondraient pas.

Les rugissements résonnaient dans les ténèbres, la nuit les portant si loin qu’ils furent perçus par des moldus vivants à plusieurs lieues de là, les inquiétant.

— On croirait deux démons qui se battent… s’inquiéta une femme, pâle de frayeur.

— Espérons qu’ils s’entretuent, que le vainqueur ne vienne pas se repaître de nos âmes, dit son mari près d’elle d’une voix chevrotante.

Ce n’était que coups de crocs et de griffes. Les deux bêtes se rendaient coup pour coup, percutant parfois les murailles du fort, faisant trembler les tours, déchaussant les pierres déjà branlantes, fissurant les murs. Le cerbère était plus massif et plus puissant que le nundu, mais celui-ci avait pour lui sa vitesse et sa souplesse, ainsi qu’une plus grande expérience.

Tout à la contemplation de ce duel furieux, personne ne remarqua l’agitation dans les traits de Mathias.

 

Il n’était plus dans la cour du fort de Wiechenzen, il était de retour au Bois aux Corbeaux, juste devant le portail clôturant la cour. Il n’y avait aucune trace du combat qui s’y était joué et le tas de cendres, vestige du bûcher crématoire sur lequel il incinéra les siens et qu’il s’était juré de nettoyer une fois sa vengeance accomplie, n’était plus là. Ou plutôt, il n’avait jamais été là.

— Vas-tu rester planter là encore longtemps ? lança une voix derrière lui.

Il se retourna et découvrit le visage serein et souriant de son père.

— Entre, tout le monde t’attend, ajouta-t-il en passant le portail.

Mathias le suivit dans la cour. Il y croisa sa sœur aînée Diane qui sortait de l’écurie avec un baquet et lui sourit.

— Enfin de retour ! s’exclama-t-elle. On t’attendait pour Samain. Tu as raté un sacré combat ! Il y a même eu un cerbère !

Elle continua de marcher vers la grange où la porte s’ouvrit, dévoilant Savinien. Celui-ci se contenta de saluer son petit frère d’un geste de la main, sans pour autant le couver d’un regard chaleureux. Mathias vit les enfants de sa sœur se précipiter hors de la maison pour aller aider leur mère à la grange.

— Bonjour oncle Mathias ! lancèrent-ils.

Ces deux cousins disparus revenaient des bois, faisant léviter des fagots qu’ils allèrent ranger au bûcher. Et sous le porche de la maison, son jeune frère Nathaël réparait un panier en osier d’un coup de baguette.

— Bonjour Mathias, dit-il. Tu m’apportes des nouvelles de ma Rose ? A-t-elle donné naissance à notre enfant ?

Mathias ne répondit pas, il se tourna vers son père.

— Où suis-je ? questionna-t-il.

— Enfin, tu poses la question… souffla Orion. Tu ne le vois donc pas ? Tu es chez toi.

— Non… car vous n’y êtes plus, j’ai brûlé vos corps à tous. Et les enfants de Diane… ils ont été dépecés et débités comme des animaux qu’on vend sur le marché.

— Oui, c’est vrai, confirma le patriarche. Nous sommes morts. Tu es le dernier Corvus en âge de te battre, ou plutôt, en étant capable. Tu en es maintenant le patriarche.

— Non… si je suis là, c’est que j’ai moi-même péri, en conclut Mathias. Tout est fini pour moi et pour le clan. C’est la fin des Corvus.

— En es-tu sûr ? Ou bien, est-ce ce que tu souhaites ? Mourir et ne plus avoir à te battre ?

— Je ne sais pas… La question serait plutôt : en suis-je capable ? Taran est trop fort, il sait trop de choses, jamais je ne pourrais l’égaler.

— Certes, il est fort et il a des siècles d’expérience, acquiesça Orion. Mais s’il nous a attaqués en traître, c’est qu’il a peur de nous.

— Pourquoi ?

— Tu as appris pour nos ancêtres, ils se sont battus à ses côtés, car à l’origine, sa cause était juste : repousser l’envahisseur romain pour protéger notre peuple, sa culture et ses traditions. À vrai dire, au début c’est nous qui nous sommes servi de lui et de son désir de vengeance. Nous n’avons pas de quoi en être fiers… Mais les Romains étaient inarrêtables, leur population a commencé à se mêler à la nôtre. Au final, nos deux cultures se sont mêlées. Nous y avons perdu, certes, mais nous y avons aussi gagné. Ce constat n’a pas arrêté Taran, trop aveuglé par sa haine. Il a voulu s’en prendre aux civils innocents, nos ancêtres ne le permirent pas. Même à cette époque, protéger l’innocence, quelle qu’elle soit, était la base de nos valeurs. Ils se sont retournés contre lui, le forçant à la fuite.

— Il était jeune à l’époque, sa force était moindre.

— Tu dis vrai, mais il en a conservé un souvenir cuisant. Et malgré tout, il était suffisamment malin pour se rendre compte de la force qui nous habitait. Lorsqu’il a voulu mettre son plan actuel à exécution, il savait que nous serions comme une épée qui le combattrait et un bouclier qui protégerait les innocents. Et contre nous tous, il n’était pas sûr de ses chances.

— Vous étiez six combattants chevronnés et vous n’avez rien pu faire ! Comment penses-tu que je vais y arriver seul ?

— Je n’en sais rien, je ne suis pas devin. Peut-être vas-tu mourir et nous rejoindre ici…

— Alors autant que je reste…

— Bien sûr, rit Orion, comme si c’était ton genre. Même si tu n’avais aucune raison d’y retourner, tu irais. Et tu as des raisons de te battre, n’est-ce pas ?

Mathias pensa immédiatement à Charlotte, à son sourire et à la chaleur de ses bras. Puis ses pensées lui amenèrent les visages de Rose, de son neveu Nathaël, et de son ami Philippe. Oui, il avait des raisons de se battre, même si ce combat était perdu d’avance.

— Surtout s’il est perdu d’avance, intervint Orion, devinant visiblement ses pensées.

— Marque son esprit, ajouta Diane, si Taran sort victorieux et prend le pouvoir, que ça soit dans la douleur et dans la peur.

— Qu’il garde cet effroi à l’esprit, enchaîna Savinien, qu’elle le suive tout le long de son règne.

— Qu’il craigne toujours de perdre son pouvoir, dit Nathaël, car il le perdra un jour, par la main de mon fils ou celle d’un autre.

— Tu ne mettras peut-être pas un point final à cette histoire cette nuit, mais tu engendreras une dynamique qui annoncera sa conclusion plus tard, finit Orion.

— La question reste entière : comment puis-je le combattre ?

— Nous sommes les Corvus, descendants des Brandrez. Puise dans la force cachée au fond de nous. La guerre… le combat a toujours fait partie de nous. Et ce sera toujours le cas pour des siècles, quel que soit notre nom. Notre essence sera toujours celle des Guerriers-Corbeaux, porteurs et défenseurs de l’espoir[2]. Nous demeurerons guidés par nos valeurs et notre honneur.

Des images envahirent l’esprit de Mathias durant le discours de son père. Par flashs, il vit plusieurs sorciers et sorcières présentant des traits communs aux membres de sa famille. Au début, dans d’étranges tenues noires et armés de baguettes en cristal. Puis à l’époque des invasions romaines, portant le glaive et la baguette de bois, il reconnut Taran faisant face aux Brandrez.

Le temps sembla continuer de filer. Il repéra des hommes d’armes du moyen-âge, le combat du Bois aux Corbeaux qui avait emporté les siens, Nathaël fils adulte combattant un mage noir à la peau marquée de sillons pâles, comme des éclairs imprimés dans sa chair…

Vinrent ensuite des images qu’il comprit venant d’un futur plus lointain, avec ses descendants ou ceux de Nathaël. Les habits évoluaient, la façon de combattre aussi. Un sorcier de son clan combattait un autre aux yeux violets en pleine rue. Un autre lui ressemblant comme deux gouttes d’eau faisait face à plusieurs dizaines d’ennemis et lançait un Feudeymon.

Les dernières visions montrèrent tour à tour une jeune femme aux yeux en amande au visage déterminé, et un jeune homme armé d’un sabre avec une forme que Mathias n’avait jamais vu combattant dans un paysage rouge et dans le vide céleste. La dernière image montra plusieurs combattants, habillés de noir, dans une bataille rangée contre des géants et d’autres ennemis. Un écusson brodé sur leurs tenues représentait un corbeau stylisé, le tout entouré de deux devises, une qu’il connaissait bien, celle des Corvus : Quis Iudices Diffidam. L’autre lui était inconnu, mais il comprit tout de suite sa philosophie : Jamais à genoux, Toujours debout.

Tous étaient des descendants du clan Brandrez, il le sentait au fond de lui, ils étaient de son sang. L’écho de leurs exploits guerriers résonnait à travers le temps.

Perché sur le rebord du puits, Bran émit un croassement strident. Il semblait appeler Mathias.

— Il va te ramener là-bas, dit Orion. Ta nuit sera dure…

— Vous reverrais-je ? demanda Mathias.

— Ce soir, ou un autre jour que j’espère lointain, après que tu aies vécu une longue et heureuse vie. Maintenant, va, et sois notre épée.

 

Lorsqu’il ouvrit les yeux, Mathias ne vit rien d’autre que le ciel étoilé. Des rugissements de bêtes résonnaient furieusement à ses oreilles. Il releva la tête sans que personne ne le remarque. Il vit Philippe et Oscar près de lui, subjugués par quelque chose se passant dans la cour. Ils ne firent attention à lui que quand il redressa son buste.

— Mathias ! s’exclama Philippe, venant immédiatement l’assister. Tu reviens à toi !

— Ouais… soupira-t-il. Qu’est-ce que j’ai raté ? Où est Taran ?

— Tu ne vas pas en croire tes yeux ! Lève-toi.

Aidé par son ami, Mathias vit dans un premier temps l’homme et la femme qu’il ne connaissait pas. Oscar et les enfants s’arrachèrent au spectacle qui se déroulait dans la cour.

— Mon oncle ! s’écria Oscar. Je suis vraiment désolé, je me suis laissé convaincre par ses mensonges.

— Tu as fait une erreur, mais tu es revenu, rassura Mathias. Tu as appris, tu es meilleur et plus fort maintenant.

— Je suis encore loin de votre niveau…

— Être fort, ce n’est pas seulement savoir se battre. Cela étant, pour le moment, place au combat.

Il posa les yeux sur la scène surréaliste qui se jouait en contrebas. Son visage demeura fermé, aucune surprise ne marqua ses traits. Bran vint se poser sur son épaule, Mathias sentit alors un nouveau lien entre lui et l’étrange oiseau. Ce ne fut pas la seule chose qu’il ressentit, une énergie nouvelle le parcourait. Simple motivation ? Peut-être, mais qu’importe, il comptait bien s’en servir pour mettre son ennemi hors d’état de nuire.

— Mon oncle, vos armes, dit Oscar en lui tendant son épée et sa baguette.

— Tu restes ici et tu veilles sur les plus jeunes, ordonna Mathias. Si le combat tourne mal…

— Nous nous assurerons qu’il ne leur arrive rien, intervint Hermès, vous pouvez vous battre l’esprit tranquille.

— J’aurais beaucoup de questions à vous poser, si je survis…

— Je ne peux vous promettre d’y répondre.

— J’y vais.

— Pas seul, prévint Philippe. Même si pour le moment, je ne sais pas comment on va s’attaquer à ce cerbère.

— Laisse-moi faire, je vais l’obliger à reprendre forme humaine.

Mathias rengaina sa broadsword et rangea sa baguette sous les regards d’incompréhension de Philippe, Hermès, Chan et des siens. À peine Bran eut quitté son épaule d’un coup d’ailes, qu’il se métamorphosa en corbeau. En tandem, ils fusèrent vers le cerbère et le nundu.

— Je ne savais pas qu’il était un animagus ! s’exclama Philippe.

— Il ne l’était pas, dit Oscar, mon père l’était, mon grand-père aussi, mais pas lui.

— C’est quelque chose de nouveau alors, fit Hermès.

— Impossible ! Il faut des mois voire des années pour le devenir, rappela le comte.

— En temps normal, oui. Croyez-en ma longue expérience : rien n’est impossible.

Les deux oiseaux surgirent entre les bêtes belligérantes, les surprenant. Le cerbère et le nundu se séparèrent d’un bond. Ils se désintéressèrent de Néféri pour se concentrer sur Taran, tournant autour de ses têtes. Les mâchoires du cerbère claquèrent, essayant de croquer les deux corbeaux au vol. Plusieurs fois, il les manqua de peu, ses dents frôlant le plumage.

Le ballet aérien perturba le druide, ses têtes se percutèrent à maintes reprises, il tituba, s’emmêlant les pattes, et finit par tomber lourdement au sol.

Taran choisit de revenir à sa forme originelle et se releva, le regard haineux. Néféri se muta également, observant le druide d’un œil neutre. Les deux corbeaux virevoltèrent encore quelques secondes avant de plonger vers le sol. Mathias se posa à quelques mètres de son ennemi. Immédiatement, il tira son épée et sa baguette. Il fut rejoint sans délai par Philippe.

L’Égyptienne alla calmement récupérer son khépesh et le remit au côté. D’un pas tranquille, elle se dirigea vers le donjon.

— Tu abandonnes notre duel, lui lança Taran. J’ai donc gagné.

— Crois-le si ça peut te faire plaisir, répliqua Néféri, ce sera la dernière satisfaction de ta vie. Je te l’ai dit : mon rôle n’est pas de te vaincre.

— Ma dernière satisfaction, dis-tu ! Je ne mourrais pas. Je compte vivre et dominer éternellement. Vous en serez témoin.

— Tu domineras peut-être, mais pas longtemps. Adieu, Taran.

Elle rejoignit ses compagnons, adressant une moue sceptique à Hermès.

— J’espère que tu as raison… soupira-t-elle.

— Que j’aie raison ou tort, ce n’est plus entre nos mains, dorénavant, dit Hermès. Nous ne sommes plus que spectateurs.

— Et toi, Chan ? Tu ne veux pas me dire comment ça va se terminer.

— Je ne vois que des possibilités de l’avenir, il y en a trop pour deviner l’issue de ce combat, répondit-elle.

 

— Vous voulez vraiment mourir ! fit remarquer Taran. Vous êtes ridicules… Venant d’un descendant des Brandrez, je ne suis pas étonné, mais de votre part, comte d’Estremer, l’honneur est-il plus important que votre vie ? Réfléchissez, je vous offre…

Un éclair l’interrompit, il l’esquiva au dernier moment et le sort lui frôla le crâne. Taran leva son épée pour bloquer âprement la broadsword. Les lames frottant l’une contre l’autre, les visages des deux adversaires proches, Mathias grogna :

— Tu parles trop…

Le Corvus continuait de pousser, gardant le druide sous pression. Celui-ci, le visage crispé, sentait qu’il ne devait pas relâcher son effort, au risque d’être coupé en deux. Et surtout, il savait que Philippe d’Estremer se jetterait bientôt dans la mêlée.

Et en effet, il se précipita. Taran pointa sa baguette vers le sol, une spirale vert émeraude se dessina autour de lui, englobant ses adversaires, l’énergie crépitait dans l’air en étincelles de la même couleur. Instinctivement, Mathias sentit le danger, il rompit le contact et bondit en arrière pour sortir de la zone. Philippe fit de même en plongeant sur le côté.

Ils s’étaient à peine sortis de la spirale que de celle-ci surgit une ronce noire aux pointes acérées. La plante dépassa les limites définies par le symbole. D’un formidable réflexe, Mathias trancha la branche qui manqua de l’éborgner. Philippe parvint à tourner la tête et n’eut que le front d’entailler.

Les deux hommes se regardèrent un instant, ils eurent la même idée pour débusquer leur proie. Ils tendirent leurs baguettes vers le bosquet de ronces en incantant :

— Incendio !

Les langues de feu vinrent enflammer les ronces, la température monta rapidement, forçant Taran à s’échapper en faisant éclater sa protection. Il était à peine sorti que Mathias lui lança un Avada Kedavra qu’il dut bloquer en dressant un puissant bouclier.

Tout à sa défense, il ne vit pas Philippe transplaner dans son dos et lancer un Diffindo, creusant un sillon dans sa chair. Ivre de rage et de douleur, le druide étendit son bouclier d’un coup pour repousser Mathias en arrière d’un vol plané. Puis il tendit sa baguette sur le comte, l’entourant d’une grosse bulle d’eau.

Philippe tenta de s’en extirper en nageant ou à l’aide de la magie, mais rien n’y fit, il resta prisonnier de cette cage liquide. Et alors qu’il se voyait déjà mourir noyer dès que ses poumons, à court d’air, le forceront à inhaler, il vit la bulle se geler. Il eut beau s’agiter, il ne fit que taper contre la couche de glace qui se rapprochait de lui.

— Cofringo !

Le sort explosa entre Taran et Philippe, projetant le druide au sol et faisant éclater la bulle qui emprisonnait le comte. Taran dut transplaner pour éviter le coup d’épée qui faillit l’embrocher.

Mathias vint aider son ami à se relever. Ils refirent immédiatement face à leur némésis.

 

— Ils vont finir par se faire tuer, dit Néféri, la différence de niveau est flagrante.

— Ne les enterre pas trop vite, fit Hermès.

— Ton éternel optimisme m’énerve… Quoiqu’il en soit, que tu sois d’accord ou non, si Taran gagne ce combat, je le finis.

 

— Pour qui vous prenez-vous ? lança Taran. Vous n’êtes que des insectes, incapables de comprendre ce qui est bon pour vous, pour les nôtres ! Vous vous battez pour condamner les Sorciers à la nuit et à la clandestinité. Tout ça parce que vous n’êtes que des ignorants. Je vis depuis plus de mille sept cents ans, je sais comment vous guider, vous, jeunes enfants sans expérience. Je suis un dieu !

— C’est vrai, tu as un point commun avec certaines divinités moldues : l’arrogance, répliqua Mathias.

— Tu n’es pas un dieu, juste un homme, ajouta Philippe.

— Je suis éternel ! s’écria le druide.

— Ni éternel ni immortel, le sang que tu perds en est la preuve. Et ce n’est qu’un début…

Taran se crispa, ses armes tremblant dans ses mains. Il sentait la blessure infligée par le comte d’Estremer suinter de sang, l’air froid lui brûlant les chairs.

— Je vous ai donné plusieurs chances de survivre, vous m’avez fait perdre assez de temps, dit-il.

Taran ferma les yeux un instant. Lorsqu’il les rouvrit, ils luisaient d’un halo pâle dissimulant ses pupilles. Le druide psalmodia une étrange litanie. Il sembla à ses adversaires et aux spectateurs que la nuit se fit plus profonde autour de lui. Bientôt, on ne distinguait plus que la lueur irradiant de ses orbites.

Les ombres se mirent à se mouvoir et prirent la forme de créatures cauchemardesques dotées de griffes et de crocs, d’apparence changeante et fugace.

Soudain, les créatures silencieuses foncèrent sur les deux hommes. Ils parvinrent à esquiver les premières, mais furent submergés et renversés. Ils se fatiguèrent à frapper et incanter, c’était comme se battre contre le vent.

Philippe décida d’ignorer les ombres et accourut vers Taran. Il fut intercepté par une créature et resta au sol, le torse lacéré de trois profondes entailles.

Voyant son ami à terre, Mathias voulut venir à son secours, il fut lui aussi projeté au sol, perdant sa broadsword dans sa chute. Les ombres se jetèrent sur lui, voulant l’achever, démontrant la volonté de leur maître d’en finir avec les Corvus.

Taran jubilait intérieurement, il avait failli avoir peur et au final, il s’en sortait sans trop de dommage. Bien sûr, il était conscient que Néféri tenterait de l’arrêter sitôt ces deux gêneurs morts. Il s’attendait à un combat beaucoup plus dur, mais il se savait capable d’en sortir victorieux.

Les ombres recouvraient Mathias, le druide imaginait déjà découvrir un cadavre sanguinolent lorsqu’elles s’écarteraient. Et ce fut comme une explosion sans bruit ni chaleur, les créatures volèrent dans toutes les directions, lacérées et déchiquetées par une lame lumineuse qui faisait des arabesques.

Mathias accourut vers Philippe pour le protéger des créatures survivantes qui se jetaient sur lui. Il les annihila sans difficulté et aida son ami à se relever.

Taran regardait la baguette du spadassin, la lame lumineuse jaillissait de son extrémité. Malgré les siècles, il n’avait jamais oublié ce sortilège pratiqué uniquement par certains clans de Sorciers adeptes des arts guerriers. Il portait bien des noms : Cythraul yn Llad, Cleddyf Goleuni, Luminis Gladius… Ce qui signifiait la Pourfendeuse de Démons ou l’Épée de Lumière. Les origines de ce sort se perdaient dans la nuit des temps.

Ainsi, les descendants des Brandrez continuaient de se le transmettre…

Pour s’être retrouvé à la pointe de cette épée, il savait qu’elle était redoutable.

— Peux-tu encore te battre ? questionna Mathias.

— Je ne compte pas abandonner, grogna Philippe.

Il voulut faire un pas vers le druide, mais il s’effondra à genoux, le souffle court et du sang imbibant ses vêtements.

— Reprends des forces, je m’occupe de lui, assura le spadassin.

Il récupéra sa broadsword et s’approcha de son ennemi.

— Et si nous dansions, toi et moi ? dit-il.

— Ce sera danser avec la mort pour toi, répliqua Taran.

— C’est une vieille amie de la famille. C’est toujours un plaisir.

— Alors, soit.

Sans attendre, les deux adversaires se jetèrent l’un sur l’autre. Taran bloquait la broadsword avec son épée et esquivait celle de lumière, sachant qu’il n’avait pas de moyen de la parer.

Les deux combattants ne se déplaçaient quasiment pas, tournant en rond comme deux valseurs.

— Il recule… fit Néféri.

Effectivement, sous les assauts énergiques du Corvus, Taran semblait ployer un peu plus à chaque coup, évitant la lame de lumière de peu. Son visage était crispé par l’effort et son regard exprimait l’effroi. L’invocation des créatures de l’ombre l’avait plus vidé de ses forces qu’il ne l’avait imaginé.

L’oiseau noir, porteur d’espoir, devenait le messager de la mort pour lui.

Non ! Il ne pouvait l’accepter. Un second souffle le gagna, il inversa la tendance, mettant Mathias sous pression. Et dans un ultime effort, il asséna un sortilège de répulsion.

Il l’arrêta en plein vol, le figeant les bras en croix à trois mètres du sol. Il lança son épée, droit sur Mathias, ne voulant plus lui laisser la moindre chance. L’arme fut interceptée par un éclair lancé par Philippe.

Déconcentré par cette intervention, il ne remarqua pas que Mathias avait retrouvé l’usage de ses bras. Le spadassin lâcha sa broadsword pour venir se saisir de son pistolet dans sa ceinture et tira. La balle atteignit le druide en pleine poitrine.

Aussitôt, le Corvus retomba sur ses pieds en même temps que Taran s’effondrait, lâchant sa baguette. Il récupéra son épée et s’approcha d’un pas tranquille de l’ennemi gisant. Titubant, Philippe le rejoignit.

— Une arme moldue… gémit Taran avec colère. Je me suis fait avoir par une arme moldue. Quel déshonneur… Pour moi, bien sûr, mais aussi pour toi… Où est ta fierté de sorcier ?

— Dans un combat à mort, il n’y a pas de règle, répliqua Mathias. Je me suis servi de tous les moyens à ma disposition.

— Je ne suis pas encore mort, et je devine que votre Ministre de la Magie veut me voir juger, pour faire un exemple. Mon heure n’est pas encore venue…

— Car tu crois que je vais te laisser vivre ? rugit Mathias en levant son épée.

— Mathias ! arrêta Philippe. S’il te plaît… Il doit être jugé.

— As-tu oublié ta mère ?

— Non, justement. Plus je pense à elle, plus je me dis qu’elle voudrait que je reste fidèle aux valeurs de mon père : la droiture et la justice. Je te demande de l’épargner au nom de ces valeurs, mais je comprends ta soif de vengeance, et sache que tu ne perdras pas mon amitié si tu l’achèves.

Le bras de Mathias resta haut, prêt à s’abattre. Taran savait que son salut ne dépendait que de l’impact des paroles du comte sur le spadassin, et de la décision qui en découlerait.

Sans un mot, Mathias planta sa lame dans le cœur du druide qui soupira douloureusement. Ainsi, après une si longue vie, il mourait comme ça, de la lame d’un Brandrez.

— Désolé, Philippe, dit-il en retirant son épée du corps de Taran. Je ne pouvais lui laisser une chance de s’en sortir d’une quelconque manière.

— Je te l’ai dit, je comprends ta décision et tu demeures toujours aussi précieux à mes yeux, assura Philippe. Ton choix aussi était bon. Qui sait qui aurait pu se ranger à ses côtés ?

Les neveux et nièces de Mathias approchèrent, accompagnés des Éternels. Hermès s’agenouilla près du corps encore chaud de son ancien compagnon. Il se recueillit un instant et fouilla sous ses vêtements, récupérant l’éclat de Pierre Philosophale monté en pendentif.

— Allez-vous répondre à mes questions maintenant ? demanda Mathias.

— Sans vouloir vous presser, monsieur Corvus, intervint Chan, je sens que le rituel d’amnésie massif est en cours. Ce n’est qu’une question de minutes avant qu’il ne se conclût. N’avez-vous pas quelqu’un à rejoindre ?

Il pensa immédiatement à Charlotte et chercha conseil dans le regard de Philippe.

— Fonce ! lui intima le comte. Rejoins-la !

Sans attendre, Mathias transplana.

Chan s’approcha de Philippe et lui prodigua des soins. Néféri demanda à Hermès de s’éloigner du corps de Taran. Elle y mit le feu, le réduisant en cendres en quelques instants.

— Aucun nécromancien n’usera de sa puissance, justifia-t-elle. Nous n’avons plus rien à faire ici.

— En effet, approuva Hermès. Dès que Chan en aura fini avec les soins au comte d’Estremer, nous partirons. Vous n’avez pas de questions à nous poser, monsieur le comte ?

— Une foule ! s’exclama-t-il. Mais je sais que vous ne me répondrez pas et n’ai aucune raison de vous imposer un interrogatoire. Je me contenterai de ce que je sais ou pense savoir.

 

Mathias apparut dans un claquement de fouet devant le château d’Estremer. Il s’y précipita, appelant après Charlotte. Attirés par ses cris, Isabelle et Noé sortirent du salon.

— Où est-elle ? demanda-t-il.

— Elle est allée au petit jardin prendre l’air, répondit Isabelle. Où est Philippe ? Est-il… ?

Mais il ne répondit pas, courant à grandes enjambées.

Il jaillit du château, dans le jardin où l’aube fraîche illuminait timidement le haut des haies. Il appela Charlotte à plusieurs reprises. Celle-ci se précipita en reconnaissant sa voix. Ils sautèrent dans les bras l’un de l’autre. Il lui prit les mains et la regarda droit dans les yeux.

— Si tu veux de moi, je veux de toi pour l’éternité, voire au-delà, dit-il.

— Je te veux pour l’éternité, répondit-elle.

Les deux amants sentirent une magie passer entre leurs mains et les lier à jamais par le cœur et l’âme.


[1] Pour une référence visuelle, voir le film « Les Animaux Fantastiques ».

[2] Dans plusieurs cultures anciennes, le corbeau est symbole d’espoir et/ou bénéfique. Il a pris une connotation négative qu’avec l’avènement du Christianisme qui cherchait à diaboliser les symboles païens.


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