Sauvetage imprévu

Chapitre 12 : Le choc

1198 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour 25/03/2022 20:02

En arrivant dans le salon où Narcissa était installée, surveillant Drago et un enfant inconnu, Severus fronça les sourcils, perplexe.

Le gamin minuscule ne bougeait pas, et semblait observer Drago jouer d’un air fasciné. Il portait un pyjama trop grand pour lui, il était maigre comme un clou, et avait une masse de cheveux noirs en bataille qui lui donnait un air canaille.

Pourtant, il ne souriait pas. Il était bien trop immobile et silencieux pour un enfant de cet âge.


Son filleul lui tendit une peluche de dragon — c’était lui-même qui l’avait offerte au blondinet — et le brun n’osa pas la prendre, visiblement effrayé. Il lança un regard en direction de Narcissa, et se recroquevilla sur lui-même, comme s’il attendait un coup.


Severus pouvait prétendre qu’il n’aimait pas les enfants — c’était le cas, effectivement — mais il ne pouvait pas rester indifférent à ce pauvre gamin trop maigre et trop petit, qui lui rappelait douloureusement sa propre enfance.

Il ferma les yeux, essayant de chasser ses souvenirs sombres avant d’avancer lentement, les yeux plissés, observant ce qui se passait avec attention.


Comme Drago insistait avec un sourire amical, le petit garçon accepta finalement la peluche, la tenant comme si elle était faite de cristal. Visiblement, il n’avait jamais eu de jouets, ni même de doudous pour se réconforter.



D’un coup, Drago vit son parrain et il laissa échapper un glapissement de joie. Il se redressa brusquement, et se jeta sur l’homme avec un gloussement ravi.

Malgré lui, Severus eut un sourire amusé, il ne comprenait toujours pas pourquoi Drago lui vouait un culte alors qu’il ne l’avait jamais encouragé, et attrapa l’enfant pour le serrer brièvement contre lui. Rapidement, le gamin gigota comme un asticot pour glisser au sol. Puis, attrapant la main de son parrain, il l’entraîna vers l’enfant mystérieux.


Le maître des potions se laissa faire avec bonne volonté inhabituelle et Drago posa la main sur l’épaule de l’autre petit garçon, toujours plongé dans l’observation du jouet qu’il tenait. Ce dernier sursauta brusquement, pâlissant aussitôt, et il lâcha la peluche qu’il tenait, comme s’il avait l’impression d’avoir fait une bêtise.

Severus n’avait pas besoin de voir les bleus qui jaunissaient sur ses poignets osseux pour comprendre. Son petit corps devait être marqué par les coups en plus du reste et quelque chose au fond de lui se révolta…



Cependant, l’homme oublia tout lorsque l’enfant leva la tête vers lui. Il se pencha un peu brusquement, mais empêcha le petit de s’écarter en l’attrapant par les épaules, d’une prise ferme tout en étant délicate. Il passa de longues minutes à fixer le gosse tremblant qui attendait les yeux écarquillés, puis il soupira et leva une main tremblante pour relever ses mèches folles. Dégageant lentement le front, il vit tout de suite la cicatrice et il resta figé, ses yeux sombres fixés sur la marque encore rouge.


Puis, il lâcha l’enfant, qui se ramassa immédiatement sur lui-même, et recula, haletant.



Son regard alla de Lucius à Narcissa et il vacilla en secouant la tête, incrédule.

   — C’est impossible…


Narcissa plissa les yeux, la fureur brillant dans ses yeux gris. Elle chuchota presque en répondant, mais chacun de ses mots avait le tranchant de l’acier.

   — Impossible ? Qu’est-ce qui est impossible ? Que cet enfant soit ici ? Qu’il soit avec nous ? Ou que nous l’ayons trouvé dans cet état ?


Lucius tenta de l’apaiser en posant une main sur son épaule, mais elle se dégagea brutalement, les poings serrés.

   — Alors Severus ? Précise donc le fond de ta pensée !



Dans son état normal, il aurait répondu agressivement ou avec une ironie féroce. Cependant, l’homme secoua la tête lentement.

   — Ce garçon… c’est… les yeux de Lily. Je reconnaîtrais ce regard n’importe où… Il est… le garçon qui a survécu. Il… Dumbledore a assuré qu’il était protégé et choyé.


Lucius soupira.

   — Constate par toi-même. Nous t’avons appelé pour que tu l’examines et que tu le soignes. Tu ne pourras pas prétendre que tu as été trompé, mon ami.


Severus cligna des yeux.

   — Le soigner ? Qu’allez-vous faire de lui ?


Narcissa grogna presque, plissant les yeux.

   — Certainement pas le renvoyer d’où il vient ! Et certainement pas le confier à ce vieux fou qui se permet de… jeter un enfant comme on jetterait un objet devenu inutile ! Ce garçon n’a plus personne pour prendre soin de lui, mais… nous avons une dette envers lui désormais : il a protégé Drago d’une agression.


Lucius roula des yeux, essayant de faire sourire Severus — mais ce dernier était en état de choc comme si son univers entier venait de basculer.

   — Ma chérie, tu avais prévu dès l’instant où tu l’as vu de le prendre sous ton aile.


Il récolta un regard noir de son épouse, et Severus soupira en se frottant les yeux.

   — Ce n’est pas ça… Vous savez qui il est. Et à qui avons-nous juré fidélité ? À la personne même qui a fait de lui un orphelin !



Il y eut un lourd silence, que Narcissa brisa en se levant rapidement.

   — Il est mort ! Il a été vaincu par un bébé, grand bien lui en fasse ! Ce petit garçon est innocent, il ne comprend rien à cette guerre et pourtant il est celui qui en souffre le plus… Je ne sais pas à quoi joue Dumbledore, mais je refuse de le laisser approcher ce petit !


Severus souffla, l’air nauséeux.

   — Dumbledore dit… il dit qu’il va revenir. Qu’il n’a pas été détruit, juste… repoussé provisoirement. Que cet enfant est le seul à pouvoir l’arrêter et qu’il doit vivre caché pour ne pas devenir la cible des Mangemorts.


Les yeux de Lucius brillèrent d’une lueur furieuse et il serra les poings.

   — Regarde-le, Severus. Aucun Mangemort n’oserait s’en prendre à un enfant de cette façon. Aucun d’entre nous, Sang pur, n’aurions accepté un tel traitement sur cet enfant, quel que soit le destin qui pèse sur ses épaules. Quel monstre pourrait infliger ça à un enfant ?



Severus reporta son attention sur le petit garçon et sursauta en croisant les yeux trop verts. Le gamin le fixait d’un air étrange, sans baisser les yeux, comme s’il y avait entre eux une reconnaissance implicite. Comme si ce gamin maigre à faire peur et couverts de marques décrivant son calvaire arrivait à sentir en Severus l’ancien enfant battu qu’il avait été autrefois…


Laisser un commentaire ?