James Sirius Potter : L'Aîné - Saison 1
-En l’état, rien ne permettrait de reconstituer le souvenir de Dawlish …
Tandis que Harry, Ron et James observaient la haut-fonctionnaire d’un air déçu, celle-ci continuait d’agiter le contenu instable de la fiole renfermant le souvenir de l’Auror qui avait prétendument tué Tarik Shafiq.
-Pourtant, hier au Terrier, tu m’avais dit que tu avais des pistes … avança Harry sur un ton déçu.
Hermione l’observa avec un sourire malicieux, puis reprit :
-J’ai dit, en l’état, Harry. C’est toi et Ron, qui m’avez mis sur la piste. Vous avez parlé de Serpentard …
-Oui, pour le Quidditch, marmonna Ron. Et alors ?
-Je ne sais pas pourquoi, j’ai pensé aux Gaunt. Morfin Gaunt pensait avoir tué la famille Jedusor, car sa mémoire avait été modifiée par Voldemort. Or, Dumbledore avait pu récupérer le vrai souvenir, où Morfin voit Voldemort à Little Hangleton.
-C’est vrai … approuva Harry.
-Alors, j’ai demandé au Professeur Everett d’accéder aux archives de Dumbledore ! Il t’avait dit qu’il avait récupéré ce souvenir peu avant la mort de Morfin. J’ai vérifié dans les registres, c’était en 1972. J’ai donc cherché les lettres de cette période-là …
-C’était donc ça tout ce tas de vieilles paperasses dans ton bureau à la maison ? demanda Ron.
-Oui ! Et j’ai trouvé quelque chose ! Dumbledore avait demandé l’aide de nulle autre que Norbert Dragonneau ! Et il m’a gentiment répondu par retour de hibou. Il se souvient très bien de ce qu’ils avaient fait.
-Tu es géniale, Hermione ! Alors comment s’y sont-ils pris ? s’impatienta Harry.
-Le Démonzémerveille !
-Le quoi ? interrogèrent les trois Aurors en chœur.
James n’avait jamais entendu nulle part ce nom. Bien que, pour faire plaisir à Hagrid, il s’évertuait à suivre en cours de Soins aux Créatures Magiques, brosser des Boursoufs ou des Veaudelunes n’avait jamais été son activité magique favorite. Mais malgré son manque d’intérêt pour la matière, il n’avait pas souvenir d’entre parler d’un Démonzémerveille. Hermione, quant-à-elle, avait l’air de beaucoup s’amuser de détailler toutes ses découvertes au trio d’Auror incrédules. Elle expliqua :
-C’est une créature peu connue qui avait été étudiée par Norbert. Mi-Chauve-souris, mi-papillon. On en trouve quelques spécimens en Afrique. Elle a la faculté d’absorber les souvenirs et elle recrache un sérum qui a pour propriété d’effacer les mauvais souvenirs …
-Intéressant … répondit lentement Harry, visiblement plongé en pleine analyse des paroles de sa meilleure amie et belle-sœur. Et tu penses que ce sérum pourrait effacer les traces du sortilège de Confusion sur le souvenir ?
-Il semble que ça ait fonctionné pour Morfin Gaunt, en tout cas.
-Alors, fonçons chez Dragonneau et récupérons un de ces sérums !
-Du calme, Ron, tempéra son épouse. Norbert n’a plus en sa possession de Démonzémerveille depuis belle lurette. Et l’utilisation du sérum est strictement réglementée dans notre pays. L’importation est interdite, et Rolf et Luna, n’ont pas non plus de Démonzémerveilles en leur possession dans leur réserve. Non, la solution ce serait … Harry ? Vous avez toujours un binôme en mission en Egypte ?
-Vale et Valiant, oui, confirma le directeur du Bureau. Tu penses qu’ils pourraient en trouver là-bas ?
-Luna et Rolf m’ont confié les coordonnées d’un élevage de Démonzémerveilles sûr. Vos collègues pourraient en récupérer. Une fois que vous aurez le sérum, revenez vers moi. Nous ferons la manipulation, et nous serons fixés …
-Tu es géniale, tante Hermione ! ne put s’empêcher de souffler James à la vue de sa marraine qui avait monopolisé toutes les ressources en sa possession pour faire avancer toute l’enquête.
Celle-ci lui sourit modestement, et prit congé des Aurors, tandis que Harry se ruait vers son bureau pour récupérer un Miroir à Double Sens et demander une communication avec ses Aurors détachés en Egypte.
-Ron ? Je vais prendre contact avec Vale et Valiant. Il faudrait rédiger un rapport d’interrogatoire en mettant Hermione en témoin anonyme. Manière de nous couvrir si Greengrass nous cherche des Noises parce que nous introduisons un sérum interdit …
Il était un peu plus de midi, quand Ron et James eurent terminé de rédiger le rapport d’interrogatoire. Ils l’avaient déposé au bureau de Greengrass pour qu’il donne son aval à l’introduction de sérum. D’après Harry, Vale et Valiant pourraient transplaner rapidement vers l’élevage de créatures et pourraient utiliser un Portoloin pour le lui ramener. Percy -qui avait la charge des Transports au Ministère- avait donné son accord pour un tel dispositif.
-Plus qu’à attendre que ce vieux grigou nous gratte du papier, marmonnait Ron, alors que Harry leur expliquait la procédure en déjeunant dans la salle de pause du Bureau des Aurors.
Cet après-midi là, Ron irait relayer Seamus Finnigan à la surveillance du Manoir Flint, et James resterait au Bureau avec Harry, qui avait, lui aussi, besoin de mains pour classer différents dossiers.
-Tu fais beaucoup d’administratif, mais il te faut comprendre que c’est une partie importante du travail d’Auror …
-Je sais, P’pa, marmonna James alors qu’il repassait à la plume le titre d’une pile de parchemins qui contenaient un dossier concernant une affaire de recel de têtes réduites.
-Tu as quand même pu voir du pays. Et quelques enquêtes terrain intéressantes. Tu es un peu plus sûr de vouloir poursuivre cette voie ?
Ce coup-ci, James n’eut pas à hésiter plus longtemps. Il est vrai que la monotonie qui s’était installée dans le Bureau l’avait un peu refroidi. Mais voir le Bureau à l'œuvre, dans un moment de tension intense, avait revigoré la motivation de l'aîné des Potter. Il était désormais certain de sa réponse :
-Je n’ai plus aucune hésitation. Je sais que c’est une période de stress qui peut être assez effrayante. Mais bon sang, j’ai l’impression de servir à quelque chose. Je veux travailler dans cette équipe, utiliser divers stratagèmes pour faire avancer une enquête … C’est ce que j’ai toujours voulu faire. Bon, OK, l’administratif pour le Magenmagot, ce n’est pas ce qui me botte le plus, mais je m’y conformerai …
Harry semblait satisfait de la réponse de son fils. Il le détailla un instant, James sentit la fierté et la détermination poindre dans le regard de son père, avant que celui-ci n’annonce se remettre à classer et réécrire les en-têtes de dossiers trop vieillies. Ils ne furent interrompus que vers seize heures, par Iggy Greengrass qui entra dans le bureau sans prendre la peine de frapper.
-Potter, Potter, salua sans aucune chaleur le haut-fonctionnaire.
Il tenait un morceau de parchemin à la main. Il ne s’assit pas quand Harry l’invita à le faire.
-J’ai bien reçu votre demande d’importation de sérum de Démonzémerveille. En voici la validation. Mais, j’ai cru comprendre, en lisant le rapport d’interrogatoire de votre témoin anonyme, que vous étiez toujours fixés sur cette histoire de souvenir nébuleux. Me trompe-je ?
-Tout à fait, Mr Greengrass. Nous avons là une solution pour reconstituer ce souvenir et confirmer que Shafiq a simulé sa propre mort.
Le Directeur du Département de la Justice Magique secoua la tête comme s’il était importuné par des insectes nuisibles. Il soupira en observant les deux Potter, puis se laissa finalement tomber sur un siège.
-Mon cher ami, Cornelius Fudge, était Directeur du Département des Accidents et Catastrophes Magiques lorsque Tarik Shafiq a été tué par l’Auror John Dawlish. La clairière, où ils ont combattu, a senti le soufre pendant trois mois. Les agents du Ministère ont mis une semaine à remettre en état la zone. Cornelius a lui-même inhumé la main qu’il restait de Shafiq. Archibald Fawley doit dîner avec moi ce soir, Potter. Il va me demander des informations sur ces enquêtes. C’est donc ce que je dois lui répondre ? Que les Aurors travaillent depuis une semaine à résoudre une affaire déjà classée depuis plus de quarante ans ?
-Je ne vois pas ce qui cloche. Vous pourrez dire au Ministre que tous les éléments de notre enquête nous conduisent à un supposé descendant de Tarik Shafiq !
-Tous les éléments ? tonna Greengrass. Tous vos éléments se résument au témoignage d’un voyou. Un traîne savate américain qui a vu là une aubaine pour monnayer une libération conditionnelle. Savez-vous que l’avocat de Bill Ethar a déjà écrit à Archibald Fawley ?
-J’imagine, répondit Harry circonspect. Mais nous trouvons que son témoignage concorde avec ce que nous avions constaté sur le terrain. Vous n’êtes pas sans savoir qu’un témoin anonyme -il lança un coup d'œil appuyé à Greengrass, ce témoin étant son gendre, Drago Malefoy- a lui aussi cité Shafiq comme piste.
-Je connais les dossiers, Potter. Ce que je veux simplement vous dire, c’est que vous auriez meilleur compte à chercher sur le terrain ce sinistre groupuscule, et celui qui dit être Marek Shafiq, que diable de savoir si son père est mort il y a quarante ans ou pas ! Les familles de sorciers sous protection commencent à être lassées de sentir la présence des Aurors et des policiers autour de leurs domiciles. Beaucoup ont écrit au Ministre pour se plaindre …
-Nous les protégeons, répondit du tac au tac Harry, bien que James savait que les Aurors avaient aussi pour consigne d’espionner les agissements des Sang-Pur.
-Et je doute qu’ils se sentent protégés, s’ils apprennent que “l’Elu” (James ne put s’empêcher de remarquer que Greengrass avait adopté un ton narquois en prononçant ce surnom), préfère enquêter sur des affaires classées plutôt que sur ce qui menace ces familles. Archibald est aussi très courroucé de voir qu’aucun des partisans de Justin Finch-Fletchley n’est ciblé. Il est revenu à la charge …
C’était le point central de l’intervention de Greengrass. James le savait, d’abord l’aval pour le sérum, puis toutes ces remontrances, pour finir par une requête. C’était un savant dosage de bienveillance, puis de management par la peur. Greengrass avait l’air d’être de ceux qui abusaient de ce type de management. Mais Harry, les lèvres pincées, l’observait avec une expression de dégoût derrière ses lunettes.
-Je ne serai pas un instrument de votre politique, Mr Greengrass, trancha-t-il d’un ton sec. Le “Collectif pour la Justice” ne revient dans aucune de nos constatations. Et je ne les espionnerai pas pour votre bon plaisir …
-Je suis différent d’Archibald … commença Greengrass rendu livide par une rage froide.
-Oui, persifla Harry. Il a gagné les élections à sa première candidature, tandis que vous, vous les aviez perdues quatre fois …
-IL SUFFIT, POTTER ! hurla Greengrass. Je pensais que nous pourrions construire une relation de travail constructive, mais je vois que vous persistez à vous comporter en adolescent capricieux. Croyez-vous que vous êtes le seul à subir les foudres d’un supérieur ? J’ai pris des risques pour vous aider à mener votre enquête. J’ai fait entendre raison à Archibald pour que vous puissiez faire suivre les vieilles familles de sorciers. Et je me doute bien que vous faites plus que les surveiller. Mais soit ! Si vous vous mettiez un minimum de plomb dans la cervelle, vous comprendriez que moi aussi, je dois m’adapter aux instructions que je reçois …
-Dites au Ministre, qu’il n’y a aucun intérêt dans l’enquête à faire suivre Finch-Fletchley et ses partisans, répéta Harry d’une voix calme, presque dégagée, mais émanant tellement de froideur que James ne reconnut pas là son père.
-Je ne dirai rien au Ministre, Mr Potter.
La voix d’Iggy Greengrass s’était abaissée au niveau d’un murmure, nimbé de colère froide. Il reprit :
-Car je vous ordonne de faire suivre Finch-Fletchley et de me remettre chaque jour les rapports de filature de lui et des principaux dirigeants du Collectif pour la Justice.
-Vous n’avez pas le droit d’interférer dans une enquête ! mugit James qui ne pouvait plus se contenir devant le vieux fonctionnaire.
-J’ai tous les droits, Potter junior, susurra Greengrass. Et je trouve, qu’une fois de plus, vous vous illustrez par votre don à intervenir là où on ne vous a rien demandé. Vous êtes sous ma responsabilité, votre Bureau dépend de mon Département.
-Stop, James, tempéra Harry. Mr Greengrass, si tel est votre volonté, nous ferons suivre des membres du Collectif pour la Justice … Mais je vous répète qu’il n’y a aucun intérêt à ce stade de l’enquête.
-Archibald se sentira plus à l’aise, si tel est le cas. Et si, je juge, que vos équipes ne mettent pas le cœur nécessaire à l’ouvrage, je vous retire l’enquête dans son intégralité. Et je la confie à la Brigade de Police Magique. Est-ce bien noté, Potter ?
-C’est bien noté, marmonna Harry, tandis que Greengrass se levait pour prendre congé du bureau du Directeur des Aurors.
Alors qu’il était dos à Harry et James qui fulminaient tous deux sur place, il ajouta, juste avant de se retirer :
-Ah, Archibald n’était pas non plus certain de la pertinence d’avoir un enfant, tout juste majeur, qui assiste à une telle enquête. Après avoir vu comment il réagissait, je pense qu’il a raison. Veuillez-donc mettre fin à la mission de votre stagiaire …
___________________________________
Jamais James n’avait connu une ambiance aussi pesante au 12 Square Grimmaurd. Il était rentré vers dix-sept heures, lorsqu’il était apparu dans la cheminée, Albus, Nancy, Lily, Alice et Scott, qui étaient en train de goûter dans la cuisine l’avaient assailli de questions sur sa journée, mais se renfrognèrent quand ils constatèrent son air défait.
Le désormais ex-Auror leur avait raconté, vaguement, le soufflon qu’avait pris son père et la façon dont Greengrass avait fait jouer de son autorité en mettant fin à son stage. James avait voulu rester seul dans sa chambre pour le reste de la fin d’après-midi. Il avait pris soin de verrouiller magiquement la porte pour que personne ne vienne le déranger. Il s’était habitué à son petit quotidien d’Auror. A voir avancer sous ses yeux l’enquête sur ses agresseurs au Chemin de Traverse. A passer du temps avec son père, avec Ron, aller boire un thé au bureau de Hermione et voir à l'œuvre la sorcière la plus brillante de sa génération. Et James s’était projeté, il se voyait terminer ses études à Poudlard et embrayer sur le métier d’Auror. Son expérience l’ayant conforté dans son voeu de carrière. Mais désormais, il s’était grillé auprès de Greengrass.
Il finit par accepter de sortir de sa chambre pour dîner. Harry n’était pas rentré. Et personne n’osait aborder l’expérience du jour de James au Bureau. Tous se concentraient sur des banalités, Albus essaya de taquiner Lily, mais même la benjamine des Potter ne semblait pas être d’humeur à plaisanter. Ce fut finalement Scott qui réussit à insuffler un peu de vie dans le repas en parlant des derniers résultats du Quidditch avec Ginny.
-Les Pies de Monrose ont fait un sacré recrutement, je pense que cette saison est la leur, pariait Scott.
-Je ne suis peut-être pas crédible en disant ça, persifla Ginny. Mais j’ai bon espoir pour les Harpies.
Ginny avait été la Poursuiveuse vedette de ce club mythique composé exclusivement de femmes. Elle avait gagné la Ligue sept fois, et avait eu l’honneur de représenter l’équipe d’Angleterre à soixante douze reprises. Mais il fallait reconnaître qu’elle avait certainement raison. Les Harpies avaient fait forte impression lors du précédent championnat. Leurs joueuses étaient encore jeunes, pour la plupart, et semblaient atteindre leur pic de forme pour la saison à venir.
-Oui, les Harpies vont gagner cette année ! s’extasia Lily. J’ai misé cinq Gallions avec Laurie.
-Et où trouveras-tu ces Gallions ? demanda sa mère, mi-interloquée, mi-amusée.
-Je n’aurais pas à les trouver ! Je vais les gagner, gagea Lily d’un air dégagé, tandis que les convives éclataient d’un fou rire devant la confiance immodérée de la jeune Gryffondor.
Lily était un phare pour son entourage. Elle arrivait toujours à détendre la plus sombre des atmosphères, elle avait toujours le bon mot pour faire oublier les tracas de son audience. Elle pouvait parfois déraper, et se muer en petite fouineuse, comme quand elle avait raillé Albus pour Orlane Boot, mais ce n’était que des maladresses. Lily était très appréciée dans la famille élargie, et James ne pouvait que se féliciter de voir sa petite sœur s’accomplir ainsi. Et elle passa d’ailleurs le reste de la soirée à leur raconter des anecdotes de Poudlard, -elle en avait décidément un stock infini !-, bientôt rejointe par Ginny, qui, de son côté, racontait aux jeunes comment Ron avait essayé de rafistoler sa vieille robe de soirée. Et c’est ponctué de ricanements, qu’ils prirent leur dernier thé avant d’aller se coucher.
___________________
James, qui partageait sa chambre avec Scott, avait décidé de se lever à l’aube. Il espérait croiser Harry, s’il était rentré dormir dans la nuit, il serait sûrement en train de prendre son déjeuner. Il prit donc soin de sortir de la chambre à pas feutrés, et il tomba effectivement sur Harry, en train de lire la Gazette du Sorcier, Ginny à ses côtés.
-Tu es bien matinal, James, remarqua sa mère tandis que Harry abaissait son journal pour observer son fils aîné.
-Oui, M’man, j’avais du mal à dormir.
-Tu n’as pas à t’en vouloir, James. C’est après moi que Greengrass en avait, rassura Harry.
-Je suis désolé d’avoir ouvert ma …
-Tu es emporté, c’est quelque chose qu’il faudra tempérer. Mais ça ne fait rien … Greengrass n’a jamais été très agréable.
-Comment ça se passe au Bureau ?
-Je suis rentré très tard, Vale et Valiant ont pu me ramener le sérum de Démonzémerveille. Et Hermione a une fois fait des miracles. Le souvenir de Dawlish a été reconstitué. Nous avons désormais la preuve que Shafiq père a simulé sa mort. Mais Greengrass et Fawley s’en fichent. Ils maintiennent que le Collectif pour la Justice doit aussi figurer parmis les suspects.
-C’est complétement idiot, pesta Ginny. Mais pour Shafiq, vous avez une idée d’où il se cache ?
-Aucune, répondit Harry. Et nous ne trouvons pas trace d’hommes en blancs … L’enquête stagne dans tous les cas, et elle n’est pas prête d’avancer si nous devons aussi surveiller Finch-Fletchley et ses partisans.
Tous trois se terrèrent dans leurs propres réflexions intérieures, avant que Ginny ne brise le silence qui s’était installé.
-Nous avons déjà reçu les listes de fourniture pour la rentrée. Scott, Alice et Nancy aussi. Everett doit savoir qu’ils sont ici … Nous irons les récupérer cette après-midi si vous n’avez rien d’autre de prévu.
_____________________________
Comme à chaque fin d'été, le Chemin de Traverse était bondé, toutes les familles de sorciers se précipitant pour effectuer leurs achats de rentrée. Pour James, Alice, Scott, Albus, Lily et Nancy, accompagnés par Ginny, il y eu l’arrêt obligatoire pour aller acheter toutes sortes de Farces et Attrapes dans la célèbre boutique de George Weasley. Ils en sortirent tous -sauf Ginny-, les bras remplis de toutes sortes d'objets qui s'avèreraient bien utiles pour se payer de bonnes tranches de rire à Poudlard. Même Albus s’était laissé tenter par les tous nouveaux modèles de Leurres Explosifs et de kit de magie Moldue.
Les murs du Chemin de Traverse étaient recouverts de photos d'Archibald Fawley, le Ministre de la Magie. Sur certaines photos, il était accompagné de ses chefs de département, James remarqua que l'on distinguait à peine Percy, caché dans un coin de l'image. La photo affichait des slogans tels que : « Période faste : faites allégeance au Ministère pour qu'elle dure ! », « Un Ministère au service de notre grandeur », toutes sortes de messages propagandistes cachant le fait qu'il persistait bel et bien un danger dans la société sorcière.
Alors qu'ils venaient de sortir de chez Fleury & Bott, pour acheter les nouveaux livres de Défense Contre les Forces du Mal qu'on leur demandait : la série Défense magique appliquée et son usage contre les forces du Mal. James en déduisit que les trois livres avaient été demandés par son père, étant donné que Lily n'avait pas à les acheter, cela ne pouvait être que parce que cela avait été demandé par l'enseignant en ASPIC qui n'était autre qu'Harry. A sa grande joie, il vit en feuilletant rapidement les livres qu'il s'agissait avant tout d'une anthologie des meilleurs sortilèges et postures à adopter en combat, avec de nombreuses illustrations et conseils. Ce qui laissait supposer que les cours contiendraient énormément de pratique. Les membres du groupe songèrent à aller profiter encore un peu plus du soleil radieux en allant dévorer une glace sur la terrasse de Fortescue. Ginny, souhaitant discuter avec Hannah, s’avança au Chaudron Baveur, où le groupe devrait la rejoindre quand ils voudraient retourner au 12 Square Grimmaurd. Ils se dirigeaient vers la devanture du glacier, quand Alice, songeuse, prétexta avoir oublié de s'acheter des plumes et se retira dans la direction opposée.
-Des plumes ? Je l’ai vu en acheter un stock qui lui tiendra toute l'année ! s'exclama Scott soupçonneux.
-Elle était vraiment bizarre aujourd'hui, remarqua Nancy. Elle n'a pas cessé de jeter des regards autour d'elle, comme si elle n'avait pas envie de voir quelqu'un.
-Je l'ai remarqué aussi, affirma Lily. Elle a reçu pas mal de courrier ces derniers jours ...
-Tu as même tenté de venir me demander comment ouvrir et refermer une enveloppe sans laisser de traces, coupa Albus. Mais je te répète que ce ne sont pas nos affaires.
James n'avait pas remarqué le comportement étrange de sa meilleure amie. Elle paraissait toujours aussi souriante que d'habitude, elle avait même été d'un grand secours dans la boutique de Georges Weasley. Celle-ci ayant réfléchi à beaucoup de blagues, elle aida James à choisir les objets les plus appropriés pour les mettre en œuvre. Ainsi, James avait passé moins de temps que prévu dans la boutique, et il avait pu sortir rapidement du bourbier que l'échoppe devenait en cette période de vacances scolaires. Mais très rapidement, il percuta ce qui inquiétait Alice. En effet, il l'aperçut. Un garçon de leur âge, petit de taille, et aux cheveux d'un blond presque blanc. Son long nez frémissait d'impatience tandis qu'il remontait le Chemin de Traverse dans le même sens qu'Alice. James ne supportait pas la tête de fouine d'Owen Finnigan. Cela faisait sept ans que les deux garçons partageaient le même dortoir. Ils ne s'étaient jamais réellement entendus, se saluant cordialement durant leurs premiers mois à l'école, leur routine polie fut brisée par une blague de James. Les deux garçons s'ignoraient depuis, mais James n'avait jamais fait d'effort pour se réconcilier et entamer une relation courtoise avec Finnigan, tant il détestait ce qu'il voyait du jeune garçon.
Owen Finnigan ne cessait de vanter les exploits de son père Auror, il était arrogant, toujours en train de cracher son venin dans le dos des autres, mais au fil des années, il avait réussi à gagner en popularité. Visiblement, sa tête de fouine plaisait aux filles, et il avait réussit à se maintenir au niveau dans les différentes matières où il comptait présenter des ASPIC. Selon ses dires, il comptait voyager un peu pour se faire la main avant d'intégrer l'élite des Aurors, comme son vaillant père. C'était aussi une des raisons qui faisait que James n'était pas sûr de vouloir finir Auror. Tant son camarade de Poudlard lui était insupportable. Alice et Owen entretenaient une relation, c'était sûr. Elle et lui avaient dansé ensemble lors de la soirée d'anniversaire de son père, puis Alice, de l'aveu de Hannah avait passé beaucoup de temps avec Owen en Irlande. Et si l'aînée des Londubat semblait si anxieuse, c'était bien parce qu'elle craignait de voir Finnigan débarquer et de lire la colère dans les yeux de son meilleur ami. Elle ne lui avait même pas parlé d'Owen, tant elle devait se douter que James serait dépité de voir sa meilleure amie sortir avec ce garçon qu'il considérait comme minable. Après tout, si Alice avait choisi de vivre sa relation cachée, James se doutait qu'elle ne durerait pas bien longtemps. Et dans tous les cas, Alice semblait avoir compris qu'elle ne pourrait imposer la présence du garçon à la tête de fouine à James.
-Laissons-la respirer, soupira James en s'installant à la terrasse du glacier.
Nancy s'assit à ses côtés et l'observa un instant. Ils n'avaient pas discuté de la remarque qu'avait faite la fille de Percy sur l'amour que Nancy portait à James. Le Gryffondor savait que la Poufsouffle avait assez de tempérament pour ne pas tenir compte des élucubrations d'une jeune fille étrange. Si elle avait semblé troublée le temps du retour au 12 Square Grimmaurd, Nancy était redevenue la petite amie aimante à fort tempérament de James. Elle avait continué à lui prendre la main lors de ses excursions, à essayer de coiffer sa tignasse de cheveux indomptables, et elle n'avait cessé de l'embrasser tendrement dès que l'occasion se présentait, y compris devant Alice et Scott, ce qui mettait James quelque peu mal à l’aise. Alors, quand il vit sa petite amie, vêtue de son chemisier blanc, légèrement déboutonné à cause de la chaleur, dévoilant une poitrine au galbe parfait, lorsqu'il s'attarda sur son visage doux et bienveillant et ses longs cheveux bruns, qui s'éclaircissaient au soleil, James dut reconnaître que la vision lui était fort agréable. Il aurait pu lui susurrer à l’oreille un ‘Je t’aime”, mais il n’y arrivait pas, sans doute aveuglé par la perspective de voir Finnigan approcher dangereusement de son cercle intime. Nancy, quant à elle, voyant que James l’observait, lui adressa un sourire radieux. Elle se jeta sur lui et lui donna un baiser des plus fougueux. En entendant les expressions de dégoût des frère et soeur de James et de son meilleur ami, la jeune fille desserra son étreinte, se redressa, se posta face à eux, et resta ainsi assise sur les genoux de son petit ami. Les discussions reprirent alors tranquillement leur cours, et lorsqu'Alice revint, une heure plus tard, souriante, elle observa un instant Nancy assise sur les genoux de James puis décida de s'installer à côté d'eux, sur la chaise que la Poufsouffle avait laissée libre, sans dire un mot pour expliquer la vraie raison de son absence. Elle refusa de prendre une glace, et Scott proposa de payer les consommations du groupe, mais il prétendit n’avoir plus d’or dans sa bourse.
-Il me restait pourtant cinq Gallions, marmonna le Gryffondor à la coupe au bol.
-Tu as du les perdre, rassura James. T’occupes, je prends les glaces, tu me le revaudras !
_______________________________________________________
Le mois d’août avançait inexorablement, et Andy demeurait confiné dans son taudis du Chemin de Traverse. Il était toujours seul dans son appartement crasseux et sans âme. Il n’avait eu aucune nouvelle d’elle. Elle n’avait pas daigné revenir vers son ancien petit ami. Il n’avait plus la force de rien. Même la magie semblait lui échapper. Il aurait voulu, attirer de la nourriture à lui, ou faire disparaître les déchets qui dépassaient de sa poubelle. Mais il n’y avait rien à faire, c’est comme si la magie se refusait à lui. Alors, faible et affamé, il se décida à sortir, par instinct de survie. Il n’avait pas remarqué que l’artère principale du monde sorcier britannique était bondée en ce moment. Les élèves qui allaient rentrer à Poudlard y effectuaient leurs achats de fournitures.
Il aurait tellement voulu se jeter un sortilège de Désillusion pour passer inaperçu, mais il n’en avait pas la force … Et puis, qui donc pourrait le reconnaître ? Lui qui était pourtant toujours bien mis, arborait désormais des cheveux longs et hirsutes lui descendant jusqu’aux épaules, et une barbe qui pourrait faire pâlir de jalousie le garde chasse de Poudlard, Rubeus Hagrid. Il décida de profiter de la foule pour, vêtu d’une cape à capuchon, se faufiler parmi celle-ci et essayer de faire les poches des passants. C’était sa seule chance de pouvoir se procurer de quoi le nourrir.
C’étaient sans doute les quelques restes qu’il avait de ses années de Quidditch à Poudlard, mais il n’eut pas de difficultés à bousculer un passant, et pendant qu’il s’excusait, avec habileté, glisser une main dans la besace du passant et délester sa bourse des quelques Gallions qui restaient. Pour la première fois depuis bien longtemps, Andy eut de quoi s’auto-satisfaire. Il ne sut combien de jours il enchaîna cette routine. Il avait tellement ressassé d’idées noires et de pensées négatives, que la perspective de voler à la tire de sorciers peu soupçonneux lui procuraient une source d’extase qu’il ne s’expliquait pas.
Il se réveillait désormais de bonne heure, il n’avait plus que cette idée en tête. La joie de compter les fruits de ses larcins lui prodiguait une fierté qui l’avait auparavant fui comme le Filet du Diable fuyait la lumière. Andy se sentait de nouveau exister, et personne ne prêtait attention à lui sur le Chemin de Traverse surfréquenté. Il avait pu s’acheter une quantité conséquente de nourriture, et il projetait même de se rendre à l’agence de Services pour Magiciens, pour louer un elfe de maison qui lui ferait le ménage de son appartement toujours aussi sale.
Ses victimes étaient pour lui des silhouettes sans visage, il ne se concentrait pas sur celles-ci, juste sur l’endroit où elles cachaient leur bourse, et la façon dont il allait subtiliser celle-ci. Mais ce jour-là, il se souvint du visage de sa dernière victime de la journée. Les boutiques commençaient à fermer, et il distingua un sorcier d’une trentaine d’années, richement vêtu d’une robe verte ornée de broderies dorées. Il avait le teint hâlé et des cheveux blonds, presque blancs attachés en catogan qui lui tombait jusqu’aux omoplates.
-Un touriste, sans doute, pensa Andy.
Il avança à proximité de l’homme et lui donna un coup d’épaule.
-Excusez-moi, lui dit Andy en lui tapotant l’épaule de sa main gauche, et en commençant à triturer la poche avant de sa robe de l’autre.
Mais l’homme arbora un rictus dépité à la vue du bandit en herbe. D’une main ferme, il lui agrippa l’avant-bras qui fouillait dans sa robe, et le repoussa violemment. Andy s’enfuit à toutes jambes, mais l’homme n’avait pas l’air disposé à le poursuivre. C’était la première fois qu’il se faisait attraper. L’incident aurait pu être sans conséquence, mais alors qu’il repensait à cet incident dans son studio miteux, il entendit quelqu’un tambouriner à la porte. Son coeur manqua un battement, était-ce elle ? Serait-il possible qu’elle ait senti qu’Andy était sorti de sa léthargie, et qu’elle voulait le rencontrer ? Il se précipita vers sa porte. Par le judas, il ne put rien discerner. Comme si la personne qui tambourinait à sa porte avait placé sa main sur la lucarne. Andy hésita : elle ne ferait jamais ça … Il voulut retourner s’allonger sur son fauteuil, mais la personne tambourina de plus belle. Ce n’est qu’au bout de quatre séries de tambourinades qu’Andy se décida à ouvrir. Après tout, c’était peut-être son propriétaire, mais il avait désormais assez d’or pour payer plusieurs mois de loyer d’avance. Il ouvrit. Mais il ne s’agissait pas de son propriétaire … C’était l’homme au catogan blond qu’il avait essayé de détrousser plus tôt dans la journée. Il était cette fois vêtu d’une longue robe blanche, ornée de symboles rouge sang. Il observait le pickpocket avec un bien étrange sourire sur son visage.
_________________________________________
Les derniers jours de vacances de James se passèrent à merveille. Le temps était radieux, ses amis, sa petite amie, son frère et sa sœur étaient toujours partants pour diverses activités. Ils adoraient par-dessus tout cheminer jusqu'au Terrier avant de grimper en haut d'une colline avoisinante à la maison des Weasley. Là-haut, des pommiers très hauts et très denses leur permettaient de jouer au Quidditch sans être vus par les Moldus. Les Potter et leurs amis jouaient à trois contre trois. Les trois remplissaient le poste de Poursuiveur, l'un d'entre eux s'occupait également de défendre les buts, tandis que l'un des deux autres devait aussi s'occuper du Vif d'Or quand il serait lâché. Sur avis de James, au vu du nombre de joueurs débutants, ils décidèrent de ne pas sortir les Cognards. En effet, Alice, Nancy, Albus et Lily n'avaient jamais joué au Quidditch. James menait une équipe composée de lui-même, d'Albus et de Nancy, tous deux très mauvais, tandis que Scott menait l'équipe qui comprenait lui-même, Alice et Lily. Alice, de par son tempérament casse-cou, arrivait à bien se débrouiller, et bien qu'elle soit très maladroite avec le Souafle, elle réussissait souvent à attraper le Vif d'Or avant Albus qui était très mauvais. Lily quant à elle, devait obligatoirement rester dans ses buts pour respecter la stratégie défensive mise en place par Scott. Elle prenait énormément de but, mais lorsque, lassée des railleries de son frère aîné, son visage devenait alors rubicond de fureur et la jeune fille sortait des arrêts improbables laissant ses frères et leurs amis pantois. Scott se contentait de jouer Poursuiveur, mais il manquait de technique comparé à James, heureusement, il avait de la chance que Nancy soit gardienne pour l'équipe des Potter et laisse tout passer. Malgré ces écarts de niveau flagrants, les jeunes adolescents s'amusaient beaucoup, et James ne pouvait que constater que ses amis progressaient au fil des jours. Lors de leur dernière journée au Terrier, James et Scott décidèrent de s'affronter en jouant tous les deux Attrapeurs de leur équipe. Scott réussit à prendre de vitesse James et au terme d'une course épique leur faisant côtoyer de près la cîme des pommiers, Scott saisit le Vif d'Or au nez et à la barbe de James. Après avoir réussi à encaisser cette défaite humiliante, James ne pouvait que constater que celui qui deviendrait probablement l'Attrapeur des Gryffondor ferait des ravages dans le championnat de Poudlard. Ils auraient d’ailleurs bientôt tout le loisir de jouer tous les deux ensemble au Quidditch, car les jours avaient inexorablement passé, et la rentrée à Poudlard se ferait le lendemain matin.
Ce soir-là, Ginny avait invité Ron et Hermione ainsi que les Londubat pour le dîner. Il avait été convenu que Rose et Hugo dormiraient au Terrier, en effet Harry se devait d'être à Poudlard pour le jour de la rentrée. Ron devrait donc travailler très tôt pour remplacer son ami et beau-frère au Bureau des Aurors, tandis que Hermione serait retenue par une audience du Magenmagot. Ginny se chargerait donc d'accompagner tous les enfants à l'école. Les Londubat étaient simplement venus dire au revoir à leur fille Alice avant la rentrée. Bien que celle-ci retrouverait très rapidement son père qui continuait de leur enseigner la botanique.
Déçu de devoir reprendre si rapidement les cours, après l'été de rêve qu'il venait de passer en compagnie des êtres qui lui étaient les plus chers. James écoutait vaguement le brouhaha des conversations autour de lui. Les adultes étaient en train de se lancer dans des diatribes sur leurs problèmes du quotidien. Harry expliquait que Greengrass s'était installé dans le bureau à côté du sien, qu'aucun Auror ne pouvait vraiment enquêter sur Shafiq et que les ordres pouvaient être interprétés ainsi : « Il fallait nier tout danger car la société sorcière n'avait pas à être inquiétée, autrement, elle se rendrait compte qu'elle était gouvernée par des incapables. ». Hermione approuvait l'analyse de son beau-frère, tandis qu'elle expliquait qu'elle était horrifiée par le miel que servait la Gazette du Sorcier à ses lecteurs. « A les écouter, tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes. » résumait-elle. Ginny expliquait qu'elle s'était fait rembarrer sévèrement par le directeur de la publication lorsqu'elle lui avait envoyé un hibou lui demandant s'il comptait parler de l'affaire Shafiq dans ses colonnes. Enfin, Hannah expliquait que l'atmosphère se faisait de plus en plus glauque au Chaudron Baveur, nombreux étaient les sorciers qui recommençaient à s'insulter en raison de leur Statut du Sang ou de leur positionnement politique.
Doublement déprimé par les nouvelles rapportées par les adultes, et par l'imminence de la rentrée, James se leva, l'air hagard et se dirigea vers la sortie. Il s'installa paisiblement sur le perron du 12 Square Grimmaurd, et observa la placette sur laquelle la nuit venait de tomber. Il décida alors de faire quelque chose qu'il n'avait que très peu l'habitude de faire, mais qui, il le pensait, pouvait le détendre, il passa le haut de son corps à travers l'entrebâillement de la porte puis murmura :
-Accio cigarettes.
Du haut du troisième étage, un petit paquet en carton, rouge vif, descendit jusqu'à sa main tendue. James ne fumait que très rarement. C'est Scott qui lui avait présenté pour la première fois un paquet de cigarettes, lors d'une soirée à son manoir, l'été avant leur sixième année. Pour ainsi dire, le paquet rouge vif était toujours celui que lui avait donné Scott un an auparavant. Il restait dix-huit cigarettes. La première que James avait fumée, c'était avec Scott, pour découvrir. Il n’avait que très peu apprécié. Croyant s'étouffer à chaque bouffée. Puis, des mois plus tard, il croisa Andrew Higgins et Leanne Gatwick dans les couloirs. Ils semblaient paisibles et heureux d'être ensemble. Troublé de voir la fille qu'il aimait dans les bras d'Andrew, James remonta dans son dortoir, il ignora pourquoi, mais il voulait se détendre. Il pensait passer la soirée à relire son Cours de Défense Contre les Forces du Mal, mais lorsqu'il fouilla dans sa malle, il comprit la stupidité de sa démarche. Jamais il n'avait relu ses cours, et il savait pertinemment que, à aucun moment, les relire le détendrait. Au lieu de ça, il aperçut le paquet rouge au fond de sa malle, et il se rappela que Scott lui avait expliqué combien il était relaxant de fumer une cigarette, seul, les soirs de déprime, en regardant la lune. Alors James s'exécuta, et il monta se fumer une cigarette en haut de la tour d'Astronomie. Il n'aurait su dire s'il en avait été vraiment détendu, mais il dut admettre qu'il fut apaisé en voyant la beauté de la nuit du haut de la plus haute tour de Poudlard. Peut-être que la troisième cigarette de sa vie, l'aiderait à déterminer si, oui ou non, fumer détendait. Il alluma sa cigarette d'un coup de baguette magique, et inspira une grande bouffée. La tête lui tournait légèrement, mais pour les instants où il avalait et recrachait la fumée, il sentait que son esprit ne se concentrait sur nulle autre chose. Alors qu'il était au milieu de sa cigarette, il entendit la porte grincer derrière lui, et il s'empressa de jeter la cigarette loin devant lui. Lorsqu'il se retourna, il vit que ce n'était qu'Alice, l'air extrêmement pâle qui l'observait d'un air soupçonneux.
-Je me demandais si tu allais bien, expliqua-t-elle.
-Tu m'as fait peur, il faudra vraiment que je t'apprenne notre code des cinq coups à moi et Albus.
La jeune fille s'assit sur le perron, juste à côté de son meilleur ami.
-Toi non plus, tu n'es pas enchanté de rentrer, remarqua-t-elle.
James approuva, tout en continuant de fixer la place déserte, devant lui. Puis, il réfléchit un instant, cela lui était sorti de la tête ces derniers jours.
-Toi par contre, tu devrais être contente de rentrer.
Elle le regarda d'un air surpris, ne semblant pas comprendre où il voulait en venir.
-Ta mère m'avait dit que tu avais vu Owen cet été. Et je l'ai vu venir dans la même direction que toi lorsqu'on était au Chemin de Traverse et que tu nous as quittés pour, soi-disant, acheter des plumes.
Alice le fusilla du regard, mi-furieuse, mi-dépitée. Elle prit une profonde inspiration puis se lança :
-On se voit avec Owen, c'est vrai. On s'écrit depuis le début de l'été. A la fête d'anniversaire de ton père, on a discuté. Je lui ai dit que j'irai passer quelques jours chez un cousin de ma mère en Irlande. Il m'a donc proposé de passer le voir. J'y suis allée, et ça c'est fait, je ne sais pas trop quoi penser de notre relation encore.
-Et tu comptes essayer de l'intégrer avec nous ? demanda James d'une voix amère.
-Il sait que tu ne l'aimes pas. Il ne comprend pas vraiment pourquoi d'ailleurs …
-C''est lui qui me déteste, Alice, n'inverse pas les rôles, je te prie.
-Je sais que vous n'êtes pas encore faits pour vous entendre, admit Alice. Je ne veux pas savoir qui est fautif. En tout cas, je fais tout pour ne pas trop précipiter les choses, tu es la première personne à qui je l'annonce. Je voulais le faire plus tôt, mais tu ne t'es pas détaché de Nancy.
-On est en couple, elle et moi ! répliqua James.
-Tout comme je semble être en couple avec Owen, rétorqua Alice. Alors, oui, peut-être que dans un avenir proche, si, après avoir passé du temps avec lui à Poudlard, j’estime que cela doit durer, tu devras t'habituer à sa présence. Je te le dis maintenant pour pas te brusquer, je ne sais combien de temps Owen acceptera encore de me laisser te ménager, mais viendra un jour, ou il sera lassé. Et je ne veux pas le perdre pour ça.
James resta silencieux. Ce qu'il craignait allait arriver. Il allait devoir supporter Finnigan. Il le voyait déjà arriver, utilisant son ton le plus mielleux pour séduire James. Il allait lui parler de Harry, de sa prétendue amitié avec son propre père. De l'ambition commune des deux fils de rejoindre leurs pères au Bureau des Aurors, il allait prendre sa figure la plus hypocrite possible. Probablement celle qu'il avait adoptée pour séduire Alice. Elle n'avait jamais vraiment eu d'expérience avec les garçons, bien qu'elle fasse tourner la tête à nombre d'entre eux, elle n'avait jamais accordé aucune importance à ceux-ci. Elle préférait chahuter dans les couloirs, aller se promener la nuit, et jouer des mauvais tours aux Serpentards. Alice ne pouvait pas abandonner James, pas maintenant. Ils étaient amis depuis l'enfance, et elle venait de lui annoncer que s'il voulait passer du temps avec elle, il allait devoir s'accommoder de Finnigan.
Certes, c'était peut-être démesuré de rejeter autant quelqu'un. Qui plus est, un élève de Gryffondor, mais dans le cœur de James, toutes les places étaient prises. Ses journées à Poudlard se résumaient à quelques personnes. En premier lieu, Scott, Alice, et maintenant, Nancy. Puis, il y avait Albus, Rose, Fred et Roxane, qui passaient aussi énormément de temps avec eux. Il n'y avait pas de place pour Finnigan l'arrogant.
-Je ne veux pas te perdre James. Je sais que toi non plus. Alors on fera des efforts d'accord ?
La voix d'Alice venait de briser le silence. Il l'observa un instant, elle avait l'air triste. Comme si elle se doutait de ce à quoi son meilleur ami réfléchissait. En fait, elle savait ce qu'il pensait. Elle avait toujours su ce que le jeune homme avait derrière la tête. Elle savait qu'il n'arrivait pas à comprendre qu'il devrait supporter la présence de Finnigan. C'est pour ça qu'elle était triste, elle savait que, plus que jamais, elle était sur le point de perdre James. Elle finit par renifler tristement, puis appuya sa tête contre l'épaule de James avant de sursauter :
-Hey, mais tu sens la cigarette ! s'exclama-t-elle.
James lui montra le paquet rouge vif qu'il avait fait venir de sa chambre.
-Toujours le paquet de Scott ? demanda-t-elle en le tenant entre ses mains.
James acquiesça avec un sourire, Alice lui rendit son sourire et sortit une autre cigarette. Elle en porta une à ses lèvres pulpeuses avant de donner l'autre à James qui écarquilla les yeux. Le soir où Scott leur avait proposé des cigarettes, Alice avait refusé catégoriquement.
-Ben quoi ? Tu crois pas qu'on a besoin de décompresser un peu ?
James lui sourit, et les deux fumèrent leur cigarette en silence, tout en contemplant le ciel étoilé. Une fois encore, le seul fait de contempler les astres aurait suffit pour rasséréner James. Il ne sut donc pas si la cigarette l'avait vraiment aidé à se détendre. Une chose était sûre, c'est qu'il serait sûrement moins détendu s'il savait que quelqu'un l'observait d'un air furieux depuis le premier étage du 12 Square Grimmaurd.