Le journal de Neville Londubat

Chapitre 8 : C'était moins une

931 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour 27/07/2025 11:45

1 mars 1996


Ce soir, on a failli se faire prendre.

Je crois que je ne vais pas dormir de la nuit. J’entends encore leurs pas résonner dans les couloirs. Leurs rires étouffés. Et surtout, la voix d’Ombrage… traînante, menaçante, comme une mauvaise odeur qu’on n’arrive pas à chasser.

La Brigade Inquisitoriale était à deux doigts de nous tomber dessus.

Tout avait pourtant commencé comme une soirée ordinaire de l’AD. On s’est retrouvés dans la Salle sur Demande, comme toujours. Elle nous attendait, fidèle, transformée en vaste salle d’entraînement, baignée de lumière, pleine d’espace et d’élan.

Ce soir, on travaillait les boucliers. Protego.

C’est un sort que j’aime bien. Il ne fait pas mal. Il ne blesse pas. Il protège. Il résiste. C’est un sort silencieux, mais solide. Pas agressif, juste… fort.

Comme j’aimerais l’être.

Et ce soir, j’y arrivais enfin. Mon bouclier tenait. Il déviait les sorts simples sans vaciller. C’était peut-être peu, mais pour moi, c’était immense. J’étais fier. Fier d’avoir progressé. Fier que mes efforts paient.

J’aurais aimé que mes parents puissent le voir.

Mais la fierté n’a pas duré. Elle s’est évaporée d’un seul coup.

Alors qu’on s’apprêtait à ranger, Hermione s’est figée. Elle avait tendu l’oreille. Son regard s’était durci.

On a tous suivi, les sens en alerte.

Un bruit, à peine perceptible. Des pas. Une voix. Et puis une autre.

Ils étaient là. Juste derrière la paroi magique. La Brigade Inquisitoriale.

Harry a réagi le premier. Il a lancé le signal : un petit sort incandescent, discret mais visible. On s’était tous mis d’accord dès le début, si ça clignote, on arrête tout.

Et alors, la Salle a compris.

Elle a réagi.

Pas lentement, pas avec hésitation. Elle a effacé sa propre existence.

Les murs ont disparu. Le sol a changé sous nos pieds. En un clin d’œil, tout était redevenu normal. Un couloir désert. Une paroi lisse, froide, silencieuse. Comme si rien ne s’était passé. Comme si l’AD n’avait jamais existé. Une seconde porte est apparue, nous sommes sortis en silence. Puis nous nous sommes dispersés. Silencieusement. Rapidement. Le cœur battant dans la gorge.

J’ai fini par courir jusqu’à un escalier en colimaçon, les jambes tremblantes, les poumons en feu. J’ai dévalé deux étages sans respirer.

Derrière moi, j’ai entendu des voix. Des ricanements. Malefoy, Montague et Crabbe, sûrement. Ils fouillaient les recoins, sûrs d’eux, sûrs de tenir une prise.

Je me suis jeté derrière une tapisserie que je connaissais depuis la première année. Une vieille dame tordait le cou à un sanglier sur la tapisserie, sans me jeter un seul regard. Je suis resté là, tapi dans l’ombre, le souffle suspendu.

Mon cœur battait si fort que j’étais convaincu qu’ils allaient l’entendre.

Les pas se sont rapprochés. Puis, enfin… ils sont passés. Sans me voir.

Je suis resté figé quelques secondes encore, juste pour être sûr. Puis j’ai repris ma course, cette fois plus discrètement, en longeant les murs, en évitant les couloirs trop éclairés.

Quand je suis enfin rentré dans la salle commune de Gryffondor, le feu crépitait doucement dans l’âtre. Tout semblait paisible, presque irréel.

Il n’y avait presque personne. Juste Seamus, assis près de la cheminée, qui déplaçait distraitement des pièces d’échecs enchantés, sans vraiment regarder le plateau. Lavande, un peu plus loin, lisait un vieil exemplaire de la Gazette du Sorcier à la lueur vacillante des flammes.

Ils ont levé les yeux quand je suis entré. Personne n’a rien dit. Mais leurs regards ont duré une seconde de plus que d’habitude. Ils étaient encore rouges, signe qu’ils venaient à peine d’arriver. Les voir ici était un soulagement.

Je suis monté dans le dortoir sans un mot.

Et maintenant, je suis là. Dans mon lit. Ma baguette encore posée sur mes draps. Mes doigts tremblent un peu. L’adrénaline refuse de retomber.

On a eu chaud. Très chaud.

La Brigade Inquisitoriale se rapproche. Ils sentent qu’il se passe quelque chose. Ombrage nous traque. Elle veut trouver. Elle veut punir. Elle rêve d’un exemple. Elle rêve de nous briser.

Et pourtant, malgré la peur, malgré la panique, je ne regrette rien.

Pas une seconde.

Parce qu’on s’est entraînés ce soir. Parce que j’ai progressé. Parce qu’on résiste. Parce qu’on existe, malgré elle.

Mais ce soir, j’ai aussi compris une chose : ce qu’on fait est dangereux. Vraiment dangereux. Ce n’est plus un jeu. Ce n’est plus juste de la magie après les cours.

C’est devenu une guerre en miniature. Une guerre à taille d’élève. Et je fais partie de cette guerre.

Soudain, j’entends du bruit dans l’escalier. Des pas précipités. Une respiration saccadée. Je tends l’oreille. C’est Harry et Ron.

Ils entrent dans le dortoir, essoufflés, les joues rouges. Je me redresse sur un coude. Harry croise mon regard et me fait un signe de tête.

Tout va bien. Alors, lentement, la tension se relâche.

C’était moins une.



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