Ariana Potter, Premier Cycle : Dans l'Ombre des Secrets
Chapitre 60 : VI Mensonges et Suspicions
3036 mots, Catégorie: M
Dernière mise à jour 09/11/2016 08:41
CHAPITRE VI : MENSONGES ET SUSPICIONS
Le seigneur Hermoni passait pas mal de temps en compagnie de Julia Chaldo et Joshua Ollivander. Il faut dire qu’il n’était pas utile à Abbadona dans son travail d’ambassadeur des Anges auprès de la CIMS en ce moment. Il préférait donc partager ses connaissances avec les scientifiques de la DE. Mais une impression étrange s’était emparée de lui depuis la veille, Julia Chaldo se montrait plus vindicative, plus sournoise dans ses questions. Hermoni la savait très intelligente. Il n’était pas étonné qu’elle ait décelé le fait qu’il cherchait à cacher certaines choses. En douze milles ans, il n’avait jamais réussi à mentir correctement. Il aurait voulu lui dire ce qu’elle voulait savoir. Mais voilà, il ne faisait qu’obéir aux ordres.
Le Conseil des Premiers avait décidé de cacher certaines choses aux Humains. Ou du moins, d’attendre avant de leur révéler. Hermoni, malgré son désaccord, ne pouvait aller à l’encontre d’une décision du Conseil. Mais il fut heureux quand Julia Chaldo lui posa une question pour laquelle il n’avait pas eu de consignes de mensonge.
« Je viens à peine d’y penser, mais quelle est l’origine des Seigneurs de l’Oubli ? questionna Julia. D’où viennent-ils ?
-Que savez-vous d’eux ? demanda Hermoni.
-Pas grand-chose. Nous avons pu en disséquer un mais son corps avait été très endommagé, il était brûlé. Nous avons appris qu’ils n’ont pas de système digestif ou d’équivalent. Par contre, les terminaisons nerveuses, ou ce qu’on a identifié comme, sont extrêmement concentré dans leurs paumes. Nous en sommes venus à la conclusion, sachant qu’ils absorbent la mémoire par contact direct à l’aide de leurs mains, que ces terminaisons leurs permettent d’aspirer la mémoire. Nous essayons encore de comprendre comment c’est possible. Pour s’en prévenir et aussi dans l’espoir de soigner les victimes des Seigneurs. Pour ce qui est de l’origine, la seule indication que l’on ait eue, fut le témoignage d’un chercheur sorcier italien qui trouva leur description dans un rouleau. Ce rouleau disait qu’ils se nourrissent des âmes et volent la mémoire. De plus, il y avait cette expression : « venus du fond du ciel ». C’est surtout là-dessus que j’aimerais avoir une explication.
-Du fond du ciel, répéta Hermoni appréciateur. L’expression n’est pas mal choisie. Les Dæmons viennent de très loin. Nous n’avons jamais eu de relation autre que la guerre avec eux. Mais ce que nous avons appris par l’espionnage et la recherche à l’époque nous ont appris qu’ils viennent de l’autre côté de la galaxie, d’un système stellaire comparable au notre. Les Dæmons étaient des consommateurs intensifs des âmes des autres espèces. Ils se nourrissaient par pure gourmandise. Quand ils s’en sont rendus compte, il était déjà trop tard, ils avaient dévoré jusqu’à l’âme de leur planète. Même le rationnement forcé qu’ils s’imposèrent à la fin ne les sauva pas. Et pourtant, ils n’ont pas besoin de se nourrir souvent. Leur espèce périclitait. Pour survivre, ils durent quitter leur monde moribond. Ils voyagèrent dans une forme de stase pour enrailler leur extinction. Et après plusieurs millénaires de voyage, ils parvinrent jusqu’à notre système solaire. Ils tombèrent sur Eden comme une pluie de feu. Les Humains, être encore dans une phase primitive de leur évolution, furent les premières victimes des Dæmons. Les Anges et les Eldars s’allièrent pour repousser les Dæmons. Le reste, vous le connaissez plus ou moins.
-Et pour les vaincre, qu’avez-vous fait ?
-Nous n’étions pas assez puissant pour vaincre leurs légions, surtout avec la défection de notre propre peuple. Les Vampires, alliés des Dæmons purent être mis au pas mais cela ne suffisait pas. Dans un dernier assaut, nous sommes parvenus à les repousser jusqu’à Tartare, la planète que vous appelez Mars maintenant. Les Eldars formèrent une ligne de défense sur Eden alors que l’ensemble des Anges Rebelles combattaient sur Mars avec des légions des premiers sorciers. Nous perdîmes beaucoup de vies dans cette bataille. Mais ce sacrifice permit d’enfermer les Dæmons dans la prison que nous avions construite pour eux : le Labyrinthe.
-Et ils y sont restés enfermés douze milles ans ! s’exclama Joshua.
-Le Labyrinthe était plus une prison pour leur esprit que pour leur corps. Il les enfermait dans un rêve éternel d’où ils n’auraient pas dû s’échapper. Nous espérions qu’ils allaient s’éteindre d’inanition. Mais il semble que même douze milles années ne furent pas suffisantes pour tous les voir mourir.
-Comment se sont-ils échappés ? questionna Julia.
-Nous l’ignorons mais une chose est sûre : ils ne se sont pas évadés seuls, quelqu’un les y a aidés.
-Le Serpent Blanc ? fit Joshua.
-Probablement, acquiesça Julia.
-Aujourd’hui, les Dæmons sont moins nombreux qu’il y a douze milles ans, reprit Hermoni. Et ils n’ont plus l’alliance avec les Vampires. Mais cela ne veut pas dire qu’ils sont moins dangereux. Le Serpent Blanc a remplacé les Vampires. Notre meilleur atout est le fait que les Humains, sorciers ou non, sont maintenant mieux armé que par le passé. Mais si les Dæmons parviennent à réveiller leur armée, nous n’aurons pas d’autre alternative que de nous engager dans une guerre ouverte. »
Julia réfléchit aux dernières paroles d’Hermoni : réveiller une armée ? Qu’entendait-il par là ? Elle alla au plus simple pour avoir la réponse :
« Quelle armée ?
-Les Dæmons se battent, mais ils ont surtout des créatures créées par leur pouvoir, des monstres de guerre. Nous ignorons s’ils y avaient pensé au moment de la bataille de Tartare, mais une partie de cette armée à disparu sans laisser de trace à l’époque. Nous l’avons cherchée un temps, sans succès. Seule certitude : elle ne se trouve pas sur Mars. Mais le système solaire est vaste, même pour nous.
-A combien estimez-vous le volume des troupes disparues ?
-Une cinquantaine.
-Une cinquantaine de quoi ? demanda Joshua dubitatif.
-Une cinquantaine de milliers d’unités créées dés l’éprouvette pour combattre et tuer.
-Cela ne semble pas si impressionnant, dit Julia alors que Joshua soupirait de soulagement.
-Il y a pourtant matière à s’inquiéter, tempéra Hermoni. Ces créatures sont capables de se multiplier sans aide extérieur.
-Et à combien estimez-vous les troupes actuelles ?
-Dix.
-C’est beaucoup moins, fit remarquer Joshua.
-Millions. Dix millions d’unités au bas mot, compléta l’ange. »
Joshua pâlit. Julia resta calme. Dix millions ne voulait rien dire sans connaître le potentiel de destruction d’une unité. Hermoni devrait leur en dire plus mais une autre question lui brûla les lèvres.
« Les premiers sorciers qui vous ont accompagnés sur Mars, que sont-ils devenus ?
-Nous avons perdu plus de 95% des sorciers que nous avions emmenés, répondit Hermoni. Ceux qui avaient survécu à la fin de la bataille de Tartare, sont restés avec nous. Mais les conditions de vie sur Tartare ne convenaient pas et ils ont fini par mourir en quelques mois. Seuls nos enfants obtenus en s’accouplant avec des humaines sur Eden étaient à même de survivre. La suite vous la devinez, nous sommes restés cachés dans le Temple, vivant en autarcie avec nos descendants, surveillant les Dæmons. Mais le temps passant, notre surveillance s’est relâchée. Surtout que depuis trois siècles, nous avons eu une autre source de divertissement.
-L’arrivée des Humains sur Mars et la colonisation, dit Julia.
-Oui, et les guerres d’indépendance que livrèrent les humains de Mars contre les nations souveraines de la Terre. Nous avons observé tout ça, délaissant notre mission première. C’est pourquoi nous ignorons comment les Dæmons ont bien pu s’enfuir du Labyrinthe.
-Si vous ne connaissiez pas le cinéma, on ne peut pas vous en vouloir, plaisanta Julia. Bon, on sait maintenant d’où viennent les Sorciers et les Dæmons comme vous les appelez. Mais vous êtes sûrs de ne rien savoir sur l’origine des Dragoniars ? J’en connais plusieurs et ça m’intéresse.
-Non, répondit Hermoni visiblement gêné. Je n’en sais vraiment rien. »
Julia en était maintenant sûre : les Anges cherchaient à cacher certaines choses. Qu’y avait-il à cacher dans les origines des Dragoniars ?
L’équipe de Pardopoulos n’avait pas beaucoup d’indication pour savoir où commencer à chercher. L’agent infiltrer au sein même des services secrets du Vatican n’avait pas pu suivre les maigres pistes qu’il avait trouvées. S’il l’avait fait, il aurait été découvert. L’équipe de Pardopoulos ne subissait pas cette pression. S’ils étaient découverts au point de ne plus pouvoir agir, ça embarrasserait la DE mais le Patron n’en serait pas plus offusquer.
Pour le moment, ce fut surtout Zoé Zapajo qui travaillait. L’intégralité des communications entrantes et sortantes de la DE étaient archivées. Seul le bureau du Patron n’était pas concerné. Normalement, un appel ou un envoi de mail en direction du Vatican aurait dû être automatiquement signalé. Mais Zapajo savait qu’à tout système de sécurité, existe un moyen de le contourner. Dans le cas du système de la DE, elle-même savait parfaitement comment s’y prendre.
« C’est très simple pour quelqu’un s’y connaissant en informatique et ayant un minimum d’intelligence, expliqua-t-elle à ses coéquipières. Il suffit que l’espion fasse rebondir le message ou l’appel plusieurs fois.
-Tu veux dire le transférer via plusieurs serveurs, éclaircit Pardopoulos.
-Tout à fait.
-Le protocole de sécurité de la DE n’est-il pas censé suivre la connexion jusqu’au bout ?
-En théorie c’est exact. Mais en pratique, c’est une tout autre histoire. Ce genre de protocole de sécurité a plusieurs failles. Personnellement, celle que j’exploiterais, c’est le fait qu’il est incapable de suivre une communication s’il y a changement de réseau virtuel.
-Je ne comprends pas tout, dit Pardopoulos. »
En retrait, Nayu Hiroji sourit intérieurement : elle n’avait absolument rien compris depuis le début. Il faut dire que l’informatique n’avait jamais été son domaine. Elle savait tout juste se servir des fonctions utiles de son TOI et envoyer un mail. Elle avait pris l’habitude de rester en retrait quand sa collègue espagnole se lançait dans une explication technique.
« Le principe de base est assez simple, continua Zapajo. Imagine que le message ou l’appel se déplace de serveur en serveur. C’est ce qu’on appelle le transfert en chaîne ou rebondir. Tous ces changements de serveur se passent dans le même réseau, le même tissage. Dans ce cas là, nos ordinateurs sont tout à fait capables de le suivre. Mais si, au cours d’un transfert il passe dans un autre réseau, il disparaît du réseau surveillé et le protocole de sécurité devient inopérant.
-Je comprends mieux, dit Pardopoulos. Mais c’est si facile de changer de réseau ?
-Pas vraiment, il faudrait changer profondément le code-source du message pour cela. C’est une opération lourde. Mais des programmes peuvent faire croire que le message à disparu du réseau pour le faire réapparaître plus loin.
-Comme une téléportation ou un transplanage de données.
-Non, je comparerais ça plutôt à une désillusion ou une cape d’invisibilité virtuelle. »
Nayu sourit de plus belle, elle savait que ses deux coéquipières et amies utilisaient ce genre de terme pour qu’elle comprenne un minimum.
« Donc, impossible de savoir où sont allés les appels, continua Pardopoulos.
-En l’occurrence, la destination des appels ne nous intéresse pas vu que nous la connaissons déjà, avança très logiquement l’espagnole. Ce que nous voulons savoir, c’est l’origine.
-Ça me semble tout aussi improbable de le découvrir.
-Si tu m’en laisses le temps, je pense y arriver.
-Comment ?
-Je ne pense pas que tu veuilles le savoir, sourit Zapajo.
-Pourquoi ? C’est illégal ?
-Non, pas pour nous. Juste extrêmement technique.
-Je vois. Je te fais confiance. Tu suis cette voie. Nayu et moi allons en suivre une autre. »
Hiroji et Pardopoulos se rendirent au bureau du personnel. Comme dans tout service de ce genre, le recrutement ne se faisait jamais sans une enquête poussée sur l’individu susceptible d’intégrer la DE. Les investigations ne se limitaient d’ailleurs pas au seul intéressé, l’entourage, qu’il soit familial ou relationnel de près ou de loin, était également passé au crible. Plus le poste était important, plus la DE allait loin dans la vie du recruté. Ces enquêtes étaient confiées au bureau du personnel qui n’était pas composé uniquement de personnels administratifs.
Pardopoulos demanda à parler au chef du bureau. Ce dernier était un ancien agent de la CIA appelé Wesson qui débuta à la DE dans une équipe IS. Après une sérieuse blessure, il dut changer d’affectation et avait fait du gras à rester derrière un bureau. Il reçut les deux agents IS.
« Ekaterina, que me vaut ta visite ? demanda-t-il de but en blanc. Je suppose que tu n’es pas là pour boire un café.
-Si tu m’en offres, je ne vais pas le refuser, sourit Pardopoulos. Je demande à avoir accès aux dossiers du personnel.
-Même pour les agents IS, ce n’est pas habituel comme demande. Qu’est-ce qui la justifie ?
-Je ne peux pas en parler. Et j’aimerais que ça reste entre nous.
-Je suppose que tu as l’aval du Patron ?
-Tu veux l’appeler pour vérifier ?
-Pas la peine. Je te connais. Après tout, c’est moi qui ais mené l’enquête de recrutement te concernant. Si tu fais ça, c’est que tu as une bonne raison. Je te débloque un terminal sécurisé avec accès complet, dans une pièce isolée. Préviens-moi quand tu as fini.
-Merci. »
Ekaterina n’était pas surprise de la facilité avec laquelle Wesson avait mis à sa disposition un terminal. Ils avaient tout deux la même formation de base dans les services secrets et se comprenaient parfaitement. Wesson ne chercherait pas à savoir sur quoi travaillait l’équipe de Pardopoulos.
Les deux femmes passèrent des heures à éplucher les dossiers des agents IS. Elles devaient découvrirent le moindre indice trahissant un lien entre un agent IS et le Vatican. Un premier tri permit de séparer les chrétiens ou les membres de familles chrétiennes des personnels appartenant à d’autres confessions ou les athées. Comme il fallait s’y attendre, c’était des moldus pour la très grande majorité. Pardopoulos ne mit tout de même pas de côté les sorciers nés-moldus de famille chrétienne.
Il fallait aller plus en profondeur, découvrir s’il y avait des traces d’implication extrémistes parmi ces agents. Mais quelque chose clochait et Ekaterina le remarqua très vite.
« On perd notre temps, dit-elle.
-Pourquoi dis-tu ça ? questionna Nayu.
-Je suis retournée voir le Patron pour avoir plus de précision. Il m’a dit que les informations reçu par l’Inquisition portaient sur l’affaire traitée par l’équipe Chaldo. Il n’a pas voulu m’en dire plus.
-Peu de gens savent ce que fait l’équipe Chaldo. A part le Patron et je crois, Julia Chaldo et Joshua Ollivander du département scientifique.
-On peut y ajouter plusieurs groupes de l’UA. Mais pour eux, je pense que seul Erius est informé de toute l’affaire. Les autres se contentent de suivre.
-Que fait-on ?
-On va procéder différemment. On va croiser les données du bureau du personnel avec la liste de toutes les personnes ayant intervenu, de près ou de loin, dans l’affaire de l’équipe Chaldo. Commence par l’équipe Chaldo ainsi que Julia, Ollivander et Erius. Je vais voir le Patron pour récupérer la liste des personnels impliqués. »