Ariana Potter, Second Cycle : Dans la Lumière de la Guerre

           CHAPITRE V : LE CORBEAU

           La Secte du Serpent Blanc existait depuis presque quatre siècles. Elle était presque aussi âgée que la DE. Il faut dire que c’était les mêmes évènements qui avaient fait naître ces deux groupes antagonistes : la mort définitive de Voldemort et la fin de la guerre. Les mangemorts du monde entier ayant réussi à se soustraire aux Justices de leurs pays se réunirent et jurèrent de rendre aux Sorciers leur place dominante sur la planète. Ils ne se donnèrent aucune limite, rien ne devait être un frein à leur avancé. Même utiliser des techniques jugées déshonorantes et inacceptables pour un sorcier comme la technologie moldue.

           La seule condition qu’ils s’imposèrent fut la discrétion. Avant d’être proche de leur but, ils ne devaient pas être découverts. Ils se montrèrent patients et attendirent leur heure, n’agissant que par le biais d’autres mages noirs qu’ils manipulaient à leur insu, des pions ignorants et sacrifiables. Ils agirent ainsi dans l’ignorance de l’existence de la DE durant plusieurs décennies. Ils finirent par découvrir cette branche des services secrets de l’ONS. Ils redoublèrent de prudence et de discrétion.

           Quelques temps plus tard, la colonisation de Mars débuta. Des sorciers se trouvèrent parmi les premiers migrants avec quelques membres de la Secte. La Secte avait connaissance de légendes parlant de démons ayant été repoussé jusqu’à la planète rouge lors d’une très ancienne guerre. Ils explorèrent Mars durant des années et finirent par trouver la prison du Labyrinthe d’Olympus. Ils ne purent libérer tout de suite les Dæmons mais ils parvinrent à entrer en contact avec eux. Les Dæmons leur parlèrent des Crânes de Cristal, leur demandant de les réunir. Alors commença une nouvelle quête pour les mages noirs de la Secte.

           Au cours des trois siècles suivant, ils parvinrent à réunir sept des treize Crânes. Une fois qu’ils en eurent six en leur possession, ils trouvèrent le moyen de briser l’enchantement qui maintenait les Dæmons prisonniers. Le temps était alors venu pour la Secte de se révéler au grand jour, ou du moins, à ceux qui s’opposeraient au retour des Dæmons. Et ce premier choc avec la DE se passa sur Mars.

           Depuis, les hommes de la Secte avaient croisé de nouveau les agents de la DE par deux fois. Une fois à Londres. La Secte avait manipulé l’équipe Chaldo pour qu’ils leur ouvrent la voie jusqu’à la Cité des Ténèbres et jusqu’au Crâne qui y était caché. La présence d’un ancien agent IS de la DE connaissant bien la façon de travailler d’Alexandre Chaldo, Ramus Owali, avait été déterminante pour la réussite de cette mission.

           Ramus Owali était un mage africain. Il maîtrisait une ancienne magie liée à la terre et transmise au sein de sa tribu depuis des temps immémoriaux. Mais alors qu’il allait avoir quinze ans, des étrangers étaient venus dans son village. Ils savaient visiblement pour la présence de sorciers dans cette tribu. Au début, ils s’étaient contentés de poser des questions. Des questions auxquelles les membres de son clan avaient appris à mentir. Ces étrangers s’étaient fait alors plus virulents, plus précis dans leurs questions. Les africains, exaspérés, leurs avaient demandé de partir. C’est alors que le drame survint. Ces étrangers massacrèrent tous le village à l’aide d’armes moldues. Malgré leurs pouvoirs, les mages, pris au dépourvu, avaient été tous tués en quelques minutes.

           Ramus était parvenu à se cacher. Les étrangers avaient continué à fouiller le village durant des heures à la recherche de survivants. Ramus avait essayé de ne pas entendre les tirs isolés qui signifiaient la mort d’un ami, d’un cousin, d’un parent. Puis le silence s’était installé, tout aussi oppressant et inquiétant. Ramus était demeuré caché. Il ignorait durant combien de temps. La soif et la faim l’avaient poussé finalement à sortir. Les étrangers étaient partis. Les cadavres pourrissant au soleil avaient embaumé l’air d’une odeur insoutenable, des charognards s’étaient repus des restes humains. La tristesse avait laissé doucement place à une fureur incontrôlable chez le jeune homme. Il l’avait laissée s’extérioriser en un grand hurlement. Ses pouvoirs échappant un temps à son contrôle, une vague de terre s’était soulevé et vint engloutir son village, enterrant sa famille et ses amis pour l’éternité.

           Ramus Owali avait ensuite erré plusieurs jours dans la savane. Il était parvenu finalement à une ville où il fut retrouvé par les autorités magiques de son pays. Souhaitant quitter ce pays où il avait connu un si grand malheur, il fut envoyé aux Etats-Unis où il étudia à l’Institut Magique de Salem. Il y apprit la magie occidentale. Mais jamais il ne cessa de pratiquer la sorcellerie de son peuple. C’était tout ce qu’il lui restait d’eux.

           Quelques années plus tard, il intégra les Magic Rangers, l’unité américaine chargé des mages noirs à l’instar des Aurors britanniques et des Chasseurs français. Sa carrière y fut brillante. Peu de gens connaissaient son passé. Et personne ne savait qu’il continuait à rechercher secrètement les hommes qui avaient massacrés les siens. Mais il se rendit vite à l’évidence que les moyens dont il disposait au sein des Magic Rangers ne lui permettraient jamais de faire la lumière sur cette affaire. Il commença à se résigner. Et ce fut à cette époque qu’il fut contacté par la DE. Il y vit une occasion d’avoir accès à des informations nouvelles.

           Il passa des années, entre deux missions, à tenter de découvrir la vérité. La première chose qui en ressortit, c’était que ces hommes savaient cacher leur trace. Et un jour, lors d’une mission, alors qu’il devait juste surveiller des tractations entre des trafiquants internationaux de produits magiques illicites, il rencontra un mage noir. La confrontation tourna court. Le mage noir le tua en quelques minutes. Il invoqua ensuite son esprit.

« Pourquoi me faire revenir des profondeurs de la mort juste après m’avoir tué ? avait demandé Ramus troublé.

-Je te pensais plus fort que ça Ramus Owali, avait dit le mage noir. Je ne pensais pas te tuer, juste t’immobiliser pour pouvoir te parler tranquillement. Heureusement, je suis un nécromancien accompli.

-Me parler de quoi ?

-Tu as passé presque trente ans à rechercher les hommes qui ont massacré ton peuple. Sans succès.

-Exact. Mais maintenant, cela n’a plus d’importance.

-Tu ne veux donc plus les venger ?

-C’est mon souhait le plus cher, mais je suis mort.

-Ces hommes étaient des moldus. Des moldus effrayés par nos pouvoirs. Des moldus souhaitant la disparition de tous les sorciers à travers le monde. Des moldus ignorant la véritable puissance de la Magie mais la redoutant plus que tout. Ces hommes n’étaient que quelques uns parmi tant d’autres. Si tu les retrouves, tu les tueras. Et après ? D’autres prendront leur place et continueront le massacre des nôtres. La seule solution, c’est que nous autres Sorciers, reprenons enfin la place qui nous revient de droit au sommet. Nous devons imposer notre existence et notre loi à ces êtres inférieurs qui ne savent que tuer les nôtres. Ainsi, tu auras ta vengeance et tu pourras même faire en sorte que plus personne ne connaissent la douleur qui fut la tienne.

-Je ne peux plus maintenant.

-Je suis un nécromancien, je peux ranimer ton corps. Tu seras plus puissant qu’avant. Tout ce que je te demande, c’est une obéissance totale. »

           Et Ramus Owali avait accepté. Il devint un draugr, un mort-vivant animé par une magie nordique. Il avait acquis une puissance extraordinaire. La douleur physique n’était plus qu’un souvenir. Il savait que seule la décapitation pouvait le tuer. Ou alors s’il trahissait son maitre et que celui-ci retirait sa malédiction.

           Ramus Owali attendait maintenant que son maitre lui octroie une nouvelle mission. Il n’était pas présent lors de la précédente opération de la Secte sur Mars. La direction avait été confiée au jeune Noah, un psychopathe aimant se battre et tuer. Mais voilà, l’opération visant à enlever au moins un des Anges Rebelles fut un échec cuisant. La Secte perdit un de ses vaisseaux de combat et plusieurs membres dont Noah. Pour Ramus, la perte de ce dernier était autant un mal qu’un bien pour la Secte. Noah s’était montré incontrôlable par le passé, mais il avait été un combattant farouche.

           Une autre nouvelle liée à cette opération pouvait être jugée bonne et mauvaise à la fois selon l’avis de Ramus : la mort d’Alexandre Chaldo. Sa disparition signifiait qu’un obstacle de taille avait disparu du chemin de la Secte. Mais Ramus aurait aimé le vaincre lui-même, prouvé une fois pour toute qu’il était le meilleur, mettre fin à la réputation de puissance de la famille Chaldo en éliminant le porteur du titre de Corbeau. Au dernière nouvelle, le titre n’avait pas encore été remis à un autre membre de la fameuse famille.

           « Tu as l’air bien pensif Ramus. »

Le draugr se leva pour faire face à l’homme âgé d’au moins une centaine d’années mais toujours alerte qui venait d’arriver. Il s’inclina respectueusement.

« A quoi pensais-tu ?

-Je pensais au Chaldo maître, répondit Ramus.

-Ah ! Les Chaldo. J’ai appris que les anciens de leur famille s’étaient réunis récemment. Ils ont sûrement choisi le successeur d’Alexandre Chaldo. Tu aurais aimé l’éliminer de tes mains.

-Oui mon maitre.

-Patience Ramus, ce ne sera pas celui que tu espérais, mais bientôt, tu auras l’occasion de te confronter au nouveau Corbeau. Et dans la guerre qui va bientôt débuter, toute cette famille maudite périra de nos mains ou de celles de nos seigneurs. Ils paieront pour avoir maintenu les nôtres dans les ténèbres de ce monde qui nous revient de droit. Combien de fois les Chaldo ont-ils protégé des moldus coupables d’exactions envers des sorciers ?

-Ils paieront maître. J’en fais le serment. Et cette Ariana Potter paiera également. Pour son ancêtre et pour ses liens avec les Chaldo.

-Tu vas bientôt partir pour une nouvelle mission, nos seigneurs le souhaitent.

-Ordonnez et j’obéirai. »

           Les préparatifs pour le départ étaient terminés. Ariana et Irael attendaient Anthony et Lucifel au pont d’envol des ATEF[1]. Le vieil ange et l’agent de la DE arrivèrent rapidement.

« Nos bagages sont déjà chargés, informa Ariana. Nous n’attendons plus que Joshua pour partir.

-Parfait, acquiesça Tony. »

Joshua Ollivander fit irruption sur le pont d’envol, accompagnées de Julia Chaldo et de Mei-Lin Zhao. Cette dernière avait l’air un peu inquiète de voir partir son petit-ami aussi loin. Joshua essaya de la rassurer.

« Tout ira bien ma chérie. Je n’y vais pas seul, Ariana et Tony sont avec moi.

-Oui, fit Ariana en prenant son ami d’enfance par le cou. T’inquiète Mei-Lin, je vais te le ramener entier et en bonne santé.

-Je… je te fais confiance Ariana.

-Surtout, essaye de récupérer un maximum de données sur la Magie eldar, dit Julia. Qui sait ce que nous pourrons apprendre de nouveau.

-Je ferais mon maximum, assura Joshua.

-Je m’excuse de vous interrompre mesdemoiselles, mais un vol nous attend, rappela Anthony. »

           Ariana rejoignit Irael alors que Julia accompagna son frère jusqu’à la rampe de l’ATEF pour laisser à Joshua et Mei-Lin un dernier instant d’intimité. Les deux amoureux s’enlacèrent tendrement.

« J’aurais cru que tu serais venue également Julia, dit Tony. Une telle occasion est unique.

-Les Eldars ont été assez précis avec l’identité de leurs invités, fit Julia visiblement déçue de ne pouvoir venir. Il n’y a que pour les Anges qu’ils n’avaient rien dit mais au vu de leur alliance passée, on peut estimer que leur présence sera bien vue. J’ignore pourquoi ils ont demandé expressément Joshua ni même comment ils connaissent vos noms à tous les trois. Nous devons faire avec, c’est tout. Et puis, j’ai confiance en Joshua pour recueillir des informations techniques.

-Espérons pour Mei-Lin qu’il ne tombe pas sur une eldare aimant l’exotisme, il parait que les femmes eldares sont magnifiques.

-Il est totalement fou de Mei-Lin, je lui fais confiance là-dessus aussi. Sinon, tu savais que les anciens de la famille se sont réunis avant-hier ?

-Non, c’est vraiment terrible de vivre dans une famille ayant autant le goût du secret, plaisanta Anthony.

-Tu devines pourquoi ils se sont réunis. Et tu es conscient que tu es l’un des candidats les mieux placés pour recevoir le titre de Corbeau.

-Je n’en ai jamais voulu. D’ailleurs, en y réfléchissant Alex non plus certainement.

-Si, mais seulement pour l’aura qu’il représente.

-Ouais, acquiesça Tony. Par contre les responsabilités qui accompagnent le titre… Je ne me vois pas siéger parmi les anciens à mon âge.

-Et pourtant, tu vas devoir, lança une voix. »

           Anthony soupira en se tournant vers les trois individus qui venaient d’arriver. Hector Guillou, visiblement, ne faisait qu’accompagner. Le plus jeunes des deux visiteurs n’étaient autre que Sébastien Chaldo, le père d’Anthony et Julia. L’autre était un très vieil homme qui s’appuyait sur une canne et semblait prêt à tomber à la moindre bousculade.

« Anthony, souffla le plus ancien. Tu as été désigné comme nouveau porteur du titre de Corbeau.

-Très bien, accepta à contrecœur l’agent de la DE. Mais pour la cérémonie, il faudra attendre, je pars en mission là.

-Nous le savons, dit Sébastien. Tout sera prêt pour ton retour. Tes amis sont bien sûr invités.

-Et bien nous allons pouvoir faire une bonne fiesta au moins. Papa, papé, à la prochaine. On embarque. »

           La rampe de l’ATEF se referma et l’aéronef décolla. Sébastien Chaldo se tourna vers le vieil homme.

« Je t’avais dit qu’il ne sauterais pas de joie grand-père.

-Il me rappelle toi quand on t’a nommé Corbeau, sourit le vieux. Mais tu as parfaitement rempli ton rôle malgré tout.

-Tony fera de même papé, fit Julia en s’approchant. Même s’il ne s’en sent pas capable, je sais qu’il y arrivera.

-Ma belle Julia, ça fait longtemps que je ne t’ai pas vu.

-Désolé, beaucoup de travail. On peut aller boire un rafraichissement à la cafeteria si vous avez le temps.

-Oui, allons-y. je trouve que je ne passe pas assez de temps avec mes arrière-petits-enfants alors que je devrais en profiter le peu qu’il me reste à vivre, sourit le vieillard. »

 [1] Aéronef de Transport et d’Evacuation Furtif.