Ariana Potter, Second Cycle : Dans la Lumière de la Guerre

Chapitre 25 : IX Tensions Planétaires

3190 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour 10/11/2016 04:38

            CHAPITRE IX : TENSIONS PLANETAIRES

 

            Christianus se creusait la tête pour trouver une solution. Il savait sa tache ardue et surtout dangereuse. La moindre erreur pouvait lui coûter la vie. Il avait compris depuis le départ que les seuls endroits où il pourrait trouver une information confirmant un lien entre Adam Ferson et Samus Denler étaient l’ordinateur personnel ou l’holophone portable du chef des services secrets pontificaux. Il était exclu de dérober même temporairement le portable de Denler, vu le nombre de fois dont ce dernier en avait l’usage dans la journée, il remarquerait dans un délai trop court sa disparition. Restait donc l’ordinateur. Mais son accès était à peine moins risqué que le vol de son portable.

            Le bureau de Denler était isolé par des vitres en verre blindé empêchant tout signal de passer au travers, ce qui interdisait l’utilisation d’un appareil pour pirater l’ordinateur à distance. Ces vitres donnant sur les bureaux des agents du service interdisaient de s’y trouver sans que tout le monde ne soit au courant. Sauf quand Denler les rendait opaque, ce qu’il ne faisait jamais quand il était absent et ce qu’il ne faisait qu’à de rares occasions quand il était présent. La porte ne s’ouvrait que par le biais d’un scanner biologique[1] ou par une commande placée sur le bureau. L’accès direct à l’ordinateur en était compromis.

            La solution la plus viable serait de passer par le routeur qui le reliait au réseau et au serveur du service. Mais là encore, ce serait difficile et risqué. Le serveur était protégé par divers systèmes et seuls quelques techniciens rigoureusement sélectionnés y avaient accès. De plus, il était nécessaire de posséder des compétences en piratage de loin supérieure à la normale, ce qui n’était pas le cas de Christianus. Cela s’avérait tout de même être la meilleure option.

            Christianus et Heinsler retournèrent au poste de la DE. Heinsler avait fait venir l’analyste de l’équipe de Louis Loup-Gris. Cet agent se nommait Diego Suarez, mexicain, la quarantaine. Suarez avait commencé à la DE par la section informatique. C’était un véritable expert en piratage.

« Salute, fit-il en voyant les deux hommes venir à lui. Alors, vous avez besoin de moi ?

-Vous savez quel est notre mission ? demanda Heinsler.

-Je travaille avec Louis depuis quinze ans, il m’a mis tout de suite au courant de la tâche que lui a confié le Patron. Et si vous faites appel à moi, je suppose que c’est que vous avez besoin d’un piratage.

-Nous devons pirater le serveur principal des services secrets pontificaux, lança Christianus. »

            Diego garda le silence mais son visage parla pour lui. Son expression signifiait clairement : « t’es sérieux petit gars ? ».

« Le serveur principal ! Rien que ça ! s’exclama Suarez. Et après, je m’attaquerai à celui de Saint-Pierre. Autant continuer sur la lancée surtout que je pense que ce sera plus simple.

-Vous dites que c’est impossible.

-Non, pas impossible, mais pas loin. On parle d’un serveur affilié à l’un des services secrets non-officiels, donc l’un des mieux cachés et des mieux gardés. Et sur ces points, je parle autant du point de vu physique qu’informatique. Ce serait comme vouloir s’attaquer au serveur de la DE. Et ça, je ne m’y risquerai pas à moins d’y être obligé.

-Nous n’avons pas le choix, continua Christianus.

-Ouais, je le comprends. Ce n’est pas en piratant l’ordinateur de Ferson qu’on découvrirait un lien entre lui et l’Inquisition. Denler doit faire en sorte qu’aucune trace ne subsiste dans l’ordinateur de ce fonctionnaire endimanché. Le problème c’est que je ne peux pas pirater le serveur via un accès distant, le filtre réseau est trop agressif. On n’aura jamais l’accès et en plus on se fera repérer.

-Comment le savez-vous ?

-J’ai déjà essayé, il y a quelques années, répondit-il simplement. Le seul moyen est de se connecter physiquement au serveur.

-C’est aussi ce que je pense. Il faut donc que je vous fasse entrer dans les locaux techniques.

-Pas besoin, il suffit que vous connectiez un transmetteur qui me permette d’effectuer le piratage depuis un poste externe et…

-Impossible, coupa Christianus. Le serveur est protégé par un champ de brouillage bloquant tout signal entrant et sortant. Les seuls moyens d’accès hors champ sont les connections du service mais comme vous l’avez dit, le filtre pose problème. Il faut donc que vous vous branchiez physiquement au serveur.

-Je ne suis pas agent de terrain, ce n’est pas mon job. Je vais vous expliquer comment faire et…

-Vous savez très bien que ce n’est pas possible. Je ne saurai jamais faire face à un imprévu au niveau informatique.

-Ouais, et comment comptez-vous me faire entrer dans le saint des saints des services secrets pontificaux ?

-Ça ne sera pas facile et ça a toutes les chances de rater.

-Et si ça rate… osa demander Suarez.

-Nous sommes morts. »

 

            Fred et Zoé s’installèrent dans un petit local comportant deux terminaux dés leur arrivée à Ascraeus. Le local était verrouillé par une porte équipée d’un scanner biologique ne reconnaissant que leurs empreintes corporelles, il était situé en sous-sol. Ariana et Nayu les aidèrent à s’installer pendant que Tony et Kat se rendaient au centre des opérations de la DE sur Mars pour se mettre à jour des dernières informations glanées par les autres agents.

« Bon, au moins on sera à l’abri en cas de bombardement, dit Fred pince sans rire.

-Tu devrais envoyer un message à Julia pour la rassurer, fit Ariana.

-Je comptais le faire. Et en même temps, je lui dirais d’embrasser Sarah de ta part.

-Merci, sourit Ariana. Je vais aller finaliser mes affaires.

-Et moi commencer mon travail. »

            Ariana sortit. Zoé continuait à installer ses affaires, aidée par Nayu. La jeune anglaise eut l’impression qu’elles prenaient leur temps. Peut-être n’était-ce qu’une impression, les deux femmes étaient amies depuis longtemps après tout. Elle ne s’en préoccupa pas plus.

« Tu as bien tout ce qu’il te faut ? demanda Nayu.

-Oui, je pense, répondit Zoé. Et s’il me manque quelque chose, je n’aurai qu’à demander. Et toi, tu es prête ?

-Deux détails à peaufiner, mais je n’en ai pas pour longtemps.

-Sois prudente.

-Ne t’en fais pas, j’ai l’habitude.

-Je sais mais… fais attention quand même. Je… »

Zoé ne continua pas sa phrase. Nayu posa sa main sur son épaule et lui sourit.

« On reste en contact, et je te promet de revenir vite. »

Nayu sortit sous les yeux de Zoé.

« Tu as intérêt de revenir, pensa Zoé. »

 

            L'holophone de bureau d’Hector Guillou sonna. C’était Ferson. Le Patron devina le motif de cet appel. Les dernières nouvelles venant de Mars par les canaux sécurisés ne devaient pas lui plaire, ainsi qu’aux autres pays colonisateur de Mars et en particulier aux états européens. Le Patron aurait bien fait la sourde oreille mais il se devait de savoir ce que pouvait en dire Ferson. Il accepta l’appel, faisant apparaître l’image holographique de l’anglais.

            « Monsieur Ferson, que puis-je pour vous cette fois ? questionna-t-il d’un ton affable.

-Vous êtes au courant de la situation sur Mars ? demanda l’ambassadeur.

-Si vous faîtes référence à la déclaration d’indépendance de la Nouvelle-Europe, oui, je suis au courant.

-Vous avez des agents sur place ?

-Les équipes Chaldo et Pardopoulos sont arrivées sur Mars, avoua-t-il, conscient que Ferson n’y pouvait rien et content de le faire rager une fois de plus sur le sujet.

-Quelque soit la mission sur laquelle elles sont, vous allez les réaffecter.

-A quelle mission ? interrogea le Patron.

-Le gouverneur Miladavic doit être arrêté et expatrié vers la Terre pour y être jugé pour haute-trahison.

-Navré monsieur mais ce n’est pas dans les attributions des services secrets de l’ONS et encore moins dans celles de la DE. Adressez-vous plutôt au SRE ou au SAE[2].

-Vous refusez d’obéir à un ordre direct ! s’emporta Ferson.

-Je n’ai pas à obéir à ce genre d’ordre, répliqua le Patron. Les services européens ont des agents sur place, contactez-les.

-Ils sont passés à l’ennemi ou ont été arrêtés. Et nous ne pouvons en envoyer d’autres dans un délai court car les forces martiennes sont en état d’alerte et se prépare à une nouvelle guerre coloniale.

-Sauf votre respect, vous vous trompez. L’UNIM se prépare à repousser une invasion des Dæmons. Elle serait d’ailleurs satisfaite si les armées coloniales présentes sur Mars leur apportaient leur concours.

-Cessez de raconter n’importe quoi ! Peu importe ! Nous nous débrouillerons autrement. Votre inaction sera rapportée et je vais demander la dissolution de votre division.

-Nous ne dépendons pas uniquement de l’ONS, vous le savez bien. La CIMS ne le permettra pas.

-En parlant de la CIMS, comment ont-ils pris la création d’un Conseil Martien de la Magie ? Mal je suppose.

-Au contraire, sourit le Patron. La CIMS parle de créer un bureau de liaison avec le CMM. Eux, ils avancent.

-Vous ne rirez plus très longtemps Guillou. Il va falloir que vous vous souveniez qui vous êtes, d’où vous venez et de quel côté il faut que vous soyez.

-Pour cela, ne vous en faîtes pas monsieur, je le sais parfaitement. C’est plutôt à vous de vous poser la question. »

            Ulcéré, Ferson raccrocha. Le Patron était satisfait de cet entretien. Visiblement, Ferson perdait peu à peu son calme à mesure qu’il remarquait les limites de son pouvoir sur la DE. Et plus il s’énerverait, plus il ferait d’erreur. Il ne restait plus qu’à lui faire faire une erreur fatale.

 

            Les renseignements glanés l’antenne martienne provenaient de leurs propres sources ainsi que des autres services de renseignements des états de l’UNIM. De plus, de par son caractère international, l’ONS avait accès à toutes les données des colonies dépendantes. Ferson ne pouvait rien y faire car couper l’accès de la DE impliquait de couper celui des autres unités des services secrets de l’ONS. Et il ne faudrait pas longtemps pour que celles-ci le remarquent et demandent des explications.

            Les Dæmons et le Serpent Blanc devaient agir quelque part sur Mars pour préparer l’invasion. Même si la mission n’était pas directement de l’empêcher, il n’était pas acceptable de ne rien faire. Les deux équipes IS devaient tenter de retrouver les Crânes de Cristal, les récupérer si possible, les détruire sinon.

            Ascraeus, en son état de capitale de Nouvelle-Europe, était la plus importante ville de la planète en termes de populations, d’infrastructures et de centres névralgiques. C’était une cible de choix pour une action terroriste. Tony et Kat gardaient à l’esprit que le principal atout de l’ennemi était la division des forces présentes sur Mars. Si les forces de l’UNIM représentaient la majorité, les colonies dépendantes possédaient une puissance non-négligeable. Et dans l’état actuel des choses, une étincelle suffirait à mettre le feu aux poudres. La confusion qu’engendrerait un début de guerre coloniale serait suffisamment profitable aux Daemons pour leur permettre d’envahir Mars avec facilité.

            Bien sûr, d’autres cibles étaient à prévoir, surtout maintenant que Nouvelle-Europe avait déclaré son indépendance. Huygens, capitale de New-America, ou Rock City, capitale de Marineris, étaient des cibles de choix pour une attaque du côté de l’UNIM. De même, Gizeh, capitale de Nilia[3], ou Tokyo II, préfecture d’Amaterasu[4], ou encore Néo-Beijing, capitale territoriale de la colonie de l’Empire restauré de Chine, ou tout autre colonie permettraient par une attaque ciblée de lancer les hostilités.

            Les analystes devaient déceler dans des faits divers et parfois insignifiants la trace de la préparation d’actes terroristes. Le temps manquait. Le premier choc de l’attaque des Dæmons était prévu dans quatre heures. Rien ne pourrait l’empêcher. Des signes d’activités suspectes avaient été repérés à plusieurs endroits. Les points qui attirèrent plus particulièrement l’attention furent Ascraeus et Néo-Beijing. Des signes que les analystes traduisaient comme étant des préparations probables d’actes terroristes.

            Les deux équipes se séparèrent. Avec Nayu, Kat demeura à Ascraeus. Tony et Ariana décidèrent de se rendre à Néo-Beijing, la colonie chinoise étant devenue la force dépendante la plus imposante de Mars. Il fallait maintenant y entrer discrètement et rapidement. Tony fit préparer un ATEF de l’ONS. Le temps manquait pour pratiquer une infiltration en sécurité, il fallait prendre des risques et y aller au culot.

« Tu es sûr de toi Tony ? questionna Kat. Vous avez neuf chances sur dix d’être abattus avant même de toucher le sol.

-Nous n’avons ni le temps ni le choix, dit Tony. Tu le sais aussi bien que moi.

-Donc tu comptes sur la chance ?

-Et sur notre habileté.

-Je ne doute pas de la tienne. Mais Ariana n’a que quelques mois d’expérience au sein de la DE.

-Et elle a déjà prouvé qu’elle était plus fiable que certains agents IS ayant des années d’expérience, répliqua Tony. Elle a de l’instinct et une raison de se battre. Ça me suffit. Occupe-toi d’Ascraeus. Nous allons limiter les contacts entre nous pendant cette opération. Après, une fois la bataille contre les Dæmons débutée, ça n’aura plus d’importance.

-Bonne chance Tony, conclut Kat.

-A toi aussi. »

            L’ATEF transportant Tony et Ariana décolla. Au sol, Kat et Nayu empruntèrent un véhicule banalisé et se rendirent en ville.

            Le temps manquait…

 

[1] Scanner d’identification scrutant le corps en entier.

[2] Service Action Européen, branche des services secrets européens spécialisée dans les actions spéciales.

[3] Colonie égyptienne.

[4] Colonie japonaise.

Laisser un commentaire ?