Ariana Potter, Second Cycle : Dans la Lumière de la Guerre

Chapitre 29 : XIII C'est la guerre

5409 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour 10/11/2016 07:59

            CHAPITRE XIII : C’EST LA GUERRE

 

            Ariana et Tony avançaient prudemment en faisant en sorte de ne pas éveiller les soupçons. Ils avaient déjà reconnu la moitié de l’immeuble. Se dépêcher lentement, comme à l’instruction, le but étant d’observer le moindre détail pour repérer toute menace qui pourrait se cacher dans les coins. Chaque porte pouvait dissimuler un ennemi.

            Tony s’approcha de la porte suivante. Il sonna pour voir s’il y avait quelqu’un. Pas de réponse. Utilisant une des fonctions de son corps cybermagique, il pirata la serrure électronique pour ouvrir la porte de l’appartement. Tony entra le premier, baguette à la main. L’entrée de l’appartement donnait directement sur le séjour.

« On y est, dit Tony. »

La disposition des meubles dans la pièce avait permis à l’agent d’arriver à cette conclusion. Pas d’holovision ni d’holophone, d’ordinateur ou d’artefact magique de communication. Juste quelques tables placées en rectangle, comme dans un poste de commandement militaire. Rien d’autre, l’appartement avait été visiblement nettoyé à la hâte. Les quelques pièces qui le composaient furent rapidement reconnu. Rien n’avait été laissé permettant de remonter jusqu’à une autre base du Serpent Blanc ni de savoir où étaient partis les membres de la secte qui se trouvaient là avant. Pas un indice, pas un document. L’appartement était « trop propre » pour n’avoir été qu’abandonné à la hâte par des résidents lambda.

« On arrive trop tard, dit Ariana.

-Nous ne trouverons rien ici, ajouta Tony. Le Serpent Blanc connait trop la musique pour laisser un indice. Mieux vaut retourner au PC voir si Rowena n’a pas une autre mission pour nous. »

            Ariana et Tony se concentrèrent, mais rien, ils ne parvinrent pas à transplaner. Ils réessayèrent mais sans plus de résultat.

« Est-ce un des effets aléatoires de la magie sur Mars ? questionna Ariana.

-Je ne pense pas, répondit Tony en tendant sa baguette devant lui. »

Il effectua quelques mouvements dans le vide. Une sorte d’ondulation, comme des rides à la surface de l’eau quand on y déplace un bâton, apparut dans l’air.

« Un champ anti-transplanage, conclut-il. »

Les réflexes d’Ariana acquis à l’entraînement s’activèrent d’un coup. Sa baguette de cristal à la main, elle se mit à couvert à l’angle d’un mur, un genou à terre, la porte d’entrée dans sa ligne de mire, prête à toute éventualité. Tony, pour sa part, vérifia les fenêtres qui donnaient sur la rue. Cette dernière était déserte. Tony activa ses senseurs pour repérer toute présence hostile. La vision thermique ne donna rien, pas plus que la vision ultraviolet. Mais la vision sonique[1] lui permit de repérer cinq silhouettes postées à différents points stratégiques surveillants l’entrée de l’immeuble. Ils ne bougeaient pas. Ce devait être une équipe de couverture. Une équipe d’assaut était sûrement déjà présente dans le bâtiment. Il activa sa connexion avec les micro-caméras qu’il avait placées au rez-de-chaussée. Il les passa immédiatement en vision sonique et remonta dans l’enregistrement. Il put ainsi voir cinq autres individus s’engager dans les escaliers.

            Tony transmit ces informations à Ariana. Quelques mois auparavant, elle aurait eu une poussée de stress. Mais depuis, tant de choses s’étaient passées. L’expérience lui avait appris qu’il fallait rester calme, l’esprit coulant comme l’eau, le corps détendu, tout en restant concentré sur l’objectif : survivre. Elle activa son TOI en mode combat, ses lunettes se matérialisant sur ses yeux. La vision sonique lui montra une image sombre et froide d’un bleu nuit profond où se détachaient en blanc une visualisation des sons même inaudible pour l’oreille humaine. Elle voyait le cœur technomagique de Tony vibrer dans sa poitrine ainsi que sa silhouette via la circulation des différents fluides et des mouvements qu’il effectuait. Si elle pouvait se voir, elle verrait une image semblable à peu de chose près, chez Tony, on devinait aisément la limite entre les parties humaines et artificielles qui représentaient les deux tiers de son être même si cela s’arrêtait à une simple démarcation. Comme quoi, Joshua et Julia avaient vraiment gardé le corps humain comme modèle en créant celui de Tony.

            La vision sonique avait l’avantage de permettre de regarder au travers des cloisons si leur nature l’autorisait. Dans un immeuble à bas coût comme celui-ci, il n’y avait aucun problème, l’isolation, comme le reste, était au rabais. Tony repéra aisément les cinq ennemis postés dans le couloir, leurs pas produisaient de fugaces marques blanches, leurs systèmes sanguins une silhouette de fil, et leurs respirations donnaient autant de cibles en plein milieu des organes vitaux en montrant leurs poumons. Deux se trouvaient au niveau du palier. Un autre, sûrement le chef d’équipe, se trouvait à mi-chemin entre l’escalier et la porte de l’appartement. Quant aux deux derniers, ils s’étaient placés de part et d’autres de la porte, attendant le signal pour lancer l’assaut. Ariana avait également repéré la place de chacun.

            La confrontation était imminente…

 

            Fred suivait en temps réel tout ce qui se passait au niveau de Tony et d’Ariana. Il les avait suivi durant l’exploration de l’immeuble et connaissait leur situation actuelle. Kat également, elle n’avait pas quitté Fred et avait tout suivi en regardant son écran par-dessus son épaule.

« Il faut qu’on aille les aider, dit Kat. Nayu, il faut qu’on transplane à Huygens, au plus près d’eux.

-Ce ne sera qu’à plusieurs kilomètres, renseigna Fred. Le champ anti-transplanage est très étendu. Ils ont dû s’y mettre à plusieurs pour le dresser. Le temps que vous y arriviez, le combat sera terminé, quel qu’en soit l’issue.

-Alors tu proposes qu’on prenne un paquet de pop-corn et qu’on attende la fin sans rien faire ?

-Je n’ai pas dit ça, je présente juste les faits.

-Ouais, excuse-moi. Mais je ne peux pas rester ici. On y va, même si c’est inutile. Zoé, tu restes là. Nayu, va chercher l’équipe d’intervention d’alerte. On part dans deux min… »

            Le fracas d’une énorme explosion coupa Kat en pleine phrase. Les lumières vacillèrent et les murs tremblèrent. Kat n’eut pas besoin d’ouvrir la bouche pour que Zoé la renseigne :

« La porte principale est attaquée. Plusieurs groupes ennemis en progression. La garde à l’entrée a été décimée. Les groupes d’intervention lancent la contre-attaque. »

Kat enragea. Les assaillants étaient visiblement des sorciers, le Serpent Blanc. L’attaque était visiblement parfaitement minutée avec l’assaut des Dæmons en orbite.

« Tony et Ariana vont devoir se débrouiller sans nous, dit Kat. Je pense qu’ils ne comptaient pas sur notre appui de toute façon. Zoé, Fred, vous vous enfermez ici et vous n’ouvrez sous aucun prétexte tant que l’attaque est en cours. Envoyez un rapport à Rowena. Nayu, on va prêter main-forte aux équipes d’intervention.

-Soyez prudentes, dit Fred.

-Vous avez des armes ? questionna Kat. »

Fred sortit le pistolet qu’il avait perçu avant leur départ de la Terre. Zoé en avait un également, elle paraissait à peine plus confiante que Fred en le sortant. Kat acquiesça d’un hochement de tête et se dirigea vers la sortie. Nayu demeura un instant en arrière, s’approchant de Zoé.

« Ne t’inquiète pas, dit-elle en posant la main sur son bras. Tout va bien se passer.

-Reviens vite, parvint à dire Zoé en souriant de manière crispée. »

Nayu fit deux pas pour s’éloigner et s’arrêta. Elle se retourna vivement vers Zoé et l’embrassa à pleine bouche. Zoé fut tellement surprise qu’elle ne parvint pas à s’abandonner totalement à la douceur du moment.

« Toi aussi tu… essaya de dire Zoé quand Nayu se détacha de ses lèvres.

-On en parlera quand ce sera plus calme, sourit une dernière fois Nayu avant de partir. »

La porte se referma derrière la japonaise et se verrouilla.

            Kat et Nayu atteignirent rapidement la cour du bâtiment. Le combat y faisait rage. Les équipes d’intervention de la DE avaient réagi assez rapidement pour pouvoir y circonscrire les forces ennemies. Les éclairs des maléfices et le fracas des armes à feu s’entremêlaient en un spectacle son et lumière d’une violence expéditive. En passant, Kat avait récupéré un fusil d’assaut et des grenades à l’armurerie. Elle le fit chanter aussitôt arriver dans la cour.

« Kat ! Par ici ! appela un homme à couvert derrière un muret.

-Vincenzo, situation ? questionna Kat aussitôt qu’elles le rejoignirent.

-Pour le moment, on est parvenu à les fixer. Mais ça ne va pas durer. Ils attaquent en force et nous ne sommes qu’à cinquante pourcent des effectifs. Le reste est avec Carter.

-J’ai fait envoyer un rapport à Rowena. Elle va sûrement nous envoyer du renfort. En attendant, il ne faut pas qu’ils entrent dans le bâtiment.

-Trop tard, une équipe de quelques hommes a déjà pénétré par le côté est, il y a deux minutes. J’ai envoyé une équipe pour les poursuivre et les éliminer.

-Le côté est ! s’exclama Nayu. Le bocal ! »

Cela paraissait logique que le bocal, le centre où toutes les données récupérées par les différents capteurs de l’ONS étaient analysées, soit une cible prioritaire de l’ennemi. Le bocal était heureusement blindé et isolable de l’intérieur, et Kat avait ordonné à Fred et Zoé de s’enfermer. Mais toute défense peut être percée.

« Tu peux te débrouiller ici ? interrogea Kat.

-Ouais, allez-y, répondit Vincenzo.

-Nayu ! »

La shugenja sortit un shiki qu’elle lança. Le shiki s’immobilisa en l’air et produisit une lumière aveuglante. Kat et Nayu en profitèrent pour traverser le découvert jusqu’à l’accès est par laquelle le groupe ennemi s’était introduit. Prudemment mais rapidement, les deux femmes se déplacèrent en direction du bocal.

 

            Ariana respirait profondément. Elle était calme, plus qu’elle ne l’aurait été ne serait-ce que quelques mois auparavant. Tony avait le visage fermé, comme si rien ne pouvait le perturber. Ils attendaient l’assaut ennemi. Qu’allaient-ils faire ? Ariana et Tony ne se posèrent même pas la question. Ils devaient réagir sans anticiper au risque de se tromper. Chaque erreur pouvant s’avérer fatale. La seule chose sûre était que leur position leur donnait un avantage, les adversaires devraient entrer par la porte et ils ne pourraient le faire qu’un par un.

            Soudain, la porte explosa en un panache de débris. Des éclairs verts mortels traversèrent le nuage de poussières, passant non-loin les deux agents de la DE. Ariana et Tony attendaient encore. Les sortilèges se turent. Il se passa trois secondes éternelles. La poussière retombait déjà. Un ennemi s’engouffra dans le vestibule de l’appartement, baguette en avant. Tony lança un couteau qui vint se figer dans le cou de l’assaillant. Du sang jaillit et l’ennemi tomba dans un râle morbide. Un autre se présenta, lançant à tout va des maléfices de stupéfixion. Ariana dut en dévier un grâce à un bouclier et contre-attaqua directement par le maléfice du bloque-jambes. Malgré tout, l’opposant leva sa baguette, prêt à lancer un nouveau maléfice alors qu’un troisième se présentait à la suite.

« Avada Kedavra ! »

Ariana fut la plus rapide, son maléfice de mort achevant l’adversaire à terre alors que celui informulé de Tony frappa le suivant.

            Trois serpents avaient été éliminés en quelques secondes. Les autres parurent un peu échaudés car il y eut une accalmie. Ils devaient réfléchir à une nouvelle stratégie. Une silhouette fugace passa dans le couloir pour se placer de l’autre côté de l’ouverture de la porte. Une main balança un objet rond dans l’appartement. Ariana et Tony eurent juste le temps d’identifier une fiole. Ils se jetèrent à couvert plus au fond de l’appartement en incantant chacun un bouclier. Lorsque la fiole se fracassa sur le plancher, une formidable explosion les plaqua violemment contre les murs. Ariana s’effondra au pied de la cloison, sonnée. Elle voyait flou et entendait un son suraigu. Elle devina une silhouette en noir s’approchant d’elle comme au ralenti. Son assaillant pointa sa baguette sur son visage et s’apprêtait à l’achever. L’autre silhouette s’était approcher de Tony, également au sol. Mais quand celle-ci fut suffisamment prête de lui, le Corbeau se redressa en percutant un genou de l’ennemi d’un coup de poing, le brisant. Tony sortit l’épée des Chaldo et la passa en travers du corps. Celui qui se penchait sur Ariana, entendant son collègue pousser un souffle d’agonie, se retourna. Ariana dégaina son pistolet et tira à deux reprises dans son dos. Le dernier adversaire se cambra et tomba mort.

            Tony se porta près d’Ariana. Il l’examina rapidement. Elle n’était heureusement pas blessée, juste un peu sonnée. Il l’aida à se relever.

« Ça va ? questionna-t-il. Ça ne tourne pas trop ?

-Ouais, ça va, répondit-elle. Laisse-moi juste quelques secondes.

-On va devoir faire vite. L’équipe d’appui doit déjà savoir que leurs collègues sont tous morts. Ils vont monter à leur tour avec une tactique différente.

-Qu’est-ce qu’on fait alors ? »

            Ariana descendait seule les escaliers. Elle prenait son temps, vérifiant chaque angle de mur, chaque porte, s’arrêtant pour observer quand elle le jugeait nécessaire. Elle parvint sans encombre au rez-de-chaussée. L’entrée de l’immeuble se découpait devant elle. Elle était en position et le fit savoir à Tony, resté à l’appartement, via son TOI. Les ennemis postés à l’extérieur étaient toujours camouflés, les deux agents de la DE demeurèrent donc en mode vision sonique. Un adversaire se trouvait juste à l’entrée, côté gauche, à couvert de l’autre côté du mur. Un autre, caché derrière une voiture de l’autre côté de la rue, presque dans l’axe de la porte. Deux autres étaient du côté droit de chaque côté de la rue. Et le dernier s’était placé en hauteur sur le toit de l’immeuble d’en face.

            Tony se tenait un genou à terre près d’une fenêtre. Il savait que sa première cible devait être le personnel en couverture en haut. Mais pour l’avoir, il devait la jouer fine. Il agita sa baguette vers la fenêtre pour métamorphoser la vitre en une volée de colombes. L’adversaire porta son attention sur la fenêtre en se demandant ce qui se préparait. Tony fit de même avec la fenêtre située à l’autre bout de la pièce ce qui eut le même effet mais en éloignant l’attention de l’ennemi plus loin. Ne sortant pas plus que nécessaire, Tony tendit sa baguette et produisit une explosion terrible qui projeta le belligérant en arrière. Le choc fut tellement violent qu’il en eut la nuque brisée.

            Les autres au sol levèrent les yeux d’un même mouvement. Ariana surgit comme un diable de sa boite, son pistolet dans sa main gauche et sa baguette dans la droite. Elle élimina l’ennemi posté à la sortie d’un tir entre les deux yeux. La détonation attira de nouveau l’attention des autres vers l’entrée et immédiatement, ils lancèrent divers maléfice vers la jeune femme. Celle-ci se protégea derrière un sort de bouclier tout en continuant à courir en direction du serpent juste en face d’elle. Un des personnels de droite fut éliminé d’un Avada Kedavra venant du haut, le second n’eut pas le temps de lever la tête qu’il fut frappé à son tour. Tony sauta par la fenêtre et lança un sortilège perforant en direction de celui qui assurait la couverture à gauche, le touchant en pleine poitrine malgré la distance. Ariana arriva au contact du dernier et le bascula à terre d’un coup de pied en pleine tête avant de l’achever au sol d’un maléfice de mort.

            La rue était de nouveau silencieuse. Ariana respirait rapidement. Tony s’assura que l’adversaire qu’il avait touché d’un sortilège perforant était bien mort avant de la rejoindre.

« Ça va ? demanda-t-il.

-Je croyais que jamais je ne m’habituerais à tuer, répondit-elle. Mais ça devient si facile.

-Plus on tue, plus c’est facile de tuer. À tel point que chez certains, cela devient naturel.

-Je n’ai pas envie que ça devienne naturel, se plaignit-elle. Je veux rester…

-Humaine, finit Tony. Alors garde cet état d’esprit. Continue de penser que tu ne veux pas tuer. Mais il te faudra le faire encore, car nous sommes en guerre. Et à la guerre, il faut tuer, sinon, on se fera tuer. C’est dur, mais c’est ainsi.

-On aurait pu les faire prisonnier.

-Ils ne nous auraient rien appris. Ce sont de simples exécutants. Il vaut mieux faire prisonnier un chef. Et il doit y en avoir un dans le coin.

-Comment ça ? questionna Ariana.

-Le champ anti-transplanage ne s’est pas levé. Il y a encore des ennemis dans la zone. Allons les débusquer. »

 

            Fred continuait de suivre la situation d’Ariana et Tony. Il souffla un bon coup quand le combat fut terminé. Il ne pouvait plus se servir des satellites pour chercher les autres membres du Serpent Blanc dans la zone, mais certaines caméras de surveillance, privées ou publiques, fonctionnaient encore. Il envoya la moindre donnée intéressante aux TOI des deux agents.

            De son côté, Zoé surveillait la situation dans la cour. Elle ne voyait ni Kat ni Nayu ce qui l’inquiétait et la rassurait à la fois. Elle ne pouvait pas rester focalisée sur ses deux partenaires car elle envoyait des données tactiques en temps réel aux unités au combat. Tout à sa surveillance et analyse de l’assaut de l’entrée, elle n’avait pas vu arrivé le groupe ennemi aux alentours du bocal.

Une première détonation les fit sursauter, elle et Fred. Les murs vibraient encore autour d’elle quand elle fit apparaître l’image captée par les caméras de l’entrée du bocal sur ses écrans. Deux sorciers lançaient des sortilèges explosifs sur la porte blindée, couverts par quatre autres qui surveillaient les couloirs tout azimut. Fred et Zoé échangèrent un regard inquiet. Fred avait déjà son arme à la main, mais le contact de ce lourd objet ne paraissait pas le rassurer pour autant. Une deuxième explosion retentit.

« Ils ne pourront pas passer la porte, dit Zoé plus pour se rassurer que pour Fred. »

La troisième explosion fit apparaître des fissures dans le revêtement du mur autour de la porte.

« Ils vont y arriver, dit Fred. Ils doivent être sous l’effet d’une potion de puissance ou n’importe quoi d’autre. Ils sont deux et ils coordonnent leurs sortilèges. Faut se cacher quelque part. Tout de suite ! »

            Fred et Zoé se précipitèrent vers le placard où se trouvaient diverses fournitures alors qu’une nouvelle explosion ébranla la structure. Zoé y entra la première. Mais au moment où une dernière explosion fit basculer la porte hors de son logement, Fred referma le placard et se jeta derrière un bureau.

            Le silence s’installa. Fred essayait de calmer les tremblements nerveux de son corps. Il tenait encore son pistolet, ses doigts crispés dessus. Il espérait qu’aucun serpent n’entendrait sa respiration saccadée. Comme il n’entendait toujours rien, il risqua une œillade au-dessus du bureau. Il se recoucha aussitôt, quatre ennemis s’étaient déployés dans la pièce. Il essaya de se calmer en respirant profondément, sans succès. Il fallait qu’il fasse quelque chose, il savait que tôt ou tard, il serait découvert par l’ennemi.

            Les serpents s’intéressaient surtout aux ordinateurs pour le moment, détruisant ceux qui ne l’avaient pas été lors de la chute de la porte. Fred surgit et tira plusieurs coups vers l’ennemi qui lui semblait le plus proche. Les balles le ratèrent sans que Fred ne sache si c’était de peu ou de loin. D’un même mouvement, les quatre adversaires se tournèrent vers lui en tirant des maléfices. Fred se remit immédiatement à couvert sous le bureau alors que les éclairs claquaient au-dessus de lui.

            Les tirs cessèrent de nouveau. Fred se rendait compte qu’il avait commis une grave erreur. Maintenant, ils savaient ou il était. Malgré tous leurs efforts pour se déplacer silencieusement, ils s’approchèrent assez pour que Fred perçoive le frôlement de leurs semelles sur le sol. L’un des adversaires bondit sur le côté du bureau en brandissant sa baguette. Par réflexe, Fred pointa son arme en pressant la queue de détente à plusieurs reprises. Frappé à divers endroit, le sorcier s’effondra en sang.

            Fred n’eut pas le temps de se relever qu’un autre ennemi surgit derrière lui et le frappa durement à la tête. L’analyste roula au sol jusqu’à la porte du placard. Il voulut se remettre debout mais une vive douleur à la jambe lui interdit et il se retrouva assis, adossé à la porte en hurlant de douleur. Il regarda sa jambe, un des sorciers lui avait tiré un sortilège cuisant dessus. Fred voulut lever son arme.

« Sectumsempra ! lança aussitôt un assaillant ».

L’arme retomba lourdement sur le sol, la main tenant toujours la poignée. Fred avait rabattu son moignon sanglant contre lui en poussant un nouveau gémissement de douleur. Il regardait ses agresseurs avec peur. Il savait très bien ce qui allait se passer par la suite. Le visage souriant de Julia lui apparut, lointain et fugace.

« Non, gémit-il. S’il vous plait, non. Ne me tuez pas. »

Mais la baguette s’abattait déjà, produisant un éclair vert funeste.

            Le corps de Fred s’affaissa sur le sol. Dans le placard, Zoé avait tout entendu. Elle ne voulait pas y croire. Elle les entendit déplacer le corps pour accéder au placard. Dans quelques secondes, se serait son tour. Elle tenait fermement son arme devant elle, le canon en tremblait intensément. Un fracas se fit entendre à l’extérieur, le bruit d’un fusil d’assaut, et des éclairs sifflant dans l’air. Durant quelques secondes, le combat faisait vraisemblablement rage dehors. Puis le silence. Assourdissant.

            Les secondes s’égrainèrent lentement. Zoé tenait toujours son arme pointée sur la porte.

« Zoé ! appela une voix qu’elle reconnut aussitôt. Zoé où es-tu ?

-Ici ! répondit-elle sans hésitation en lâchant son arme. Ici dans le placard. »

La porte s’ouvrit à la volée, faisant apparaître Nayu, visiblement soulagée de la retrouver saine et sauve. Les deux femmes se jetèrent dans les bras l’une de l’autre. Les mots étaient inutiles. Elles restèrent enlacées de longues secondes. Aucune ne voulait interrompre ce moment. Ce fut le soupir de Kat qui les ramena à la réalité. La chef d’équipe était penchée sur Fred.

« Il s’est battu, dit Zoé. Mais ils étaient trop forts. Il n’aurait pas dû mourir. Ce n’était qu’un analyste, pas un combattant. »

Kat se releva, se désintéressant du corps qui refroidissait déjà. Elle se tourna vers Zoé et dit, visiblement touchée malgré qu’elle essaya de montrer le contraire :

« C’est la guerre. »

 

[1] Mode de détection transformant les ondes sonores en images.

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