Ariana Potter, Second Cycle : Dans la Lumière de la Guerre

Chapitre 37 : VII La villa Maggiora

1935 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour 20/02/2019 19:22

CHAPITRE VII : LA VILLA MAGGIORA

 

Le plan s’avérait risqué. Mais en fait, qu’est-ce qui n’était pas risqué dans ce genre de métier ? Ariana avait appris à faire partiellement abstraction des risques pour se concentrer sur l’action à mener. Partiellement, car garder les risques à l’esprit permettait de ne pas commettre d’imprudence et de respecter le plan.

Avec le reste de l’équipe, elle était postée près de l’échangeur le plus proche de la villa Maggiora. Le choix de ce lieu pour l’intervention fut motivé par plusieurs raisons. La première étant que le véhicule transportant Christianus aurait beaucoup de difficultés à s’échapper avec les bordures de bétons de l’échangeur. L’habitation la plus proche se trouvait à deux kilomètres, ce qui limitait le risque d’implication de civils. Et enfin, la villa Maggiora ne se trouvant plus très loin, les agents du Vatican relâcheraient leur vigilance, pensant ne plus risquer grand-chose.

Malgré tout, il fallait demeurer prudent, ces agents étaient bien entraînés et ne reculeraient devant rien pour mettre la tentative d’évasion de la DE en échec.

— Ils sont en approche, annonça Zoé. Temps estimé : deux minutes.

— On se prépare, lança Tony.

Ariana et Nayu se mirent en place. Elles devaient faire croire à un accident pour forcer le véhicule du Vatican à s’arrêter. Ensuite, au signal de Tony, les enfers se déchaineront sur eux.

D’un coup de baguette, Ariana envoya la voiture dans le décor, comme si elle venait de quitter la route après une perte de contrôle. Elle fit apparaître de la fumée venant du moteur. Les deux agents se grimèrent le visage en faisant apparaître des marques d’impact et en se badigeonnant de faux sang. Un coup de baguette sur les vêtements permit de parfaire l’illusion.

Ariana s’allongea au sol près du véhicule, comme si elle venait d’en être sortie par Nayu. Elle lança une œillade à la japonaise.

— Prête à recevoir un Oscar ? dit-elle.

— Tu as passé trop de temps avec Alex, répliqua Nayu en souriant.

— En place, coupa Tony alors que le véhicule du Vatican quittait la voie rapide.

Ariana ferma les yeux. Elle sentit Nayu se lever précipitamment. Cette dernière agitait les bras pour attirer l’attention des occupants du véhicule du Vatican en criant en japonais :

— Onegai ! Mate o kudasai ![1]

Le véhicule s’arrêta mais ses occupants restèrent à l’intérieur. Ils devaient se demander la conduite à tenir. Finalement, la portière côté passager s’ouvrit et un homme en descendit.

— Que s’est-il passé ? questionna-t-il.

— Nous… perdus contrôle véhicule, dit Nayu en faisant semblant de ne pas parler l’italien. Mon amie… blessée… plus connaissance. Venez vite !

— Du calme madame.

L’homme s’approcha d’Ariana pour l’examiner. Il ne remarqua pas la baguette qu’elle dissimulait le long de son avant-bras, tenant juste l’extrémité dans sa main. Ariana le sentit s’agenouiller près d’elle.

— Impero, souffla-t-elle.

L’agent du Vatican était sous son contrôle. Elle le fit se retourner vers ses collègues restés dans le véhicule.

— Viens, j’ai besoin de ton aide ! appela-t-il.

Le conducteur hésita encore un instant mais finit par obtempérer. Lorsqu’il fut assez près, Nayu colla un shiki sur sa poitrine, le mettant également sous contrôle. Il restait deux agents dans la voiture à côté de Christianus.

— Deux agents sous contrôle, annonça Ariana par son TOI.

— OK, continuez de les faire jouer les bons samaritains, dit Tony. Je m’occupe du reste.

Tony devint silencieux quelques secondes.

— On a un problème, signala-t-il. Un autre véhicule arrive.

— Civil ? questionna Nayu

— Je n’en suis pas sûre. Je ne suis pas parvenu à relever l’immatriculation. Il sera sur position dans trente secondes. Il faut improviser. Vous êtes seules. J’interviendrais si besoin et possibilité.

Le nouveau véhicule dépassa au pas celui du Vatican et s’arrêta juste devant lui. Plusieurs personnes en descendirent. De là où elles étaient, ni Nayu ni Ariana ne pouvait les voir. Ariana devina deux silhouettes venir vers eux. Elle referma les yeux, se concentrant sur ce qu’elle entendait. Il y eut un bruit de frottement de vêtements.

— Lâchez vos armes. Ou ce qui vous sert d’arme, ordonna calmement une voix.

Nayu, toujours dans son rôle, joua la panique :

— Moi, pas comprendre. Nous, accident. Mon amie, blessée. Elle, besoin…

Nayu s’interrompit en plein milieu de sa phrase.

— Inutile de jouer avec nous, agent Hiroji, reprit la voix calme. Je pense que vous pouvez vous relever agent Potter. Je suppose que vous avez mis ces deux hommes sous votre contrôle, je vous conseille fortement de les en libérer.

Ariana ouvrit les yeux. Plusieurs hommes, l’arme au poing, se tenaient en arc de cercle, prêts à tirer à la moindre manifestation d’hostilité. Au centre, elle reconnut immédiatement l’homme qui leur parlait : Samus Denler en personne. Ariana se demandait si elle devait obtempérer. Après tout, les deux hommes du Vatican en leur pouvoir leur donnaient un avantage. Denler sembla deviner ce que pensait la jeune femme.

— Ne faites pas la naïve agent Potter, dit-il. Je sais que vous êtes encore nouvelle dans le métier de l’espionnage alors je vais me fendre d’une leçon. Je n’hésiterai pas à sacrifier ces deux hommes. Et aucun de mes agents ne désobéira à mon ordre si je leur ordonne de tirer sur vous quatre. Alors je vous suggère de vous rendre sans faire d’histoire.

— Comment avez-vous su ? questionna Ariana.

— Vous croyez être les seuls à pouvoir pirater un réseau de surveillance civil sans vous faire déceler ? De plus, je voulais assister à l’exécution de Féndès. D’une certaine manière, je lui dois bien ça. Mes analystes nous ont prévenus qu’il y avait quelque chose d’étrange avec les caméras.

— Ariana, Nayu, obéissez-lui, ordonna Tony. On coupe les connexions. Ne vous en faîtes pas, on viendra vous chercher.

Ariana dissipa son sortilège, Nayu fit de même en retirant le shiki lentement. Les deux hommes libérés de l’emprise des deux agents de la DE se relevèrent en reculant et sortirent leurs armes. Ariana et Nayu déposèrent les leurs au sol. Immédiatement, deux agents du Vatican entravèrent leurs mains dans le dos pendant que deux autres récupéraient leurs équipements.

Denler demanda à voir les deux baguettes magiques d’Ariana. Il les examina avec intérêt mais ne dit rien. Il ordonna à ses hommes de les charger dans le fourgon avec Christianus.

Lorsque les deux femmes furent installées dans le fourgon, Christianus ne put empêcher la surprise de marquer son visage. Il attendit que la porte arrière se referme et que le véhicule reprenne sa route pour parler.

— Que faîtes-vous là ? demanda-t-il.

— On est venu te sauver, répondit Ariana. Mais ça ne s’est pas passé comme prévu.

— Pourquoi ça ? Je suis un agent double, je suis sacrifiable.

— Je ne suis pas d’accord avec ça. Mais il parait que je suis encore trop jeune dans ce métier. Quoiqu’il en soit, je n’ai fait qu’obéir aux ordres. Même si dans ton cas, je voulais te sauver.

— Pourquoi ?

— Pas besoin de raison pour sauver un ami. Et puis, j’ai une amie qui ne m’aurait pas pardonné de te laisser mourir.

— Elle va bien ?

— Oui. Tu lui manques.

— Il va falloir qu’elle m’oublie.

— Je ne pense pas qu’elle le fera. Ce n’est pas son genre.

— Silence ! ordonna le garde présent avec eux dans le fourgon.

 

Les deux véhicules du Vatican passèrent la grille d’une grande propriété méditerranéenne à deux étages d’une blancheur d’albâtre et vinrent s’arrêter devant l’entrée principale. Un double escalier en arc-de-cercle permettait de monter jusqu’à une grande double porte en bois sculpté et ciré. Ariana, Nayu et Christianus furent menés à l’intérieur qui se révéla aussi somptueux que l’extérieur. Un grand escalier de marbre desservait les étages. Le sol était en damier noir et blanc. Des toiles datant visiblement de la Renaissance paraient certains murs en représentant des scènes bibliques ou ecclésiastiques.

Ariana et ses compagnons d’infortune ne purent longtemps profiter de la décoration. Ils furent guidés par une petite porte coincée sur le côté de l’escalier. Ils se retrouvèrent dans les salles de services et furent descendus dans la cave. Au moment de s’engager dans le soubassement, Ariana entendit la voix de Samus Denler visiblement en communication avec quelqu’un d’important.

— Oui monseigneur, je pense qu’il y en a d’autres dans le coin. Mais je ne peux pas lancer de recherches sans alerter les autorités italiennes… Non monseigneur, je ne pense pas que ce soit une bonne idée… Bien monseigneur, nous ferons comme vous le commanderez…

Denler les rejoignit dans la cave quelques instants après qu’ils furent installés à genoux à même le sol. Derrière chacun d’eux se tenait un agent du Vatican pointant une arme sur leur crâne, prêt à tirer sur ordre de leur chef. Ce dernier leur fit signe de se relâcher.

— Vous avez de la chance, annonça Denler. Quelqu’un veut vous parler. Vous avez donc gagner un peu de vie.

— Nous exécuter sera une déclaration de guerre à la DE, dit Ariana.

— Nous sommes déjà en guerre contre la DE. En fait, nous sommes en guerre contre vos semblables depuis des millénaires. La DE n’est rien d’autre que le bras armé des Sorciers.

— Nous ne sommes pas vos ennemis.

— Ce n’est pas avec moi qu’il faudra en parler. Un peu de patience agent Potter.

 

À l’extérieur de la propriété, Tony était posté en observation. Des agents du Vatican gardaient les entrées de la villa.

— Que comptes-tu faire ? questionna Zoé dans sa tête.

— Ils savent qu’une intervention de l’UA est exclue, et ils se disent qu’une équipe IS amputée de deux de ses membres ne prendra pas le risque de passer ces murs.

— Alors que c’est ce que tu comptes faire, n’est-ce pas ?

— Oui, et tout de suite, ils ne vont pas tarder à les exécuter.

— On a un peu de temps il semble. J’ai une info intéressante.

— Je t’écoute, fit Tony.

— Je viens de voir le cardinal Nova quitter le Vatican. Il a pris la direction de la villa Maggiora.

— Le grand maître de l’Inquisition ! Il veut peut-être assister à l’exécution. Quoiqu’il en soit, ça nous donne un délai. Et la nuit approche. On va attendre un peu. Et pourquoi pas demander un peu de renfort.

— J’ai aussi un message du Patron, signala Zoé.

 


[1] S’il vous plait ! Arrêtez-vous !

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