HP et l'attrait des ténèbres
- Sirius, je vais faire un tour.
- Un tour ? Où ça ? Je pourrais venir avec toi, j'ai envie de bouger moi aussi…
Stupide tentative pour ne pas me laisser seul, ou peut-être même me surveiller. Qu'est-ce qu'ils ont tous? Albus doit bien voir qu'il a dramatisé les choses, non ?
- J'ai envie d'être seul Sirius. Je rentre pas tard.
- Ah. ça marche. Sois là pour diner hein ? Albus mange ici ce soir.
Oui Sirius, je vais rentrer. Je ne vais pas fuguer bordel !
- Oui. A'toute.
Les choses se sont calmées à l'extérieur. Bon nombre de mangemorts ont été retrouvés, parce que trop imprudents. D'autres ont été vendus par les mangemorts captifs, qui tentent de sauver leur peau par tous les moyens. La vie semble reprendre un cours normal pour tout le monde. Mais moi je n'ai jamais connu ça. J'ai toujours connu la guerre, ou au moins la peur, et la menace.
Je sors rapidement et transplanne dans une rue que je sais peu fréquentée du Londres moldu. Je n'ai pas encore passé mon permis, mais le ministère a certainement mieux à faire en ce moment que faire la chasse aux fraudeurs de transplannage, non ? Et puis, je suis l'Élu, j'ai bien droit à quelques avantages, non ? Bien sur. Ils me doivent trop pour m'arrêter pour un truc pareil.
La journée est ensoleillée, la chaleur presque étouffante. Je décide de trouver une rue à l'ombre : je n'aime pas cette chaleur. Elle me rappelle bien trop le combat, la sueur, la douleur. La fraicheur est nettement plus rassurante.
J'entre dans un bar, prends place à une petite table reculée, et commande un whisky glace. Je ne ressors qu'une bonne heure plus tard, et avec un taux d'alcool que je juge suffisant dans le sang. Je décide de me balader dans les rues avant de rentrer. La nuit commence à tomber, et l'air n'est plus aussi insupportable. Une légère brise provoque même un léger frisson sur ma nuque. J'observe les gens, les magasins, les restaurants. Il n'y a surement que des moldus ici ; ils ont tous l'air plus ou moins moroses, tandis que les sorciers laissent actuellement leur joie éclater. La victoire. La liberté. Tous aussi stupides les uns que les autres. Les moldus stupides de ne pas apprécier leurs vies. Les sorciers stupides d'apprécier la victoire. J'aperçois une jeune fille, de dos, assise à la terrasse d'un café et en grande conversation avec une autre fille, plus jeune. Je crois un instant qu'il s'agit d'Hermione : la chevelure brune et épaisse est identique. Mais la jeune fille se met à rire extrêmement fort. Non. Ce n'est pas Hermione. Hermione n'a pas ce rire perçant et désagréable. Soudain, je suis fortement poussé par quelque chose, ou quelqu'un. Je me retourne rapidement et dit :
- Tu peux pas faire gaffe abruti ?
L'Homme se retourne. Il doit avoir la vingtaine. Il est légèrement plus grand que moi. Il sourit et se rapproche de moi :
- C'est à moi que tu parles comme ça merdeux ?
Merdeux ? Des gens se mettent à rire. Sa bande d'amis. Il n'est pas seul. Et alors ?
- Oui abruti, c'est à toi que je parle – je lui lance, m'approchant moi aussi.
Il regarde ses potes, déstabilisé. Il ne doit pas avoir l'habitude qu'on lui réponde. Qu'est-ce que je fous là ? Je vais quand même pas me battre à la moldue si ? Pourquoi pas ? C'est un connard. Ouais. C'est un connard. Baguette ou pas, je peux le tuer. On me l'a appris lors de mon entrainement. Mais pourquoi on s'est embrouillé déjà ?
Le gars a soudain l'air moins détendu. Je vois sa veine pulser sur sa tempe.
- Écoute gamin, si tu ravales pas tes paroles, je vais être obligé de te démonter la gueule. Tu risques de pas apprécier.
De plus en plus de gens s'arrêtent pour observer l'altercation. Curiosité morbide. Faut que je me décide. Soit je m'excuse et me casse. C'est ridicule. Soit je me bats. Et je lui montre à qui il parle ce connard.
- Ramène-toi gros sac. Tu vas pas comprendre ce qu'il t'arrive.
Je souris de toutes mes dents. Un peu d'action. Ça m'avait manqué ! Je décide de lui laisser le premier coup. Ce serait trop simple sinon. Le coup de poing que je reçois dans l'arcade me renvoie tous les plans de l'entrainement dans la tête. La douleur déclenche tous mes mécanismes de survie. Un fin filet de sang goutte sur mon visage. Je vais m'amuser un peu. Il a appris à sa battre pour impressionner ses potes ? Moi, j'ai appris à me battre pour survivre. Moi, j'ai fait la guerre.
Je plante mon regard dans le sien et éclate de rire :
- C'est tout gros balourd ? Je croyais que t'allais me démonter la gueule, je m'attendais pas à recevoir un coup digne d'une gamine.
Il semble perplexe. Bien sur que ça fait mal, il est con. Mais la première chose qu'on m'a apprise, c'est supporter la douleur. Conserver sa dignité. Ne pas pleurer. Ne pas crier. Ne surtout pas supplier.
- Vas y Max, démonte lui la tronche à ce merdeux ! T'as vu comme il te parle ? - lui crie un de ses amis.
- Bah oui Max, aller, démonte moi la tronche !
Il se jette alors littéralement sur moi. À force de faire le malin, j'étais déconcentré, je n'ai pas le temps d'esquiver. De violents coups atteignent mon visage, mon abdomen. La rage commence à couler dans mes veines. Cette vieille amie. Je renverse rapidement la situation : je suis au dessus de lui et je bloque ses épaules avec mes genoux. Frappe. Je le frappe : l'arcade, la lèvre, les pommettes. Du sang coule. Des cris résonnent autour de moi. Frappe. Le mec est sonné. Je l'attrape par le col et fait choquer son crâne contre les pavés de la rue. Les cris deviennent hystériques. Encore. J'entends des gens me supplier d'arrêter. Le gars ne bouge plus. Son visage est couvert de sang. J'entends des sirènes au loin. Ça me dit quelque chose. La police ! Il faut que je me tire, et en quatrième vitesse.
- Putain il bouge plus !
- Il se casse ! Il se casse !
- Max ! Max !
- Appelez une ambulance !
J'ignore les voix. Je ne regarde pas derrière moi. Je me mets à courir. Les sirènes semblent de plus en plus proches. L'adrénaline pulse dans tout mon corps. Je me rue à l'arrière d'une boutique fermée. Il n'y a personne. Les cris se rapprochent. On me crie de m'arrêter. Et je transplanne.
Devant le porche du Square Grimmaurd, je me permets de respirer à nouveau.
La nuit est largement tombée. Mes vêtements, tout comme mes mains, sont couverts de sang. Un peu du mien, beaucoup de celui du gars que je viens de laisser pour quasi-mort au cœur de Londres. Il faut que je nettoie mes fringues. Ils vont paniquer. Ils vont croire que je suis devenu fou ! Mais je ne suis pas fou. Non. Mais Albus devait manger là ce soir. La panique afflue en moi à une vitesse affolante. Ils vont penser que ce n'était pas moi avec leur stupide histoire d'âme. C'était moi. Je relève le regard sur la porte d'entrée.
Snape est assis sur les marches du perron et me fixe.
- Vous avez l'air en forme Potter.
Trop tard.
oOoOoOoOoOo
J'ai l'impression qu'un véritable procès va débuter. Je suis assis au centre du salon, sur une chaise en bois. À ma droite, Sirius. Devant moi, Albus. À ma gauche, Snape. Et leurs regards semblent respectivement attristé, songeur, et intrigué.
Je ne peux même pas éviter leurs regards. Je suis complètement encerclé. Albus me regarde intensément. J'ai la sensation qu'il cherche à me percer.
- Harry, tu t'es battu?
Quelle question idiote. Nan, j'ai mes règles Albus, ça ne se voit pas ?
- Oui – je réponds quand même.
- Tu ne sembles avoir été touché qu'à l'arcade. À qui appartient tout ce sang Harry ?
Albus a définitivement un sens logique très poussé. Je jette un regard à mon Tee-shirt. Il est complètement maculé. J'ai peut-être exagéré. Ou peut-être pas.
- Ça me semble logique. C'est le sang de mon adversaire.
- Harry, depuis quand as-tu des adversaires autre que les mangemorts ? - Demande alors Albus.
Cependant, il ne me laisse pas répondre à sa question.
- Je veux que tu me racontes ce qu'il s'est passé – continue-t-il
- Et bien, j'étais sur le point de rentrer et...
- Qu'avais-tu fais avant d'être sur le point de rentrer ?- Me coupe-t-il.
- Et bien… j'ai trainé un peu dans les rues, histoire de prendre l'air.
- Continue.
- Oui. J'étais sur le point de rentrer et un mec m'a bousculé. Je lui ai demandé de faire attention et ... et bien ça a dégénéré.
- Des détails Potter !
Je fixe Snape. Il a l'air tout simplement furieux.
- Il n'y a rien de plus. On s'est battu et puis je suis rentré.
Visiblement, mes réponses à leurs questions ne semblent pas satisfaisantes. Snape se retourne vers le vieux directeur :
- Albus ?
- Vas y Severus.
Qu'est-ce qu'ils complotent ces deux-là ? Sirius n'a pas l'air plus au courant que moi.
Snape s'approche de moi, et d'un mouvement si rapide que je ne comprends pas ce qu'il m'arrive, il pointe sa baguette dans ma direction :
- Legilimens !
Je me sens violemment happé par les souvenirs de la journée. J'essaie de m'opposer à l'intrusion mais c'est Snape. Il est bien trop fort à ce jeu là, et l'alcool ne m'aide pas vraiment pour une fois.
Je me revois au bar, à boire, seul. Un verre, deux verres, trois... Je perds le compte. Je me vois errer dans la rue, croiser le faux sosie d'Hermione, et finalement tomber sur ce fameux Max. La bagarre me revient de plein fouet : je frappe, je frappe, j'explose même sa tête contre le sol. Du sang. Des sirènes de police. La fuite.
Je mets un bon moment à revenir à la réalité. Snape fixe intensément Sirius du regard. Qu'est-ce qu'ils font ? Soudain, Sirius se lève et m'assène une gifle magistrale : sous le coup, je ne peux empêcher ma tête de basculer sur le côté. Ah. Snape lui a certainement montré ce qu'il s'est passé.
- Tu l'as presque tué ! Tu t'es tiré comme un lâche, en laissant ce gars à moitié mort !
Il me hurle dessus. Ses traits sont déformés par la colère. Il attrape vivement le col de mon tee-shirt et me relève de force de ma chaise.
Je me dégage de sa poigne.
- Lâche-moi Sirius – Ma voix n'est qu'un souffle.
- Tu te fous de moi ou quoi ? Tu te rends compte de ce que tu viens de faire ?
Il se rapproche encore de moi et tente d'agripper mes épaules avec plus de force encore.
Cette fois, je le pousse violemment et lui lance un regard noir.
- Lâche-moi Sirius – je répète, plus fort.
- Ça suffit tous les deux- coupe Albus - Harry, va te coucher s'il-te-plait.
Un rire étouffé traverse mes lèvres, auquel Snape répond par un regard glacial. Quelle façon courtoise de me dire qu'ils veulent parler de moi sans ma présence. Je ne demande pas mon reste et sans un regard de plus, je monte les escaliers quatre à quatre.
oOoOoOoOoOoOoOo
- La situation est grave Albus. La police. S'il avait été attrapé, l'affaire aurait pu remonter jusqu'au ministère de la magie.
- Oui. J'en suis conscient Severus. Cela dégénère bien plus vite que je le croyais. Et le pire est en train de se produire; l'esprit de Tom s'incruste dans celui d'Harry, à son insu. C'est le plus inquiétant : Harry n'a pas l'impression de changer. Le changement se fait en douceur. Il a beau être un minimum au courant, il ne distingue pas son esprit de celui de Tom.
Toujours dans le salon, les trois hommes étaient nerveux. La situation dégénérait. Bien trop vite.
- Black, arrête de tourner en rond – conjura Snape, au bord de la crise de nerfs.
- Et qu'est-ce que je peux faire d'autre ? Il a massacré un homme aujourd'hui ! Il lui a éclaté le crâne ! Et vous me dites que ce n'est que le début !
Sirius ne tenait plus en place. Il était aussi furieux qu'inquiet pour son filleul. Il ne cessait d'aller et venir, faisait les cent pas dans la pièce, avant de se rasseoir, ou bien d'appuyer son front contre le mur de pierre dans une vaine tentative de retrouver son calme.
- Sirius, nous allons trouver une solution. Si Harry pouvait distinguer ces deux esprits, cela serait plus simple : il aurait des périodes dominées par Tom et d'autres où il aurait le contrôle. Ces périodes seraient facilement identifiables, ce qui nous permettrait de l'empêcher de nuire ou de se nuire dans les périodes contrôlées par Tom.
Albus, lui, était installé dans le large canapé. Il réfléchissait aux possibilités qui existaient afin de sortir Harry de ce cauchemar. Il tenait au garçon. Il s'y était bien trop attaché pour être indifférent à son devenir. Le corps du vieux directeur semblait crier son besoin de repos et de calme. L'étincelle de malice et d'énergie qui luisait dans ses doux yeux bleus ne semblait plus de taille à contrebalancer avec son grand âge.
- Albus, reprit Snape, même si Potter pouvait différencier ses deux esprits, cela n'apporterait aucune solution concrète.
- Si Severus. Cela changerait tout. Harry se révolterait, il voudrait se battre contre cet autre. Je le sais. Ce serait certainement une lutte très longue, difficile et probablement douloureuse pour lui, j'en suis presque sûr. À la vitesse où les choses évoluent, nous pouvons être sûrs d'une chose : l'esprit de Tom n'occupe pas seulement une petite partie de celui d'Harry. Non, il grignote peu à peu son âme.
- Black bon sang ! Arrête un peu !
- Mais vous êtes en train de me dire que l'esprit d'Harry pourrait être entièrement rongé par celui de Voldemort. Harry, le Harry que nous connaissons, disparaîtrait sans même s'en rendre compte. C'est juste... juste.
Snape jetait des coups d'œil inquiets au directeur, son mentor des premières heures. Quand celui-ci soupira faiblement, Snape décida d'intervenir. Ils leur fallait un espoir, même mince. Très bien, il allait le leur donner.
- Oui Black. C'est terrible. Mais on ne le laissera pas disparaître. J'ai peut-être une idée de potion Albus – continua-t-il en se tournant vers le directeur – Si vous pensez que Harry pourrait lutter contre Tom, alors il ne me reste qu'à me pencher sur l'élaboration d'une potion qui lui permette de clairement distinguer les idées qui n'appartiennent qu'à lui, et celles qui proviennent de Tom. Un dérivé poussé de potion d'éclaircissement d'esprit. Cela doit être possible.
- Oui Severus, cela serait une grande avancée – reprit Albus, en adressant un faible sourire à Snape.
Le vieux directeur n'était pas dupe. Une telle potion serait certes certainement possible, mais au combien difficile. Il connaissait Severus : ce dernier s'inquiétait, parce que son mentor ne semblait plus faire face. Severus était bien plus attentif aux besoins et problèmes des autres qu'il ne le laissait penser.
- Mais une telle potion est certainement difficile à faire – lança Sirius à l'adresse de son rival serpentard.
- Il s'agirait d'une création Black. Cela sera forcément plus difficile à préparer qu'un gâteau au chocolat.
- En attendant – reprit Albus, sentant que la situation difficile n'aiderait pas les deux hommes à s'exhorter au calme et au civisme et qu'une énième querelle serait très vite arrivée – Harry ne doit plus sortir. C'est bien trop dangereux. À la moindre incartade, on devra lui retirer sa baguette. C'est trop risqué. J'entends par là tout comportement excessif. Peut-être que la peur de se voir retirer sa baguette le forcera à se tenir tranquille. Mais bien sûr, si les choses dégénèrent plus qu'elles ne l'ont déjà faites, il faudra transférer Harry. J'ai déjà trouvé une maison, à Hastings, au Sud-est qui conviendra parfaitement. Severus a déjà accepté cette mission.
Sirius s'effondra dans le fauteuil et se mit à boire. Pour la première fois, Snape ne lui fit aucune remarque à ce propos. Albus les quitta rapidement en les priant de rester calme et en leur assurant que tout se passerait bien. Alors Snape s'assit face à Black et se servit un verre d'alcool. Les verres furent rapidement vidés.
- Tu as d'autres bouteilles ici, je suppose ? Questionna Snape, d'une voix dénuée de sarcasme et le regard braqué dans celui de Sirius.
Sirius s'autorisa un léger sourire. Snivelus n'était pas toujours insupportable après tout.