HP et l'attrait des ténèbres
J'ai besoin d'être seul. Pourquoi Sirius ne veut pas le comprendre ? Après les événements de la veille, il a certainement eu des remords concernant son geste. Il est vrai que sa gifle n'était pas du même acabit qu'une gifle de la tante Pétunia. Je grimace à cette pensée. Je ne pensais pas que mon parrain puisse un jour lever la main sur moi. Surtout que Sirius n'a semble-t-il jamais été un modèle de self-contrôle dans sa jeunesse, et même aujourd'hui. Je chasse ces idées de mon esprit et m'assois à même le sol, contre le mur du côté de la fenêtre. Les lourds rideaux de celle-ci sont tirés. La pièce est sombre et je me plais à imaginer que nous sommes en hiver. Je n'aime pas l'été. Ou plutôt, je n'aime plus l'été : sa chaleur, sa lumière, sa sueur, sa fatigue. Je soupire. Je suis incapable de penser à quelque chose de positif ou quoi ? Je laisse mon corps aller lentement d'avant en arrière. Personne ne m'a jamais bercé. Alors je le fait. J'enroule mes bras autour de me genoux y j'y réfugie ma tête. Calmement, je me balance : avant, arrière, avant.. Aujourd'hui, Dumbledore m'a appris ce que signifiait cette histoire de lien entre Snape et moi : il aurait été très ami avec ma mère. Et même s'il détestait mon père et ses acolytes de l'époque, les maraudeurs, il aurait prêté un serment de protection envers moi. Ainsi, à ma pseudo-mort, ou pseudo-coma lors de la bataille, il aurait été victime de la même chose que moi, puisqu'il n'avait pas tout tenté pour me sauver. C'est risible. Ces histoires de lien, de serment et d'amitié avec ma mère me semblent tellement anodines aujourd'hui. Qu'est-ce que ça peut faire? Rien. Ils sont tous morts, ou presque.
J'ai envie de pleurer. Mais aucune larme ne coule. Ça ne sert à rien. Non. Ça ne sert à rien.
Je relève la tête et observe la chambre avec plus d'attention. Sirius a pris le temps de la rendre agréable à vivre avant que je ne parte. Il a même posé des cadres sur les murs. Sur l'un d'eux, j'apparais avec lui. Celle-ci est récente. Elle ne date que de peu de temps avant la fin, le combat. Sirius a un bras posé en travers de mes épaules et sourit. À sa posture bien droite, l'étincelle dans ses yeux, et les légers regards qu'il lance à ma copie photographique, on est certain qu'il est fier de moi. Mon regard se voile. Fier de moi pourquoi ? Parce que je suis le fils de James Potter ? Parce que je suis à ce moment là appelé à tuer le plus grand sorcier noir ? Je frissonne. Non. Sirius m'aime pour ce que je suis. Non ? Pas sûr. Je me force à tourner la tête pour échapper à ces tristes possibilités.
Sur un autre cadre, je suis avec Ron et Hermione, près du lac de Poudlard. Ron lance des cailloux dans l'eau en espérant faire des ricochets. Son visage est sombre et il lance les pierres avec un peu trop d'ardeur. Hermione, imperturbable, lit un énorme bouquin en dessous du chêne du lac. Elle jette parfois des regards à l'ombre qui se tient à quelques mètres d'eux, allongée sur l'herbe. L'ombre, c'est moi. Je regarde le ciel. Rien d'autre. C'est pathétique comme image. Hagrid n'aurait pas du la prendre, et encore moins me la donner. Et Sirius n'aurait pas du l'accrocher.
Ce n'est pas la photographie d'un heureux souvenir de jeunesse. Non. Pas de mélancolie à avoir pour ce jour de portrait. Nous devrions rire, danser, je ne sais pas moi, faire ce que les autres faisaient en cette septième et dernière année d'étude à Poudlard. Non, on a pas vraiment l'air insouciant. La copie de Ron semble haineuse, celle d'Hermione inquiète, et la mienne résignée. Quel beau portrait d'amitié ! Je grogne et me remet debout. C'est insupportable. Je suis pas foutu de me remettre des événements. Je vois bien que j'ai changé. Je suis plus violent, plus impulsif. Qu'est-ce que je peux y faire ? Ils s'attendaient vraiment à ce que je ressorte de cette guerre comme n'importe quel adolescent normal ? Ils sont stupides. Ils ne comprennent rien.
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Dans la cuisine, Snape s'affairait sur des calculs pour la potion qu'il espérait produire. Il était inutile pour l'instant de tenter quoi que ce soit en laboratoire : il fallait échafauder des plans, des hypothèses, imaginer quels ingrédients pourraient être utiles. La moitié de la table de le cuisine était donc recouverte de feuilles volantes pleines de l'écriture rapide et illisible du professeur de potions. La plupart d'entre elles étaient raturées. Certaines étaient même complètement froissées, victimes du mécontentement voire de la rage de l'Homme en noir.
Sirius quant à lui, s'était ennuyé toute la journée : il avait bien tenté à plusieurs reprises d'aller voir Harry mais celui-ci avait obstinément – et silencieusement – refusé de lui ouvrir la porte. Sirius n'avait pas forcé son filleul. Il s'en voulait terriblement de lui avoir donné une gifle. Le jeune homme ne se rendait pas compte de la gravité des choses. Il avait certainement été choqué de voir son parrain le frapper. Sirius naviguait donc entre la cuisine, le salon, et le premier étage. Il avait bien tenté de lire un bouquin, mais la lecture n'avait jamais été son passe-temps favori. Alors qu'il passait pour la dixième fois par la cuisine, il s'attarda sur la visage anxieux et blafard de Snape.
- Tu trouves quelque chose Snivelus ? - demanda-t-il, l'air de rien.
Snape grogna quelques mots incompréhensibles et sans relever les yeux de ses travaux, siffla entre ses dents, si bas que s'en était presque inaudible :
- J'essaie cabot, j'essaie.
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