Apprends moi à te haïr
Chapitre 17 : La Hauté Société et les sentiments
6684 mots, Catégorie: G
Dernière mise à jour 27/07/2015 23:28
_ Bonjour me héla Marius tandis que je fonçais littéralement vers le jardin en cherchant à fuir Tom. Comment te sens-tu me demanda-t-il alors en me forçant à stopper ma course.
_ Bien lui mentis-je en maintenant mon regard dans le sien.
_ Ne mens pas. Tout le monde a entendu votre dispute et ta tête prouve que la nuit a été plutôt courte me taquina-t-il en me faisant signe de le suivre dans le jardin.
_ Merci raillais-je en fixant néanmoins mon reflet dans une vitre afin de constater les dégâts par moi-même.
_ Je t'en prie ricana-t-il en s'asseyant sur un banc proche de l'entrée principale du château. C'était impressionnant tout de même, je ne l'avais jamais vu
_ Dans un tel état terminais-je à contrecœur. En effet, la colère de Tom avait été magistrale lorsque j'étais enfin rentrer au dortoir. Immédiatement, les serpents avaient été renvoyés dans leurs lits tandis qu'il m'apostrophait littéralement avec toutes les idioties qui lui passaient par la tête. Le voir perdre son sang-froid m'avait fait perdre la parole jusqu'à ce qu'il insulte ma famille et particulièrement mon père. S'en était donc suivit une longue dispute que je ne retranscrirais pas car je ne la juge pas digne d'être couchée sur le papier.
Nous étions jeunes, idiots, amoureux et il était légèrement possessif lorsqu'il s'agissait de moi. Je compris plus tard que cette obsession pouvait le pousser à l'extrême lorsque je disparaissais plusieurs heures suite à une énième dispute.
_ HERMIONE ! S'écria Abraxas en nous apercevant Marius et moi. Le soulagement que je ressenti dans sa voix me fit froncer les sourcils. Il était rare qu'il se montre aussi démonstratif, au contraire, Abraxas était le maître de ce que j'appelais alors la mono-émotion. Il nous rejoignit totalement essoufflé et sans même nous en demander la permission, s'assit à nos côtés ; nous forçant ainsi Marius et moi à nous coller. Je le fixai circonspecte face à son attitude. Il me sembla blême, presque malade ce qui me fit comprendre que la situation était sérieuse. Alors qu'il reprenait son souffle, Marius me désigna son uniforme. En fait, il n'en portait pas. Il avait revêtu un costume visiblement taillé sur mesure à l'élégance sobre et distinguée.
_ ABRAXAS s'écria Lucrétia depuis l'autre bout de la cour. Je levai un regard curieux vers elle. Deux Serpentards qui se faisaient remarquer dans la même journée, c'était suffisamment rare pour entrer dans les annales de l'école. Plusieurs élèves se retournèrent sur Lucrétia avant de vaquer à nouveau à leurs occupations. Beaucoup avaient compris qu'il ne fallait jamais s'occuper des affaires des serpents fut-ce-t-elle faite en public ce qui était somme toute très rare. A mes côtés, Abraxas se tendit tandis que sur son visage, la haine se lisait très clairement. Pour la première fois, il me fit penser à son fils, Lucius. Il se leva alors précipitamment pour fuir Lucrétia mais Marius eut le réflexe de le rattraper par la manche avant de le forcer à rasseoir ; ce qu'il fit à contrecœur.
_ Si tu es venu à nous, c'est que tu as besoin de notre aide alors reste argumenta Marius avec force ce qui arracha un grognement mécontent à Abraxas. Lucrétia nous rejoignit très rapidement, rouge d'avoir du courir après Abraxas visiblement. Bien décidée à comprendre ce qui se passait sans pour autant nous donner en spectacle, je fis signe aux autres de me suivre. Nous pénétrâmes rapidement dans une salle de potion annexe qui servait principalement de salle d’entraînement pour les mauvais élèves. A peine l'assurdatio lancé, Abraxas explosa littéralement.
_ Je te hais.
_ Holà, on se calme rétorqua Marius en posant une main sur l'épaule de son ami pour le calmer, ce qui n'eut qu'un piètre effet. Abraxas continuait de jeter un œil haineux sur la pauvre Lucrétia qui ne savait visiblement plus ou se mettre.
_ Sue vous arrive-t-il à tous les deux leur demandais-je enfin.
_ Megan souffla-t-il, subitement abattu.
_ Je n'y suis pour rien rétorqua alors Lucrétia, visiblement blessée par l'accusation silencieuse que la réponse d'Abraxas semblait comporter.
_ Toi et ta famille êtes prêt à tout pour monter dans l'échelle sociale cria alors Abraxas en se relevant pour faire face à Lucrétia qui n'en menait pas large.
_ Stop m'écriais-je en m'interposant entre eux. Ils se tournèrent vers moi comme s'ils avaient attendu que je m'interpose. La colère d'Abraxas ne semblait pourtant pas vouloir s'apaiser. La haine qu'il le traversait me sembla inextinguible.
_ Expliquez-vous calmement leur demandais-je en tentant de calmer leur colère sans trop savoir pourquoi.
_ Orion cracha Abraxas avec dégoût.
_ Orion ? S'étonna Marius en proposant à Lucrétia de prendre sa place sur le banc.
_ Le père de Megan vient d'accepter la demande en mariage du mien m'expliqua Lucrétia, visiblement dépitée par cette nouvelle.
_ Attends … ne devait-il pas épouser Aliana Lurton demanda Marius en fronçant les sourcils.
_ Malheureusement oui soupira Lucrétia sauf que mon frère a le don pour faire fuir ses fiancées comme s'il avait la peste commença Lucrétia. Tout s'est passé hier soir, il avait une entrevue prévue avec Aliana à Pré au Lard. Apparemment le début de soirée s'est plutôt bien passé jusqu'à ce qu'Orion considère qu'allait plus loin était nécessaire... D'après ce que je sais, elle a fini par transplaner pour lui échapper avant d'aller s'en plaindre à plusieurs professeurs qui ont fini par prévenir sa famille termina-t-elle en se tournant vers Abraxas, attendant visiblement sa réaction avec appréhension.
_ Mais pourquoi Megan ne manqua-t-il pas de s'énerver quelques secondes plus tard. Je ne comprenais rien à cette absurde situation.
_ Attendez, je croyais que des fiançailles ne pouvaient être rompues une fois la première rencontre passée les coupais-je avant tout pour éviter un autre mélodrame.
_ Sauf cas exceptionnel comme celui-ci m'expliqua Marius.
_ En quoi refuser des avances est un cas exceptionnel ? J'ai cru comprendre que c'était plutôt courant bien que je trouve cette manière de procéder abjecte rajoutais-je rapidement.
_ Il l'a battue murmura Lucrétia entre ses dents tandis qu'un lent frisson de peur la traversait. Je retins à temps un cri d'horreur. Je savais le frère de Lucrétia particulièrement cruel mais pas stupide à ce point-là. Le souvenir de mon réveil à l'infirmerie me revint, j'espérais alors qu'elle, au moins, avait pu être entourée de ses proches. Je savais qu'elle n'oublierait pas ce moment ni les coups, ni la douleur … qu'elle tremblerait à chaque geste trop grandiloquent. Il lui faudrait du temps pour guérir de cette nuit, de ces souvenirs et je priais intérieurement pour qu'elle soit suffisamment forte pour s'en remettre. Elle est en observation à St Mangouste depuis hier soir et Orion, quant à lui, a été arrêté ce matin. C'est Tom qui est parvenu à le libérer en lui évitant la prison de justesse seulement ma famille doit désormais payer une grosse amende continua Lucrétia, presque au bord des larmes.
_ Pardon mais je ne vois toujours pas le rapport avec Megan chuchotais-je à l'intention de mon amie.
_ La dot s'écria Abraxas. Tout n'est toujours qu'une question d'argent avec les Mac Millan.
_ La famille de Megan est riche mais son patrimoine n'est qu'immobilier et une alliance avec ma famille leur permettrait de mettre enfin la main dans le monde de la finance, univers qu'ils lorgnent depuis très longtemps.
_ Je ne comprends pas …. Abraxas est bien plus riche qu'Orion rétorquais-je en invitant Marius à continuer ses explications.
_ Certes mais le problème est que ma famille n'est pas versé dans la finance, nous ne sommes plus concernés par la recherche de l'argent puisque nous avons plus qu'il n'en faut. De plus, ma famille contrôle principalement le secteur judiciaire et policier du pays et non pas financier. Je les fixais tous avec des yeux ronds en tentant d'assimiler ce que venait de m'avouer Abraxas. J'avais la sensation de pénétrer dans un immense labyrinthe de règles et que jamais je ne parviendrai à comprendre où pouvait être la sortie. Abraxas, toujours énervé, commença à faire les cent pas autour des nombreuses tables, toutes plus surchargées les unes que les autres de potions instables dont Slughorn n'avait visiblement pas eu le temps de s'occuper. Je l'aime et je ne peux pas … Le verre se fracassa au sol en un millier de morceaux tandis qu’une légère volute vert brumeux s’élevait lentement. Abraxas fut le premier à s'écrouler, la bouche grande ouverte alors qu'il s'apprêtait visiblement à s'excuser. J'intimais silencieusement aux autres de s'éloigner le plus rapidement possible en coupant du mieux qu'il ne le pouvait leur respiration. La brume évoluait vite, bien plus vite que ce que je n'avais prévu. Lucrétia, paniquant, ouvrit la bouche pour parler avant de s'écrouler au sol comme une poupée de chiffon suivit rapidement par Marius qui semblait au bord de l’asphyxie. Je me retins à temps lorsque mon cerveau intima à mes poumons de prendre à cause du manque d'air. Ma tête tournait fortement et je savais que bientôt la potion bloquerait ma vue. Je renversai sans vraiment faire attention à ce que je faisais plusieurs potions sur le sol tandis qu'un toussotement me prenait. Je n'étais pas parvenu à me retenir. Je sentis la brume pénétrait ma gorge au moment où un goût de cannelle brûlée se déposa sur ma langue. Je me souviens vaguement avoir murmuré le prénom de Jédusor dans un dernier soupir.
***
_ Bonjour souffla une voix qui me sembla venir de ma droite. Elle était douce pourtant elle me parvenait difficilement. Je l'entendais sans véritablement comprendre ce qu'elle disait néanmoins je me laissai bercer. La voix me caressait lentement les cheveux, toujours du haut vers le bas. Cela m'apaisait. Je n'avais aucune envie d'ouvrir les yeux ; j'avais l'impression que ma tête était entourée par un épais étau. Hermione discernais-je parmi l’imbroglio de mots. Je me forçai alors à ouvrir les yeux afin d'apercevoir mon visiteur et surtout pour pouvoir enfin mettre un visage sur cette voix si douce. Parmi un épais brouillard, je distinguai d'abord ses cheveux noirs un peu en bataille ce qui m'étonna lorsque je fus complètement consciente. Mon sang battait à mes oreilles tandis que je me forçais à faire face à l'aveuglante lumière qui semblait vouloir persécuter mes yeux. Bois m'intima la voix dont les intonations me semblèrent masculine. J'obéis à contrecœur au vu de l'odeur qui agressait mes narines. Hermione répéta la voix, visiblement inquiète face à mon temps de réaction. Je hochai doucement la tête pour rassurer mon visiteur. Je parvenais désormais à apercevoir une silhouette floue mais réelle. Doucement, il me serra la main comme pour me rassurer ce qui faire naître un sourire sur mes lèvres craquelées par le manque d'eau. Petit à petit, la lumière se fit moins agressive et je parvins finalement à distinguer nettement les traits de Marius à mes côtés. Je parvins à cacher ma surprise et peut-être même ressentis-je alors une petite pointe de déception.
_ Marius, je finis par m'étonner.
_ Ouf soupira-t-il, visiblement soulagé que je parvienne enfin à le reconnaître. Tom m'a demandé de prendre sa place le temps qu'il se repose un peu. Il t'a veillé toute la nuit m'expliqua-t-il.
_ Ou sont les autres ? Demandais-je alors, n'apercevant personne autour de moi.
_ Ils vont bien rassure toi ricana-t-il en me forçant à me rallonger sur d'épais coussin afin que je sois mieux installée. Je mis quelques minutes à retrouver mes sens, mes idées et souvenirs. J'avais toujours un goût de cannelle brûlée dans la bouche si bien que je demandai rapidement à manger afin de le faire partir.
_ Tu peux y aller Marius annonça Tom, me faisant sursauter au passage en passant derrière le rideau qui me séparait du reste du monde. Je lui adressai un sourire timide en priant pour qu'il ne se fâche pas. Je le connaissais suffisamment pour le savoir légèrement protecteur sur ce qu'il considérait comme ses affaires... or je détestais cela. Tom s'installa à la place de Marius après son départ avant de braquer lentement son regard dans le mien.
_ Comment vas-tu finit-il par demander en semblant se radoucir après que j'ai attrapé sa main en priant pour que mon geste face effet.
_ Je me sens rouillée mais je vais bien décidais-je d'ironiser afin de le faire sourire. Comment vont les autres finis-je par demander voyant que mon effet était quelque peu loupé.
_ Ils sont en retenues avoua-t-il finalement.
_ Mais ils devraient être à l'infirmerie comme moi m'écriais-je malgré ma voix chevrotante et fatiguée.
_ Cela ne te regarde pas me coupa-t-il.
_ Ce sont mes amis rétorquais-je presque aussitôt.
_ La retenue n'est que le moindre de leur maux, crois-moi !
_ Tu ne vas tout de même pas les punir lui demandais-je complètement estomaquée à cette idée.
_ Ne t'en mêle pas soupira-t-il, exaspéré par mes suppliques. Je décidai alors de me taire pour mieux revenir dans la bataille. Je n'étais pas suffisamment en forme pour tenir un débat philosophique sur la façon de traiter ses amis avec lui. Repose-toi finit-il par m'annoncer en se relevant. Il me fixa quelques secondes, comme hésitant, avant de déposer un baiser sur mon front. Je mis plusieurs heures à m'endormir tant mon cerveau était en ébullition. J'avais une décision à prendre. La proposition de Dumbledore tournait constamment dans mon esprit sans que je ne parvienne à faire taire son message.
La vie ne ressemble jamais à ce que l'on a rêvé lorsque nous n'étions que des enfants. J'imaginais des mondes féeriques et magiques et lorsqu'ils sont devenus réalité, j'ai cru que j'allais vivre un rêve éveillé jusqu'à la fin de mes jours. Oh ! Comme je me suis lourdement trompée. Peu à peu, mes rêves m'ont abandonnés ou peut-être le contraire. Je crois que j'ai fini par ne plus croire pourtant lorsque je repense à ces rêveries enfantines, je me surprends à sourire bêtement alors qu'il n'y'a rien de drôle à penser que nos rêves sont morts, que nous ne les avons jamais réalisé. Je crois que je voulais avant tout être heureuse, entourée d'une famille, de ma famille et peut-être même d'amis … Était-ce vraiment irréalisable ? J'ai passé ma vie à me battre pour des concepts abstraits comme la liberté, l'amitié, l'amour et même si, aujourd'hui, j'en paie le prix, je ne regrette rien.
Toute ma vie, l'on a tenté de me mettre dans une case. Je m'en rends compte désormais. Pour Harry et Ron, j'étais la meilleure amie intello, toujours là pour eux, prête à tout quitte à les materner parfois tandis que pour les serpents, j'étais leur princesse, celle qu'ils devaient respecter, qu'ils respectaient par peur des représailles. De tous ceux que j'ai connu, qui peut réellement se targuer de connaître mes plus sombres secrets ! J'ai longtemps pensé que j'étais parvenu à échapper à ses étiquettes, parfois trop lourdes à porter alors qu'elles m'ont toujours talonnée. Le monde sorcier n'échappe pas à la règle notamment en ce moment. Si la rivalité entre Serpents et Gryffons a toujours existé, je crois qu'elle n'a jamais été aussi exacerbée. J'ai l'impression que tout doit être blanc ou noir pourtant ce monde en deux teintes ne me plaît pas. Je refoule mon passé depuis si longtemps que j'ai fini par croire que mes vieux instincts de prédatrice étaient derrière moi pourtant j'aurais dû savoir que la magie noire ne s'oublie pas.
***
Je suis sortie de l'infirmerie le lendemain matin avec la promesse de plusieurs jours de repos le temps que mon corps récupère complètement de l'incident. Marius, Lucrétia et Abraxas profitant aussi de cette offre que je trouvais plutôt généreusement, me tinrent compagnie pendant notre convalescence. Les jours qui suivirent me semble pourtant flou dans ma mémoire. J'en retiens un grand soleil printanier, un soleil réchauffant qui me mettait du baume au cœur. Jédusor avait fini par accepter de ne pas punir Abraxas après que je lui ai avoué, dans un pieu mensonge, que j'étais l'unique responsable de cet incident. Nous passions alors le plus clair de notre temps dans le parc, au bord du lac afin d'être seuls. Chaque nuit, je serais la fiole dans ma main jusqu'à ce que je m'endorme. Je l'avais précieusement caché sous mon oreiller, sachant que c'était le dernier endroit où quelqu'un viendrait fouiller puisque Tom ne me rendait que très rarement visite dans ma chambre. Je passais le plus de temps possible avec les filles et à mesure que nos discussions se faisaient plus longues et intimes, je finis par comprendre ce que tous me cachaient depuis mes fiançailles. Ils étaient devenus des mangemorts en puissance. Bien sûr, ils ne comprenaient pas encore les effets qu'auraient cette marque dans le futur et au fond, Jédusor n'avait fait que créer un emblème à son « club », pour le moment ! Tous de futurs mangemorts … Je crus que cela changerait ma relation avec eux, que je m'éloignerais tant cette révélation me choqua néanmoins je ne parvins pas à le faire, ils étaient mes amis et des adolescents qui ne faisait qu'obéir à une hiérarchie. Cependant je me demandais parfois combien de temps ils leur faudrait pour devenir des êtres dénués d'âmes, capable de tuer, d'anéantir avec sang-froid. Six mois, un an ou cinq ? La solution aurait été de m'éloigner d'eux, de partir loin de l'école et de trouver un autre moment pour tuer Jédusor avec la potion. Cette idée si simple ne m'a même jamais effleuré l'esprit. Je passais mes journées à réfléchir à la décision que je devais prendre. Le problème était que je commençais à apprécier, et c'est un faible mot, la compagnie de Jédusor et que je ne me sentais pas capable de mettre fin à une vie si peu de temps après la mort de mon père. Jédusor avait fini par devenir un repère, un pilier sur lequel je me reposais et auquel je me confrontais pour me sentir vivante. Cependant je m'obligeais à penser au futur, espérant que l'idée des nombreux morts qui ne manquerait pas de jalonner la route de Jédusor me fasse prendre une décision. Même si cette pensée me dégoûtait et donnait des frissons, je ne parvenais plus à penser Jédusor et Voldemort comme une seule et même personne. La naissance de mes sentiments envers Tom faussait mon jugement.
_ Hermione. Je relevais la tête, surprise de reconnaître la voix de Jédusor alors que je me trouvais dans la tour. J'avais ressenti le besoin d'y faire un tour quelques heures plus tôt comme si prendre de la hauteur allait véritablement m'aider. Pourquoi m'évites-tu ? Finit-il par me demander en s'installant à mes côtés. J'ouvris la bouche pour protester avant de la refermer puisqu'il disait la vérité. J'avais disparue depuis le début de la matinée, sans prévenir personne et je n'avais tout simplement pas vu le temps passé.
_ Je ne t’évite pas rétorquais-je doucement. J'avais juste envie de lire continuais-je en lui montrant mon livre.
_ Pas seulement aujourd'hui m'expliqua-t-il d'une voix qui me sembla triste. Tu es distante ces derniers temps. Je marquai un instant ma surprise avant de me reprendre. Sa remarque ne m'étonna pas, je n'avais pas eu la sensation de m'éloigner mais je devais reconnaître que j'avais souvent été dans mes pensées à cause de cette fiole dont le poids pesait sur ma conscience.
_ C'est bientôt l'anniversaire de mon père et disons …
_ Ah s'exclama-t-il, gêné par mon mensonge qui n'en était un qu'à moitié. La date approchait à grand pas et je ne me sentais pas tout à fait prête à l'affronter.
_ Et disons que je me pose des questions ajoutais-je pour combler le silence.
_ Quel genre de questions.
_ Des questions qui te concernent lui avouais-je en chuchotant tout en prenant soin de ne pas le regarder.
_ Pourquoi souffla-t-il en me forçant lentement à tourner la tête pour le regarder.
_ Parce que j'ai peur murmurais-je alors que nos visages se trouvaient à quelques centimètres l'un de l'autre. Sans même chercher à me demander la ou les raisons de mon ressenti, il attrapa doucement ma main et y croisa ses doigts aux miens. Intérieurement, je soupirai de bonheur comme si la sensation de sa peau contre la mienne m'avait manqué sans que je ne m'en rende véritablement compte.
_ Pourquoi finit-il par souffler en caressant lentement mon bras de son autre main dans un geste de va et vient. Je le regarde faire quelques minutes, incapable de répondre le temps de rassembler mes esprits.
_ Être avec toi me change et je ne parviens pas à me faire à cette idée.
_ J'avoue que parfois, tu es déroutante. Lorsque j'étais enfant, j'ai longtemps tenté de plaire à des gens qui ne me connaissait pas et me jugeait sur un simple coup d’œil jusqu'à ce que je comprenne que ressembler à une autre personne que moi-même ne m'aiderait pas. J'ai mis du temps à accepter ce fait. Ce changement que tu ressens n'est pas de mon fait ou peut-être que si … mais seulement en partie reconnut-il en me voyant faire la grimace à cette idée. Ce que je veux dire, c'est que ce changement que tu ressens ne peut s'opérer si une partie de toi n'y adhère pas. Pardonne-moi par avance pour ce que je vais te dire mais cesse d'être une petite fille sage et obéissante. Tu as du caractère et cela se ressent pourtant j'ai l'impression que tu ne te laisse jamais véritablement aller comme si tu écoutais la voix de la raison plutôt que celle de ton instinct. Peu à peu, ses paroles faisaient leur chemin dans mon esprit, trouvant un écho menant droit à mon cœur. La question est, si tu suis ton instinct et non ta raison, es-tu prête à me suivre ? A mesure de son discours, son visage s’éclaira, s'enflamma même. Je ne l'avais jamais vu aussi convaincu d'une chose. Je ne connaissais rien de son enfance et je comprenais finalement parfaitement son cheminement pourtant quelque chose me retenait de prendre mon envol. S'il te plaît souffla-t-il alors à quelques millimètres de mes lèvres. Mon cœur accéléra, je sentais le sang battre sur mes tempes.
_ Oui soufflais-je alors lentement, il combla l'espace qui nous séparait. Au début, le baiser me sembla doux, léger comme une plume jusqu'à ce qu'il glisse sa main dans mes cheveux, faisant ainsi pression pour que notre baiser s'intensifie. J'eus l'étrange impression que cela dura des heures. Nous nous cherchions en riant comme des enfants, découvrant, je le pense, des sensations jusque-là encore inexplorée. Je dirais que ce baiser est notre premier même si ce n'est véritablement pas le cas. C'est juste que lorsque j'y repense, je le trouve innocent, enfantin si loin des événements que nous vivions alors. Et surtout c'est celui qui m'a fait plonger. Ce moment, ce geste si simple a décidé du reste de mon existence. Peut-être que si j'avais su qu'accepter me mènerait sur des chemins si sombres que personne, hormis lui, n'aurait l'idée d'arpenter ; j'aurais refusé. Seulement, je sentais perdue et isolée malgré l'amitié que m’offraient les autres serpents alors j'ai accepté sans savoir que je le suivrai plus loin que personne ne l'avait ou ne l'aurait jamais fait.
***
_ Es-tu folle s'écria Lucrétia alors que je leur racontai, avec un immense sourire béat, ce qui s'était passé quelques heures plus tôt. Mon cœur en battait encore la chamade et je ne parvenais à décoller mon sourire de mes lèvres ; la réaction de Lucrétia me refroidit totalement.
_ Pourquoi lui demandais-je alors, excédée par sa réaction.
_ Parce que tu ne sais ce que tu viens d'accepter, Hermione !
_ Au contraire, je le sais parfaitement lui répondis-je en croisant mes bras sous la poitrine comme une enfant qui refuse de reconnaître ses torts. Je n'avais aucune envie d'écouter Lucrétia qui me sermonnait depuis plus de vingt minutes tandis que Cassiopeia et Daphné nous observaient en silence.
_ Si tu apprends la magie noire, tu seras enchaînée … Aujourd'hui, tu es libre alors reste-le énonça Daphné comme si je pouvais tout simplement revenir en arrière. Je me voyais mal annoncer à Jédusor que j'avais changé d'avis après ce qui venait de se passer.
_ Tom m'as déjà appris quelques tours de magie et je ne me sens pas enchaînée la contrais-je, en pensant que cela suffirait. Lucrétia laissa, pour la première fois, échapper un rire mauvais qu'elle n'adressait d'habitude qu'à Walburga. Je fus blessé par son attitude mais je le cachai ; ne voulant pas envenimer la situation.
_ Tu ne connais rien de la magie noire. Les tours que tu as appris ne sont que les bases qui ne nécessitent pas une liaison totale entre la magie qui coule dans tes veines et l'ombre. Avec ce que tu sais pour le moment, tu ne mesure pas les conséquences de ton geste expliqua Cassiopeia, qui n'était pas encore intervenue jusque-là.
_ Je sais parfaitement ce que je fais répétais-je encore une fois, exaspérée par leurs attitudes hostiles à mon encontre. J'avais pensé qu'elles seraient heureuses de savoir que j'acceptais enfin la demande en mariage de Jédusor et l'idée d'entrer dans leur monde définitivement.
_ Nous voulons que tu comprennes ce que cela signifie réellement pour toi continua Cassiopeia. Si tu te lies à Tom par le biais de la magie du sang ; jamais plus, tu ne pourras être libre ! A partir du moment où il aura déposé la marque sur toi, tu ne pourras plus jamais partir. La fuite te sera interdite, il te traquera car tu lui appartiendras. La vie de sang pur est un cercle infernal, un spectacle permanent dont tu seras la Reine. On te jugera, jaugera, critiquera et lorsque Tom fera une erreur, les femmes des autres clans seront impitoyables avec toi. Es-tu réellement prête à sacrifier ta vie pour lui me demanda-t-elle alors après ce que je qualifierai comme le pire discours d'entrée chez les sang-purs.
_ J'ai conscience de tout cela finis-je par leur dire. J'en avais pleinement conscience depuis le départ mais je ne pouvais pas le leur avouer. Rentrer dans leur monde était mon but et le moindre de mes maux. Je me sentais prête à affronter leur univers si cela pouvait me permettre de réussir ma mission sans avoir à tuer celui dont je commençais à tomber amoureuse. Je compris alors à mesure que les filles tentaient de trouver un moyen de convaincre que je ne voulais plus les quitter, que les serpents avaient fini par devenir un cocon protecteur, une famille avec laquelle je me sentais chez moi. Le discours de Tom faisait peu à peu son chemin dans mon esprit, je me laissai dicter mes décisions par mon instinct ; et il me soufflait de le suivre pour le moment. J'étais indéniablement attiré par la magie noire et ses mystères ; ma curiosité m'aida, il est vrai, à prendre ma décision. Cependant, je pensais également que pratiquer la magie noire pourrait m'aider à comprendre la fascination qu’exerçais le pouvoir sur Jédusor ; je voulais le comprendre pour mieux saper les bases mêmes de ses convictions. J'avais tort.
***
_ Professeur criais-je en courant après Dumbledore. Il s'arrêta presque aussitôt et se retourna lentement vers moi. Il m'adressa un mince sourire triste comme s'il avait déjà compris. Il hocha doucement la tête pour signifier qu'il me disait bonjour. Je stoppai ma course, une fois arrivée à sa hauteur. Je sentais les regards des élèves qui traînaient tranquillement des pieds malgré la fin proche de la pause matinale. Ils étaient tous surpris qu'un serpent veuille parler au directeur des Gryffondors.
_ Je suis venue vous rendre votre potion lui dis-je en lui tentant la fiole qu'il m'avait remise un mois plus tôt.
_ Merci en espérant qu'elle ait été suffisante pour vous guérir totalement de ce bête incident claironna-t-il afin que tous entendent clairement ce qu'il me disait. Je le gratifiai d'un sourire reconnaissant. Soudainement, il me tendit un livre que je pris maladroitement tant j'étais incertaine de la démarche à suivre. J'ouvris la couverture pour lire le titre mais il était caché par un parchemin plié en quatre. Je le refermai précipitamment, comprenant son intention. Je vous souhaite une bonne journée. Je le regardai partir presque estomaquée. Intérieurement, je mis à prier pour que cette entrevue publique ne remonte pas aux oreilles de Tom. Je n'avais aucune envie d'inventer un autre mensonge même si Dumbledore venait de m'en fournir un. Par peur de devoir expliquer la nature du livre que je tenais entre mes mains, je partis dans le parc afin de fuir la foule. L'heure suivant la pause matinale était toujours libre le vendredi et comme je m'en servais souvent pour m'isoler, les autres ne se poseraient pas trop de questions. Je m’installai au bord du lac, derrière un immense chêne afin de passer totalement inaperçue. J'ouvris alors le livre, les mains tremblantes. Je mis plusieurs secondes avant de me décider à déplier le papier. J'y découvris une fine écriture penchée que je connaissais bien.
« Miss Granger,
Je vous prie d'excuser cette initiative cependant je la crois nécessaire. Je sais depuis votre départ que vous refuserez ma proposition et je crois que je comprends vos raisons pour y avoir moi-même succombé. Je ne me permettrais pas de juger vos actes et décisions néanmoins, j'aimerais vous mettre en garde. Le chemin que vous choisissez de suivre en liant votre vie à celle de Tom sera difficile à arpenter. La magie noire n'apporte pas le bonheur, elle n'en créée que l'illusion. Je sais qu'il m'est inutile de vous prévenir au sujet de Tom puisque vous devez en savoir bien plus que moi pourtant je crois que vous ne devriez pas confondre vos sentiments avec la réalité.
Je vous prie de toujours à l'esprit que des personnes sincères tiennent à vous et de ne surtout pas vous perdre sur le chemin que vous vous êtes tracé. J'espère pour l'avenir du monde sorcier que vous réussirez votre mission mais sachez que s'il vous arrive un jour d'être perdue et seule, je vous tendrai la main sans vous juger.
Votre très humble serviteur, Albus Dumbledore. »
Troublée, j’appuyai ma tête contre le chêne tout en fixant le paysage qui s'étalait sous mes yeux. Pourtant, je ne voyais rien. La biographie de Skeeter sur Dumbledore me revint en tête. Je l'avais lu rapidement, n'y prêtant pas véritablement attention au contraire d'Harry qui avait été détruit par les nombreuses révélations sur le sombre passé de son mentor. Je n'avais pas été très étonnée car j'avais compris depuis longtemps que puissance rimait souvent avec pouvoir. L'envie est un vice et une vertu selon la nature du vœu. La magie noire, en vérité, m'attirait depuis longtemps. Sans véritablement l'avouer aux garçons, quelques sorts que nous avions appris lors des réunions de l'A.D était tiré de quelques livres de magie noire. Je m'apprêtais à laisser parler mes plus bas instincts, ceux qui avaient fait hésiter le choixpeau lors de mon entrée ici. Est-ce vraiment mon passé avec les mangemorts qui a fini par me corrompre ou alors est-ce le fait que je n'avais plus rien à perdre et que malgré leur maladresse, j'avais fini par trouver une nouvelle famille chez les serpents.
Il me rendait vivante alors que je me sentais morte à l'intérieur. Il éclairait ma vie, ma personnalité sous un nouveau jour. J'ouvris alors les yeux, ma décision prise.
J'allais le suivre, qu'importe le prix !