Les Souffleurs de Lumière

Chapitre 23 : La jeune fille, l'étoile et le magicien

7681 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 10/11/2016 02:51

 

LA JEUNE FILLE, L'ETOILE ET LE MAGICIEN

 

 

C'était de l'eau.

Ils échangèrent une série de regards inquiets.

- La Citrouille n'est pas un sous-marin, rappela Wendy.

- On ne pourra pas retenir nos respirations éternellement, dit Vivienne. "On ne peut pas plonger là-dedans sans savoir et quand on en ressortira."

- Calcifer v-va se m-mouiller, bégaya Matilda.

Terrence trempa la main dans le miroir et la ressortit parfaitement sèche.

- Aqua Vitae, souffla Gunter en écarquillant les yeux.

- Qu'est-ce que ça veut dire ? grommela Christopher. "Je sens que je ne vais pas aimer."

- On pourra respirer là-dedans, expliqua le vieil homme. "Enfin, en théorie, on devrait pouvoir. On nomme cela aussi Kouki, boisson des dieux ou eau de la vie."

- En effet, ce n'est pas de la flotte ordinaire, confirma doucement Euphrosine. "Nous serons parfaitement à l'aise, ne vous inquiétez pas."

Elle se tourna vers Calcifer qui flottait à côté d'elle comme une légère flamme rouge.

- Prêt ? demanda-t-elle.

- Prêt, murmura le petit daemon d'un air étrangement timide.

- Attendez, intervint Albus qui penchait la tête de côté depuis un moment, l'air de guetter quelque chose. "Est-ce que vous êtes déjà venue ici ? Il y a un son dans cette eau. Une espèce de chanson… et ça ne m'inspire pas confiance."

La vieille magicienne sourit.

- Tu entends le chant ? Je suis impressionnée. Mais nous ne risquons rien. Pas cette fois.

Elle se tourna vers Wendy.

- Tout ira bien. La Citrouille a déjà fait la plongée, expliqua-t-elle.

Gunter se racla la gorge.

- Ai-je raison de penser que nous allons devoir avaler l'eau pour pouvoir respirer ? demanda-t-il.

- En effet, dit Euphrosine. "Ce n'est pas une expérience très agréable, mais ça ne dure pas longtemps."

Il y avait un étrange éclat au fond de ses yeux bleus. Quelque chose qui tenait de l'excitation enfantine et du fanatisme fiévreux à la fois.

Scorpius frissonna. Il enveloppa soigneusement son carnet de notes dans un mouchoir auquel il jeta par précaution un sort d'imperméabilisation, puis se prépara à descendre dans le bassin.

L'eau était tiède. Elle s'enroulait autour de ses jambes avec la consistance d'un smoothie.

Il prit une grande respiration, pinça son nez machinalement, puis se laissa couler en fermant les yeux, sans provoquer la moindre éclaboussure. Il retint son souffle aussi longtemps qu'il le put, puis lorsque ses poumons se mirent à brûler, il ouvrit la bouche et hoqueta, avalant de force l'eau épaisse.

Elle lui picota la langue. Il battit des paupières, surpris, croisa le regard hilare de Terrence.

- On dirait du cidre, dit celui-ci.

Ses mots résonnèrent de façon un peu étouffée et Scorpius étouffa un petit rire, comme si le goût alcoolisé de l'eau lui montait à la tête.

- On peut parler ! gloussa-t-il. "C'est incroyable – on peut respirer et on peut parler !"

Des bulles naissaient autour de son visage et s'envolaient vers la surface du cercle d'or au-dessus de lui.

 Ils étaient dans ce qui ressemblait à une autre gigantesque caverne, sous-marine celle-ci. Ils descendaient lentement vers le fond et la grotte semblait s'éclairer au lieu de s'assombrir.

Les strates de rochers luisaient d'un bleu transparent, comme faites de glace ou de gelée turquoise, dessinant des alvéoles à travers lesquelles on devinait le vif passage d'un banc de poissons argentés. Un courant un peu froid emportait vers les profondeurs des grains de sable scintillants et l'écho lointain d'une chanson mélancolique.

Scorpius se demanda si c'était celle qu'Albus entendait et chercha son ami des yeux.

L'éthologue prenait des notes sur la faune aquatique, sans s'apercevoir que l'encre sortait en spirales noires de la bouteille qui flottait à côté de lui.

Pas très loin, Matilda pianotait sur une rangée d'anémones qui se rétractaient à tour de rôle. Ses longs cheveux se déroulaient dans l'eau comme des algues, mais ils semblaient bien plus beaux et soyeux qu'à l'air libre. La peau diaphane de la biologiste brillait et il n'était pas difficile d'imaginer qu'elle avait du sang de Sirène.

La chevelure flamboyante de Vivienne se déployait autour de son visage tandis qu'elle examinait, perplexe, l'astrolabe dissident et la boussole affolée.

Christopher se livrait à des expériences diverses telles qu'entamer un sandwich ou essayer de produire une flamme avec sa baguette.

La Citrouille nageait comme une araignée qui se noie et Wendy, prise de pitié pour sa machine, finit par la désactiver et s'asseoir dessus pour la guider. Des étoiles de mer s'étaient collées sur le ventre du véhicule doré et de minuscules crabes couraient entre les boulons.

Euphrosine et Calcifer étaient déjà presque au fond, talonnés par Gunter qui battait des pieds tel une grenouille pour aller plus vite.

Terrence, qui les suivait de près, lâcha soudain une exclamation stupéfaite.

Il y avait une ville, tout en bas, dans l'obscurité bleuâtre.

De hautes colonnes de marbre autour desquelles s'entrelaçaient des guirlandes d'athérines agiles, une immense acropole baignée d'une lumière azurine diffuse, de vastes escaliers flanqués de statues de bœufs dont les cornes de pierre encadraient des disques. Des enfilades de rues vides où filaient des bancs de sardines et des maisons aux toits en coupoles au-dessus desquels planait lentement une créature grise qui ressemblait à une baleine, mais qui respirait en laissant échapper des nuées de bulles dorées.

Lorsqu'Euphrosine posa les pieds sur le sol, en bas des marches qui montaient vers une sorte de temple imposant, quelque chose frémit et des flammes d'un bleu vif jaillirent les unes à la suite des autres dans la série de braseros postés de chaque côté de l'escalier. De petits poissons s'enfuirent en brouillant l'eau, puis revinrent, intrigués, pour timidement picorer les étincelles.

- Alors voici l'Atlantide… murmura Gunter, très ému.

- Peut-être, dit la vieille magicienne. "Ou peut-être pas. Venez."

Les autres les rejoignirent, un peu troublés par le silence feutré qui régnait sur la ville engloutie. Ils n'osèrent pas suggérer l'exploration des lieux ou de camper sur place le temps de comprendre pourquoi ils pouvaient respirer ici. C'était comme s'ils sentaient qu'ils ne devaient pas s'attarder. Ils gravirent les marches derrière Euphrosine, tels une procession, suivis par la Citrouille réactivée qui semblait mal à l'aise et cliquetait des mandibules frénétiquement.

- Si c'est u-une ancienne ville d-des F… d'eux, est-ce q-qu'on ne d-devrait p-pas f-faire atten-tion ? bredouilla Matilda en se rapprochant de Vivienne, jetant un coup d'œil effrayé à l'ombre mouvante de la baleine.

- Non, ils craignent l'eau, répondit Calcifer d'un ton fanfaron.

- Sauf que ce n'est pas exactement de l'eau… bougonna Christopher derrière elle.

Wendy surveillait anxieusement la progression d'Albus qui peinait sur ses béquilles, s'arrêtant régulièrement pour reprendre son souffle entrecoupé de quintes de toux.

- Pas sûr que "respirer" cette aqua vitae soit particulièrement recommandé quand on a les poumons dans son état, marmonna Terrence en croisant le regard inquiet de Scorpius.

Gunter traînait à l'arrière ou galopait devant, passant souvent ses mains dans ses cheveux gris et drus qui en restaient hérissés, en parlant tout seul.

Il y avait de nombreuses inscriptions sur les murs. Certaines en grec, d'autres en latin, d'autres encore en runes ou en écriture cunéiforme.

Tout semblait figé dans un éternel sommeil.

Ils passèrent devant une fresque très abimée et reconnurent les mêmes figures que sur celle trouvée dans les ruines. Elle était gravée sur un mur de pierre très poreuse et il en manquait une grande partie, dévorée par l'usure. Des filaments brillants surlignaient les silhouettes aux bras levés qui accueillaient les astres et le dessin le mieux conservé était celui d'un homme en train de porter à sa bouche quelque chose qui ressemblait à un cœur embrasé.

Euphrosine le considéra un moment d'un air terriblement triste, puis se remit à gravir les marches, accompagnée par Calcifer qui grésillait un peu, comme s'il approchait de sa limite : ce n'était certainement naturel pour un daemon de feu de brûler sous la surface de l'eau.

Gunter lança un dernier regard d'envie vers la fresque, puis lui emboîta le pas, suivi par Matilda qui continuait de jeter des coups d'œil apeurés autour d'elle. Les autres s'attardèrent un instant.

- Il manque la fin, dit Christopher pensivement. "Voilà pourquoi Jen Pendragon a cru qu'il pouvait obtenir ce pouvoir…"

- On ne se lance pas dans une expérience comme ça sans réfléchir, rétorqua Terrence. "Il aurait pu se douter qu'il n'avait pas toutes les données en main."

- Peut-être qu'il essayait d'impressionner la femme qu'il aimait… suggéra Vivienne doucement.

- Peut-être que c'était plus fort que lui… murmura Albus.

Il se retourna, pencha la tête de côté comme s'il avait entendu quelque chose, puis fronça les sourcils.

- Continuons. Je n'aime pas du tout cette chanson.

Scorpius avait du mal à comprendre pourquoi. La mélodie était ténue, très lointaine. Elle lui donnait un sentiment de nostalgie et semblait parfaitement inoffensive.

- Vous croyez que c'est la baleine qui chante ? demanda Wendy en levant les yeux vers la créature qui se déplaçait languissamment au-dessus d'eux, laissant derrière elle une trainée de bulles dorées.

Comme en réponse, le cétacé émit un long chuintement plaintif.

- Non, dit Albus.

- Non, dit Scorpius au même moment.

Terrence regarda ce dernier, étonné.

- Tu l'entends aussi ?

L'agent du gouvernement haussa les épaules et chassa un petit poisson argenté qui butinait les coutures de sa veste.

- Ils nous attendent, dit-il en pointant du menton Gunter et Matilda qui s'étaient arrêtés en haut des escaliers, au pied des deux grandes colonnes qui marquaient l'entrée du temple.

Le reste du groupe se hâta de les rejoindre. Euphrosine et Calcifer semblaient en plein conciliabule, un peu à l'écart, mais quand les autres s'approchèrent d'eux, ils s'aperçurent qu'ils tremblaient comme deux feuilles mortes.

- Cette fois, c'est fini, bégaya la vieille femme, les larmes aux yeux.

- Je ne suis pas sûr de vouloir que ce soit la fin, couina le daemon, en se tortillant d'un air pathétique.

Matilda et Vivienne les considérèrent sans comprendre, mais Wendy s'avança et serra Euphrosine dans ses bras.

- Je ne sais pas ce qui va se passer, mais on est là, avec vous, promit-elle.

Christopher fit un pas en avant et tapota la tête ébouriffée de flammèches.

- Du courage, bonhomme, dit-il d'un ton bourru.

Albus et Gunter hochèrent gravement la tête. Terrence était déjà en train de s'enfoncer dans l'obscurité du temple.

A l'intérieur, il n'y avait rien d'autre qu'un immense trône de marbre vide, autour duquel virevoltait un essaim de poissons dont les écailles étincelaient à la lumière turquoise qui remplissait la salle.

Au pied du trône se trouvait un cercle d'or semblable à celui qu'ils avaient découvert dans l'allée des géants de pierre, opaque et sombre comme une goutte de nuit.

Euphrosine tendit la main à la personne la plus proche d'elle et d'un signe de menton, indiqua de faire passer le geste. Calcifer disparut à l'intérieur de la Citrouille et Wendy s'assura que le sortilège qui les liait l'une à l'autre était bien enclenché.

Puis ils sautèrent tous ensemble dans le miroir…

… et émergèrent, mouillés et frissonnants, dans une basse grotte de glace sur les parois de laquelle chatoyaient les reflets de l'eau d'un bleu vif.

Les dents claquantes et les lèvres violettes, Wendy fit aussitôt léviter le véhicule qui flottait en s'enfonçant et le déposa au sec, avant de grimper avec les autres sur l'étrange plage lisse et blanche qui émergeait à quelques mètres d'eux.

- C'est du diamant ! dit Christopher très excité, après avoir tapoté le sol de son piolet et effectué quelques relevés avec sa baguette. "Et pas n'importe quelle sorte ! Celui-ci provient de graphite transformée par l'impact d'un astéroïde !"

Ses cheveux dégoulinaient et il grelottait, mais il ne semblait pas s'en apercevoir, émerveillé devant cette découverte.

- Tout le monde se sèche immédiatement ! ordonna Terrence en courant d'Euphrosine qui se relevait sur des jambes vacillantes à Albus sur qui Scorpius était penché, essayant fébrilement d'aider le jeune homme à reprendre sa respiration.

Vivienne jura et entreprit de souffler de l'air chaud sur sa chevelure rousse qui frisottait déjà indécemment.

Matilda frissonnait de tous ses membres, mais ce n'était pas à cause du bain froid forcé qu'ils venaient de prendre. Les yeux écarquillés, Gunter et elle contemplaient la caverne qui s'ouvrait devant eux. C'était une salle digne d'un conte des mille et une nuits, aussi éblouissante que le palais de la reine des neiges. Rien n'était lisse à part la petite plage. De partout jaillissaient des cônes de cristal clair brillant, de toutes tailles, attrapant le moindre reflet d'eau bleue, le moindre éclat de lumière – une beauté débordante qui ne laissait aucune place à la logique, un désordre magnifique et étincelant, un fouillis de fleurs de verre.

Il régnait un bourdonnement diffus, paisible et hors du temps, comme si des milliards de papillons battaient des ailes quelque part, ou des centaines de bébés bullaient doucement dans leur sommeil.

Et, dans chaque diamant, palpitait un cœur embrasé.

Quand Wendy le réalisa, elle lâcha lentement la poignée de la porte de la Citrouille, retenant son souffle comme si l'endroit était sacré.

- Oh, balbutia-t-elle en regardant sortir Calcifer qui dansait légèrement dans l'air, comme une flamme de bec bunsen, ses yeux insondables fixés sur les cocons de glace.

- Des étoiles… murmura Vivienne en laissant retomber sa baguette sans se soucier de ses boucles emmêlées. "Ce sont des étoiles… ce sont les étoiles, celles qui avaient disparu…"

Terrence se redressa, lâchant sans y penser Albus qui chancela et que Scorpius rattrapa. Le médicomage semblait subjugué.

- Alors nous y voilà… souffla-t-il. "Une pépinière de connaissances… à portée de main…"

L'agent du gouvernement passa le bras du jeune homme malade autour de ses épaules pour mieux le soutenir.

- Tu crois que ça y est ? Nous sommes arrivés au cœur de l'Axe ? Au centre de la Terre ? Ce sont eux, les Souffleurs ? chuchota-t-il.

Albus secoua faiblement la tête.

- Non, dit-il. "Ce ne sont pas les Souffleurs."

Calcifer se retourna et eut un drôle de petit rire, un écho de son ricanement ironique brisé par une trop grande émotion.

- L'enfant-dragon a raison, lança-t-il. "Les Souffleurs sont encore plus profond. Vous les rencontrerez, car les yeux qui voulaient voir doivent maintenant revenir à eux. Mais d'abord vous devrez dire adieu."

Terrence tressaillit. Matilda étouffa un petit couinement. Scorpius resserra son bras autour du dos d'Albus qui n'avait pas cillé. Wendy pâlit. Christopher avala difficilement sa salive. Vivienne crispa les lèvres. Gunter fit un mouvement pour dire quelque chose, mais se ravisa.

Ses cheveux blancs encore humides, Euphrosine s'avança vers le daemon, mal affermie sur ses vieilles jambes. Son visage ridé était empreint de bonté et elle sourit en tendant les mains pour que vienne s'y déposer la petite créature de feu.

- Veux-tu bien me laisser leur raconter notre histoire ? demanda-t-elle.

Calcifer se roula en boule en ronronnant.

- Oui, puisque nous sommes arrivés à la fin.

La magicienne se tourna vers les autres et ils s'assirent machinalement, s'enroulant dans les couvertures que Terrence avait fait apparaître par magie. Le sol était froid, mais pas comme de la neige durcie, et il sembla se réchauffer au bout d'un moment.

L'eau bleue clapotait doucement contre les cristaux transparents, les habillant de chatoyants reflets turquoise.

Euphrosine ferma les yeux et ils l'imitèrent, calant leurs respirations sur le battement de cœur des étoiles.

Puis la vieille femme rouvrit les paupières et, pour la première fois depuis cent ans, elle parla de l'exploration de l'Axe en 1927.

Ils avaient suivi une route différente, traversé d'autres lieux étranges, vu d'autres mystères, avant de parvenir à la cité engloutie.

Jen Pendragon avait étudié le Voyage Extraordinaire d'un Sorcier Ordinaire en long, en large et en travers. Il était persuadé qu'en descendant dans les entrailles de l'Antarctique, il découvrirait un pouvoir au-delà de toute imagination : la source originelle de la magie, concrétisée par le souffle d'or d'une créature immortelle, que l'on ne pouvait décrire avec des mots et que l'on représentait sous la forme d'un dragon.

Arne Saknussem avait raconté sa rencontre avec des êtres sages et puissants, d'une très grande pureté, qui habitaient de l'autre côté de "la porte qui mène à tous les secrets" et qui veillaient au bon ordre des choses.

Mais il n’avait pas parlé de la caverne où dormaient les étoiles dans des cocons de glace, ni du destin tragique des Faucheurs. En fait il avait évoqué plusieurs fois de "funestes évènements advenus dans le passé" et mentionné la sévérité impartiale des Souffleurs de Lumière à l'égard de la cruauté envers créatures ou nature, mais il n'avait pas développé le sujet, comme par crainte d'attiser leur colère.

Aussi, lorsque l'équipe de Pendragon avait découvert la fresque dans la cité engloutie, Jen s'était convaincu que cela était un signe du destin, un message laissé pour les hommes qui voudraient accéder à un nouveau plan de connaissance, s'ils étaient assez braves et assez fous pour oser cueillir une étoile.

Personne ne s'était douté que le chant qu'ils avaient eu dans les oreilles pendant les longues heures d'étude sous la surface du cercle d'or avait pu altérer leur volonté, les leurrer dans un piège, les attirer vers un sort plus terrible encore que la mort…

Ils étaient aussi passés par le temple pour continuer leur chemin et s'étaient retrouvés dans la caverne de cristal.

Et c'était là que le destin d'une jeune fille, d'un magicien et d'une étoile s'était scellé.

 

Euphrosine interrompit son récit pour caresser la tête ronronnante de Calcifer, le temps de reprendre son souffle. Les autres écoutaient, suspendus à cette voix chevrotante chargée d'émotions. Il y avait de la peur sur certains visages, un intérêt passionné sur d'autres et de la tristesse sur ceux d'Albus et Gunter.

 

Tous les étoiles dormaient en rêvant doucement, sauf une.

Quand Jen avait sifflé machinalement la mélodie entendue des dizaines de fois dans la cité engloutie, elle était sortie de son cocon en papillonnant, claire flamme rouge curieuse comme un chat, innocente et amicale.

Elle avait joué dans les jupons d'Euphrosine, butiné son chapeau de paille orné de camélias,  goûté des œufs au lard et s'était perchée sur l'épaule de Pendragon pour l'écouter réciter des poèmes. Elle ne répondait pas directement aux questions posées sur les secrets et riait comme une clochette lointaine en se dérobant.

Alors Jen avait repris ses notes et, tout en fredonnant à mi-voix l'étrange chanson sans même sans apercevoir, il avait cherché un moyen d'obtenir ce qu'il était venu chercher. Sans doute pensait-il que l'étoile leur permettrait d'arriver jusqu'aux Souffleurs, ou peut-être s'était-il déjà laissé corrompre par la magie ancienne des Faucheurs… personne ne le saurait jamais. Il avait fini par trouver une formule dans le bas-relief de la fresque qui paraissait n'avoir aucun sens et l'avait lu à voix haute. D'abord en anglais, ce qui n'avait eu aucun effet, puis en grec et enfin en prononçant simplement les runes les unes à la suite des autres.

Alors la caverne de glace avait tremblé. Les cocons s'étaient assombris, comme enveloppés d'obsidienne, et l'étoile apprivoisée s'était affolée telle un insecte pris au piège sous une lampe bleue. Son cœur palpitait au milieu des flammes et Jen Pendragon l'avait saisi entre ses mains, bien décidé à l'avaler comme sur les dessins qu'il avait étudiés pendant des heures.

 

- Il croyait qu'il deviendrait un avec elle ou qu'elle lui communiquerait ses pouvoirs avant de se séparer de lui. Nous n'avions aucune idée de la souffrance que cela provoquerait. Nous n'avions pas compris qu'il s'agissait d'une créature vivante et que nous allions la réduire en esclavage puis la tuer…

Euphrosine articulait avec effort et de grosses gouttes de sueur coulaient sur son front. Terrence, fasciné par le récit, ne semblait pas s'en apercevoir, aussi Wendy se pencha pour tendre sa gourde à la vieille femme qui refusa d'un geste de la tête avant de continuer.

 

Jen Pendragon avait approché le cœur de sa bouche, résolu à aller jusqu'au bout de son expérience malgré le vrombissement menaçant qui s'élevait des cocons de cristal et les flammes grandissantes, rouges et vives, qui jaillissaient entre ses doigts.

Et tout était devenu chaos.

Dans la gorge du jeune homme, une lumière avait gonflée, vive et brûlante. L'obscurité avait rempli la caverne de glace. Le sol tremblait et une vague s'était levée sur l'eau, noire et mouvante. Puis le livre d'Arne Saknussem avait pris feu et le corps de Jen Pendragon s'était consumé avec un vif éclat, dans un cri déchirant.

L'instant d'après, Euphrosine s'était retrouvée seule, assise sur la plage blanche entourée des débris du camp et des ossements encore fumants des autres membres de son équipe.

Les cônes de cristal reflétaient l'eau turquoise, mais ils étaient tous vides.

Il ne restait rien de Pendragon ou de l'extraordinaire voyage d'un sorcier ordinaire, pas même quelques flocons de cendres.

Euphrosine avait ouvert les yeux et, en face d'elle flottait, pantelante, épuisée, une étoile qui n'avait plus de cœur et dont les larmes faisaient fondre le diamant.

 

- Ensuite, je ne me souviens pas exactement… j'ai erré un moment, avec Calcifer…

 

Il l'avait guidée vers la voie ferrée magique, mais ne l'avait pas prévenue qu'il ne fallait pas regarder en arrière jusqu'au réverbère. Elle s'était arrêtée de nombreuses fois, s'était retournée en croyant entendre la voix de Jen l'appeler. Elle avait trouvé la barque, coupé un bout de sa longue tresse châtaine pour payer le passage sur le conseil de Calcifer, et lorsque l'aube s'était levée, elle avait posé le pied sur la banquise, frissonnante.

Alors seulement le daemon l'avait toisée de son regard de braise et lui avait dit la vérité.

Elle était condamnée à rester pour toujours en Antarctique. Son cœur était resté prisonnier de l'Axe et elle ne pourrait jamais ni mourir ni partir.

Il avait scellé le pacte en s'assurant qu'elle ne pourrait pas parler de ce qui s'était passé et avait éclaté d'un rire sardonique qui s'était achevé sur un sanglot.

Elle avait pleuré avec lui, serrant contre elle la créature de feu qui palpitait de souffrance et d'amertume et s'était résolue à retourner un jour dans les profondeurs de la terre, pour trouver une solution, ramener son fiancé et rendre à l'étoile sa liberté.

Mais les Souffleurs en avaient décidé autrement.

Renoncer.

Ils les avaient avertis avant, ils l'avertissaient encore. Et le message ne changea jamais en cent ans.

En 1937, la Porte ne s'ouvrit pas.

Ni en 1947.

En 1957, lorsque les Souffleurs décidèrent de fermer la Porte après l'abandon des chiens japonais, Euphrosine était déjà assez âgée pour les comprendre, même si elle n'avait pas encore abandonné sa résolution. Elle ne voulait pas qu'une autre tragédie se produise et empêcha le reste de son équipe de continuer plus profond avant que l'Axe ne les engloutisse. Rina Kettlery, qui avait recoupé des documents et des conversations, avait compris que Jen Pendragon avait été fiancé avec Euphrosine et elle crut que la magicienne avait délibérément provoqué cet échec.

Il y eut de terribles disputes, des reproches, des rapports à n'en plus finir, et le gouvernement faillit abandonner la Base.

Euphrosine resta seule en Antarctique pendant plusieurs mois.

Puis une nouvelle équipe arriva. Ils tentèrent de déplacer Calcifer qui s'était installé dans la chaufferie et s'était construit une loge d'obsidienne, mais la Tour faillit s'écrouler. Les scientifiques et les sorciers se succédèrent au fil des années.

Il n'y avait plus d'aurores boréales et on en déduisit que les Souffleurs de Lumière avaient disparu. Calcifer et Euphrosine se contentèrent d'hausser les épaules.

De jolis renards à queue de feu se roulaient dans la neige sur le vieux continent.

En 1967, la Porte ne s'ouvrit pas.

Ni en 1977.

Euphrosine entendait parler d'un mage noir qui semait la terreur et elle supposa que les Souffleurs gardaient la porte fermée pour protéger l'ordre du monde d'une telle menace. Elle se résigna. Elle apprit à tricoter, à jeter des sorts pour soulager ses articulations rhumatisantes, à boire de la tisane au lieu de thé. Elle continuait à porter une robe bleue qui était depuis longtemps démodée.

Vingt ans encore s'écoulèrent.

Puis Gunter et Poivre descendirent de l'aérostat qui apportait le ravitaillement et saluèrent la très vieille magicienne. Ils étaient amusants, chaleureux, simples. Elle les aima tout de suite.

Et Calcifer, étrangement, aussi.

Voldemort tomba pour la deuxième fois et le monde entier célébra Harry Potter. En Antarctique, Euphrosine se mit à guetter les signes de l'ouverture de l'Axe.

Mais en 2007, elle eut beau lutter contre la malédiction qui lui tenait la bouche fermée, elle ne put aider les membres de son équipe à trouver la Porte avant que le temps ne soit écoulé. Elle aurait voulu hurler que c'était de leur faute, mais un regard vers Gunter, accablé de honte, l'arrêta.

Elle pleura amèrement sur sa main où le mot funeste était de nouveau apparu.

Calcifer, lui, chantonnait dans sa cheminée. Il eut une phrase sibylline, qu'il refusa d'expliquer.

Personne n'était entré, mais quelqu'un était sorti.

L'intérêt des Souffleurs de Lumière avait été piqué par quelque chose qui se passait, quelque part dans le monde. Ils avaient vu quelque chose de beau. Quelque chose d'inhabituel. Quelque chose de précieux qu'il fallait protéger.

En 2017, au solstice d'hiver, la Porte resta fermée.

Euphrosine fêta Noël dans le salon tendu de vert, en compagnie de Gunter et de Poivre. Elle avait enfin l'impression d'avoir une famille. Elle était en paix.

Jen Pendragon dormait dans son cercueil de glace sous l'Antarctique et il n'était peut-être pas nécessaire de le réveiller. Calcifer ne semblait pas malheureux, en compagnie de l'elfe. Tout était bien.

Mais l'année du centième anniversaire, les astérolines se remirent à fleurir sous la surface de l'eau. La banquise frémit d'une impatience joyeuse, les étoiles brillèrent au firmament, les Mangeurs d'Ombre s'agitèrent dans la chaudière.

Le mot fatal apparut de nouveau sur la main d'Euphrosine.

Mais, cette fois, elle savait ce qu'elle devait faire.

 

Il y eut un grand silence quand la magicienne eut terminé de parler. Matilda reniflait et Vivienne s'essuya rapidement les yeux. Christopher s'efforçait de ne pas céder à l'émotion et sursauta quand Gunter se moucha bruyamment à côté de lui.

Terrence se pencha en avant.

- Et ? demanda-t-il. "Qu'est-ce que vous allez faire, donc ?"

Les yeux pervenche d'Euphrosine plongèrent dans les yeux bleu ciel du médicomage.

Elle sourit.

- Parfois, renoncer, c'est simplement accepter qu'on ne peut rien faire. Et souvent, cela demande plus de courage que de s'acharner pour une cause déjà perdue. Je n'aurais jamais dû jurer que j'irais chercher Jen. Ce n'était pas possible. Il est mort. On ne triche pas avec la mort, à moins de vouloir l'existence maudite de ce seigneur des ténèbres qui oppressait l'Angleterre, il y a quelques années.

- Lord Voldemort, souffla Scorpius.

- Voilà, lui. C'est ton père qui l'a vaincu, n'est-ce pas, Albus ?

Le jeune homme hocha la tête.

- Oui. Ils étaient liés l'un à l'autre. C'était son destin.

- Le destin est quelque chose que l'on crée par nos choix, dit la vieille femme avec un sourire doux.

Elle se leva sur ses jambes branlantes, épousseta ses jupons tout en tenant toujours Calcifer comme un bébé sur son bras.

- Wendy, tu veux bien me donner le chapeau qui est accroché à mon sac ? demanda-t-elle.

Elle s'en coiffa crânement, faisant un peu craquer les brins de paille usée que seule la magie retenait encore ensemble. Les camélias étaient assortis à ses yeux.

- Allons ! Il est temps, dit-elle d'une voix joyeuse.

Elle se tourna vers les cônes de diamant dans lesquels dormaient les étoiles et prit une longue respiration.

- Attends, dit Calcifer.

Il s'échappa de son étreinte. Sa flamme grandit, grandit d'un éclat vif, jusqu'à les éblouir. Lorsqu'ils purent rouvrir les yeux sans être aveuglés, un jeune homme au teint doré et aux cheveux flamboyants se tenait debout devant la vieille femme courbée par les ans. Il avait d'étranges yeux triangulaires aux reflets de feu.

- Oh, dit Euphrosine.

Et un peu de rose monta à ses joues diaphanes.

- Avant que tu t'en ailles, il y a une chose que tu dois savoir, dit Calcifer sans se soucier des regards stupéfaits du reste de l'équipe.

- Il pouvait faire ça ! chuchota Christopher à Terrence d'un ton vaguement envieux.

Le médicomage haussa les épaules en riant.

- Il est plutôt joli garçon pour un astéroïde, souffla malicieusement Vivienne à Matilda qui piqua un fard.

- Il te ressemble un peu, dit Wendy à Albus.

- Il ne ressemble pas du tout à sa dernière apparition, quand il faisait le fantôme au fond du gouffre, remarqua Scorpius en fronçant les sourcils.

- C'est parce qu'il avait pris la forme du souvenir de Jen Pendragon, ce jour-là, répondit Gunter à voix basse. "Silence, tous. Ce sont leurs adieux. Laissons-leur un peu d'intimité…"

Ils reculèrent vers la Citrouille, se contentèrent d'observer de loin.

Ils n'avaient pas peur.

Il y avait quelque chose comme une berceuse dans le bourdonnement heureux des étoiles endormies.

- Je te demande pardon de les avoir tués, dit Calcifer. "Mais je ne suis pas désolé de t'avoir piégée."

- Je comprends, dit Euphrosine.

Le daemon secoua la tête.

- Non, tu ne comprends pas. Je ne l'ai pas fait pour me venger parce que Pendragon m'avait arraché le cœur. Je l'ai fait parce que je voulais que tu restes toujours avec moi.

Il eut un petit mouvement impatient du menton et des flammèches jaunes se mêlèrent à sa chevelure cramoisie.

- Je t'aime, Euphrosine, dit-il de son habituel ton d'enfant gâté. "Je crois bien que je t'ai aimé depuis que j'ai ouvert les yeux."

Elle le regarda un instant avec des yeux comme des soucoupes, puis pouffa de rire. Ses dents s'entrechoquèrent et ses os craquèrent joyeusement.

- Gros bêta, dit-elle.

Calcifer fit la grimace.

- Tu ne me prends pas au sérieux. Je suppose que ce n'est que justice, grommela-t-il.

- Oui, dit-elle en essuyant ses yeux. "Cela fait cent ans que tu m'appelles "la gamine" ou "vieille sorcière". Je n'ai jamais vu une stratégie romantique aussi ridicule. Même Jen s'en était mieux sorti."

- Je sais bien qu'il était meilleur en tout, grogna le daemon d'un ton boudeur. "Personne ne récitait mieux les poèmes que lui. Toutes les étoiles devaient se pencher vers la terre quand il te faisait la cour."

Euphrosine riait toujours et il glissa un coup d'œil dans sa direction, timide, un peu de bleu bunsen fleurissant sur ses joues de feu.

- Tu vas m'embrasser ? demanda-t-il, plein d'espoir. "Dans les contes de fée, les princesses..."

- Non, dit Euphrosine fermement.

- Tch, fit-il.

Elle considéra un moment le visage désappointé qu'il penchait vers elle, puis ouvrit les bras.

- Viens, dit-elle avec chaleur.

Il se précipita. Pendant un instant, elle apparut aux autres comme enveloppée de flammes, puis ils virent distinctement son dos se redresser, sa poitrine s'affermir, ses cheveux se dérouler en une longue tresse châtaine, sa robe bleue danser sur des jambes fines. Les rides s'effacèrent de son visage, son arcade sourcilière s'adoucit, son nez et son menton se remodelèrent, sa bouche redevint aussi pleine et ronde qu'une cerise.

Elle sourit.

Puis ils entendirent distinctement un battement de cœur, sourd et tranquille, comme celui de quelqu'un qui ne doute pas.

Ensuite ils durent fermer les yeux de nouveau et cette fois, quand ils les rouvrirent, il n'y avait plus rien sur la plage blanche, à part un chapeau de paille orné de camélias bleus.

Wendy voulut le ramasser, mais il s'évapora entre ses doigts comme une poignée de cendres.

- Où s-sont-ils ? bredouilla Matilda. "Que s'est-il p-passé ?"

- C'est fini, dit Gunter d'un air ému. "Cette longue attente, ces regrets… c'est terminé. Poivre serait fier."

- Est-ce qu'ils ont morts ? demanda Christopher à qui Vivienne asséna un coup d'astrolabe.

- Mais non, idiot. Ils sont quelque part où ils sont heureux.

- Techniquement, je pense que lorsqu'elle lui a donné son cœur, elle a disparu, corrigea Terrence. "Elle n'était qu'un écho vieux de cent ans, après tout. Quant à lui, je suppose qu'il est retourné parmi les siens, pour attendre le Renouveau…."

- C'est ça qu'elle a fait ? Je n'avais pas pigé, grommela Christopher.

Vivienne leva les yeux au ciel.

- Vous n'êtes qu'un rustre, soupira-t-elle. "Je plains la femme qui vous épousera."

Gunter s'était assis à côté du sac en tapisserie et avait posé sa main dessus, machinalement. Il enleva ses lunettes et se mit à les essuyer, le regard perdu dans la contemplation de l'eau turquoise.

Wendy scrutait les cocons transparents à la recherche d'une étoile qui ressemble au petit daemon impoli et attachant.

- Ils vont me manquer, murmura-t-elle en ravalant ses larmes. "Est-ce que nous allons tous finir par disparaître ? Pourquoi l'Axe nous prend nos compagnons les uns après les autres ? Si c'est ça, sa grande leçon, je regrette d'être venue…"

Albus, qui s'était approché derrière elle, s'immobilisa. Quelque chose passa sur son visage, un instant, puis disparut.

Terrence, qui le regardait à ce moment-là, fut le seul à apercevoir cette brève expression.

- Ne pleure pas. Je suis sûr qu'on reverra Calcifer, dit Albus en laissant tomber une de ses béquilles. Il entoura la jeune fille de son bras libre et lui nicha son menton sur l'épaule. "Il clignotera tellement fort dans le ciel, qu'on ne pourra pas le confondre avec une autre étoile."

Wendy se blottit contre lui, absorbant le réconfort de sa chaleur.

- Heureusement que tu es là…

Il ne répondit pas, se contenta de l'embrasser sur la joue.

Les autres regardaient aux alentours, cherchant la prochaine direction. Les cônes de cristal semblaient avoir bougé et une sorte de passage s'ouvrait dans la forêt de glace.

Lorsqu'ils se furent un peu remis, ils décidèrent de s'y engager et d'attendre de trouver un autre endroit afin de s'installer pour la nuit. La caverne dans laquelle dormaient les étoiles leur semblait trop sacrée pour y camper.

- Ah, dit Vivienne. "L'astrolabe ne fonctionne plus, c'est...."

Elle s'interrompit et ouvrit la bouche en O, restant sur pause quelques instants.

- Alors c'était lui, balbutia-t-elle sous le regard amusé des autres. "Depuis le début, l'étoile sur laquelle se font les réglages, c'était ce… ce…"

- Calcifer, suggéra Terrence.

- Cette insupportable créature ! explosa l'astronome tandis que le reste de l'équipe éclatait de rire, laissant enfin échapper la tension et la tristesse des dernières heures. "Ce sale petit… démon ! Il ne pouvait pas me dire que c'était lui que nous suivions ?"

- J'imagine qu'il trouvait ça excellent, comme dernier tour, dit Gunter, les yeux pétillants derrière ses lunettes. "Allons, en route. Il nous reste encore du chemin avant de trouver les Souffleurs de Lumière."

Il entra le dernier dans le tunnel de glace, après avoir lancé un dernier coup d'œil à la plage blanche et à l'eau turquoise dont les reflets chatoyaient sur les diamants.

- Bonne nuit, Calcifer. Adieu Euphrosine, murmura-t-il. "Merci d'avoir partagé ces trente dernières années avec nous. La Tour, Poivre et moi n'aurions pas été les mêmes sans vous."

Il soupira, puis suivit son équipe.

Il ne vit pas l'étoile qui scintillait comme en réponse dans l'un des cônes de cristal.

 

 

A SUIVRE...

Prochain chapitre : LE PONT DES SOUPIRS

 

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