Le lion et le serpent
A ma grande surprise, le réveillon se passa formidablement bien. Oncle Ron et tante Hermione avaient également été invités et Lily et Hugo avaient passés leur temps à courir dans toute la maison à jouer avec des produits d’oncle George. N’ayant pas le droit de faire de la magie en dehors de l’école, Alice n’avait pas pris sa baguette et ne mit le feu à personne. En revanche, Saturnin, son grand frère, m’inquiétait plus.
En apparence, il était en tout point opposé à sa sœur, et il paraissait si normal qu’on aurait pu croire qu’il avait été adopté. Le seul problème, c’est qu’il se passait parfois des phénomènes étranges autour de lui, comme chez les jeunes enfants sauf que ça faisait trois ans qu’il apprenait à maîtriser la magie.
En dehors de ça, il était plutôt intelligent et le choixpeau l’avait même envoyé à Serdaigle, pour le bonheur de sa mère. En revanche, les histoires qu’elle racontait étaient restées pour lui de simples histoires, contrairement à sa sœur.
- ... c’est pourquoi il faut toujours se méfier des nargols, me disait-elle.
Le diner était fini et on regardait les flammes dans la cheminée. Hugo et Lily s’étaient assoupis sur le tapis et les adultes discutaient dans la cuisine. James avait disparu dans sa chambre pour préparer je ne sais quelle bêtise. Encore assis à table, Rose et Saturnin étaient plongés dans une discussion qui semblait portée sur la métamorphose.
- Ils ont l’air de bien s’entendre, fit remarquer Alice en les regardant à son tour. Tu crois qu’ils vont finir ensemble ?
- Qu’ils quoi ?
J’étais à mille lieux de penser à ça. Je réfléchis et trouvai cette idée encore plus délirante que les nargols.
- Rose n’a que one ans, fis-je remarquer.
- C’est vrai, mais dans deux ou trois ans ils y penseront peut-être. Ce serait drôlement chouette d’être sa belle-sœur !
J’étais trop consterné pour répondre. Pour moi, les histoires d’amour, c’était pour les grands. J’avais encore le temps avant de penser à ça.
Je regardai Rose et Saturnin d’un air songeur lorsque soudain, j’eus une vision fugitive.
- Tiens, fit Alice. On dirait que tu as attrapé un nargol !
- Mais non, répondis-je avant de changer de sujet. Ça marche bien le Chicaneur ?
Je n’écoutai pas vraiment sa réponse, trop perturbé par ce que j’avais vu.
Ce n’était pas un foutu nargol.
Ce n’était même pas une jolie fille.
C’était des yeux gris clairs.
Le réveillon se passa comme les années précédentes, à deux exceptions prêtes. Tout d’abord, ma mère avait fait décorer la salle à manger aux couleurs de Serpentard, un moyen de me féliciter de mon entrée dans cette maison. Ensuite, le manoir me parut plus vide que d’habitude.
Peut-être parce que je m’étais habitué à l’agitation qui régnait dans l’école. Peut-être parce que je n’avais plus à supporter les bavardages incessants de Fiona.
Ou peut-être parce que le manque de chaleur de mes parents me gênait. Bien sûr, ils m’aimaient, et même peut-être un peu trop étant donné que j’étais leur fils unique. Ils me cédaient tout et répétaient sans cesse à quel point j’étais formidable, exceptionnel, etc… Mais à force d’être répétés, ces mots avaient un peu perdu de leur sens. Et j’aurais peut-être aimé autre chose qu’une montre en or ou un nouveau balai.
Ils me l’avaient offert en avance, certains de me faire plaisir. Le tout dernier nimbus ! J’étais ravi, évidemment, mais mon père m’avait un peu refroidi en me lançant « avec ça, tu vas pouvoir faire gagner la coupe à Serpentard ! ». Comme si je faisais déjà parti de l’équipe… Comme si être le plus doué était l’évidence même !
Je poussai un soupir, allongé sur mon lit, le balai à côté de moi. J’étais monté tôt, prétendant vouloir l’admirer. Mais j’y avais à peine jeté un coup d’œil avant de le reposer. Je ne manquais de rien, alors pourquoi avais-je une sensation de vide?
Lorsque je m’endormis enfin, la dernière chose que je vis fut des yeux verts étincelants.
- Albus !
- Non merci, je ne veux plus de gâteau…
- Albus, réveilles toi, mon grand !
J’ouvris les yeux avec peine et découvris mon père penché au-dessus de moi. Alors que je regardai ses yeux verts semblables aux miens, il me sourit.
- J’ai un cadeau un peu spécial pour toi, me dit-il d’un air mystérieux. Viens l’ouvrir avant que tout le monde ne se réveille.
Curieux, je me levai aussitôt et le suivis dans le salon. Là, il me tendit un paquet mou emballé dans du simple papier kraft.
De plus en plus surpris, je l’ouvris et un tissu fin et léger s’en échappa. Je le dépliai sans comprendre et reconnu une grande cape.
- Elle est transmise de père en fils depuis une éternité, me dit mon père d’une voix émue. J’espère que tu en feras bonne usage. Vas-y, essais-là !
Je m’exécutai tout en me demandant à quoi une vieille cape pourrait bien me servir. Je commençai même si tout ça n’était pas une énorme farce.
- Maintenant regarde dans le miroir.
Je me tournai vers la glace au-dessus de la cheminée et là, j’ouvris la bouche de stupeur. Hormis me tête, tout mon corps avait disparu ! C’était incroyable…
- J’ai fait la même tête à ton âge, ria mon père. Tu verras, elle peut te sortir de bien des situations, mais tu dois rester prudent malgré tout. Surtout, ne la perd pas !
J’acquiesçais, la gorge nouée. C’était le plus beau cadeau de noël que j’avais jamais eu !
- Pourquoi moi ? murmurai-je. James…
- James a reçu un autre cadeau à ton âge. Et crois-moi, il en profite bien. Je t’ai donné la cape à toi car je sais que tu y feras attention.
- Merci, c’est super.
- De rien, mon grand. Et maintenant va vite la ranger avant d’aller réveiller les autres.