Kaʻohana koko a me kaʻohana o ka naʻau

           Steve venait de coucher le petit garçon avec une délicatesse telle, que l’enfant avait à peine entre-ouvert les yeux en baragouinant, qu’il s’était aussitôt rendormi. Il se redressa, observant quelques secondes le petit être qui dormait paisiblement, puis il rejoignit le couloir à pas feutrés.

Kelley était accoudée contre l’embrasure de la porte, un air satisfait et heureux sur le visage. Quand Steve arriva à sa hauteur, elle glissa son bras autour de sa taille et se serra contre lui, posant sa tête au creux de son épaule.

_Pas trop déçut qu’il n’ai pas besoin de dormir avec nous ? demanda Steve en chuchotant.

           Kelley sourit et détourna son regard de l’obscurité de la chambre de l’enfant, pour plonger dans les yeux de Steve.

_Cela paraît tellement banal et pourtant je trouve ça … un peu magique. Répondit Kelley, en repensant au fait de dormir avec Keynan et de le sentir totalement serein grâce à leur présence.

Cela lui rappelait des souvenirs de sa propre enfance, avant que sa mère ne meure, où elle et ses parents passaient du temps ensemble. Quand elle et son père se retrouvèrent seuls, ce genre de moment paisible et heureux - même si rares, du fait de l’emploi du temps de Jo – lui avait laissé des souvenirs impérissables et d’autant plus importants, car elle connaissait la perte d’un parent. Elle imaginait aisément que ce soit pareil pour Keynan.

_Mais t’avoir pour moi toute seule, c’est pas mal aussi ! continua Kelley en poussant Steve en direction de la chambre.

           Ils restèrent côte à côte jusqu’à la chambre et Steve pensa, toujours en souriant, qu’il comprenait tout à fait ce qu’elle avait voulu dire. Arrivés vers le lit, Kelley se tourna vers lui et remonta ses mains derrière sa nuque, elle l’attira vers lui pour l’embrasser. Steve s’était emparé de sa taille d’une main et il la fit tomber en arrière sur le lit en retenant sa descente.

           Steve et Danny roulaient sur l’autoroute en direction d’un hangar. Le commandant jeta un coup d’œil à la voiture de Lou qui les suivait de près. Danny tapota nerveusement son gilet pare-balle, son regard passant de la route qui défilait au visage concentré de son coéquipier.

_J’espère qu’ils n’ont pas touché aux enfants ! marmonna-t-il en pensant aux otages que les criminels avaient pris.

           La réflexion ne manqua pas de durcir davantage les traits du visage de Steve, dont la mâchoire se crispa.

_On y est ! lui dit quelques minutes plus tard son coéquipier.

           Garant les voitures un peu plus loin, les quatre membres du 5.0, se dispersèrent autour du bâtiment, ayant déjà élaboré leur plan d’action avant de partir. Le temps était compté, car les criminels avaient donné un ultimatum au couple de riches entrepreneurs à qui ils s’étaient attaqués. Dans à peine quelques minutes, s’ils n’avaient pas transféré la somme demandée par les ravisseurs sur le compte que ces-derniers avaient donnés, les 3 enfants du couple seraient tués.

Steve espérait tout de même, que la menace ne serait pas menée à exécution, car les parents s’apprêtaient à transférer une partie de la rançon. Mais ils n’avaient pas encore la totalité, et n’étaient même pas sûrs de pouvoir la réunir un jour.

Steve fit signe à Danny, et tous deux se placèrent d’un côté et de l’autre de la porte. Lou et Kono confirmèrent qu’ils étaient en place, et soudainement, l’équipe du 5.0 entra dans le hangar.

Avec rapidité, ils avancèrent dans la grande pièce, remplie de caisses en bois, sur le qui-vive. Après avoir passé tout le bâtiment au peigne fin, ils ne purent que constater combien il était désert.

_Ce n’est pas possible, tout nous menait ici ! se désolé Steve en jetant un coup d’œil à sa montre.

_Hé ! fit Danny, qui tournait autour d’une caisse. Toutes ces caisses de marchandise, elles ont une autre adresse de livraison !

           Le commandant fronça les sourcils et reporta son attention sur l’indice que lui montrait son coéquipier.

           Immédiatement, Steve appela Abby qui était au QG du 5.0 avec Jerry.

_Abby, il faudrait que tu me dises ce qu’il y a à l’adresse que je t’ai envoyée. Demanda-t-il au téléphone, tandis que les membres de l’équipe rejoignaient leurs voitures.

_C’est un bâtiment de stockage aussi, il est plus petit mais bien plus isolé. Lui expliqua Abby.

_On n’y sera jamais à temps ! constata Danny en regardant l’heure, alors que Steve s’était déjà mis au volant.

_Chin n’est pas loin ! lui dit Abby. Je lui envoie des policiers en renfort ! Le quartier d’Ahuimanu est juste au nord de celui de Kaneohe.

           Alors que Steve accélérait, bien conscient que traverser l’île allait leur prendre trop de temps, il réfléchissait.

_Chin a besoin d’un renfort efficace ! marmonna-t-il pour lui-même.

           Chin gara sa voiture un peu avant l’entrée de la zone industrielle. Il n’y avait pas beaucoup d’hangars et ils étaient très espacés les uns des autres : c’était un lieu idéal pour garder des otages discrètement. Il ouvrit son coffre pour prendre son équipement pour l’intervention. Entendant un bruit de moteur, il se tourna vers la Mustang qui arrivait à son niveau, le soleil miroitant sur la carrosserie argentée. Chin salua Kelley quand elle sortit de sa voiture, ils échangèrent quelques mots sur la disposition des lieux et la manière d’intervenir. Le lieutenant Kelly avait prévu d’attendre les renforts de la police qu’Abby lui avait envoyé, mais ils jugèrent qu’ils devaient faire un repérage pour s’assurer que les criminels mais surtout les otages étaient bien là.

Avançant prudemment, caché par l’épaisse clôture en bois qui séparait le hangar d’un autre bâtiment, Chin et Kelley se rapprochèrent de leur objectif, une porte coulissante qui était entrouverte. Jetant un coup d’œil à l’intérieur grâce à un système de caméra que Kelley avait amené, ils purent analyser la situation.

Le ton montait parmi les kidnappeurs et l’un d’eux était au téléphone. Ils y avaient au moins 3 hommes armés, d’après ce qu’ils pouvaient voir. Pour autant, la grande pièce ouverte que faisait le hangar, était remplie de longues d’étagères entreposant diverses caisses de transports. D’autres hommes pouvaient être cachés par ces-dernières.

_Je ne vois pas les otages. Murmura Kelley.

_Il y a une plateforme au-dessus. Lui fit remarquer Chin, en désignant une fenêtre au-dessus d’eux, légèrement plus au milieu de la façade. Surement un bureau ouvert.

_Je peux monter pour aller voir, et cela fait un point d’entrée comme elle est ouverte. Proposa-t-elle.

           Chin tiqua, mais il entendait la voix de l’homme gronder de plus en plus. Si les kidnappeurs étaient sérieux, et si les parents n’avaient pas réussi à réunir la somme, ce qui semblait être le cas, il n’allait pas falloir attendre longtemps avant qu’ils s’en prennent aux otages. Il hocha la tête, supposant que Steve aurait sûrement fait la même chose à sa place. Il regarda Kelley s’éloigner un peu, en se demandant tout de même comment elle comptait monter vers la fenêtre alors qu’elle semblait inaccessible.

           Kelley aussi semblait regarder autour d’elle ce qu’elle pouvait utiliser. Elle vérifia que son arme était fermement rangée dans son étui, et se tint dans le coin opposé à Chin, là où le mur formait un renfoncement. Kelley sauta et parvint à mettre ses mains et ses pieds de chaque côté, posés à plat sur le mur. Elle monta à la force de ses jambes et de ses bras, jusqu’au niveau de la fenêtre. Le rebord de cette dernière formait une fine démarcation dans le béton, et Kelley s’y agrippa pour rejoindre la fenêtre.

           Chin était à la fois impressionné par ce que venait de faire Kelley, et inquiet car l’homme venait de partir d’un pas décidé vers le fond du bâtiment, zone où Chin ne voyait plus rien. Il prévient Kelley, qui tenta un coup d’œil et en se remontant à la force des bras, pour avoir les yeux à hauteurs de la fenêtre.

_On ne peut plus attendre ! lui dit Kelley.

_Alors je rentre ! répondit Chin, en poussant la porte, arme à la main.

           Alors que le lieutenant du 5.0 faisait son entrée, en s’annonçant tout en commençant à tirer sur les hommes qui se tournaient face à lui, surpris mais prêt à en découdre, Kelley se propulsa d’un coup par la fenêtre et roula au sol.

Chin avança jusqu’à une grande caisse de marchandise et s’abrita derrière elle, alors que des tirs fusaient dans sa direction. Il jeta un coup d’œil vers la plateforme qui surplombait la pièce, mais de sa cachette il ne pouvait pas voir ce qu’il s’y passait. Il espéra que les renforts ne tarderaient pas, tout en se penchant à nouveau pour ouvrir le feu sur ses adversaires.

Kelley avait roulé sur le sol de la plateforme et se redressa presque aussitôt, par habitude elle avait pris le maximum d’information lors de son bref coup d’œil par la fenêtre, ainsi que lors de son passage dans celle-ci. Elle se retrouva donc pratiquement entre les 3 enfants pris en otage à sa droite, et l’homme qui était au téléphone, en haut de l’escalier à sa gauche. Ce-dernier s’était retourné, étonné, à l’entrée de Chin dans l’entrepôt, mais il avait fait volte-face presque aussitôt pour se retrouver devant le commandant White.

Kelley avait saisi l’un de ses couteaux attachés à sa cheville, en même temps qu’elle c’était redressé. Elle lança, d’un geste vif, le couteau sur l’homme qui était juste à côté des otages. Elle eut juste le temps de constater qu’elle l’avait touché, qu’elle vit du coin de l’œil, le chef des criminels, relever son bras droit vers elle, arrondissant son index autour de la gâchette. Elle se jeta sur lui et lui envoya un magistral coup de pied, pour faire partir au loin l’arme qu’il tenait. Lâchant par la même occasion le téléphone qu’il tenait dans la main gauche, l’homme vacilla sous le choc, avant de répliquer.

Chin avait réussi à avancer un peu, vers une des premières étagères de l’entrepôt, mais il avait dû trouver refuge à nouveau derrière elle pour ne pas servir de cible à ses adversaires. Il était un peu mieux placé, et apercevait quelques bribes du combat qui se jouait en haut. Il relança sa demande de renfort par la radio, et se pencha à nouveau pour essayer de se débarrasser des tireurs.

           Kelley venait de reculer pour éviter un coup et enchaîna avec un coup de pied en pivotant, le propulsant en arrière, l’homme perdit l’équilibre et dégringola dans les escaliers.

Au même moment, les sirènes de police se faisaient entendre et les kidnappeurs restants eurent un moment de panique, et tentèrent de fuir.

Chin bloquait la sortie de derrière et il les vit partir en direction d’une grande ouverture latérale.

_Ils sortent par la droite du bâtiment. Lança Chin par radio.

           Le petit groupe de fuyards atteignirent le côté droit du bâtiment, une grande porte latérale en fer était fermée. Et avant qu’ils n’aient pu essayer de l’ouvrir, des caisses tombèrent depuis l’étage et se fracassèrent dans un épais nuage, juste devant la porte.

Les policiers rentrèrent par la grande porte. Ils finirent d’arrêter les hommes restants, tandis que Chin rejoignait Kelley pour rassurer les enfants.

           Steve regarda sortir les kidnappeurs, menottes aux poignets et rejoignit Chin et Kelley qui venaient de rendre les enfants à leurs parents.

_Vous avez assuré ! leur dit-il.

_On forme une bonne équipe ! lança Chin. Moi je tire, et elle, elle crapahute !

           Kelley sourit.

_Je comprends tout à fait pourquoi vous faites ce métier ! Ces moments-là, ça vaut le coup ! Même si personne ne devrait avoir à vivre ça ! dit-elle.

_Oui, mais heureusement, nous sommes là pour que cela se termine bien ! répondit Chin, ayant lui-même déjà vécu cette situation avec Sara. En tout cas merci de ton aide ! Encore !

           Chin sourit à l’adresse de Kelley, puis de Steve, et tapotant sur son gilet pare-balle, il retourna voir le reste de l’équipe.

_Dis-moi … commença Kelley en reportant son attention sur le couple qui montait en voiture avec leurs enfants. Tu m’as demandé de venir pour essayer de m’engager dans l’équipe, ou pour vérifier que je n’avais rien perdu pendant ma mission ?

           Steve rit et avec naturel, passa son bras par-dessus ses épaules.

_C’est mon devoir de m’assurer qu’avant de retourner sur la base tu sois prête !

           Kelley se tourna vers lui et ils échangèrent un regard complice, alors qu’autour d’eux tout le monde s’affairait. Puis Steve du trevenir à la réalité et retourna à son travail.

           Chin rejoint Danny, Kono et Lou.

_Ils ont l’air de s’être arrêtés là où ils en étaient. Observa Chin, toujours avec un sourire aux lèvres.

           La résolution de cette enquête lui avait redonné de l’énergie et désormais ses pensées n’étaient plus que dirigées vers Sara et Abby.

Kono était ravie pour son cousin et elle ne pouvait que constater à quel point il était enjoué à l’idée de devenir papa et d’offrir à Sara une famille plus solide. Et cela le rendait aussi plus intéressé que jamais par le bonheur de ses proches. C’était une qualité qu’elle avait toujours admiré chez son cousin, cette empathie et cette envie de voir les gens, autour de lui, heureux. Et Chin se trompait rarement sur les gens, à l’exception de Gabriel Waincroft.

Chin prit congé de ses amis, et Kono reporta son attention sur Danny, qui semblait loin de la béatitude qu’affichait Chin, depuis quelque temps maintenant. Pourtant, à présent, il lui offrit un petit sourire satisfait.

_Il faut croire que les renforts de Steve sont toujours là quand il faut ! dit-il en hochant la tête.

           Lou et Kono opinèrent alors que Kelley se rapprochait d’eux.

_Comment va notre membre intérimaire ? demanda Lou, en accueillant cette dernière.

_Toujours fidèle au poste. Lui répondit-elle avec humour.

_Steve avait sûrement peur que tu t’ennuies pendant tes vacances. Continua Lou. Si tu cherches des activités sportives mais moins dangereuses, demande-moi ! Le golf c’est un moyen beaucoup plus sûr de passer ses vacances !

           Alors que Lou et Kelley s’éloignaient en discutant gaiement, Kono se tourna vers Danny.

_Tu sais, même si c’est dur, il faut parfois juste attendre … lui dit le lieutenant Kalakaua, en repensant à tous les problèmes qu’elle avait connus avec Adam. Cela ne sert à rien de t’inquiéter d’avance pour lui … ou pour toi !

           Danny hocha la tête, aux paroles sages de sa collègue et décida de rejoindre son meilleur ami.