Sexy Dance (Tome 1)

Chapitre 3 : Une soirée un peu trop arrosée

5187 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 10/08/2025 16:43

💧 Scène 15 - Auditions


L'air est lourd, chargé d'humidité et d'agacement. Le grand studio, baigné d'une lumière pâle venue des immenses baies vitrées, résonne d'un morceau classique remixé en version électro.

Lucifer est au centre, chemise ouverte sur le torse, les tempes humides, les yeux cernés.

Il soupire, agacé.


— « Suivant... »


Un garçon en jogging monte. Il tente de le rattraper sur un porté. Lucifer s'élance, bras tendus... et s'écrase lourdement à genoux sur le parquet.


— « On va jamais y arriver...» souffle Lucifer.


Dans un coin de la pièce, Alastor est appuyé contre le miroir, jambes croisées, chewing-gum en bouche. Il ricane à peine, les yeux plissés, amusé.


— « On dirait un pigeon blessé... » murmure-t-il entre ses dents, trop bas pour que Lucifer l'entende.


Une fille tente sa chance. Elle rate le timing. Lucifer retombe encore, cette fois sur les fesses. Il tape du poing contre le sol, exaspéré.

Charlie, assise sur une caisse de musique, grimace de compassion.


— « Courage... tu vas finir par trouver quelqu'un. »


Lucifer se redresse, essuie son front. Il regarde sa liste. Presque personne ne reste à auditionner. Il serre les dents.

Dans le miroir, il croise le regard d'Alastor, toujours à l'écart, amusé, décontracté, en sweat noir.


Lucifer lance, froidement :


— « Tu comptes te moquer encore longtemps, ou t'as prévu de faire quelque chose d'utile un jour ? »


Alastor hausse les épaules, faussement innocent.


— « Moi ? Jamais de la vie... Je respecte l'art. Surtout quand il s'écrase au sol avec autant de grâce. »


Lucifer détourne les yeux. Il est à bout.


— « Suivant ! »


Mais personne ne se lève.


Scène 16 - "Tu veux que je t'impressionne ? Alors saute."


Lucifer croise les bras. Son regard claque comme une gifle.


— « Allez, vas-y. Montre-nous ce que tu sais faire, "l'artiste de rue". »


Alastor s'approche tranquillement du centre de la pièce, toujours en sweat noir et baskets usées. Il fait craquer ses doigts, relève ses manches.


— « T'as peur que je sois meilleur que toi, ou juste que je te lâche ? »


Lucifer souffle par le nez.


— « T'as un style trop... désordonné. Trop hip-hop. T'es pas fait pour la rigueur du classique. »


Alastor avance d'un pas.


— « Et toi t'es trop rigide. Peut-être que tu fais tout parfaitement, mais tu ressens rien. T'es coincé. (pause) Laisse-moi te le prouver. »


Charlie écarquille les yeux, se redresse. Elle sent que ça va clasher - ou exploser.


Lucifer hésite. Puis, d'un geste sec, il lance la musique.


Un crescendo dramatique.

Il s'élance.

Un tour.

Une pirouette.

Puis il saute - bras tendus vers Alastor.

Et là...


Alastor le rattrape parfaitement.


Ses bras puissants glissent sous ses omoplates et ses genoux.

Lucifer est suspendu dans les airs, légèrement cambré, le souffle court.

Leurs visages sont à dix centimètres l'un de l'autre.

Trop proches. Trop longtemps.

Alastor sourit en coin.


— « On dirait que tu rentres bien dans mes bras, finalement. »


Lucifer le fixe, glacé.


— « Tu m'as juste rattrapé. C'est pas une victoire. »


Mais il se sent bizarrement... stable. En sécurité. Lourd et léger en même temps.

C'est pas comme d'habitude.

Alastor le repose doucement, comme s'il déposait quelque chose de précieux.


Puis il ajoute, plus bas :


— « On recommence ? Ou t'as peur de t'habituer ? »


❤️ Scène 17 - "On répète, pas besoin de se regarder comme ça."


La musique repart.

Lucifer est concentré. Trop.

Il fait un pas.

Alastor le suit.


Leurs jambes se croisent, tournent, s'alignent.


Ils enchaînent la chorégraphie que Lucifer avait imaginée pour son ancien partenaire.


C'est fluide... presque trop.

Lucifer murmure, les dents serrées :


— « Garde ton dos droit. T'as une posture de mec qui sort du lit. »


Alastor rit doucement, sans s'arrêter de danser.


— « Et toi t'as celle d'un type qui y est jamais allé. »


Lucifer s'approche. Ils doivent se frôler. Se toucher. Il pose sa main sur la nuque d'Alastor pour un mouvement guidé.


Mais sa voix tremble.


— « Si tu fais tomber le rythme, ou que toi tu me fais tomber, je te vire. Compris ? »


Alastor s'empare de sa taille à ce moment-là. Lucifer s'élance. Alastor le tourne, parfaitement. Encore.

Puis Alastor le regarde dans les yeux. Fixement.


— « Si tu continues à parler comme si t'étais au-dessus de tout le monde, je vais finir par croire que t'as peur. »


Lucifer fige un instant.


— « Peur ? Pff, n'importe quoi. »


— « T'as peur de moi. De ce que tu ressens quand je te touche. Tu veux le contrôle, mais ton corps me suit sans réfléchir. »


Lucifer recule, brutalement. Il coupe la musique.

Silence.

Respirations rapides.

Trop rapides.

Charlie les regarde, bouche ouverte.

Lucifer serre les poings.


-« C'est fini. J'en ai assez vu. Je veux plus te revoir ici à partir de demain. »


Alastor le regarde partir. Il ne sourit plus.


🎒 Scène 18 - "Il ne devrait pas me faire sourire."


Le lycée est calme. Fin de journée.

Les derniers rayons du soleil teintent les couloirs d'une lumière orangée.

Lucifer marche lentement, seul, son sac en bandoulière. Son pas est lourd, mais régulier.

Il atteint son casier.


L'ouvre.


Range soigneusement son carnet de chorégraphie, un bandeau de poignet et une bouteille vide.

Il inspire doucement, referme la porte en métal d'un geste lent.

Son regard se perd à travers la vitre juste en face.

Dans la cour, en contrebas, une foule est rassemblée.

Musique.

Rires.


Et au centre...


Alastor.


Il danse, enchaîne des mouvements de hip hop saccadés, rapides, explosifs.

Ses bras sont vifs, sa tête suit le rythme, ses jambes frappent le sol.

Il est entouré de quelques gars et filles : tenues moulantes, tops courts, sourire aux lèvres.


Lucifer les observe.


Un éclat étrange dans les yeux.

Pas de jalousie. Mais une sorte de... fascination.


Il s'appuie contre le mur, sans quitter la scène des yeux.

Alastor, en pleine impro, rit avec eux, essuie son front. Puis il lance, fort :


— « Et maintenant, pour mon grand rôle d'étoile filante en tutu... »


Et là, il joint ses bras au-dessus de sa tête, exagérément rigide.

Il se met à tourner sur lui-même en prenant une posture de danseur classique caricaturée, presque grotesque.

Les autres explosent de rire.

Lucifer devrait être vexé.

Mais au lieu de ça...


Il baisse légèrement la tête.

Puis, un petit sourire en coin apparaît.

Juste un.

Subtil.

Presque affectueux.

Il murmure pour lui-même :


— « Petit crétin. »


Et il s'éloigne dans le couloir, son sac sur l'épaule.

Mais dans son cœur, quelque chose a dansé avec lui, ce soir-là.


🧢 Scène 19 - "Même heure. Même endroit. Et un collant."


Le soleil descend lentement derrière les bâtiments du lycée, jetant des ombres longues sur l'asphalte.

La musique continue de battre dans les enceintes portables, et Alastor est toujours au centre, un bras en l'air dans sa pose ridicule.


— « Tadaaa, j'suis prêt pour l'Opéra Garnier ! »


Rires.


Angel siffle.


— « T'es magnifique, ma salope. Manque plus que les paillettes et un beau tutu ! »


Husk, les bras croisés, ajoute entre deux bouffées :


— « Tu ferais un malheur chez les cygnes bourrés. »


Et là, silence.

Lucifer est là.

Dans la cour.

Impeccable, sac toujours sur une épaule, regard calme mais brûlant de détermination.


Les potes d'Alastor le voient et commencent à glousser, à se donner des coups de coude.


— « Eh bah putain, voilà la diva en personne !


— « Il est venu chercher son petit rat d'opéra ! »


— « Allez, Al, t'es devenu timide quand on est là ou quoi ! Va le vanner ! »


Alastor lève les yeux au ciel, soupire fort, exaspéré.


— « Fermez-la deux secondes, sérieux... »


Lucifer s'approche.

Son ombre s'allonge devant Alastor.

Il s'arrête à un mètre de lui.

Leurs regards se croisent.


— « Je te donne une seconde chance, dit-il. Ce sera ta dernière. Je déconne pas. »


Alastor hausse un sourcil.


— « Une seconde chance ? »


— « Demain. Même heure. Même endroit. Toi et moi. Sérieusement cette fois. »


Un silence.

Lucifer incline légèrement la tête, moqueur.


— « Mais si tu veux vraiment être mon partenaire... tu devras porter un collant. »


Un éclat de rire fuse.

Angel est au sol. Husk tousse dans son joint.

Alastor cligne des yeux. Déstabilisé.


— « Attends... quoi ? C'est quoi un collant ? »


Lucifer rit.

Vrai rire.

Clair, rare, presque lumineux.

Il tourne les talons sans répondre, laissant Alastor là, confus, planté comme un idiot au milieu du cercle.


— « Mais... attends ! Ça s'achète où ce truc ?! »


Lucifer, sans se retourner, lève une main nonchalante en l'air.


— « Tu trouveras. T'as vraiment intérêt. »

Fondu noir.


🍻 Scène 20 - "J'te jure c'est juste pour l'emmerder"


Lumière jaune pâle.

Des guirlandes LED clignotent mollement dans le salon d'Angel, tendues entre deux posters arrachés.

L'endroit sent l'alcool cheap, le tabac, le vieux désodorisant fraise.

Angel est allongé sur le canapé, en crop top et short filet, téléphone à la main.

Husk, debout contre le mur avec une bière, regarde Alastor en coin.


— « Sérieux Al, tu vas encore louper le 1v1 ? J'en ai marre de jouer au basket solo. Tu passes ta vie au bahut pour un gars qui t'adresse à peine la parole. »


Alastor ne répond pas tout de suite.

Il est assis sur l'accoudoir, un gobelet rouge à moitié plein dans la main.

Il fixe le vide.

Enfin non. Pas le vide.

L'espace où Lucifer aurait pu être.


— « J'sais pas. C'est chiant, ce soir. Personne me calcule ici. »


Angel ricane.


— « Tu veux dire : personne t'emmerde ici. »


Alastor sourit, mais c'est un sourire flou.

Un peu absent.

Il prend son téléphone. Ouvre son répertoire. Hésite.

Puis se tourne vers une fille qui passe, un peu pompette, un haut transparent sur elle, révélant ses sous-vêtements.


— « Eh. T'es dans la classe de Lucifer, toi, non ?


— « Mh-hm, pourquoi ? »


— « Tu peux me filer son numéro ? J'dois le joindre pour un... truc de danse. »


— « Ouais ouais, attends. Hihi t'as un crush ou quoi ? »


Il répond pas. Prend le numéro.

S'éclipse par la terrasse, là où la musique est plus lointaine, l'air plus frais.

Il compose.


Bip. Bip.


Ça décroche.


— « ...Allô ? »


La voix de Lucifer. Froide. Directe.


— « Qu'est-ce que tu veux, Alastor ? »


— « Tu fais quoi ce soir ? »


— « Me reposer. Pourquoi ? »


— « Y'a une soirée chez Angel. Tu devrais venir. J'sais pas... ça te ferait du bien de... respirer. Te décoincer. »


Silence.


Lucifer soupire.


— « Je te signale que je passe déjà ma vie à supporter ta voix. J'vais pas me l'infliger en plus en soirée. »

Alastor rit, doucement.


— « T'as peur de t'amuser ? D'être vu avec moi ailleurs que dans une salle de danse ? »


Autre silence.

Puis...


— « ...Où c'est ? »


— « T'as changé d'avis ? »


— « Disons que j'ai pas envie de m'endormir en lisant Platon ce soir. J'peux faire le rebelle... juste une fois. »


— « Donne-moi ton adresse. »


— « 666 boulevard Hell Street, dans le 4e. Pourquoi ? Pourquoi tu me demandes mon adresse, Alastor ? »


— « Je viens. J'vais pas te laisser te balader dans les rues à une heure pareille. »


Lucifer hésite.


Puis :


— « Soupir... Ok. Mais si tu fais une blague sur mon immeuble ou mon numéro, j'te claque. »


— « Promis. J'me tiens à carreau. (pause) Enfin... au début. »


Il raccroche.

Son reflet dans la vitre de la terrasse sourit.


🛌🏻 Scène 21 - "Tu peux me dire ce que tu fous à grimper sur mes murs ?"


Lucifer raccroche.


Il reste là, une seconde, téléphone en main, immobile dans sa chambre trop grande, aux murs blancs et aux meubles parfaitement alignés.


Puis il cligne des yeux.


— « Putain. Je vais à une soirée. »


Panique.

Il ouvre son armoire.

Sort un haut noir. Trop habillé.

Un sweat gris. Trop fade.

Un débardeur blanc. Trop... musclé ? Non. Non.


— « Je vais ressembler à un gosse paumé. Pourquoi j'ai dit oui ? »


Il tourne en rond, le cœur battant, le regard fouillant les moindres recoins de sa chambre pour une solution.

Il n'est jamais sorti seul dans L.A.

Et surtout pas dans le 9e, ce quartier qu'on lui a toujours décrit comme "dangereux", "sale", "hors de sa portée".


J'vais faire demi-tour. C'est pas grave. Il m'en voudra pas. Il doit être déjà reparti-


TOC TOC.


Lucifer sursaute si violemment qu'il fait tomber son téléphone.


Quoi... ? C'est pas la porte. C'est... la vitre ?


Il se retourne lentement, et là, son cœur explose.


Alastor.


Debout sur le rebord de la fenêtre de sa chambre, à 3m de haut.

Casquette à l'envers, sweat noir à moitié ouvert, et un sourire en coin qui veut dire "t'as cru j'allais attendre que tu sortes tout seul ?"

Lucifer pousse un petit cri de surprise étouffé.


— « Mais t'es complètement malade ou quoi ?! » chuchote très fort le danseur.


Il se précipite, déverrouille la vitre coulissante et la tire d'un coup.


— « Chut ! Arrête de faire du bruit, tu vas réveiller mes parents ! »


Trop tard. Alastor s'engouffre comme un chat... ou comme un voleur, et glisse littéralement sur le tapis.

Il s'étale par terre en lâchant un "tch" moqueur.

Lucifer écarquille les yeux.


— « Si mes parents apprennent que t'es passé par ma fenêtre... »


— « J'étais pas censé survivre jusqu'ici avec tous tes codes de digicode et ta barrière de jardin de riche. »


Lucifer chuchote, la voix légèrement tremblante :


— « Qu'est-ce que tu fous ici ? »


Alastor se relève, essuie son sweat, et le regarde avec un demi-sourire provocateur.


— « J'ai dit que je venais te chercher. J'ai juste pas dit par où. (pause) Tu viens ou tu veux continuer à paniquer devant tes pulls pendant une heure ? »


Lucifer reste figé.

Il sait qu'il devrait lui dire de dégager.

Mais au fond... il n'a jamais eu aussi envie de sortir.


🏍️ Scène 22 - "Bienvenue dans mon monde, chéri."


Lucifer fixe toujours Alastor, planté au milieu de sa chambre comme une contradiction vivante.


Alastor, lui, ne bouge pas. Il le regarde. Trop longtemps.


Lucifer fronce les sourcils.


— « Tu peux te retourner s'il te plaît ?


Je veux me changer. Je ne vais quand même pas débarquer là bas en pyjama. »


— « Tch, c'est pas comme si je voulais te mater... » dit Alastor, la voix rieuse.


Lucifer le fusille du regard. Alastor lève les mains, faussement sage, et se tourne... Enfin... il penche juste un peu la tête pour regarder, juste un petit peu, un petit oeil.

Lucifer soupire et commence à se changer. Il enlève sa chemise lentement.

La lumière douce de sa chambre glisse sur son dos pâle, sa peau est vraiment très blanche après réflexion. Ça en devient presque... sexy.

Alastor, évidemment, jette un gros coup d'œil très évident par-dessus son épaule.


— « J'pensais pas que les rats d'opéra avaient des abdos. Tu fais des tractions avec ton orgueil ou quoi ? Pas mal, pas mal... »


Lucifer soupire, ne dit rien. Il sait qu'il le regarde. Il sait qu'il devrait lui dire de détourner les yeux.


Mais il ne dit pas non.

Il enfile un haut noir sobre, un jean bleu ajusté avec deux trous au niveau des genoux. Chaussures fines.


Quelques minutes plus tard, ils sortent en silence par la même fenêtre. Lucifer s'assure avant que ses parents dorment bien.

La rue est calme. Froide. Et devant... la moto rouge et noire. Celle d'Alastor, sans aucun doute.

Massive.

Et Alastor qui sort un casque, qu'il pose doucement sur la tête de Lucifer.


— « Tu m'fais confiance ? »


Lucifer lève les yeux vers lui, méfiant.


— « Non. »


— « Parfait, grimpe. »


Lucifer hésite.


Une seconde. Deux.


Puis il monte.


Il s'assoit derrière Alastor, les mains d'abord crispées sur le bord du siège...

Puis lentement, il glisse ses bras autour de sa taille.

Et au moment où le moteur gronde, il dépose sa tête sur son épaule.

Alastor tourne légèrement le visage, juste assez pour chuchoter dans le vent :


— « Bienvenue dans mon monde, chéri. »


Et la moto s'élance dans la nuit de Los Angeles.


🌆 Scène 23 – “Ce n’est pas si mal, de se taire avec toi.”


Le moteur rugit dans la nuit.

La moto fend les rues du 9e, dévorant le bitume à pleine vitesse.

Lucifer garde la tête posée contre l’épaule d’Alastor, ses bras enroulés autour de sa taille.

Leurs corps sont collés. Le vent gifle son visage, fait voler ses mèches blondes sous le casque.


Il ne parle pas.


Il pense.


Mais pour une fois, il pense doucement.

Les lumières de la ville passent, floues, irréelles.

Et au fond de lui, une voix chuchote :


— « Ce n’est pas si mal, de se taire avec toi. »


Alastor jette un rapide coup d’œil dans le miroir.

Et sourit.


🎉 Scène 24 – “Ils ont tous arrêté de respirer.”


La moto freine doucement devant un immeuble délabré, éclairé par des guirlandes et des téléphones levés vers le ciel.

De la musique s’échappe à travers les murs, grave et électro.


Lucifer descend. Il enlève lentement son casque.


Ses cheveux sont un peu décoiffés. Il ressemble à un garçon normal.


Et pourtant, quand il monte les marches aux côtés d’Alastor, tous les regards se tournent.


Angel crache son soda.

Husk reste figé, canette en main.


Un mec dit à voix haute :


— « Mec… le danseur est là ? Avec toi ? »


Alastor passe un bras derrière Lucifer sans même le toucher. Juste pour marquer le terrain.


Lucifer, lui, garde le menton haut. Mais ses yeux fuient un peu.


Il ne sait pas comment se tenir ici.

Il ne sait pas s’il a bien fait.

Mais il est là. Et ça, c’est déjà énorme.

Une fille chuchote à sa pote :


— « Il est canon, mais il a pas l’air d’avoir déjà bu un seul verre de sa vie. Je me demande ce qu'Al compte faire avec lui. »


Lucifer la fixe. Elle baisse les yeux.

Il regarde ensuite Alastor, droit dans les yeux.


— « Tu m’as amené ici pour me tester ? »


Alastor hausse les épaules, les yeux brillants.


— « J’te teste tout le temps, chéri. »


🍸 Scène 25 – “Ça tape, hein, le monde réel ?”


La soirée bat son plein.

Le salon d’Angel est rempli de corps qui bougent, rient, crient.

Des verres volent de main en main, une table sert de piste de danse, les enceintes font trembler les murs.

Lucifer est assis dans un coin au début.

Dos droit. Verre à la main.

Il observe. Analyse.


Angel vient vers lui, souriant de toutes ses dents :


— « Tu vas rester coincé toute la nuit ou tu comptes au moins faire semblant de t’amuser ? »


Lucifer lève un sourcil :

— « Je m’amuse. »


— « T’as encore ton manteau, chéri. »


Lucifer regarde ses manches, soupire… et retire lentement sa veste.


Quelques regards s’attardent sur lui.


Husk surgit avec une bouteille et claque un gobelet sur la table :


— « Il a pas encore bu ! Ça va pas du tout, ça ! Al, s’il tient pas l’alcool, t’le récupères ! »


Alastor répond, nonchalant, en prenant un shot :


— « Il a qu’à apprendre. Tout s’apprend avec moi. »


Lucifer lève les yeux au ciel. Puis, par provocation, il avale le shot qu’Husk vient de lui servir.

Erreur.

Vraie erreur.

Dix minutes plus tard, Lucifer est hilare.

Ses joues sont rouges, ses yeux brillent. Il rit à une blague d’Angel qu’il n’a pas comprise.

Une fille vient lui proposer un jeu : “Tu préfères”.

Lucifer accepte. Grave erreur numéro deux.


l— « Tu préfères embrasser Alastor ou… faire un strip-tease sur la table ? »


Lucifer fronce les sourcils, très concentré.


— « La table est en verre, non ? C’est dangereux... »


— « Donc tu préfères embrasser Alastor ? »


Lucifer tourne lentement la tête vers lui, avec une lenteur dramatique.


— « Mmmh… j’y pense. »


Alastor arque un sourcil, amusé.


Lucifer finit par se lever, trébuche légèrement, puis se dirige vers la cuisine.


Il ouvre le frigo. Reste figé.


— « Qui a mis… du ketchup à côté des glaçons ? »


Angel, explosé de rire au fond :


— « T’es foutu, bébé riche. Ça tape, hein, le monde réel ?! »


Lucifer se retourne, désignant quelqu’un avec une cuillère :


— « J’aime bien ici. Vous êtes… pleins de décadence. »


Puis il s’effondre sur le canapé, bras en croix.


— « C’est mon nouveau lit. Je reste vivre ici. »


💢 Scène 26 – “T’es trop mignon pour rester tout seul.”


La fête bat son plein.


Alastor est au milieu de la piste, entouré de monde, son corps qui bouge parfaitement au rythme.

Il danse avec une fille — grande, crop top scintillant, sourire rouge cerise — qui colle son bassin au sien.

Leurs regards se croisent, ils rient, transpirent, vivent.

Autour d’eux, la foule ondule, floue, bruyante.

Un peu plus loin…

Lucifer titube.


Il est à moitié affalé contre un mur, son gobelet vide à la main.


Ses yeux papillonnent, il voit flou, mais il rit encore parfois, sans trop savoir pourquoi.

Et là, un mec l’approche.


Grand, jean troué, muscles bien mis en valeur, une chaîne en or qui brille à la lumière du salon.


— « Hey, t’es pas de ce coin, toi. »


— « Je suis de… Je... je sais plus. »


— « J’vois ça. T’es complètement perché, mon gars. »


Lucifer sourit vaguement, vacille.

Le mec le rattrape.


— « T’es trop mignon pour rester tout seul. »


Lucifer rit encore. Il ne comprend pas. Ou il ne veut pas comprendre.

Le mec se penche, sa main glisse sur la hanche de Lucifer. Il murmure un truc inaudible à son oreille. Lucifer détourne légèrement la tête, mais sans force.

Et là, sans prévenir — le mec tente de l’embrasser.

Main à l’arrière de sa tête, bouche qui s’avance.

Lucifer se débat faiblement, secoue la tête.


— « Non… non, je... »


Mais le mec insiste, leurs lèvres s'effleurent presque. Il est violent.

Le salon est toujours bruyant. La musique cogne. Mais pour Lucifer… tout devient flou. Sourd. Glissant. Ses yeux papillonnent. Le goût d’alcool amer lui reste dans la bouche. Il sent la main du mec qui l’a plaqué contre le mur, une poigne ferme sur sa nuque.


— « Détends-toi… c’est rien. Juste un bisou. T'es bien avec moi là, hein ? »

Lucifer détourne la tête, essaye de bouger, mais ses jambes tremblent. Il a l'impression qu'il va s'évanouir, il fait une crise de panique.


— « Non. Je... je veux pas… Laisse moi... »

Le mec le saisit plus fort. Une main sur sa mâchoire.


— « Mec, t’as joué avec moi toute la soirée. Tu croyais quoi ? Tu m'as regardé avec ton petit air sexy pendant deux heures, j'suis pas un chien moi ! Hein ?! »


Il le cogne contre le mur. Le choc résonne dans la pièce, mais est couvert par la musique. Lucifer gémit, une larme silencieuse coule le long de sa joue. Il ferme les yeux.


— « Arrête... s’il te plaît… »


Les mains du mec commencent à descendre, il les passe brusquement sous ses vêtements. Lucifer commence à paniquer.


🌛 Scène 27 – “Il est trop tard.”


Alastor est toujours sur la piste.

La fille contre lui est belle, forte, souple.

Elle bouge comme une déesse de feu, sa main glisse sur sa nuque.


Mais quelque chose tique.

Quelque chose gratte dans sa tête.

Un bruit. Une vibration. Une impression.

Et alors, ses yeux croisent ceux de Lucifer.

Au loin.


Coincé entre deux silhouettes.

Un garçon accroché à lui.

Lucifer qui se débat.

Lucifer qui tremble.

Lucifer qui dit non.

Le cœur d’Alastor se contracte.


— « LUCIF- »


Trop tard.


La fille qui danse avec lui l’attrape par le col et l’embrasse avec force.

Ses ongles dans ses cheveux, sa langue entre ses lèvres sans qu’il le veuille.

Il tente de reculer, grogne, pousse.


— « Putain, arrête ! »


Il s’arrache à elle, souffle, furieux.

Il se retourne.

Mais Lucifer n’est plus debout.

Il est au sol.

Recroquevillé.

Ses mains tremblantes couvrent son torse, ses épaules, son ventre.


Il pleure à chaudes larmes, sans un mot, sans un cri, le visage tourné vers le sol, les yeux rougis de terreur.

Le monde autour continue de tourner.

Mais pour Alastor, tout s’est figé.

Il avance.


Ses pas deviennent lourds, ancrés. Il n’entend plus la musique.

Il ne sent plus la fête.

Il ne voit que lui.

Lucifer. Brisé. Sale. Seul.

Et il comprend, enfin.


J’aurais dû être là. Putain, j'ai merdé. Ça devait être sa première teuf...


Il s’agenouille lentement devant lui.


— « Lucifer… »


Lucifer ne répond pas. Il tremble, encore, incapable d’ouvrir les yeux. Comme s’il avait peur que le toucher d’un autre soit encore celui de ce mec.

Alastor lève une main, hésite.


Et murmure :


— « C'est moi. C'est juste moi... Regarde moi. »


🌃 Scène 28 – “Je veux rentrer.”

Lucifer tremble.

Le sol est dur, froid, étranger.

Il ne sent plus vraiment son corps — juste le vide, juste la peur, juste la honte.


Puis une voix.

Une voix qu’il connaît.

Qu’il déteste, qu’il aime, qu’il n’arrive plus à suivre.


— « C’est moi. Juste moi. »


Un souffle. Un battement. Un soupir.

Et doucement… Lucifer s’effondre contre lui.

Ses bras lâchent prise.

Sa tête chute dans le creux de l’épaule d’Alastor.


Il pleure sans bruit.

Et Alastor l’enlace.

Pas pour le tenir.

Pour le recoller.


Il serre fort. Pas trop fort. Juste assez pour lui dire : “T’es là. Je t’ai.”

Autour, les gens passent. Certains regardent. D’autres s’en fichent.

Mais dans cet instant précis, y’a plus que deux garçons dans le monde.


Lucifer murmure, d’une voix étouffée par les larmes :


— « Je veux rentrer… »


Alastor hoche la tête, sa mâchoire serrée.


— « Je t’emmène. T’inquiète. T’as plus rien à faire ici avec ces connards. »


Il glisse un bras sous ses jambes, l’autre dans son dos, et le soulève sans effort.

Lucifer se laisse faire. Il n’a plus la force de fuir. Plus la force de résister.

Le trajet se fait en silence.

La moto les attend dans la rue.


Alastor l’installe doucement.

Il lui remet le casque, attache la sangle lui-même. Ses mains tremblent un peu.

Il monte. Lucifer s’agrippe à lui comme à une bouée.


Et dans la nuit noire de Los Angeles, ils disparaissent.


💤 Scène 29 – “Tu l’avais laissé traîner, ton verre ?”


La fenêtre s’ouvre doucement, comme un secret glissé dans la nuit.

Alastor passe à l’intérieur de sa chambre sombre, Lucifer toujours dans ses bras.

Il allume une petite lampe, juste assez pour voir sans blesser les yeux.

Son lit est en désordre, ses draps un peu froissés, la pièce sent la nuit et la sueur froide.


Il dépose Lucifer sur le matelas avec une délicatesse qu’on ne lui connaissait pas.

Comme s’il posait quelque chose de cassé.

Lucifer gémit légèrement, les paupières closes, le souffle irrégulier.

Alastor s’assoit à côté de lui, la tête dans les mains. Il panique intérieurement.

Il veut hurler, frapper, remonter le temps. Mais à la place… il reste là. Il souffle. Il serre les dents.


Puis, doucement, il tourne la tête vers lui.


— « Tu l’avais laissé traîner, ton verre ? »


Lucifer ne répond pas. Son regard flotte entre lucidité et fatigue profonde.


— « Quelqu’un a très bien pu y glisser un truc quand tu regardais pas. »


— « J’ai... j’ai rien vu. »


— « Le type là… c’était qui ? »


Lucifer secoue la tête, le front moite.


— « J’sais pas… il était là… et j’étais pas bien. Au début. Après, j'ai eu l'impression de m'évanouir... »


Alastor sent une colère noire monter dans sa gorge.


— « C’était lui. C’est lui qui t’a drogué. Il a dû mettre de l'ecstasy ou de la coke, putain... J'aurais dû être là. J'aurais pû être là... »


Lucifer murmure :

— « Je l’ai pas vu faire. J’étais juste... fatigué. Alastor, c'est pas ta faute... D'accord ? »


Silence.


Alastor baisse les yeux. Il se sent coupable. Terriblement.


— « Et moi j’étais là… en train de danser, de me faire embrasser par une idiote pendant que toi... »


— « Arrête. »


Lucifer a parlé doucement, mais ses yeux se sont ouverts. Rouges. Gonflés. Humides.


— « C’est pas de ta faute. Tu ne pouvais pas savoir. Et puis... T'es là, maintenant. »


Alastor déglutit, mal à l’aise. Il n’est pas habitué à ce genre de douleur. Celle qu’on ne peut pas cogner.


— « Tu veux qu'je reste ? »


Lucifer ferme les yeux. Hésite.


Puis, un souffle.


— « Juste… assieds-toi. Là. Dis rien. »


Alastor hoche la tête. Il s’assoit, le dos contre le mur, les yeux sur lui.


Et le silence s’installe, enfin supportable.


🪒 Scène 30 – “Elles étaient là avant moi.”


La pièce est plongée dans un calme presque irréel.

Le genre de calme qui suit le désastre.


Lucifer est couché sur le lit, les jambes repliées, une main posée sur son ventre.


Son visage semble plus doux maintenant, comme si le sommeil l’avait lavé du reste.


Alastor est toujours assis contre le mur.


Il le regarde.

Il le fixe.

Il ne comprend pas pourquoi il reste là, à scruter le moindre battement de cils.

Puis son regard glisse.

Un poignet.

Découvert.

La manche relevée.


Et là… des traces.


Des cicatrices.

Claires. Beiges. Anciennes.

Parfaites, discrètes… mais impossibles à ignorer.


Alastor fronce les sourcils.


Il penche légèrement la tête, lentement, comme si son corps refusait de voir ce qu’il voit déjà.


— « C’est quoi, ça… »


Un murmure. Pour lui-même.


Son ventre se noue.


Il veut demander. Il veut comprendre.

Mais les yeux de Lucifer restent clos.

Son souffle est lent, calme. Endormi.


Et soudain… c’est pire.

Parce qu’il ne peut pas demander.

Parce qu’il ne peut pas entendre la réponse.

Parce qu’il sait très bien ce que ça pourrait être.


Alastor se redresse.

Il regarde encore une fois ce poignet trop fin.


Et il détourne les yeux.

Sans un mot, il retourne à la fenêtre.

La nuit est fraîche dehors.

Le silence le suit, comme un poids au creux de la gorge.

Il passe une jambe, puis l’autre, se glisse dehors.

Et juste avant de disparaître, il murmure presque sans voix :


— « J’vais pas te laisser t’écrouler. Pas toi. »


Puis il s’en va.

Le vent referme doucement le rideau derrière lui.

Il mettra cette histoire au clair.



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