Sexy Dance (Tome 1)
🥣 Scène 31 - "T'as rêvé de ton prince, c'est ça ?"
La lumière grise du matin filtre à travers les stores en plastique de la petite chambre. Alastor est allongé sur le ventre, une main sur son oreiller, l'autre pendante dans le vide. Ses cheveux en bataille, les draps tordus.
Un réveil clignote en rouge : 07:49.
Il grogne.
Il devrait déjà être debout.
Il s'en fout.
Ses yeux sont ouverts, fixés au plafond.
Et dans sa tête... y'a lui.
Lucifer.
Ses yeux embués.
Son corps tremblant dans ses bras.
Ses larmes.
Et surtout... ce putain de poignet.
Il serre les dents.
- « ALASTOOOOOOR ! »
Un poids s'écrase sur lui.
Il gémit. Lève les yeux.
Isabelle. 8 ans. Boucles brunes, pyjama licorne, sourire jusqu'aux oreilles.
Elle saute sur son dos comme si c'était une tradition.
- « T'as rêvé de ta princesse, c'est ça ?! T'étais tout rouge quand j'suis rentrée ! »
- « C'est pas mon prince. »
- « C'est même pas une princesse ? J'suis déçue. »
Alastor grogne en riant et l'éjecte doucement du lit. Elle retombe sur les coussins au sol.
Il s'assied enfin, frottant ses yeux.
Le poids revient.
Celui de la veille.
Du regard.
Du murmure : "Je veux rentrer."
Il souffle longuement et se lève.
Il s'habille vite, enfile un hoodie noir, secoue ses cheveux devant le miroir fêlé de sa commode.
Il n'arrive pas à se regarder.
Dans la cuisine, une odeur de pain grillé et de café flotte dans l'air.
Sa mère, doux visage fatigué, blouse à fleurs, lui tend un bol :
- « J'allais monter. Tu dors encore ? T'étais pas censé être déjà parti ? »
- « J'suis à la bourre. »
- « Tu veux que je t'excuse ? »
Il hausse les épaules.
Elle le fixe alors. Plus doucement.
- « T'étais où, hier soir ? »
Alastor s'arrête net.
Il regarde son bol.
Puis sa mère.
Elle n'a pas dit ça méchamment. Pas en colère. Juste inquiète.
- « J'ai... ramené quelqu'un chez lui. Il était pas bien. »
Elle fronce les sourcils.
- « Quelqu'un du lycée ? C'est un copain à toi ? »
Il hésite.
- « Ouais. Quelqu'un de... compliqué. »
Silence.
Elle pose une main sur son bras, légère.
- « Alors fais attention à toi aussi, mon cœur. Tu ne peux pas sauver tout le monde. N'oublie pas. »
Il la regarde.
Puis baisse les yeux.
🏫 Scène 32 - "Il ne répond pas."
Le lycée est bruyant. Les couloirs vibrent des voix, des casiers qui claquent, des baskets qui raclent le sol.
Mais dans la tête d'Alastor, c'est le silence.
Assis au fond de la classe, première heure de maths.
Son stylo tourne entre ses doigts, page blanche devant lui.
Les chiffres au tableau se mélangent avec d'autres images.
Lucifer.
Ses larmes.
Ses mains qui tremblent.
Son poignet.
Ses silences.
- « Al ? T'as pigé l'exercice ? »
Husk lui donne un coup de coude, mais Alastor ne bouge pas.
Il fixe la table.
Angel à côté rigole, mâche bruyamment un chewing-gum.
-« Il plane le gars. Tu penses encore à la bombasse d'hier ? Laquelle, d'ailleurs ? La rousse ? Ou le mec efféminé chelou que t'as ramené sur ta moto ? »
Alastor lève les yeux.
Un regard noir.
Le genre qui coupe les rires nets.
Angel se tait, surpris.
L'intercours sonne.
Alastor se lève avant tout le monde. Il traverse le couloir en ignorant les appels d'Husk derrière lui.
- « Wesh, tu vas où ? »
Il répond pas.
Il descend un escalier, contourne la cour, longe les grandes baies vitrées.
Il les trouve près des distributeurs, à leur endroit habituel.
Charlie et Vaggie.
Charlie a son sac rose fluo en bandoulière, Vaggie en noir et jean déchiré, les cheveux tirés en chignon.
Elles discutent à voix basse. Charlie a l'air tracassée.
Alastor s'approche.
- « Vous l'avez vu ce matin ? »
Vaggie arque un sourcil. Charlie le fixe, un peu méfiante.
- « Qui ça ? »
Il les regarde. Sérieux. Tendu.
- « Lucifer. »
Les deux échangent un regard.
Charlie secoue la tête.
- « Non. Il est pas venu. »
- « Il répond pas non plus. J'ai envoyé au moins cinq messages. »
Vaggie croise les bras, le regard dur.
- « Il répond à personne. Même pas à nous. Et on le connaît, c'est pas son genre. »
Charlie ajoute, plus inquiète :
- « On pense qu'il est resté chez lui. Peut-être malade. Ou... épuisé. C'est bizarre. »
Alastor reste silencieux.
Il sait pourquoi il ne répond pas.
Il sait ce qu'il s'est passé.
Mais il ne dit rien.
Pas par honte.
Par respect.
Il hoche simplement la tête.
- « Merci. »
Il tourne les talons sans autre mot.
Il marche vite. Son cœur bat plus fort.
Il sait très bien où aller.
Et il n'est pas question de rester là à rien faire.
🔵 Scène 33 - "Montre-moi ça."
Alastor longeait déjà le mur du lycée avant même que la cloche sonne.
Il avait pris son sac et s'était tiré sans un mot, les mains dans les poches, le cœur en feu.
Il connaissait le chemin.
Chaque coin. Chaque rebord du trottoir.
Et maintenant il était là, dans le quartier parfait, propre, froid, trop silencieux.
À l'arrière du bâtiment.
Devant la fenêtre ouverte d'un certain deuxième étage.
Un souffle. Un saut.
Ses pieds atterrissent dans la chambre de Lucifer, sur la moquette moelleuse aux couleurs trop sobres.
- « Lucifer ? »
Personne.
Rideaux tirés. Silence.
Et soudain... une silhouette jaillit de derrière le lit.
Lucifer.
Il lui saute dans les bras. Fort. Brutal. Inattendu.
Alastor se fige.
Il n'aime pas ça.
Les câlins. Les gestes collés. Le contact prolongé.
Mais c'est Lucifer.
Et là, il rit doucement. Il respire vite. Il est en vie.
- « T'es venu... Tu m'as trouvé... »
Alastor grogne, faussement agacé, mais un sourire lui échappe.
- « Oh merde, Lucifer... Pourquoi t'étais pas là aujourd'hui ? Je me suis inquiété avec tes potes ! »
Lucifer le serre encore plus fort.
- « Chut, chut... Faut pas que mes parents entendent que je parle avec quelqu'un. Ils m'ont déjà assez engueulé comme ça... »
Alastor fronce les sourcils.
- « De quoi tu parles, chéri ? »
Lucifer lui attrape la main et le traîne doucement vers le lit.
Ils s'asseyent.
- « Ce matin... ils m'ont vu. Ma gueule de bois. Mes fringues de la veille. C'était prévisible. Ils n'ont pas aimé... du tout. »
Il marque une pause.
Puis, sans un mot... il retire ses lunettes de soleil.
Et Alastor voit en écarquillant grand ses yeux.
Le bleu. Violacé. Net. Sous l'œil rouge, déjà gonflé.
Il se fige. Son sang se glace.
- « Qui t'a fait ça ? »
Lucifer baisse les yeux. Il ne dit rien.
Alastor lui attrape doucement le menton, le regarde en face. Il n'espère pas être en face d'un enfant martyrisé lui aussi par son père.
- « C'est qui ? Lucifer, dis-moi que c'est pas ton père. Je t'en prie, dis-moi que c'est pas... »
Lucifer ne répond pas.
Il ne nie pas non plus.
Alastor met deux doigts sur le bleu, tendrement, Lucifer dépose alors sa main sur la sienne. Le regard d'Alastor n'est plus amusé. Plus arrogant. Il est fendu.
- « J'vais pas laisser passer ça, Lucifer. »
Le danseur sourit, triste.
- « C'est mignon, t'as l'air sincèrement vénère. »
Alastor serre les dents.
- « J'suis pas "vénère". J'suis furieux. »
Lucifer ferme les yeux et pose sa tête contre son épaule.
- « T'es venu pour moi. »
- « Évidemment. »
💋 Scène 34 - "J'ai jamais embrassé personne."
La chambre est calme.
Le silence flotte comme un drap tendu entre deux cœurs qui battent trop fort.
Alastor n'a pas bougé.
Lucifer est toujours contre lui, la tête posée sur son épaule, et lui, il garde sa main contre ce visage abîmé qu'il voudrait protéger du monde entier.
La lumière du jour filtre entre les rideaux, teintant les murs d'un gris doux.
On n'entend que leur respiration, un peu irrégulière.
Puis, lentement... Lucifer relève la tête.
Ses yeux sont rouges, encore un peu humides, mais ils brillent différemment.
Moins de tristesse. Plus d'envie. D'un truc qu'il comprend pas encore.
Leur regard se croise.
Et aucun des deux ne parle.
Pas besoin.
Lucifer s'approche un peu plus.
Leurs fronts se frôlent.
Et là, Alastor sent quelque chose changer.
Un souffle plus court.
Un frisson qu'il n'arrive pas à cacher.
Lucifer ferme les yeux une seconde.
Son front contre celui d'Alastor.
Ses doigts tremblent.
Il ouvre la bouche. Un souffle. Un murmure.
- « J'ai jamais... jamais embrassé quelqu'un. »
Alastor cligne des yeux.
Il sent son cœur rater un battement.
Il comprend. Parfaitement.
Alors il ne rit pas.
Il ne fait pas de commentaire.
Il reste là. Calme. Sûr. Présent.
Sa main monte lentement, remonte le long du bras de Lucifer, jusqu'à effleurer sa nuque, doucement. Il penche un peu la tête, juste assez.
Et dans un souffle grave, bas, presque rauque, il murmure :
- « Tu veux... qu'on essaie ? »
Lucifer ne répond pas tout de suite. Il hésite. Il a peur. Mais il ne s'écarte pas.
- « Oui... mais... je... je sais pas comment faire. »
Alastor esquisse un sourire discret.
- « C'est pas grave. C'est pas un devoir, t'sais. C'est juste... toi et moi. Je te jugerai pas si t'y arrives ou non. »
Lucifer inspire lentement.
Ses paupières sont mi-closes.
Son souffle caresse déjà la lèvre d'Alastor.
Et alors, dans un geste infiniment lent, Alastor comble les derniers centimètres.
Leurs lèvres se touchent.
C'est pas une explosion.
C'est pas un feu d'artifice.
C'est un frisson, chaud, désordonné, profondément humain.
Lucifer laisse échapper un petit son, comme un soupir qu'il n'a pas pu retenir.
Sa main s'agrippe au t-shirt d'Alastor.
Ses lèvres sont maladroites, un peu tremblantes, mais sincères.
Alastor prend son temps.
Il l'aide sans diriger.
Il l'accueille.
Ils se détachent un instant.
Lucifer a les joues rouges.
Le souffle court.
Mais il sourit.
- « C'était... bizarre. Mais... bien bizarre. Je veux dire... J'aime bien. »
Alastor rit doucement.
- « Ça va s'arranger si tu pratiques. »
Lucifer lève les yeux au ciel, faussement exaspéré.
Ils se sourient.
Et le silence revient. Mais cette fois... il est léger.
Plein de promesses.
❤️🩹 Scène 35 - "Colère contenue"
Le silence venait à peine de se dissiper, alourdi par la proximité et le baiser échangé, quand Alastor s'était levé d'un geste sec.
Trop sec.
Comme s'il voulait arracher quelque chose de lui-même.
Lucifer le regarda, surpris, encore assis sur le lit, les joues rouges.
- « Alastor ? »
- « J'vais les buter maintenant. »
Le ton était froid, plat. Trop calme pour être honnête.
Il parlait de ses parents.
Ceux qui lui avaient mis ce bleu sous l'œil.
Lucifer se redressa un peu, nerveux.
- « Non... Tu vas rien faire. Tu peux pas débarquer comme ça chez moi et- »
Alastor se tourne, les yeux noirs d'une colère brûlante.
- « Pourquoi ? Tu crois que j'vais les laisser continuer ?! J'vais leur faire comprendre qu'on touche pas à un gamin, ok ? Jamais. Surtout pas toi. »
Lucifer blêmit.
- « Non... Non, Alastor, s'il te plaît ! Écoute moi ! »
- « Ah ouais, tu veux que je t'écoute ? Tu crois qu'ils vont arrêter si je fais rien ? T'attends quoi, une deuxième claque ? Un bras en moins ? »
Il est déjà près de la fenêtre.
Lucifer panique.
- « Alastor, s'il te plaît. Si tu m'aimes un tout petit peu, reste. Dis rien. C'est pas la solution. »
Alastor s'arrête net.
Son dos est tendu.
Il reste immobile un long moment.
Puis, dans un souffle presque cassé :
- « J'sais même pas si t'es sérieux. J'sais pas pourquoi t'as fait ça. Le baiser. Et j'peux pas rester si j'ai pas de réponse. »
Lucifer murmure, presque inaudible :
- « Parce que t'es la seule personne avec qui je me sens en sécurité. »
Lucifer baisse les yeux, sa mâchoire tremble. Il se lève à son tour, les mains légèrement levées, comme pour approcher un animal blessé.
- « C'est pas la solution, Alastor... Si tu fais ça, ils vont devenir pires. Ils vont me couper les vivres. M'enfermer. M'envoyer dans un putain d'internat ou chez un psy. »
Mais Alastor n'écoute plus.
Il est déjà à deux pas de la fenêtre, les mains tremblantes, la respiration saccadée.
- « J'te jure que si je redescends dans cette rue, j'monte les escaliers de cet appartement et je leur éclate la gueule. »
Lucifer panique. Il fait deux pas, rapides, et l'attrape par le bras.
- « Arrête. T'as pas à me sauver, Al. Pas comme ça. Pas avec la violence. »
Alastor pivote, violemment, prêt à lui dire de le lâcher - mais Lucifer tire plus fort.
Et d'un geste sec, tremblant lui aussi, il l'attire contre lui.
Leurs torses se touchent.
Leurs respirations s'entremêlent.
Les deux battent à un rythme aussi rapide que désaccordé.
Lucifer murmure :
- « Arrête de bouger. Reste là. Juste... reste là. »
Alastor reste figé un instant, comme s'il ne savait plus respirer.
Ses bras tendus, durs, prêts à cogner... se détendent. Lentement.
Il ferme les yeux.
Le front contre l'épaule de Lucifer.
Un souffle. Un frisson.
Lucifer passe une main dans ses cheveux.
- « Tu me protèges déjà... Rien qu'en étant là. Pas besoin de cogner. »
Alastor soupire, brisé, fatigué, comme s'il rendait les armes.
Il murmure dans le creux de sa nuque :
- « J'te jure... si jamais ils recommencent, Lucifer... Je pourrais pas me contenir. S'ils reposent la main sur toi... Rien que cette idée me donne envie de vomir. »
Lucifer hoche doucement la tête contre lui.
- « Je sais. Mais là, maintenant... j'ai besoin que tu restes. »
Et ils restent.
Collés.
En silence.
Deux corps trop différents, deux vies opposées... mais pour une minute entière, parfaitement alignés.
Alastor était resté là. Immobile.
Lucifer dans ses bras.
Le souffle contre son cou.
La chaleur de son corps collée au sien.
Et pendant quelques secondes, il aurait voulu que rien ne bouge.
Que personne ne frappe à la porte.
Que personne ne les voit.
Que ce moment reste là, hors du monde.
Mais son cœur battait trop vite.
Trop fort.
Et Lucifer leva les yeux vers lui.
Juste un peu.
Son menton posé contre sa poitrine.
Son regard ancré dans le sien.
Trop de douceur. Trop de vérité. Trop d'envie.
Lucifer entrouvrit les lèvres.
Juste un peu.
Son souffle effleura la bouche d'Alastor.
Et le monde sembla ralentir.
Alastor baissa les yeux vers lui.
Ses doigts tremblaient un peu sur le dos du blond.
Il aurait pu être tenté. Il le voulait. Dieu, il le voulait tellement.
Mais il détourna le visage.
À la toute dernière seconde.
Il ferma les yeux.
- « Pas encore. »
Lucifer le fixa, interdit.
- « Quoi ? »
- « Si j't'embrasse là, maintenant... J'saurai plus si c'est moi que tu veux... ou juste quelqu'un qui t'écoute enfin. »
Lucifer reste figé.
Touché.
Pas vexé. Mais surpris.
Il comprend.
Alors il hoche doucement la tête. Et murmure, dans un souffle sincère :
- « Alors reste. Mais reste... pour moi. Même sans les baisers. »
Alastor esquisse un sourire.
- « T'as de la chance que je sois curieux. »
Lucifer se laisse aller à un petit rire, léger.
Et ils restent là, front contre front, sans un mot de plus.
Les cœurs battant trop fort pour oser briser le silence.
🍰 Scène 36 - "Visite imprévue"
Lucifer s'était détendu.
Enfin.
Alastor et lui étaient assis côte à côte sur le lit, les jambes qui se touchaient à peine.
Le silence était revenu, ni pesant, ni gênant, juste... fragile. Suspendu.
Mais alors que Lucifer allait ouvrir la bouche pour dire quelque chose, une voix retentit en bas de l'escalier.
- « Lucifer ! C'est ta copine Charlie qui est là ! »
Lucifer se figea.
Alastor aussi.
Ils se regardent.
Une seconde de panique silencieuse.
Lucifer bondit du lit, attrape un sweat, le jette sur Alastor à moitié assis :
- « Mets ça. Cache ton visage. Non. Ton T-SHIRT ! D'abord ton t-shirt ! »
Alastor le regarde, blasé :
- « Calme-toi, chéri, j'ai pas tué quelqu'un. »
- « Non, juste brisé toute forme de logique sociale dans mon monde. »
Des bruits de pas.
Des talons.
Une voix féminine, enthousiaste :
- « Luluuuuuuu ! J'ai apporté les muffins au matcha que t'adoooores ! »
Lucifer grimace.
Il n'a pas le temps de réagir : la porte s'ouvre.
Et là, dans l'embrasure, Charlie s'arrête net.
Elle tient une boîte rose pastel.
Elle porte une jupe plissée beige, un polo blanc impeccable.
Ses cheveux sont parfaitement coiffés.
Et devant elle : Alastor.
Debout. Dans la chambre de Lucifer.
Le sweat sur les épaules, l'air un peu défait, les cheveux en bataille.
Charlie cligne des yeux.
- « Euh... »
Lucifer se racle la gorge.
- « Salut, Charlie. Surprise. »
Charlie plisse les yeux.
- « Alastor ? Genre... Alastor Alastor ? Celui du 9e ? Le gars qui a traité mon sac de 'crapaud de luxe' en début d'année ? »
Alastor se gratte la nuque, un sourire en coin :
- « T'as fini par le changer, au moins. »
Charlie ne sait pas si elle doit rire ou frapper.
Lucifer intervient, les bras croisés :
- « Il était juste venu me... passer un message. De la part du lycée. Voilà. »
Charlie hausse un sourcil.
Elle entre, lentement, pose sa boîte.
- « Et le message, il dure combien de temps ? Une nuit complète et une matinée d'école ? »
Lucifer rougit violemment.
Alastor étouffe un rire derrière sa main.
- « C'est pas ce que tu crois. »
- « T'es sûr ? Parce que moi j'crois beaucoup de choses, Lucifer. »
Lucifer soupire. Il s'approche, lui prend doucement le bras.
- « Je t'explique. Mais... doucement. Et sans jugement. »
Charlie le regarde.
Puis son regard glisse vers Alastor.
Puis de nouveau vers Lucifer.
Et elle dit, doucement :
- « Est-ce que tu vas bien ? »
Lucifer cligne des yeux. Surprise.
Il hoche la tête.
- « Ouais... grâce à lui. »
Charlie se détend.
Puis elle sourit.
- « Bon. Alors je t'écoute. Mais je garde les muffins. T'as pas intérêt à me faire pleurer, sinon je les mange tous. »
Alastor s'allonge de nouveau sur le lit, les bras derrière la tête.
- « J'veux bien en goûter un, moi. »
Charlie le regarde comme une bête curieuse.
- « Toi tu vas gagner ma tolérance millimètre par millimètre. »
- « J'aime bien les défis. »
Lucifer, lui, sourit.
Un peu amusé.
Un peu rassuré.
Et surtout...
plus seul du tout.
🫦 Scène 37 - "Rouge comme un diable"
Le téléphone d'Alastor vibra.
Il était posé sur le bureau. L'écran s'illumina : « M'man ».
Il fronça les sourcils, le décrocha aussitôt.
- « Allô ?... Quoi ? Qu'est-ce qui s'est passé ?... »
Lucifer et Charlie échangèrent un regard inquiet.
Alastor reprit, d'un ton sec :
- « Elle s'est blessée ?! Mais comment ?... Ah. Juste une entorse ? Bon... J'y vais. J'en ai pour dix minutes. Merci. Je t'aime. À ce soir. »
Il raccrocha, l'air déjà en train de se lever.
- « Ma sœur s'est blessée en sport. L'école a appelé ma mère, mais elle est au taff jusqu'à tard. Faut que j'aille la chercher. »
- « Tu as une sœur ? » demande Lucifer, à moitié inquiet et intrigué.
- « Oui. Elle a 8 ans. Tu la rencontreras peut-être un jour si elle nous fait l'honneur de sortir de sa chambre de princesse licorne un jour. »
Lucifer s'était levé lui aussi. Il le raccompagna jusqu'à la fenêtre.
Alastor enfilait son t-shirt à moitié quand il s'arrêta, jeta un coup d'œil à son sweat resté dans les mains de Lucifer.
- « Garde-le. Tu l'as mis, il est à toi maintenant. Je te le donne avec plaisir, t'auras mon odeur à portée de main si besoin. Ça va aller ? »
Lucifer baissa les yeux sur le vêtement, surpris. Un vêtement large, qui sentait encore son parfum sucré mélangée à l'odeur de ses quartiers.
- « Lucifer, j'suis sérieux, est-ce que ça ira si je pars ? Tu fais pas de conneries, hein ? » dit Alastor en repensant aux cicatrices sur ses poignets.
- « Oui, bien sûr ! Tu m'envoies un message au 07. 13 .57 .37 .11, quand tu auras fini avec ta sœur. Je voudrai bien savoir comment ça se sera passé. D'accord ? »
- « Je le ferai, compte sur moi »
Lucifer releva les yeux pour répondre, mais Alastor était déjà sur le rebord de la fenêtre.
- « On se voit demain, chéri. »
Et il disparut, sans attendre de réponse.
Charlie s'était tue jusque-là.
Mais dès qu'Alastor fut hors de vue, elle croisa les bras et planta son regard dans celui de Lucifer.
- « Alors ? Tu comptes me dire pourquoi tu ressembles à une tomate dès qu'il t'adresse la parole ? »
Lucifer, qui portait toujours le sweat contre lui, releva la tête d'un air faussement innocent.
- « Hein ? Je sais pas de quoi tu parles. »
Charlie leva un sourcil. Très haut.
- « Bien sûr. Je ne suis pas née de la dernière pluie. Tu t'es regardé dans un miroir ? Tu fonds dès qu'il ouvre la bouche. C'est pas un crush, c'est une noyade. »
Lucifer recula légèrement, le rouge aux joues :
- « C'est pas vrai... »
- « C'est un terminale, Lu. Toi t'es en seconde. C'est littéralement un homme face à un bébé canard nerveux. »
Lucifer tourna la tête, mal à l'aise.
Charlie pencha la tête, une moue moqueuse au coin des lèvres.
- « Aaaahhh... Attends. »
Elle plissa les yeux, se rapprocha.
- « T'es pas rouge parce qu'il te plaît... t'es rouge parce que t'as FAIT un truc. »
Lucifer ouvrit la bouche.
Mais trop tard.
- « Je le savais ! TU L'AS EMBRASSÉ, AVOUE LE ! »
- « Charlie- »
- « Je suis ta meilleure amie, tu PEUX PAS me cacher ça ! »
Lucifer attrapa un coussin et se le mit sur la tête.
- « C'est toi qui me saoule là... »
- « Dis-moi que c'était un vrai baiser. Genre... sur la bouche. Et pas juste un câlin bizarre. »
- « Charlie ! »
- « Oh mon dieu C'ÉTAIT VRAI ! »
Elle explosa de rire, s'écroulant à moitié sur le lit.
Lucifer la repoussa doucement, le visage toujours écarlate.
Charlie se calma un peu, le souffle court, les yeux brillants.
- « Bon, sérieux maintenant... T'as l'air heureux. C'est nouveau, et ça te va bien. J'espère que ça se passera bien entre vous si vous sortez ensemble. »
Lucifer se figea.
Puis il esquissa un petit sourire.
- « J'sais pas encore ce que c'est. Mais... ouais. C'est différent. »
Charlie hocha doucement la tête.
- « Promets-moi juste que tu vas pas tout garder pour toi, comme d'habitude. Et que tu vas pas te faire mal dans l'histoire. »
Lucifer la regarda, sincèrement touché.
- « Promis. »
💕 Scène 38 – “Petite sœur, gros cœur”
Le casque vissé sur la tête, Alastor slalomait entre les voitures.
Son sweat lui manquait déjà, sans qu’il veuille vraiment l’admettre.
Il repensait au regard de Lucifer, à sa voix quand il lui avait dit :
Tu l’as mis, il est à toi maintenant.
Un truc con. Mais il l’avait dit sans réfléchir.
Et maintenant ? Bah il y pensait comme un débile amoureux.
Il freina net devant l’école primaire.
Dans la cour, une surveillante lui indiqua l’entrée de l’infirmerie, un peu surprise de voir un ado en casque et en débardeur débarquer aussi vite.
— « Tu viens chercher Isabelle Turner ? »
— « Ouaip. C’est ma sœur. »
— « Elle s’est foulée la cheville en sautant les escaliers. Encore. »
Alastor soupira en secouant la tête.
Il entre dans l’infirmerie… et son regard s’adoucit immédiatement.
Isabelle, 8 ans, cheveux bouclés et un pansement ridicule sur la cheville, était assise sur un petit lit, en train de manger un gâteau.
Elle leva les yeux et s’écria :
— « Al !!! »
— « Salut tornade. T’as encore voulu faire du parkour dans la cour ou quoi ? »
Elle rit.
— « J’avais parié avec Niffty que je pouvais sauter deux marches d’un coup. J’ai gagné… mais j’ai perdu ma cheville. »
— « Logique. Allez, viens. J’te ramène. »
Il la prit dans ses bras, la portant comme une plume.
Isabelle passa ses bras autour de son cou, puis lui souffla à l’oreille :
— « T’es bizarre aujourd’hui. »
Alastor arqua un sourcil en l’installant doucement à l’arrière de sa moto, casquée comme une pro.
— « Qu’est-ce que t’entends par “bizarre” ? »
— « Je sais pas. On dirait que tu souris tout seul. Et t’as ce regard-là… comme dans les films. Quand le héros il pense à sa copine. »
Alastor haussa un sourcil, mi-blasé mi-touché.
— « C’est pas une copine. »
— « C’est un garçon ? »
Il roula des yeux.
— « T’es trop futée pour ton âge. »
— « Il est mignon ? »
Alastor soupira profondément.
Mais au fond, il souriait.
— « Trop, ouais. »
Elle hocha la tête, comme si elle approuvait le casting de son grand frère.
— « Alors invite-le à manger une glace avec nous un jour. Je veux voir s’il est gentil. »
— « Un jour. Peut-être. »
Et sur ces mots, il démarra la moto.
Le vent dans les cheveux.
Sa sœur dans le dos.
Et Lucifer dans la tête.
🌈 Scène 39 – “Et il est beau, ton copain ?”
L’appartement sentait le sucre et le linge propre.
En revenant à la maison, Alastor avait porté Isabelle jusque sur le canapé, puis dans son lit quand elle commença à piquer du nez devant un dessin animé.
Il la borda doucement, assise dans son petit lit à barreaux blanc décoré de stickers mal collés et d’une guirlande lumineuse rose.
— « Tu veux que j’te laisse la porte entrouverte ? »
— « Non, reste encore un peu… »
Alastor soupira, mais il s’assit à côté d’elle.
Isabelle croisa les bras, le regarda fixement.
— « Tu l’aimes, hein ? »
— « Quoi ? »
— « Le garçon à qui t’as donné ton pull. C'est pas pour rien que t'es en débardeur. T'aimes pas montrer les cicatrices que papa t'a faites d'habitude. »
Alastor leva les yeux au ciel.
— « C’est pas ce que tu crois. »
— « Mais tu lui as donné ton pull. Et tu pensais à lui en moto. Je t’ai senti sourire. »
Il baissa la tête, gêné.
— « C’est compliqué. »
— « Il est gentil avec toi ? »
Cette question.
Simple. Douce. Tellement innocente.
Alastor ne répondit pas tout de suite.
Puis, à voix basse :
— « Ouais. Il me regarde comme si j’étais pas un raté. C’est... bizarre. »
Isabelle sourit, les yeux brillants.
— « Et il est beau ? »
Alastor la regarda, abasourdi.
— « C’est ça la question importante pour toi ? »
— « Bah ouais ! Si c’est mon futur beau-frère, faut qu’il soit canon ! »
Il explosa de rire, étouffé pour ne pas réveiller tout l’immeuble.
— « Dors maintenant. T’as assez posé de questions pour aujourd’hui. »
Elle hocha la tête, mais attrapa sa main avant de fermer les yeux.
— « T’as le droit d’être heureux, Al. Même si c’est bizarre. »
Alastor resta là un instant, figé.
Puis il se pencha doucement pour lui embrasser le front.
— « Dors bien, microbe. »
Il sortit sur la pointe des pieds et referma la porte en silence.
Dans le couloir, il s’appuya un instant contre le mur, les yeux vers le plafond.
Son cœur battait encore trop vite.
Il sortit son téléphone. Hésita.
Puis appuya sur le nom : Lucifer 💛🔥
Il colla l’appareil contre son oreille.
Une sonnerie. Deux. Trois.
Puis une voix familière, un peu fatiguée, mais calme :
— « Allô ? »
Alastor sourit sans s’en rendre compte.
— « C’est moi. Comme promis. »
Un petit silence. Puis la réponse, presque timide :
— « J’attendais ton appel. »
📞 Scène 40 – “Appel du soir”
Lucifer était allongé sur son lit, les yeux fixés sur le plafond de sa chambre luxueuse, plongée dans une pénombre violette.
Les rideaux tirés laissaient passer quelques traînées de lumière du soir.
Il tenait son téléphone contre son oreille. Et dans son oreille, la voix d’Alastor.
— « C’est moi. Comme promis. »
Lucifer ferma un instant les yeux, rassuré.
— « J’attendais ton appel. »
Un petit silence. Pas pesant. Juste... suspendu.
— « Elle va bien ? » demanda Lucifer doucement.
— « Ouais. Elle s’est foulé la cheville. Rien de méchant. Elle a juste besoin de faire la princesse pendant trois jours. »
Lucifer esquissa un sourire.
— « On peut comprendre d'où elle peut le tenir. »
— « T’insinues que j’suis capricieux ? »
— « Non. Mais t’as le charisme d’un prince Disney quand t’arrives par une fenêtre. »
Alastor éclata d’un petit rire grave.
— « J’vais le prendre comme un compliment. Même si j’sais toujours pas ce que j’fous dans ta tête. »
Lucifer serra le téléphone un peu plus fort.
— « Tu fais pas que “être dans ma tête”. »
L’autre côté du fil resta silencieux quelques secondes.
Puis Alastor souffla :
— « Je pense qu’à toi. Depuis hier. Depuis la moto. Depuis... bien avant, en fait. »
Lucifer s’assit sur son lit, les jambes croisées.
— « J’sais pas si c’est une bonne chose. Je suis compliqué. »
— « Et moi j’suis censé être simple ? J’ai séché les cours pour te voir ce matin, chéri. J’ai pas fait ça depuis que j’suis en première. »
Lucifer sourit doucement.
— « Je sais même pas ce qu’on est. »
— « Moi non plus. Mais je m’en fous un peu. J'ai pas besoin d'étiquettes. »
Un silence. Puis Lucifer murmura :
— « J’ai toujours peur de tout gâcher. »
— « Alors gâche rien. Sois juste là. Et laisse-moi être là aussi. »
Un instant passe.
Lucifer ferma les yeux et se laissa tomber en arrière sur le lit, toujours avec le téléphone contre son oreille.
— « Est-ce que tu vas t’endormir au téléphone avec moi comme dans les films ? »
Alastor rit doucement.
— « Si t’arrêtes de poser des questions aussi niaises, peut-être. »
— « T’as qu’à raccrocher, dans ce cas. »
— « Non. Je veux t’entendre respirer encore un peu. »
Lucifer sentit sa gorge se serrer.
— « Bonne nuit, Alastor. »
— « Bonne nuit, chéri. »
Et aucun des deux ne raccrocha tout de suite.