Sexy Dance (Tome 1)

Chapitre 5 : La famille d'Alastor

6234 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 14/08/2025 14:08

Scène 41 – “Chéri, t’es en avance”


Le soleil tapait doucement sur les grilles du lycée.

La cour était encore calme, les élèves arrivaient en grappes, certains à moitié endormis, d’autres trop énergiques pour 8h du matin.


Lucifer arriva à pied, casque sur les oreilles, sac bien droit sur l’épaule. Il passa la porte du lycée en relevant à peine les yeux.


Mais il n’avait pas besoin de regarder. Il le sentit.


— « T’es en avance, chéri. »


Alastor, adossé à un muret, l’attendait déjà. Son casque de moto accroché à son sac. Il avait ce sourire en coin, celui qui agaçait Lucifer autant qu’il l’attirait.


Lucifer leva les yeux au ciel :


— « Tu vas m’appeler comme ça tous les jours ? »


— « Jusqu’à ce que tu me supplie d’arrêter. Ou pas. »


Lucifer pinça les lèvres, l’air de vouloir répondre quelque chose…

Mais il détourna le regard, les joues légèrement rosées.


Alastor le regarda un instant. Puis, sans prévenir, il attrapa lanière du sac de Lucifer et l’ajusta sur son épaule.


— « Tu tiens ton sac comme si tu partais à l’armée. Détends-toi. »


— « C’est mon style. »


— « Ton style a besoin d’un café. »


Lucifer arqua un sourcil, surpris.


— « Tu m’invites au distributeur, là ? C’est ton plan de drague ? »


— « T’es dans ma tête depuis deux jours. C’est pas un plan de drague, c’est une tentative de survie. »


Lucifer baissa les yeux, incapable de retenir un petit sourire nerveux.


Ils marchèrent côte à côte dans les couloirs.

Quelques regards se tournaient vers eux. Pas forcément méchants, mais… intrigués.


Charlie les aperçut au bout du couloir et leva un pouce dans leur direction, en mode “je savais que vous finiriez par marcher ensemble comme dans un teen drama cheap”.

Lucifer roula des yeux. Alastor lui fit un clin d’œil.


Ils arrivèrent devant le distributeur. Alastor appuya sur la touche pour un chocolat chaud.


— « Je t’offre une boisson chaude, et en échange, tu me fais un sourire sincère. »


— « J’ai pas signé ce contrat. »


— « J’le fabrique. Maintenant souris. »


Lucifer prit le gobelet tiède, le fixa un moment. Puis releva lentement les yeux vers Alastor.

Un demi-sourire étira ses lèvres.


— « C’est bon ? T’as ton quota pour la journée ? »


— « Pas encore. »


Et sans prévenir, Alastor vint lui voler un baiser.

Bref. Léger. Mais vrai.


Lucifer resta figé. Puis il murmura :


— « Tu vas me rendre fou. »


Alastor sourit plus largement.


— « C’est l’idée, chéri. »


Scène 42 – “Tu vas pas me faire le coup du partenaire motivé, si ?”


Studio de danse – 11h15


Le parquet brillait sous les néons du plafond.

Dans le silence du studio, Lucifer faisait quelques pas lents, seul au centre. Il était en tenue noire, sobre, classe, concentré. Un clip dans ses cheveux pour ne pas être gêné, ses écouteurs autour du cou.


Il vérifiait la playlist sur la sono, puis tourna la tête à l’entrée.


Alastor venait d’arriver.


Pas en retard. Pas en train de traîner.

En t-shirt noir ajusté, pantalon fluide anthracite, et baskets de danse noires, propres. Il avait fait l’effort. Il suait un peu déjà, preuve qu’il s’était échauffé en silence dans un coin avant de venir.


Lucifer ne put s’empêcher de le fixer une demi-seconde de plus.

Mais il reprit vite son masque neutre :


— « T’as mis des vraies chaussures. Je suis impressionné. »


— « T’as failli mettre “impressionné” et “moi” dans la même phrase. C’est beau. »


Lucifer ignora la remarque, prit sa télécommande et lança la musique.

Il se plaça au centre.


— « Aujourd’hui on bosse le porté. Si tu rates encore, tu sors de ce projet. »


Alastor leva un sourcil.


— « Menace acceptée. »


— « Alastor. » La voix de Lucifer se fit plus sèche, autoritaire.

Il n’était plus “le mec qu’il taquine”. Il était “le chef du projet”.


Alastor redressa la posture, plus sérieux.


Lucifer entama la chorégraphie.

Des pas classiques, précis. Il glissait sur le sol avec aisance.

Alastor suivait, un peu moins fluide, mais clairement plus concentré que jamais. Il faisait des efforts. Il respectait le tempo. Il lisait le corps de Lucifer.


Le moment du porté arriva.

Lucifer s’élança, tournant sur lui-même avant de bondir.


Et Alastor le rattrapa. Parfaitement.


Ses bras musclés le soutenaient avec douceur.

Lucifer resta un instant dans les airs, suspendu, le souffle coupé.


— « Pas mal... » souffla-t-il, surpris.


— « T’as dit “pas mal” ? Attends j’fais une croix dans mon calendrier. »


Lucifer descendit lentement, ses pieds retrouvant le sol.

Mais leurs torses restaient presque collés.


— « Tu vas pas me faire le coup du partenaire motivé, si ? »


— « J’vais faire bien pire. Je vais être bon. Et tu vas plus jamais vouloir danser avec personne d’autre. »


Lucifer leva les yeux au ciel, tentant de cacher un sourire.


Il recula de quelques pas, reprit sa télécommande.


— « Encore une fois. Cette fois, t’essaies pas de me mater en même temps. »


— « Trop tard, chéri. »


Lucifer lança la musique à nouveau.


Mais il souriait.


Scène 43 – “J’te ramène. Comme d’hab.”


Fin de cours. Le studio est presque vide.


Lucifer refermait la porte du local à sono, une serviette sur l’épaule, les cheveux un peu humides de sueur. Il semblait concentré… ou du moins, il faisait tout pour le paraître.


Alastor, lui, s’adossait au mur près de la sortie, son sac en bandoulière, les cheveux en bataille. Il mâchouillait un chewing-gum, l’air plus calme que d’habitude.


— « C’était bien aujourd’hui. »


Lucifer haussa un sourcil.


— « Tu veux une médaille pour m’avoir pas fait tomber ? »


— « T’avoues que j’ai géré. »

Un sourire en coin.

— « Donc ouais, je veux une médaille. Ou un bisou. Je prends les deux. »


Lucifer souffla par le nez, amusé malgré lui. Il attrapa son sac et passa devant lui.


— « T’as pas fini de t’écouter parler, toi. »


— « Et toi, t’as pas oublié que j’ai une moto garée juste là. Je te ramène. Comme d’hab. »


Lucifer se retourna un peu, arquant un sourcil, un rien moqueur.


— « Tu dis ça comme si c’était une routine. »


— « C’est en train d’en devenir une. »


Silence.


Lucifer détourna les yeux, mais son petit sourire en coin parlait pour lui.

Il baissa la tête, réajusta sa veste fine.


— « J’espère que t’as pris le casque rouge. Le noir me décoiffe. »


Alastor rigola doucement et sortit son trousseau de clés :


— « Il est sous la selle. J’t’ai dit que je gérais. »


Ils quittèrent ensemble la salle de danse, côte à côte.


Et dans les couloirs, quelques regards suivaient leur démarche synchrone, leurs épaules presque qui se frôlaient.

Mais ni l’un ni l’autre n’y prêta attention.


Lucifer s’habitue.

Et Alastor... aussi.


Scène 44 – “C’est qui lui ?!”


Le moteur de la moto s’éteignit dans l’allée.

Alastor enleva son casque, le jeta nonchalamment contre le mur du garage, puis tendit la main à Lucifer pour récupérer le sien.

Lucifer descendit avec élégance, remettant aussitôt en place ses mèches de cheveux décoiffées par la route.


— « T’as roulé comme un taré, t’es au courant ? »


— « C’est faux. J’ai juste voulu te décoiffer. Mission accomplie. »


Lucifer leva les yeux au ciel.


Ils entrèrent par la porte latérale, celle qu’Alastor utilise quand sa mère n’est pas là. La maison était calme, simple, mais vivante : des dessins d’enfant sur le frigo, un panier de linge propre posé sur une chaise, une odeur discrète de lessive dans l’air.


La porte claque derrière eux.


Alastor soupire, pose ses clés, et range ses baskets sans grande conviction. Lucifer, plus discret, dépose son sac près de l’entrée, regardant autour de lui, encore un peu impressionné par l’ambiance chaleureuse de la maison.


Mais il n’a pas le temps de trop analyser.


— « ALASTOR !! »


Isabelle surgit du salon, bondissant comme un chaton électrique. Elle se jette sur son frère pour lui faire un câlin à moitié sauté dans le torse.


Puis elle s’arrête net en voyant Lucifer juste derrière.


— « Ohhh… »


Elle penche la tête, l’examine, papillonne des yeux.


— « C’est lui ? »


— « Isabelle. » grogne Alastor d’une voix d’avertissement.


Mais c’est trop tard.


Elle lui tire la manche, se tourne vers Lucifer, et enchaîne :


— « C’est toi, hein ? Le mec trop mignon ? »


Lucifer rougit aussitôt.


— « Pardon ? »


— « Bah ouais ! Il a dit “il est trop mignon, ouais”, avec cette voix-là ! »


Elle prend une voix grave en l’imitant, pleine d'assurance caricaturale :


— « Il est trop mignon, ouais. Trop classe. Trop... gentiiiil. »


— « ISABELLE. » Alastor est rouge pivoine, il attrape un coussin pour lui lancer dessus.


Mais elle continue, hilare :


— « Et il pense à toi H-24 quand il est à la maison. Même quand il regarde ses céréales, il a la tête dans les nuages. »


Lucifer tourne les yeux vers Alastor, un rictus en coin malgré sa gêne.


— « Ses céréales, hein ? »


Alastor soupire bruyamment, fuyant son regard.


Mais c’est pas fini.


— « Et hier, il m’a demandé si j’pensais que t’aimais les bisous tout baveux ! »


— « QUOI ?! » crie Alastor.


— « Bah oui ! Il m’a dit : “Tu crois qu’il aimerait les bisous tout baveux ou il préfère les petits bisous timides ?” »


Lucifer est écarlate.

Il éclate de rire, les joues rouges, une main sur la bouche.


— « Tu veux mourir, Isabelle ? » dit Alastor, hors de lui.


— « Tu vas pas taper ta sœur devant ton amoureux quand même ? » dit-elle avec un clin d’œil.


Alastor la chope et lui ébouriffe violemment les cheveux, pendant qu’elle hurle de rire.


Lucifer secoue la tête, toujours plié en deux.


— « Je… crois que je suis traumatisé. »


Alastor le fixe, mortifié.


— « Elle ment. Je dis jamais “baveux”. »


— « Mh-mh. Bien sûr. Je vais croire ça. »


Silence.


Puis Lucifer murmure, sans le regarder :


— « Les petits bisous timides… c’est pas mal. »


Alastor le regarde comme s’il venait de buguer.


Et Isabelle, qui a entendu, lève les bras au ciel :


— « J’LE SAVAIS !!! »


Scène 45 – “C’était un prétexte, hein ?”


— « On a des devoirs à faire. Faut pas nous déranger. »


Alastor avait dit ça d’un ton très sérieux, en posant une main sur la tête d’Isabelle pour la faire pivoter dans l’autre sens, comme s’il venait d’éloigner un chiot curieux.


Elle plissa les yeux.


— « Mh. C’est ce qu’on va voir. »


Mais il avait déjà poussé doucement Lucifer dans le couloir et claqué la porte de sa chambre, qu’il verrouilla aussitôt.

Il laissa tomber son sac dans un coin sans y prêter attention, puis se retourna pour constater que Lucifer avait déjà les yeux posés partout : les murs, les guitares, le petit bureau mal rangé, les stickers sur la lampe…


— « Ta chambre est… surprenante. J’pensais que t’étais bordélique. »


— « Merci ? »


Lucifer tourna sur lui-même, observant le coin lit.


— « J’aime bien. C’est toi. »


Il se posa tranquillement sur le matelas, croisant les jambes en tailleur, dos droit.

Alastor s’approcha un peu, sans vraiment savoir où poser ses mains. Il hésita, puis finit par s’asseoir à son tour, un peu plus loin. Distance de sécurité.


Mais Lucifer tourna la tête vers lui, un brin moqueur.


— « Tu veux vraiment faire tes devoirs avec moi… ou c’était juste un prétexte pour te débarrasser de ta sœur ? »


Alastor grimaça.


— « T’as grillé. »


— « Facile. »


Il y eut un silence.


Lucifer ramena un genou contre lui, jouant distraitement avec le bracelet autour de son poignet. Il semblait détendu. Il avait l’air bien, là, dans cette chambre, loin des cris, loin des autres.

Et Alastor, lui, le fixait discrètement.


— « Mais si t’as vraiment des devoirs… » ajouta Lucifer, un peu provocateur, « j’peux faire semblant de t’aider. »


Alastor sourit doucement.


— « T’as envie qu’on parle de philo maintenant ? »


— « Si c’est pour débattre sur ta capacité à tenir un porté, pourquoi pas. »


— « J’ai été bon. »


— « T’as été correct. »


— « C’est presque un compliment. »


Lucifer détourna les yeux, mais ses joues rosirent très légèrement.


Et derrière la porte, un minuscule grincement à peine audible fit sursauter Alastor.

Il roula des yeux.


— « Elle est en train d’espionner, c’est sûr. »


Lucifer étouffa un rire :


— « T’as pas idée comme vous vous ressemblez. »


Alastor se leva d’un bond, traversa la pièce à pas de loup, ouvrit brutalement la porte…


Personne.


Mais un petit couinement étouffé s’éloigna au pas de course dans le couloir.

Il referma la porte en soufflant.


— « J’vais lui mettre des clochettes. »


Lucifer rigolait doucement derrière lui.


Quand Alastor revint s’asseoir, cette fois-ci, il était un peu plus proche. Juste un peu.


Et Lucifer ne recula pas.


Scène 45 – “Je t'avais prévenu, non ?”


Ils étaient à nouveau assis sur le lit.


Pas très près.

Mais pas très loin non plus.


Lucifer avait cessé de taquiner. Il triturait le tissu de sa manche entre ses doigts, les yeux vaguement posés sur la fenêtre. Le soleil tapait contre le rideau, dessinant des ombres dorées sur ses pommettes.


Alastor, lui, faisait tout pour ne pas le regarder trop fixement.


Mais il finissait toujours par tourner les yeux vers lui. Encore. Et encore.


— « T’es bizarrement silencieux. » murmura Lucifer, sans détourner la tête.


— « J’essaie de pas faire de conneries. »


Lucifer tourna lentement la tête vers lui.


Leurs regards se croisèrent.


C’était doux. Silencieux. Lent.


— « Je crois que c’est trop tard pour ça. » souffla-t-il.


Alastor le fixait encore. Il inspira, les yeux baissés une seconde vers les lèvres de Lucifer. Puis il remonta doucement le regard.


— « Je t’avais prévenu, non ? »


Lucifer ne dit rien. Mais il se pencha un peu, juste un tout petit peu, comme on se penche quand on ne sait pas trop si c’est le bon moment, mais qu’on n’a plus envie d’attendre.


Alastor hésita une seconde de plus. Puis ses doigts vinrent effleurer doucement le poignet de Lucifer, juste pour s'assurer qu’il ne reculerait pas.


Il ne recula pas.


Alors il s’avança, lentement.


Et leurs lèvres se touchèrent à peine. Un contact à peine perceptible. Un souffle. Un frisson. Puis un autre. Plus sûr.


Un petit baiser.

Puis deux.

Puis trois, un peu plus long, un peu plus vrai.


Lucifer ferma les yeux, son cœur cognant contre sa poitrine comme un tambour, sans savoir où mettre ses mains. Il finit par glisser ses doigts contre le bras d’Alastor, timidement.


Quand ils se séparèrent, leurs visages restèrent proches. Très proches.


— « T’as pas bougé. » murmura Alastor.


— « Fallait pas. »


Ils restèrent là, nez contre nez, à moitié souriants, à moitié tremblants.


Et derrière la porte, Isabelle étouffait un cri avec un coussin.


Scène 46 — “C’est bizarre, mais… j’aime bien.”


Lucifer était toujours assis sur le lit, les jambes croisées sous lui, le souffle un peu court. Alastor, juste à côté, ne disait rien. Ses doigts avaient doucement glissé contre le tissu de la manche de Lucifer, remontant jusqu’à son poignet, avec une lenteur volontaire.


Ils s’étaient déjà embrassés. Plusieurs fois, petits baisers discrets. Mais là… il y avait autre chose.

Une tension calme.

Quelque chose d’inédit.


— « Je peux ? » demanda doucement Alastor, les yeux rivés aux siens.


Lucifer hocha à peine la tête. Il ne savait même pas ce qu’il autorisait.

Mais il savait qu’il n’avait pas peur.


Alastor s’approcha un peu plus, et doucement, il le poussa pour qu’il s’allonge à moitié sur le lit, sans le brusquer. Lucifer se laissa faire, le cœur battant si fort qu’il en avait mal à la poitrine.


Alastor était penché au-dessus de lui, appuyé sur un bras, l’autre main posée sur le ventre de Lucifer, à travers sa chemise. Sa paume était chaude.


Lucifer fronça légèrement les sourcils.


— « C’est bizarre. »


— « Quoi ? »


— « Je sais pas. J’ai jamais… J’veux dire, personne m’a jamais touché comme ça. »


Un silence.


— « C’est trop ? » demanda Alastor.


Lucifer secoua la tête, sans le regarder.


— « Non. C’est bizarre… mais j’aime bien. »


Alastor sourit doucement. Il baissa la tête et l’embrassa à nouveau, plus lentement cette fois. Plus longtemps.

Lucifer, les yeux clos, mit du temps à répondre, mais il suivit le mouvement, tremblant un peu, ses doigts cherchant à agripper quelque chose — le drap, la manche d’Alastor, n’importe quoi.


Puis Alastor glissa une main sur son flanc, le caressant doucement à travers ses vêtements, sans jamais aller plus loin.

Juste une chaleur, une présence.


— « Tu veux que j’arrête ? » souffla-t-il.


Lucifer hésita.


Puis, dans un murmure :


— « Continue. »


Rien d’agité. Rien de précipité.


Juste deux corps qui se découvrent. Deux souffles qui s’accordent.

Et un silence qui en disait plus long que n’importe quel mot.


Lucifer avait les yeux clos. Sa respiration était plus calme, mais son corps, lui, était toujours en alerte.

Pas dans la peur.

Dans l’inconnu.


Il sentait le poids modéré d’Alastor à côté de lui. Son bras toujours posé contre son flanc. Sa main, chaude et ferme, toujours en train de tracer des cercles lents sur son ventre à travers le tissu.


Lucifer entrouvrit les yeux.


— « Tu fais toujours ça ? »


— « Quoi ? »


— « Toucher comme ça. »


Alastor le regarda, légèrement penché au-dessus de lui.


— « Non. »


Lucifer tourna la tête vers lui, son regard un peu perdu, un peu fragile.


— « Alors pourquoi moi ? »


Un court silence. Puis Alastor baissa un peu les yeux, presque gêné de sa propre réponse.


— « Parce que… t’as l’air d’en avoir besoin. »


Lucifer ne répondit pas. Il le fixa longuement.


— « J’ai jamais été aussi proche de quelqu’un. » murmura-t-il.


Alastor sourit, mais c’était un sourire un peu triste.


— « C’est pareil pour moi. »


Leurs fronts se frôlèrent. Puis s’accrochèrent. Front contre front. Immobiles.


Lucifer ferma les yeux, et cette fois, c’est lui qui avança ses lèvres pour un baiser.

Un peu maladroit.

Mais il avait osé.


Alastor répondit, plus sûr. Il fit durer. Il approfondit un peu. Il glissa une main dans les cheveux de Lucifer.

Le contact était chaud. Presque lent. Comme s’ils cherchaient à ancrer ce moment dans leur mémoire.


Lucifer gémit à peine, surpris par une vague étrange dans son ventre.


Alastor s’arrêta.


— « Ça va ? »


Lucifer acquiesça, très vite.


— « Oui. Juste… j’ai pas l’habitude. »


Alastor rit doucement.


— « Je t’apprendrai. »


Lucifer ouvrit les yeux.


— « À embrasser ? »


— « À recevoir. »


Silence.


Et Lucifer répondit, le souffle court :


— « Promis… je retiendrai bien la leçon. »


Scène 47 – “Il est charmant, ton camarade.”


Un claquement sec retentit dans l’entrée.


Alastor se redressa d’un coup, et Lucifer, encore assis sur le bord du lit, se figea légèrement.


— « C’est elle ? » murmura-t-il.


— « Ouais. »


Il n’eut pas le temps de répondre plus que la voix familière de Louise, la mère d’Alastor, s’éleva dans le couloir :


— « Isabelle ? Alastor ? Je suis rentrée ! »


Quelques secondes plus tard, elle apparaissait dans l’encadrement de la porte de la chambre.


Ses yeux balayèrent la pièce.

Elle vit les deux garçons assis côte à côte sur le lit, leurs joues un peu roses, leurs cheveux un peu en bataille. Elle ne dit rien tout de suite, mais un petit sourire discret vint étirer ses lèvres.


Lucifer se leva aussitôt, réajustant le col de sa chemise, presque sans y penser.


— « Bonjour madame. Je suis Lucifer… le camarade d’Alastor. »


Il tendit la main, sans trop savoir s’il en faisait trop ou pas assez.


— « Enchanté. »


Sa voix était calme, mais un peu plus basse que d’habitude.


Louise lui serra la main doucement, les yeux brillants d’un air complice.


— « Enchantée, Lucifer. Tu peux m’appeler Louise. »


Elle le lâcha, sans insister, et se tourna vers son fils.


— « Alors c’est toi qu’il a ramené l’autre soir, hein ? Je me doutais que ce n’était pas un inconnu. »


Lucifer rougit un peu plus, baissant les yeux en esquissant un petit sourire nerveux.


C’est ce moment-là qu’Isabelle choisit pour apparaître, un grand sourire moqueur aux lèvres.


— « Maman, c’est lui. C’est le garçon “trop mignon” ! Tu sais, celui qui fait sourire Alastor tout seul comme un idiot. »


— « Isa ! » grogna Alastor, en croisant les bras.


— « Bah quoi ! » répondit-elle avec malice. « En plus il est poli, ton copain ! »


Lucifer cligna des yeux, piqué par le mot, mais ne dit rien. Il jeta un coup d’œil discret vers Alastor, comme pour vérifier s’il allait corriger sa sœur.


Il ne dit rien non plus.


Louise haussa légèrement les épaules, l’air amusé.


— « Ils faisaient leurs devoirs ? » demanda-t-elle, faussement innocente.


— « C’est ce que j’ai dit. » marmonna Alastor.


Elle s’approcha un peu de lui, lui souffla à l’oreille avec un petit sourire :


— « Il est très charmant, ton camarade. Et très poli. Je valide. »


Alastor leva les yeux au ciel, exaspéré.


Lucifer, lui, avait entendu. Et il sourit un peu, malgré lui.


— « Vous voulez que je vous aide à mettre la table ? » proposa-t-il presque timidement.


Louise secoua doucement la tête.


— « Non, non. Tu es notre invité. Repose-toi. Et merci. »


Isabelle, pas décidée à s’arrêter là, lui lança :


— « Et si vous vous mariez, je veux être demoiselle d’honneur. »


— « ISA. »


— « Quoi !? »


Lucifer éclata d’un rire nerveux, une main devant la bouche. Ses joues étaient rouges, mais ses yeux brillaient de ce petit feu qu’Alastor appréciait secrètement : celui de quelqu’un qui, pour une fois, se sentait à sa place.


Scène 48 — “Tu dois vraiment y aller ?”


Le dîner était simple, mais chaleureux.


Autour de la petite table carrée, Lucifer riait pour la première fois depuis des jours. Ses épaules étaient plus détendues. Il s'était laissé aller, entre deux bouchées, à faire quelques petites remarques sarcastiques qui avaient déclenché des éclats de rire chez Alastor. Louise observait la scène avec un léger sourire en coin, sans interrompre. Isabelle, elle, riait à gorge déployée à la moindre vanne.


Lucifer, pour la première fois, se sentait à sa place à table. À une table normale. Une famille qui s’écoutait, qui parlait, qui mangeait ensemble.


— « Et donc, Alastor a vraiment hurlé quand il a vu une araignée dans la salle de bain ? » demanda Lucifer, moqueur, en levant une sourcil.


— « Elle était ÉNORME. » grogna Alastor.


Isabelle pouffa.


— « Il a crié comme une fille ! »


— « Dis ça encore une fois, Isa. Juste une. »


— « Comme. Une. Fille. »


— « …Tu veux finir dans le jardin ce soir ? »


Tout le monde éclata de rire.


Mais soudain, la sonnerie du téléphone de Lucifer retentit.

Un frisson glaça son dos.


Il sortit son portable, et son sourire s’effaça d’un coup.


"Maman."


Il se leva lentement de table, le cœur qui se mit à battre fort.


— « Excusez-moi… » murmura-t-il.


Il quitta la pièce, s’éloignant dans le couloir pour répondre.


— « Allô ? »


— « LUCIFER. » La voix glaciale de sa mère claqua immédiatement. « Où est-ce que tu es ? Pourquoi t’as pas prévenu ? Tu crois que tu peux disparaître comme ça ? »


— « Je… J’étais chez un ami, je comptais revenir avant ce soir, je— »


— « Tu rentres MAINTENANT. Ton père est furieux. »


Lucifer sentit son estomac se tordre. Il savait très bien ce que ça voulait dire. Une nouvelle engueulade ? Non. Une nouvelle claque. Ou pire.


— « J’ai pas fini de manger… Je— »


— « T’as entendu ce que j’ai dit ? Rentre. Tout de suite. »


Et elle raccrocha.


Lucifer resta figé quelques secondes, le téléphone encore contre son oreille.


Derrière lui, Alastor était arrivé, inquiet.


— « C’est ta mère ? »


Lucifer hocha la tête, sans parler.


Il avait les yeux humides. Mais il se battait pour ne pas pleurer.


Il baissa les yeux.


— « Je dois rentrer. »


— « Quoi ? Maintenant ? » Alastor fronça les sourcils. « Mais pourquoi— »


— « Mon père… »


Silence.


— « Il va encore… ? »


Lucifer ne répondit pas.


Alastor s’approcha instinctivement, prêt à poser une main sur lui.


— « Je t’accompagne. »


— « Non. » coupa-t-il d’une voix nette.


Alastor écarquilla les yeux.


— « Mais— »


— « J’ai dit non. Faut pas… faut juste pas. » Il détourna les yeux. « J’veux pas que tu voies ça. »


Alastor serra les dents, impuissant.


Lucifer prit ses affaires. Il fit un détour par la salle à manger. Isabelle fit la moue.


— « Déjà ? Tu veux pas rester ? »


Il lui fit un petit sourire triste.


— « Une autre fois, d’accord ? »


Louise aussi avait compris. Elle se leva, s’approcha doucement.


— « Tu veux qu’on appelle quelqu’un ? Un adulte ? »


Lucifer hocha négativement la tête, sans un mot.


Louise le regarda avec une tendresse mêlée d'inquiétude.


— « Tu peux revenir ici quand tu veux. Tu le sais, hein ? »


Il sourit à peine, et hocha encore une fois la tête.


Puis il disparut derrière la porte d’entrée.


Alastor resta debout, face à cette même porte, sans parler.


Il n’avait rien pu faire.


Mais une seule chose tournait en boucle dans sa tête : et si cette fois, ça allait trop loin ?


Scène 49 – “Je suis rentré.”


La porte de la maison se referma derrière lui avec un claquement sec.


Lucifer resta quelques secondes immobile dans le hall, ses clés encore en main. Il savait qu’il n’aurait pas dû partir. Il savait que ça allait arriver.

Mais maintenant… c’était trop tard pour reculer.


— « Lucifer ? » La voix de sa mère était posée, mais tendue.

Elle était là, debout dans le salon, les bras croisés.


— « Je suis rentré. » murmura-t-il simplement.


— « Tu crois que c’est une heure pour rentrer, peut-être ? Tu veux qu’on passe pour des imbéciles dans le quartier ? »


Il ne répondit pas.


Alors le silence fut brisé par des pas lourds dans l’escalier.

Des pas qu’il reconnut immédiatement.


Son père descendit lentement, une chemise ouverte, le regard sombre. Il ne criait pas. Il n’avait pas besoin de crier.

Lucifer le savait déjà : le plus dangereux, c’était quand il ne disait rien.


— « Papa, je suis désolé… J’étais chez un ami, j’ai pas fait exprès de rentrer tard. »


Pas de réponse.


Il sentit le souffle coupé net dans sa poitrine.


— « Je vais aller me coucher, j’ai cours demain, je suis fatigué. »


Il fit un pas vers l’escalier.

Un bras l’attrapa violemment par le col.

Le reste, il préféra ne pas s’en rappeler.


Les mots se brouillèrent.

Il sentit seulement la peur, la douleur, la honte. Le froid.

Et puis ce moment, allongé sur le sol du couloir, recroquevillé contre le mur, à respirer trop vite pour ne pas hurler.


Ses yeux pleuraient, mais il ne faisait plus de bruit.

Plus maintenant. Il savait que ça aggravait les choses.


---


Plus tard, dans sa chambre, Lucifer s'était enfermé à double tour.


Il s’assit contre la porte, dans le noir. Ses genoux repliés contre lui, le souffle court.


Ses mains tremblaient encore.


Un de ses poignets portait une marque rouge.

Son regard glissa lentement vers son téléphone, posé sur le bureau.

Il voulait appeler quelqu’un. Peut-être Charlie. Peut-être… Alastor.

Mais il ne bougea pas.


Il avait trop honte.


Alors il s’allongea sur son lit, en boule, et pria pour que personne ne le voie comme ça.


Scène 50 — “Ça fait pas si mal que ça.”


La lumière de la chambre était éteinte.

Seule la lueur pâle d’un réverbère filtrait à travers les rideaux.


Lucifer était resté allongé un long moment, immobile sur le lit, le souffle calme en apparence… mais le cœur agité comme une mer en pleine tempête.


Il n’avait pas pleuré. Pas cette fois.

Il ne voulait plus pleurer.


Ses doigts glissèrent lentement sous l’oreiller.

Il en sortit une petite boîte en métal, presque anodine.

Presque.


Il s’assit sur le bord du lit.

Le silence lui faisait mal.


Il roula lentement la manche de son sweat — celui d’Alastor — et fixa la peau pâle de son bras.

Ses yeux croisèrent les anciennes marques. Certaines rosées, d’autres plus nettes. D’autres à peine visibles.


Il en fixa une en particulier.


Et alors, sans réfléchir plus longtemps, il ouvrit la boîte.


Un petit objet y dormait à l’intérieur. Froid.

Rassurant, presque.

Contrôle.


Lucifer l’attrapa.

Il le connaissait par cœur.

Pas besoin de lumière.


— « Juste… une. »


Sa voix trembla. Mais sa main, non.


Un trait. Léger.


Un picotement. Un soupir. Un soulagement.


Le monde, pendant un instant, se taisait enfin.


Mais au fond, il le savait : ce n’était qu’un mensonge de plus.

Une fuite. Un cri silencieux que personne n’entendait.

Ou presque.


Son regard se posa sur son téléphone.

Et le nom “Alastor” en haut de ses messages non lus.


Il aurait pu l’appeler.

Il aurait pu taper juste un mot : « Viens. »

Mais il n’en fit rien.


Il reposa l’objet. Essuya doucement la goutte rouge qui perlait.


Et il se rallongea. Le bras contre son ventre.

Le cœur lourd.

Et le monde, encore, trop silencieux.


Scène 51 – “Viens. Je t’en supplie.”


Lucifer était recroquevillé contre le mur de sa chambre.

Les volets étaient tirés.

Le silence l’étouffait.


Sa respiration était irrégulière.

Ses yeux brûlaient encore.


Son téléphone vibra sur le sol, là où il l’avait laissé tomber.


Il hésita. Longtemps.

Puis il tendit la main et décrocha, sans un mot.


— « Lucifer ? »


C’était Alastor.

Sa voix était inquiète, mais aussi… plus dure. Plus tranchante que d’habitude.


— « Pourquoi t’as pas répondu à mes messages ? Merde, on s'inquiétait. Est-ce que tout va bien ? »


Lucifer murmura, d’une voix presque inaudible :


— « Je pouvais pas… »


Alastor se figea.


— « Il t’a fait quelque chose, hein. »


Lucifer ferma les yeux.


— « Je t’ai dit que j’avais pas envie d’en parler. »


— « C’est ton père. Je le sais. Tu vas pas me mentir à moi. Je te jure que si je pouvais, je monterais là-haut et je— »


— « Arrête... » souffla Lucifer, la voix cassée.


Mais Alastor n’entendait plus rien.


— « Il t’a touché ? Il t’a frappé encore ?! Tu veux que j’attende quoi, moi ? Que tu sois à l’hôpital pour bouger ?! Je vais pas attendre qu'ils te tuent ou que tu te tires une balle dans la tête pour agir ! »


Lucifer sentit les larmes revenir, d’un seul coup.

Son bras lui faisait mal. Trop. Il serra les dents.


— « Alastor... »


— « Quoi ?! »


Il explosa, sans même le vouloir.


Et alors…

Lucifer fondit en larmes.


Pas des pleurs silencieux.

Des sanglots. Profonds. Douloureux. Honnêtes.


— « Je veux pas être seul. Je t’en supplie… viens. Maintenant. »

Il avait du mal à respirer.

— « Tu peux pas me laisser seul. Pas ce soir. »


Alastor resta muet une seconde.

Puis il répondit, d’un ton beaucoup plus doux.


— « Ouvre la fenêtre. Je suis déjà en route. Fais pas de conneries, je suis là dans dix minutes max. »


Lucifer hocha la tête, même si personne ne le voyait.

Il raccrocha, les mains tremblantes.

Il s’approcha de la fenêtre, l’ouvrit.

L’air frais entra doucement.


Et il resta là, immobile…

à attendre.

Pas un sauveur. Pas un héros.


Juste… quelqu’un.


Quelqu’un qui ne le laisserait pas tomber.


Scène 52 – “Je suis là.”


Le ciel était noir. Les ruelles silencieuses.

Alastor sauta le mur de clôture, les baskets glissant à peine sur le rebord en pierre.

Il leva les yeux vers la fenêtre. Elle était entrouverte.

Lucifer avait obéi.


Un pied sur le rebord.

Un souffle coupé.

Il grimpa.


Et quand il passa enfin de l’autre côté, il atterrit dans le silence.

La chambre était sombre, froide, presque vide.


Lucifer était assis à même le sol. Dos contre son lit.

Les genoux ramenés contre sa poitrine. Le visage ruisselant.

Ses bras tremblaient. Son tee-shirt large laissait entrevoir un pansement mal fixé sur l’avant-bras.


Alastor figea. Son cœur se serra.


— « Lucifer... » souffla-t-il.


Lucifer tourna lentement la tête.

Ses yeux étaient rouges, gonflés. Il avait l’air… absent.


— « Je voulais pas que tu me voies comme ça. »


Alastor ne répondit pas.

Il s’agenouilla lentement devant lui, posant une main sur son genou, très doucement. Il le regardait comme on regarde quelqu’un qui tient à peine debout.


— « Qu’est-ce qu’ils t’ont fait... » murmura-t-il.


Lucifer secoua la tête, incapable de parler.

Un hoquet remonta dans sa gorge.


Alors Alastor se laissa tomber contre lui.

Il glissa les bras autour de son dos, lentement, sans forcer, sans brusquer.


— « Je suis là maintenant. Tu m’entends ? Je bouge pas. »


Lucifer s’effondra dans ses bras, comme une poupée désarticulée.

Il s’accrocha à lui avec une force désespérée, la tête contre son cou.


— « J’ai eu tellement peur... »


— « Chut. C’est fini. Ils peuvent plus te toucher. Pas ce soir. »


Alastor le berçait doucement, la main dans ses cheveux.

Il était resté fort toute la soirée.

Mais là, dans ce silence pesant, les larmes lui montèrent aussi aux yeux.


Il déposa un baiser sur son front, sans un mot.


Et ils restèrent là.

Dans l’obscurité.

Deux cœurs fracassés, blottis l’un contre l’autre.

Le temps suspendu.


Scène 53 – “Tu l’as fait toi-même…?”


Alastor avait toujours eu l’impression que Lucifer était fragile, mais là…

Il le sentait casser entre ses bras.


Et puis, dans un geste presque mécanique, il l’aida à remonter un peu sa manche.

Pour qu’il soit plus à l’aise.


Mais il s’arrêta. Net.


Son regard se figea.


Des marques.

Pas une.

Pas deux.

Des dizaines.

Certaines fines, d’autres boursouflées. Certaines plus anciennes, cicatrisées en blanc, d’autres encore fraîches.


Lucifer, sentant son bras se figer dans la main d’Alastor, se crispa aussitôt.


Il comprit.


Il tenta de le retirer, doucement.


Mais Alastor ne le lâcha pas.


— « C’est toi… » murmura-t-il. « Tu t’es fait ça toi-même. »


Le silence s’écrasa dans la chambre.


Lucifer détourna le regard, honteux.

Sa voix était basse, sèche de larmes :


— « J’ai essayé d’arrêter. Je… j’y arrive pas. C’est comme si… si j’avais besoin que ça fasse mal. Juste pour sentir autre chose. J'ai... j'ai tellement peur... »


Alastor n’avait jamais eu aussi de peine dans sa vie.


— « Lucifer… c’est pas normal. Tu peux pas rester comme ça. Je te jure que je vais t’aider, mais là, faut… faut qu’on aille à l’hôpital. Ça va aller. »


Lucifer secoua violemment la tête.


— « Non. Non, je veux pas. Je veux pas sortir d’ici. Pas ce soir. Pas retourner dehors, pas me faire engueuler si quelqu’un me voit. Pas les questions, pas les dossiers, pas les regards... »


Il paniquait déjà.


Alastor attrapa doucement son visage entre ses mains.


— « Regarde-moi. »


Lucifer hésita… puis leva les yeux.


— « On n’ira pas à l’hôpital, d’accord ? » souffla Alastor. « Mais demain, on sèche les cours. Tous les deux. »


— « Quoi ? Pourquoi ? »


— « Ma mère est infirmière. Elle travaille pas le vendredi. Elle saura comment te soigner. Et elle dira rien. »


Lucifer le fixa longuement.

Ses lèvres tremblaient.


— « Tu crois qu’elle m’en voudra ? »


Alastor secoua la tête doucement.

— « Elle va juste vouloir que tu ailles mieux. Comme moi. »


Lucifer ferma les yeux, hocha doucement la tête, le souffle court.


Et dans un murmure :


— « D’accord. Mais… reste avec moi cette nuit. »


— « J’avais pas prévu de partir. »


Il l’embrassa doucement sur la tempe.

Puis s’allongea contre lui, sans bruit.

Lucifer se laissa glisser contre son torse, ses doigts agrippant le tissu de son sweat.


Pour la première fois depuis longtemps,

il se sentit presque en sécurité.

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