JoJo's Bizarre Adventure : Lost Baby

Maneater mimait l’inconscience mais derrière ses yeux prétendument livides, ses neurones s’animaient à une vitesse folle. Là où l’homme avait pu s’en affranchir au cours des millénaires de civilisation, l’instinct de survie animal prenait le pas sur toutes ses autres émotions. Les pupilles du petit requin scrutaient discrètement chaque élément du décor à la recherche d’un moyen de s’éclipser du danger. La force de cet humain était à un océan entier de la sienne, il ne pourrait jamais rivaliser. S’il voulait poursuivre sa quête, il devait fuir, loin, le plus loin possible. Cependant, une chose le décontenançait : cette fillette affrontait ce prédateur, au dépit de tous les risques, pour les sauver. Pourquoi faisait-elle cela ? Était-ce le secret qui avait permis aux humains de dominer leurs instincts ?  

Adam : Tu es folle, Jojo ! Tu ne vas rien pouvoir faire contre un monstre pareil ! 

La petite fille aurait voulu lui répondre mais elle devait se tenir droite face à Guns. Il fallait lui montrer à quel point elle était devenue forte. 

Guns : Alors, à quoi voulez-vous jouer, Mademoiselle Shizuka ? J’espère que votre « duel » ne sert pas juste à gagner du temps.

Shizuka parlait sérieusement et distinctement malgré la peur qui l’envahissait. Elle savait que le majordome ne lui ferait jamais de mal mais en serait-il autant de ses amis ? 

Shizuka : On va jouer à chat avec les mêmes règles que quand j’étais petite : si j’arrive à te toucher 3 fois le dos, je gagne et tu me laisses partir.

Une fois de plus, deux âges de Guns se mélangèrent dans une voix simultanément de soprano et de ténor. L’Histoire semblait inlassablement se répéter.

Guns : Et moi, je dois juste t’attraper et t’empêcher de bouger pendant 10 secondes, c’est ça ? Ça ne devrait pas être très compliqué…

Guns retira un bras de sa veste et releva la manche de sa chemise en grimaçant de sa douleur. Sur son bras, désormais nu, à une distance irrégulière, étaient plantés une dizaine de fines épines. 

Shizuka : Ces épines…Ce sont celles qui bloquent la douleur…? 

Il arracha une épine de son Stand, la plaça entre son majeur et son index et le planta d’un coup sec juste au-dessus de son coude. 

Guns : Voyons, Mademoiselle, je vous déconseille de vous apitoyer maintenant sur mon sort. 

N’essayez pas d’y aller doucement, vous risqueriez de le regretter. 

Shizuka avala sa salive et hocha la tête. Le majordome se dépêcha de s’apprêter à nouveau. La fillette se contenta de lever son index, son majeur et son annulaire. Elle baissa le troisième, puis le second et enfin, le premier marquant le départ du duel fatidique maquillé sous des traits enfantins. Au moment où le dernier doigt tomba, comme la dernière brique d’une enceinte pendant un siège, Guns fonça à l’assaut. Le pied de Love at First Sting propulsa le majordome vers la petite fille. D’un pas agile, Shizuka esquiva et disparut d’un tir précis de son Stand. 

Guns : Un peu trop lent… 

Protégé par son voile d’invisibilité, Shizuka se rua vers le dos de son adversaire pour tenter de marquer un premier point. Le bruit étouffé de son cocon l’empêcha d’entendre les trois détonations, leitmotiv des Boléro 5,6 et 7. 

Guns : VII - Brise Matinale ! 

Guns frappa tout en tournant sur lui-même comme un lanceur de marteau, provoquant une bourrasque. La fillette présomptueuse fut balayée et projetée vers le mur d’un des immeubles, choc amorti de justesse par les ailes de son Stand. Comme un personnage blessé de vieux jeu vidéo, la silhouette de Shizuka clignota, incapable de maintenir son invisibilité sous l’effet du choc. 

Guns : Alors, c’est tout ce dont la “nouvelle Mademoiselle” est capable ? J’avoue être un peu déçu. Vous pouvez toujours m’accompagner voir votre père, il n’est pas encore trop tard. 

Shizuka grogna avant de reprendre son invisibilité. Le majordome parcourait le décor du regard à la recherche d’un indice du déplacement de la fillette comme il le faisait des années auparavant. Cependant, cette fois, aucun gravillon, aucun courant d’air suspect ne le mit sur la voie d’une attaquante invisible.

***



Le jeune adolescent s’était jeté au sol pour se protéger du bras de sa professeure. Pourtant, pour le prévenir de toutes blessures, le Stand d’Ève l’avait revêtu de la constellation du Sagittaire mais le corps de Guns ne lui avait pas obéi. La femme pouffa et plongea sa main dans sa poche pour en sortir un sachet de bonbons. Elle les enfournait frénétiquement dans sa bouche en regardant son élève étendu sur le sol. 

Ève : Je peux savoir ce que tu fais par terre…?

Guns : Je ne sais pas…tu as donné des coups comme si tu préparais ton Boléro…alors par réflexe…

Ève : J’ai fait ça pour te faire comprendre quelque chose : si la puissance du Boléro est impressionnante, sa véritable force est la peur et l’appréhension qu’il inspire dans la tête de ses adversaires. Voir les effets d’un Boléro 5 ou 6 sur un objet empêchera celui que tu affrontes de garder la tête froide…Il fera tout ce qu’il peut pour ne pas t’attaquer de face. Le Boléro est aussi une technique d’intimidation. 

Guns : Alors, c’est pour ça que tu as accepté de m’apprendre le Boléro ?! En instiguant la peur, je peux faire réagir les dards de mon Stand et, en utilisant mes inhibiteurs sur moi…je peux lever toute hésitation de porter le prochain coup et de me blesser ! C’est génial ! 

Ève : Mmmmh…Il y a peut-être une part de ça effectivement…

Ève était pensive. Guns percevait même, derrière son visage enjoué, une pointe de tristesse, profondément enfouie. Elle regardait le manoir des Joestar devant lequel la petite Shizuka jouait avec ses figurines de comics. 

Ève : Mais la capacité du Stand que tu obtiens n’est pas laissée au hasard, elle représente qui tu es réellement. Tu es comme Shizuka, vous êtes capables de vous adresser directement aux cœurs. Ça peut paraître un peu fleur bleue mais je pense réellement que la principale qualité pour un joueur de Boléro, c’est de savoir quand les mots suffisent… 

Guns : C’est pour ça que ton Stand a cette capacité ! Tu as toujours voulu protéger les autres !

Ève : Mon “Stand”…? 

La femme eut un moment d’absence avant de regarder la constellation qui servait de protection à son élève. Elle sourit au jeune adolescent qui avait fini par s'asseoir en tailleur sur le gazon. 

Ève : Ah, tu parles de Skyfall ? Effectivement, c’est peut-être pour ça qu’on m’a accordé cette capacité…Maintenant, relève-toi ! Je veux que tu maîtrises le niveau 3 avant la fin de la journée ! 

Elle lui donna la main pour le relever et lui ébouriffa les cheveux en affichant son joli sourire, son esprit toujours à demi-présent. 

***

Le souvenir de ce moment avec Ève avait inspiré une idée à son élève. Il connaissait sa jeune maîtresse par cœur et devait utiliser ses faiblesses pour triompher. La petite fille avait dû se remettre à courir dès le moment où elle avait disparu pour ne pas le laisser monter dans les octaves de Boléro. Il avait donc environ quatre secondes et demie. 

Guns : Merci Ève. 

Il devait utiliser la peur qui devait traverser le cœur de Shizuka en cet instant même. Il frappa quatre fois devant lui et mima un cinquième coup. En faisant cela, Guns savait qu’elle éviterait de l’approcher de front et allait naturellement le contourner pour viser son dos. Son poing s’arrêta juste avant d’engendrer le moindre contrecoup. Love At First Sting apparut et son manieur se servit de son autre bras pour arracher violemment un dard. 

Guns : Inhibiteur de détermination ! 

Le majordome se retourna pour l’enfoncer là où la petite fille se trouvait à coup sûr mais sa main ne rencontra que l’air froid du mois de novembre. Derrière lui, la petite fille émergea de nulle part et posa sa main au centre du dos de Guns. 

Shizuka: Touché !