JoJo's Bizarre Adventure : Lost Baby
Chapitre 106 : Live or Let Die (Partie 4)
1966 mots, Catégorie: T
Dernière mise à jour 29/10/2025 20:10
Guns prit quelques secondes à réaliser ce qui venait de se produire. Le déroulement parfait de ce duel s’était effondré en un instant sous ses yeux.
Ève : Mais si le Boléro demande une qualité, c’est bien la modestie !
Les mots passés de son ancienne professeure résonnaient dans son esprit comme si elle était toujours présente à ses côtés. De son rire moqueur, elle lui reprochait son impatience et son orgueil. Guns se retourna et scruta les alentours à la recherche de la petite fille invisible. Haussant la voix comme un orateur, il s’adressa à la foule de positions possibles de Shizuka.
Guns : Très bien, Mademoiselle Shizuka, je dois reconnaître que vous avez fait d‘importants progrès ! Je devrais cesser de vous traiter comme une petite fille fragile !
Les poings du majordome se remirent à danser une valse à sept temps et, sur le septième temps, les pieds vinrent le rejoindre dans une course effrénée. En miroir, le Stand se lança vers son manieur en armant son bras, prêt à frapper. Quand les deux joueurs et leurs phalanges se rencontrèrent, un immense orage et un terrible ouragan se levèrent obligeant les observateurs de la scène de se plaquer au sol pour ne pas être emportés.
Guns : VIII – Réveil en sursaut !
L’onde de choc propulsa Love at First Sting vers le bâtiment comme un météore. Guns avait repéré une aile vide de l’immeuble où le Stand vint se loger. La panique empara le bâtiment et une foule gigantesque déferla en trombe, croyant à un attentat criminel. Shizuka, comprenant la scène qui était en train de profiler, retint son souffle muet.
Guns : Je pense qu’il est temps que l’on s’affronte à armes égales.
L’instant suivant, Guns disparut dans la foule de façon presque surnaturelle. Job, depuis sa prison sans barreau, tenta de discerner un son pouvant le trahir au milieu de la panique ambiante avant de finalement comprendre la portée de la technique.
Job : Il ne peut pas se rendre invisible, il se contente de copier le rythme de ce qui l’entoure !
Adam : Et même toi, tu es incapable de le repérer ?! Ta mélodie du machin-truc ne te permet même pas de le repérer !
Job : Justement, les battements de son cœur, ses pas, sa respiration… il les fond dans la Mélodie du Monde !
***
Guns répétait les quatre mêmes coups depuis plusieurs heures, sans résultat. A chaque erreur, la constellation absorbait une grande partie de l’énergie pour l’envoyer vers le sol. Cependant, son bras commençait à sérieusement fatiguer.
Guns : V – Rêve piquant…non, V – Rêve pesant…toujours pas…Pourquoi je dois utiliser ces noms déb-…je veux dire, est-ce-que c’est vraiment nécessaire de tous les retenir ? Ça me déconcentre…
Ève : C’est comme le solfège pour le Boléro. Libre à toi de crier ce que tu veux quand tu seras un maître en la matière mais pour l’instant, ça t’aidera à apprendre le rythme d’exécution.
Guns : Je maintiens que mes noms sont beaucoup plus cool…Dis-moi quel est ton record de Boléro ?! Je veux savoir si je suis proche de te dépasser !
Ève ne put réprimer un petit rire devant l’innocence de ton élève. Même si ses mots montraient son impatience et sa détermination, un profond respect pour sa professeure transpirait des paroles de la bouche essoufflée de Guns.
Ève : Je n’ai pas envie de te démotiver....
Guns : Allez !
Ève : Très bien, j’ai atteint le Boléro 23 et je n’ai jamais essayé le 24. C’était déjà un miracle d’atteindre une mesure aussi haute…
Guns : v-v-vingt-trois ?! Mais c-comment…le Boléro 5 est déjà quasiment impossible…
Ève : Je t’avais prévenu ! Bon, on va faire une pause. Je vais t’apprendre une autre facette du Boléro, ça t’aidera peut-être à lever le blocage.
Le petit majordome s’assit en tailleur pour écouter attentivement les explications de la garde du corps. Son attitude prétendument élégante n’arrivait à masquer l’étincelle d’admiration qui brillait dans ses yeux.
Ève : Je t’ai menti le mois dernier : le Boléro ne s’utilise pas qu’avec le bras. En réalité, il peut imposer son rythme sur ton cœur, ton souffle, tes pas… En maîtrisant parfaitement ton corps, tu peux masquer ta respiration dans celui de ton adversaire et camoufler ta silhouette dans l’ombre de ton ennemi.
Pendant un court instant, Eve disparut devant les yeux, d’abord perplexes puis stupéfaits, du jeune adolescent. Les quelques secondes suivantes, comme un mirage, sa silhouette s’incarnait et se désincarnait en un clignement d’œil.
Guns : C-comment… ? On dirait le Stand de Shizuka !
Ève : Est-ce-que tu as déjà été incapable de voir une personne devant toi, simplement parce qu’elle ne bougeait pas ? C’est exactement le même phénomène. Ce que tu ressens n’est pas la réalité mais une perception filtrée qui s’attache au changement. Ma présence s’efface car je ne bouge plus, je suis un décor pour ton cerveau. De la même façon, en copiant ton souffle, tes neurones en font abstraction comme ils le font du toucher de tes vêtements sur ta peau.
Guns : Tu vas aussi m’apprendre ça ?
Ève : Bien sûr, à partir de maintenant, entre les entraînements physiques, on travaillera le contrôle de tout le reste de ton corps !
Guns : Hé ! C’était censé être un moyen de m’aider pour le Boléro pas une excuse pour alourdir encore mon entraînement !
Ève fut à nouveau prise d’un fou rire. Après avoir admiré son joli visage quelques instants, Guns la rejoignit dans une joie insouciante.
***
Cette fois-ci, le rire d’Ève ne disparut pas : il se répétait inlassablement comme un vieux disque rayé. Les images de cette nuit-là lui revenaient en mémoire, par bribes, par sensations éparses. L’atmosphère froide et lugubre du parking qui hérissait les poils de ses bras. L’odeur agressive du sang qui brûlait ses narines. Le corps éventré de la femme qu’il admirait tant qui marqua sa rétine à jamais, ses entrailles bouillies dans une soupe de mélasse noire, recouvrant de son bitume grouillant le sol goudronné. Enfin, ce rire d’outre-tombe qui résonnait dans le parking, couvrant à peine sa respiration et les battements erratiques de son cœur, imitant celui qu’il avait entendu des centaines de fois, prisonnier du corps brisé d’une poupée parlante.
L’épaule de Guns le faisait terriblement souffrir mais il restait concentré sur ses pas, sur ses respirations pour ne pas perdre le rythme de l’homme qu’il suivait, discipliné comme une ombre. Plus jamais cela ne devait se reproduire et, pour ça, il fallait qu’il mette fin à ce “duel” le plus vite possible.
Impuissants, Adam et Job regardaient le ballet des personnes paniquées qui dansaient sur la place. Ils essayaient tant bien que mal de distinguer un bruit ou une perturbation dans l’air qui trahirait la présence de l’adversaire de leur coéquipière. La rage d’Adam avait lentement cédé sa place à l’inquiétude. Il serrait le poing pour se retenir d’intervenir.
Adam : Le fumier, avec cette foule, Jojo n’a aucune chance de le retrouver ! Il cherche à l’épuiser en la faisant conserver son invisibilité le plus longtemps possible mais…il sous-estime les progrès qu’elle a faits !
Job semblait également inquiet derrière son visage prétendument impassible. Adam - qui connaissait cette expression mieux que personne - le provoqua pour tenter d’obtenir une réaction.
Adam : Tu t’en fais pour Jojo ? Elle a déjà réussi à maintenir les effets de son Stand bien plus longtemps. Niveau endurance, elle le sèmera sans problème !
Job : Ce n’est pas ça qui m’inquiète. Quand on l’a affronté avec la sardine, il n’a pas eu besoin de ce genre de stratagème pour disparaître donc il y a une autre raison pour laquelle il s’est donné la peine de faire tout ça…
Adam regarda la foule quelques instants et comprit où l’ancien mafieux voulait en venir. Dans un petite partie de la cohue, au milieu des bousculades, des épaules successives s’écartaient en cognant un obstacle invisible.
Job : Tu as compris ? Il se sert de la foule comme d’un sonar pour déterminer la position de la Signorina.
Adam : Et la foule…elle agit chaotiquement…donc aucun moyen d’être sûr d’esquiver tout le monde c’est le piège parfait ! Il faut que j’intervienne…
Job : Attends une minute. Fais-lui confiance.
Adam serra les dents. Il se sentait coupable de l’impulsivité et du comportement dont il avait fait preuve avec sa partenaire. Il s’était promis de mettre ce nom de côté et de traiter Jojo comme n’importe qui d’autre mais il avait brisé cette promesse, une de plus.
Guns : Trouvé !
Le majordome traversa la piste en dansant agilement, d’un pas de chat, sautant d’ombre en ombre, malgré le chaos ambiant. Il arracha une nouvelle épine de son Stand et continua d’avancer vers cette silhouette indiscernable, chahutée d’un fuyard à l’autre. Cependant, l’épaule de Guns rencontra celle d’un employé, retirant l’effet du Boléro pendant quelques instants.
Guns : Elle a…
De justesse, Guns sauta d’un pas sur le côté pour esquiver la main de la fillette qui allait se poser sur son dos. Elle avait probablement profité du chaos pour rendre invisible un ou deux passants. Job sourit, satisfait que ses prédictions se soient réalisées.
Ironiquement, c’était au tour de Guns de se faire piéger par la foule, bousculé de part en part, agacé de s’être de nouveau fait avoir. Son Stand prit les traits du visage d’Ève tiré de ses souvenirs pour lui faire des remontrances sur son comportement.
Ève : Tu devrais réfléchir un peu plus avant d’agir.
Guns : Je sais, je sais…
Le jeune homme en costume courut vers le mur d’un des bâtiments pendant que son Stand se rua vers son symétrique. S’appuyant sur les deux bâtiments, ils se propulsèrent l’un contre l’autre comme ils l’avaient fait quelques minutes plus tôt et frappèrent d’un puissant Boléro à l’unisson pour se renvoyer contre les deux façades. Ils répétèrent l’opération, tournant légèrement sur eux-mêmes comme un brin d’ADN. Guns trônait entre les sommets des deux bâtiments, son Stand à ses côtés, semblant léviter au-dessus des passants tétanisés, surplombant la place comme un dieu vengeur.
Ève : Tu ne comptes pas faire ce à quoi je pense, Guns…? Tu vas le regretter.
Désormais, pour le majordome, il était presque impossible de déterminer si cette phrase provenait d’un lointain souvenir ou de son imagination. Le présent n’était plus qu’un immense sentiment de déjà-vu.
Guns : Je suis désolé, Ève, mais si je veux lui faire entendre raison, je vais devoir utiliser mes propres techniques.