Le Revers de L'Infini - Tome 2 : L'Eveil

Chapitre 2 : Lumière intérieure

1401 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 06/10/2025 20:48

Le crépuscule enveloppe la cour d’une lumière douce et vacillante.

Aya marche lentement sur les dalles tièdes, son regard baissé, concentré. Chaque pas est mesuré. Chaque respiration est maîtrisée. Elle essaie. Elle tend son esprit vers l’intérieur, vers cet espace flou où vit Cindy.

Dans sa tête, elle ne cherche pas des mots, mais une présence. Quelque chose d’instinctif. Un frisson qui palpite juste sous sa conscience.

Au-dessus d’elle, presque invisible dans l’ombre d’un toit bas, Gojo est assis, jambes ballantes. Il l’observe en silence. Un instant, son éternel sourire s’efface, remplacé par une expression plus calme, presque fière.

— Elle commence à essayer…

Sa voix résonne à peine dans l’air tranquille du soir. Il ne parle à personne, mais ses mots s’impriment dans le silence.

À voix basse, il ajoute, presque pour lui-même :

— C’est quand on arrête d’avoir peur de soi qu’on devient vraiment dangereux…

Aya lève la tête, prise d’un doute. Quelque chose a vibré à l’intérieur… Une voix ?

— Y a quelqu’un ?...

Gojo, perché juste au-dessus, répond aussitôt :

— C’est moiiii !

Il atterrit près d’elle avec une grâce irréelle, un sachet de chips dans une main.

— T’as l’air concentrée. Elle te parle ?

Aya recule légèrement, surprise.

— Ho… Bonsoir…

Elle inspire, hésite.

— Oui... enfin… non. Ce ne sont pas des mots. C’est comme si… je comprenais ce qu’elle veut sans qu’elle parle.

Elle le regarde, troublée.

— C’est encore confus. Mais j’ai cette impression… qu’elle pourrait être là tout le temps, en moi.

Gojo croise les bras, l’air attentif.

— Pas des mots, hein ? Juste... des trucs que tu ressens ?

Il arque un sourcil, un sourire doux aux lèvres.

— Alors elle est bien là, ta Cindy. Peut-être même plus profondément que tu le crois.

Il penche légèrement la tête, son regard plus sérieux.

— Et toi… t’es prête à vraiment l’écouter ? Même quand ce qu’elle dira fera flipper ?

Aya le fixe, amusée par sa posture à mi-chemin entre la sagesse et l’enfant devant un sapin de Noël.

— Pour l’instant, elle ne demande rien… Elle n’exige rien non plus.

Elle baisse les yeux un instant.

— Tout à l’heure, j’ai senti qu’elle voulait que je la libère. Pour se battre. C’était comme… si elle voulait me protéger.

Elle relève les yeux vers lui.

— Quand cette entité a parlé de moi, j’ai senti Cindy prête à bondir. Tu crois qu’elle va revenir… n’est-ce pas ?

Un silence s’installe. Gojo redresse la tête, les mains dans les poches, et cette fois, il ne plaisante plus.

— Ce que tu dis… c’est pas bête du tout. C’est même très juste. Les forces comme la tienne, elles réagissent d’abord par instinct. Les mots, c’est pour plus tard.

Il avance d’un pas, ses yeux dans les siens, même derrière ses lunettes.

— Et oui. Elle va revenir. Les fléaux comme ça… ils lâchent pas. Surtout quand ils trouvent quelque chose d’unique.

Il inspire, un peu plus grave.

— Alors comment on gère ça ?... On s’entoure. On apprend. Et surtout, on reste pas seul avec sa trouille.

Son sourire revient, plus doux.

— T’es pas seule, Aya. Et Cindy non plus.

Aya le fixe, sans vraiment réussir à voir ses yeux à travers les verres teintés.

— Elle a parlé d’une lumière… Tu sais ce qu’elle a vu, exactement ?

Gojo la regarde un moment en silence. Puis, lentement, il retire ses lunettes. Ses yeux bleu éclatant capturent la lumière du soir. Calmes. Intenses. Incisifs.

— Ce qu’elle a vu ? Ce que moi je vois aussi...

Il garde les lunettes dans une main, se redresse.

— Une étincelle. Quelque chose de brut, encore flou… mais capable d’éclairer même les coins les plus sombres.

Il accroche ses lunettes à sa chemise, le regard presque tendre.

— Les fléaux ressentent ce genre de lumière comme une brûlure. Certains veulent l’éteindre… d’autres s’en emparer.

Il sourit, complice :

— Reste à toi de choisir ce que tu veux en faire.

Aya reste un instant bouche bée devant ses yeux magnifiques, presque irréels.

— Je vais leur botter les fesses… avec ma lumière.

Elle rit doucement, puis le fixe à nouveau.

— Pourquoi tu caches tes yeux ? J’en ai jamais vu comme les tiens.

Gojo sourit, malicieux.

— Parce qu’ils sont trop beaux, évidemment. Si je les montre tout le temps, plus personne se concentre en cours.

Il reprend un ton plus posé.

— Et puis… ils voient des choses. Parfois trop. Alors je filtre, pour pas que ça m’écrase.

Un clin d’œil.

— Mais pour toi, je peux faire une exception de temps en temps.

Aya sourit à son tour.

— Promis, je resterai concentrée.

Elle le regarde plus sérieusement maintenant.

— Et toi ? T’as aussi une lumière ? T’as toujours été aussi fort ?

Gojo croise les bras, son sourire devient plus doux.

— On m’a dit que j’étais "trop fort" dès le berceau. J’suis né avec.

Il hausse les épaules.

— Mais la lumière, c’est pas juste de la puissance. C’est ce qu’on choisit d’en faire.

Il la fixe, presque pensif.

— Et non, j’étais pas toujours "fort" dans le bon sens. Le pouvoir, je l’avais. Mais la force… j’ai dû apprendre à la porter.

Il sourit, sincère.

— Toi aussi tu brilles, Aya. Pas encore clairement. Mais c’est là. Et crois-moi, ça fait peur à ceux qui vivent dans l’ombre.

Aya baisse brièvement les yeux, puis les relève, résolue.

— Moi aussi, je veux apprendre. À être forte. À ouvrir les yeux. À ne plus trembler.

Elle soupire, honnête.

— Mais j’veux pas être un poids. Pas "la petite chose fragile" qu’on doit protéger.

Gojo incline légèrement la tête, un éclat bienveillant dans les yeux.

— Tu veux avancer. Et crois-moi, c’est déjà énorme.

Il regarde un instant le ciel devenu mauve.

— Si t’es prête à bosser, faudra choisir tes alliés. T’entourer des bons.

Un sourire revient sur ses lèvres, complice :

— Alors dis-moi… parmi les élèves, avec qui t’aimerais t’entraîner ? Qui te pousse à progresser ?

Aya cligne des yeux, surprise par la question.

— Heureusement que t’as précisé "élève", sinon j’aurais dit toi. Ou Nanami. Sans hésiter.

Elle rit doucement.

— Mais... je dirais tous. Chacun a quelque chose à m’apprendre. Et puis… ce matin, Souta m’a vraiment aidée à y voir plus clair.

Elle sourit, sincère.

— S’il peut faire ça... je suis sûre qu’il peut m’apprendre encore plus.

Gojo éclate d’un petit rire franc, chaleureux.

— T’as l’œil, Aya. Souta parle peu, mais chaque mot est pesé. Il porte bien plus que ce qu’il montre.

Il se redresse, les lunettes retrouvant leur place sur son nez.

— Et toi, t’as un bon instinct. C’est précieux, surtout pour une sorcière en devenir.

Il arque un sourcil, malicieux :

— Et si un jour tu veux aussi t’entraîner avec moi, tu sais où me trouver. Je suis peut-être une superstar occupée… mais j’ai toujours du temps pour mes élèves.

Aya le regarde, amusée, puis réprime un bâillement.

— Une superstar, hein...

Elle sourit.

— Je m’en souviendrai. J’adore tes entraînements, surtout quand ils sont tôt le matin...

Elle baille encore, main sur la bouche.

— Désolée… Bonne nuit, monsieur Gojo.

Elle s’éloigne en souriant doucement, avant de disparaître dans le bâtiment.

Gojo l’observe un instant, un sourire attendri aux lèvres.

— Ouais, c’est ça… dors bien, petite lumière...

Son regard se baisse, l’espace d’un instant plus pensif, plus silencieux.

Puis, comme si de rien n’était, il tourne les talons, sifflotant doucement. Et disparaît à son tour dans l’ombre, les mains dans les poches.


Rendez-vous mercredi entre 20h et 22h pour la publication des deux prochains chapitres...

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