Le Revers de L'Infini - Tome 2 : L'Eveil
Gojo revient tranquillement, les mains dans les poches, un mochi entre les dents. Ses lunettes sont revenues sur le nez, et il jette un œil dans la salle comme s’il faisait ses courses. Il scanne les visages, puis s’approche de la table d’Aya, Yu et Souta.
— Vous trois. Bravo. Recrutés. Félicitations ! C’est pas que vous étiez mon premier choix, hein…
Son sourire est trop léger pour être honnête.
— C’est juste que Toge et Panda ont disparu je-ne-sais-où. Donc : promo du jour !
Il balance un dossier devant Souta, sans leur laisser le temps de répondre.
— Hôpital public. Un patient dans le coma. Tout un étage qui part en cacahuète : cauchemars, angoisses, hallucinations. Rien de visible, mais on pense à un fléau parasite bien accroché à l’aura du malade.
Il jette un regard à Yu.
— Toi, Mister zen-zen, si ton pouvoir d'apaisement est pas que de la déco, on peut empêcher qu'il se transfère ailleurs...
Un sourire en coin pour Souta.
— Ton radar de paranoïaque, parfait pour dénicher une bestiole sournoise...
Et plus doucement, à Aya :
— Toi... lis entre les lignes. Ce genre de fléau adore ceux qui doutent ou cogitent trop. Sois pas une porte ouverte.
Il tapote le dossier, comme pour ponctuer son discours.
— Faites pas de bêtises. Y’a des gens en vie là-bas. Ce serait ballot qu’ils finissent plus mal qu’ils ont commencé...
Puis il tourne les talons. En s’éloignant :
— Et si l’infirmière vous appelle "Takeshi" dans le couloir, souriez et dites merci. Pas le moment de l’offusquer !
Yu reste la bouche entrouverte.
Souta soupire.
Aya regarde Souta et le dossier, un peu tendue.
— Un hôpital...
Souta feuillette brièvement.
— Classe 2. Fléau parasite. C'est pas le genre qui te saute dessus. C'est pire. Il s’installe.
Il lève les yeux vers Aya et Yu.
— Si l’un de nous décroche, il prendra racine. Donc pas de panique, pas d’imprudence.
Yu avale difficilement sa salive.
— Mais pourquoi il s'en charge pas lui-même...
Souta, sèchement :
— Parce qu’on est là pour apprendre. Et Gojo adore nous balancer dans le bain, juste assez profond pour voir si on nage.
Il regarde Aya.
— T’en dis quoi ?
— J’ai déjà refusé ? Tu me sous-estimes...
Elle range ses affaires.
Souta hoche doucement la tête.
— Pas ce que j’ai dit. Je te connais un peu maintenant… T’as juste l’air trop douce pour ce genre d’endroit. Mais t’es là, à chaque fois.
Il met sa veste sur l’épaule.
— Donc, allons voir ce que cache ce lit d’hôpital.
Yu, nerveux :
— Super… J’adore les histoires de possessions.
Il suit le mouvement.
Aya l’encourage doucement :
— Ça va aller, Yu.
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[À l'extérieur du bâtiment]
Une voiture noire attend. Kiyotaka, assistant exorciste, est appuyé contre la portière conducteur. Il lève les yeux de sa tablette.
— Pile à l’heure. Gojo m’a prévenu. Vous avez l'air ravi.
Il ouvre la portière passager.
— Montez. Dossier complet à l’arrière sur la tablette, si vous voulez réviser. Essaie de pas traumatiser le nouveau, Souta.
Souta soupire et monte. Aya salue Kiyotaka et s’installe. Elle prend la tablette. Yu suit en silence.
Souta demande calmement :
— T’as jamais fait face à un parasite, hein ?
Yu fait non de la tête.
— Non... enfin... pas consciemment.
Il essaie de plaisanter.
— Si on compte pas la fois où j’ai cru qu’un miroir me fixait trop longtemps...
Souta, moqueur :
— C’était pas un fléau. Juste ta coupe de cheveux.
Kiyotaka sourit dans le rétroviseur.
— Ne vous éloignez pas. Si l’un de vous commence à avoir des vertiges ou à entendre des voix... vous sortez.
Yu déglutit.
— Et... on est censés le purifier comment, s’il est collé à un type dans le coma ?
Souta, sérieux :
— On le déloge. De gré ou de force.
Il regarde la tablette entre les mains d’Aya.
— D'autres infos ?
Aya secoue la tête.
— Rien de plus...
Elle lui tend la tablette.
Souta la prend doucement.
— C’est pas le plus fort, mais c’est le genre qui te grignote si t’es pas solide.
Yu, un peu amer :
— J’me demande s’il est solide, lui... le patient.
Kiyotaka répond :
— Il l’était. Votre but, c’est qu’il le reste.
La voiture tourne dans une rue calme. L’hôpital est en vue. Aya serre son livre contre elle.
— Tiens-toi prête, Cindy...
La voiture s’arrête. Kiyotaka coupe le moteur, ouvre le coffre. Il en sort trois glaives compact chargés en énergie occulte.
— Pas de panique, rien de surdimensionné. C’est un parasite, pas un ogre.
Il distribue les armes.
Aya prend le glaive à contre-cœur.
— Je suis obligée ?
— Oui. Consigne de Gojo.
Il ferme le coffre.
— Si vous ressentez une gêne, une perte de repères... c’est qu’il tente de vous atteindre.
Souta prend calmement le glaive. Aya dépose son livre dans la voiture.
Yu range son arme en silence.
— Étage 4, aile Est. Chambre 418. Le patient est seul. Vous avez une heure. Pas plus.
Il tend des talkies.
— Gardez vos radios ouvertes. Pas de héros. Pas de secrets.
Chacun prend le sien.
Yu murmure :
— J’ai pas l’intention de m’éloigner...
Aya, inquiète :
— Moi je reste avec vous.
Kiyotaka s’écarte, leur ouvrant le passage.
— Bonne chasse.