Le Revers de L'Infini - Tome 2 : L'Eveil

[il y a deux chapitres postés à chaque fois... Avez-vous lu le 13 ? celui où Gojo fête l'anniversaire de Souta ?]

La cour dort presque, noyée dans un halo bleuté. Le vent glisse entre les arbres, léger, portant encore les échos du réfectoire. Aya lève les yeux vers le toit, là où une silhouette allongée découpe le ciel.

— Monsieur Gojo ?

Une voix tranquille lui répond, un peu étirée, comme sortie d’un rêve.

Allongé sur le toit, les mains croisées derrière la tête, Gojo ouvre un œil. Il se redresse à demi, l’air amusé.

— Quelqu’un me demande ?

Aya hésite, puis répond timidement :

— C’est Aya...

Gojo se lève avec la nonchalance d’un nuage et descend du toit en lévitant, ses vêtements frôlant l’air sans bruit. Il atterrit doucement à ses côtés, un sourire accroché aux lèvres.

— Que puis-je faire pour miss Sunshine ?

Aya s’incline légèrement, mal à l’aise.

— Bonsoir... Pardon de te déranger...

Elle serre un peu plus son livre contre elle. La nuit a ce silence qui rend les excuses plus fragiles.

Gojo incline la tête, bienveillant.

— Tu ne me déranges pas. Vas-y.

Aya prend une inspiration.

— Je me demandais... Tu as vu tout ce qu’il s’est passé dans l’hôpital ?

Gojo hausse les épaules, son regard se voile d’un éclat sérieux.

— Honnêtement ? J’ai compris que quelque chose clochait dès que j’ai vu vos têtes en sortant...

Il sourit à peine, sans moquerie.

— Un fléau de Classe S dans un hôpital classé 2, c’est pas une erreur... c’est un piège...

Sa voix se fait plus grave, son ton plus posé.

— Et maintenant, je veux savoir qui l’a tendu.

Aya le fixe, incertaine.

— Tu ignorais sa présence... vraiment ?

Gojo pousse un soupir, ajuste lentement ses lunettes sur son nez.

— Ouais. J’ai rien senti.

Le silence tombe, dense. Même le vent semble suspendu.

— Et c’est bien ça qui m’inquiète, ajoute-t-il.

Son regard se perd un instant dans le vide, là où la nuit se confond avec la ville.

— Un fléau de ce niveau qui masque sa présence... soit il est très, très spécial. Soit quelqu’un l’a aidé.

Aya hésite avant de reprendre, la voix plus basse.

— Tu sais ce qu’on a fait sur place ?

Gojo la regarde, les mains dans les poches.

— J’en sais assez pour m’inquiéter. Mais pas assez pour comprendre ce que vous avez vraiment vécu. Et ça, j’ai besoin de le savoir.

Aya hoche la tête, et sa voix, d’abord tremblante, se fait plus assurée. Elle raconte tout :

le premier fléau éliminé proprement, Cindy qui agit sans causer de dommages au patient.

Le second, figé par Yu.

Le troisième, détruit par Souta.

Puis le territoire, la boucle temporelle, le loup de Souta, l’œil de reconnaissance de Cindy.

Et enfin, le rang S... reconstitué après l’attaque. Fuyant Yu.

Elle lève un doigt et conclut dans un souffle :

— Pouf.

Gojo l’écoute sans un mot. Ses lunettes reflètent la lumière pâle d’un lampadaire. Quand elle termine, il sourit brièvement, presque fier.

— Bon... Au moins vous avez fait un vrai travail d’équipe. Et ça, c’est cool !

Il lève le pouce, geste léger, presque enfantin, avant que son visage ne se referme.

— Ce genre de mission... c’est pas censé être pour des élèves.

Il frotte sa nuque, pensif, un pli d’inquiétude traversant son expression.

— Ce que vous avez affronté, c’était au-dessus. Et pourtant, vous vous en êtes sortis ensemble. Ça, c’est ce que je retiens.

Il marque une pause, le regard tourné vers les fenêtres de l’école où les lumières s’éteignent une à une.

— Le reste... c’est à moi de m’en occuper. Toi, continue juste à faire confiance à ton équipe. Et à Cindy.

Un clin d’œil discret, presque tendre. Aya sourit doucement.

— C’est Yu qu’il faut féliciter... Il a été impressionnant.

Un bâillement lui échappe, qu’elle tente de cacher.

— Pardon...

— T’as pas à t’excuser, dit-il simplement. Vous avez vécu plus que ce qu’on demande à des élèves.

Il pose une main légère sur son épaule. Le geste est bref, mais il contient toute une promesse.

— Allez. Repose-toi, soldate. Le monde peut attendre un peu.

Aya acquiesce, les paupières déjà lourdes.

— Je vais aller dormir. Bonne nuit, monsieur Gojo. Et merci.

— Bonne nuit, Aya.

Elle s’éloigne, sa silhouette glissant entre les ombres du couloir, puis disparaît dans le bâtiment.

Gojo reste seul dans la cour. Il lève les yeux vers le ciel, ses mains retrouvant la chaleur de ses poches.

Les nuages se disloquent, découvrant un morceau d’étoile.

— {Hm... Yu Min-Jae...}

Son regard s’assombrit, perdu quelque part entre la lune et une inquiétude sans nom.

Puis il tourne les talons, entre à son tour, refermant la nuit derrière lui.