Le Revers de L'Infini - Tome 2 : L'Eveil
[ Je publie toujours les chapitres par deux, avez-vous bien vu passer le 21 ?]
La nuit tombe sur l’école. Le vent agite légèrement les branches au-dessus de la cour. Souta s’arrête au centre de l’espace dégagé, les mains toujours dans les poches. Il se tourne vers Aya qui le suit à pas mesurés, le livre serré contre sa poitrine.
— On va commencer simple, dit-il d’un ton calme. Je vais pas t’envoyer contre un fléau. De toute façon, c’est pas mon rôle.
Il désigne du menton l’espace autour d’eux.
— Ici, t’as rien à craindre. C’est pas un test. C’est juste toi… et elle.
Il lève une main, paume ouverte, sans menace. Juste une invitation.
— Fais-la venir. Dis à Cindy de m’approcher… et de me toucher. Rien d’autre. Si elle peut faire ça sans m’attaquer, c’est que t’as le contrôle. Et ça, c’est déjà énorme.
Aya hoche lentement la tête.
— D’accord… ça, elle peut le faire.
Elle ferme les yeux. Sa respiration ralentit. Elle plonge dans ce lien intérieur, profond. Une pulsation familière résonne doucement — celle de Cindy. Quand elle rouvre les yeux, elle n’est plus tout à fait elle-même. Elle voit à travers les prunelles invisibles de la créature. Cindy approche lentement de Souta, l’entoure, puis effleure simplement sa main tendue.
Aya rouvre les yeux brusquement. Troublée.
— C’était étrange…
Souta baisse légèrement la main.
— Je l’ai sentie. Pas vue, mais… c’était doux. Pas hostile.
Il croise les bras, pensif.
— Ça veut dire que t’as appris à poser des limites. À elle… et à toi.
Un court silence.
— C’est pas rien.
Aya hoche la tête lentement.
— Au début je la voyais faire… Ensuite, j’ai vu à travers elle… mais là… c’est comme si c’était moi qui avais touché ta main.
Souta la regarde avec plus d’attention.
— Si t’as ressenti le contact comme si c’était toi… alors essaie de me toucher toi-même. Pour comparer.
Son ton reste calme, mais son regard fuit un instant. Il regrette un peu sa propre idée.
Aya s’approche timidement, les joues rosies, et effleure du bout des doigts son bras.
— Ben oui… ça fait pareil.
Souta détourne légèrement les yeux, croise les bras.
— Intéressant. Ton lien avec elle est plus profond que prévu… Tu ressens vraiment à sa place.
Il reprend, plus bas, presque gêné :
— Et euh… pas besoin de rougir pour si peu. C’était pour la science.
Aya recule un peu, encore plus rouge.
— Oui… je sais. Et… oui, c’est comme si j’étais elle.
Souta garde un ton posé.
— Donc si elle attaque, c’est toi qui frappes aussi. C’est pas juste un pouvoir… c’est une extension. Une partie de toi. Tu es Cindy, et elle est toi.
Il détourne le regard, presque avec un sourire.
— Faudra que t’apprennes à garder ton calme. Sinon, si un jour je dis une connerie… tu risques de me mordre pour de vrai.
Aya rit doucement.
— C’est une idée...
Mais son sourire disparaît aussitôt.
— Tu dis que c’est pas un pouvoir… ?
Souta hausse les épaules.
— Pas au sens classique. Un pouvoir, tu l’invoques, tu le domines. Là, elle agit, elle ressent, elle obéit… ou pas. C’est plus intime. Plus dangereux aussi. Mais si tu la maîtrises, tu seras plus forte que beaucoup ici.
Il la fixe un instant, plus sérieux :
— Faut juste que tu décides si t’as peur d’elle… ou si vous êtes du même côté.
Aya le regarde, hésite, puis murmure :
— J’ai jamais eu peur d’elle. Elle a toujours été là pour m’aider.
Souta détourne brièvement les yeux, comme pour masquer une réaction intérieure. Puis il revient à elle.
— Tant mieux. Parce que c’est à toi qu’elle répond. Qu’elle soit née avec toi ou en toi, peu importe. C’est toi qui choisis ce qu’elle fait.
Une pause, puis il lève légèrement le menton :
— Demain, on poursuit ?
Aya sourit timidement.
— Oui… demain.
Elle regarde la nuit tombée autour d’eux, l’air plus calme.
— Je vais aller dormir, je crois. Merci, Souta… vraiment.
Il lui adresse un signe de tête, sans insister.
— Tu me remercieras quand tu ne trembleras plus.
Il tourne les talons et s’éloigne, mains dans les poches, vers le dortoir des secondes années.
Aya l’observe partir, le livre serré contre elle. Puis elle pivote doucement et marche à son tour vers sa chambre.
Prochains chapitres, mardi soir entre 20h et 22h