Le Revers de L'Infini - Tome 2 : L'Eveil
[N'oubliez pas que je publie toujours les chapitres par deux, vérifiez bien si vous avez lu le précédent :) ]
Le réfectoire bourdonne mollement sous la chaleur. Le plafond vibre légèrement, les ventilateurs tournent dans une fatigue presque audible. Dans un coin, Rin débarque d’un pas traînant. Elle prend son plateau, attrape quelques plats tièdes à la chaîne, puis se laisse tomber sur une chaise avec un soupir théâtral.
— Fait chaud… grommelle-t-elle, en remuant son riz avec des baguettes paresseuses. Y a que Jin pour supporter une chaleur pareille.
Son regard inquisiteur balaye les tables alentour, entre défi et lassitude. Elle commence à manger, tout en surveillant, comme toujours.
La porte grince légèrement. Megumi entre. Son pas est souple, presque sans bruit, mais son regard est aussi tranchant que direct. Mains dans les poches, il s’approche de la table de Rin, ses yeux plantés dans les siens.
— Rin, c’est bien toi ?
Elle se redresse légèrement, croise les bras, mi-surprise, mi-sarcastique.
— La rumeur disait que t’étais froid, mais là, on touche au zéro absolu... C’est de famille ?
Elle le jauge, plissant les yeux.
— Alors, Megumi Fushiguro… tu fais quoi dans le coin ? C’est pas une zone pour exorcistes en mission.
Megumi ne sourcille pas. Il reste là, calme, son ton neutre.
— J’enquête avec Nanami et Gojo. Sur Raku’en.
À ces mots, Rin relève un sourcil.
— Elle serait dans le secteur ? Ou c’est une parano des anciens ?
— Rien n’est confirmé. Mais il y a une présence. Floue. Quelque chose ou quelqu’un qui pourrait être lié à elle. Et Aya pourrait être ciblée.
Le visage de Rin se ferme instantanément. Elle pose ses baguettes. La tension grimpe.
— Je te préviens : si tu veux la foutre sous cloche pour une intuition, on va pas s’entendre.
— Je veux la protéger. Pas l’enfermer, réplique Megumi sans hausser le ton. Et c’est pour ça que je te parle.
Il marque une pause, ses yeux plantés dans ceux de Rin.
— T’es loyale. Et t’as les nerfs. Si tu sens quoi que ce soit d’anormal, viens me voir. Ou Gojo. Ou Nanami. Discrètement. Pas un mot de trop.
— Tu crois que je vais regarder ça de loin ?
Megumi secoue la tête.
— Non. Et t’auras pas à le faire seule.
Il s’installe à moitié, son ton devenant plus grave.
— Souta veille aussi. Il garde un œil sur tout, sans que ça se voie.
Rin cligne des yeux, un brin interloquée.
— Souta ? Je pensais qu’il gardait ses distances.
— Il les garde. Pour mieux voir venir. Et parce qu’il n’a pas le luxe de se rater.
Mais tu peux lui faire confiance.
Elle réfléchit un instant, puis acquiesce.
— OK. Si lui, toi, et les grands vous surveillez… alors j’ouvre l’œil. Mais au moindre faux pas… je serai pas la dernière à réagir.
— C’est exactement ce que j’attends de toi.
Il reste un instant debout, puis finit par tirer une chaise et s’installe à côté d’elle. Son regard quitte enfin la gravité de leur échange. Il attrape une barquette de nourriture laissée là, l’air vaguement dépité.
— Bon… assez parlé d’ombres et de suspicions.
Il inspecte le contenu du plateau avec l’air de quelqu’un qui s’apprête à manger une punition.
— Dis-moi plutôt : c’est toujours aussi infect ici, ou j’ai juste oublié le goût des cantines ?
Rin arque un sourcil, un sourire en coin aux lèvres.
— Oh, tu t’es assis ?! Ça veut dire qu’on fraternise maintenant ?
Elle brandit un onigiri mou et à moitié écrasé, l’ironie en étendard.
— Bienvenue dans le ventre de l’enfer. Menu du jour : fade, tiède, et probablement radioactif.
Megumi soupire, pioche une bouchée, mâche avec une lenteur pleine de regrets.
— …Je confirme.
Rin s’avachit un peu plus, les bras sur la table.
— T’es resté combien de temps sans poser un pied ici, sérieux ?
— Trop longtemps pour que ça me manque. Et pas assez pour oublier ce goût de carton humide...
Ils mangent quelques secondes en silence. Une pause, suspendue hors des ombres qu’ils traquent. Pas de sorts, pas de menaces. Juste deux ados, autour d’un plateau trop tiède, avec la même inquiétude tapie quelque part entre les mots.
Rendez-vous mercredi entre 20h et 22h pour la suite...