Le Revers de L'Infini - Tome 2 : L'Eveil
Chapitre 38 : Le silence après la vague
1484 mots, Catégorie: T
Dernière mise à jour 11/11/2025 20:28
[Comme d'habitude, n'oubliez pas que les chapitres sont publiés par deux... Vérifiez si vous n'avez pas manqué le 37 ;) ]
Le monde se remet en place d’un seul coup. Pas de transition, pas de fondu. Juste un claquement sec, la sensation d’être recrachés, et la cour familière de l’école se reforme autour d’eux. Le ciel est clair, immobile. L’air sent l’herbe fraîche. Un contraste si violent que le cerveau peine à suivre.
Aya cligne plusieurs fois des yeux. La lumière de fin de journée lui brûle les rétines après la noirceur du temple.
— Ho… murmure-t-elle en inspirant profondément. C’était… rude, comme retour.
Sa voix tremble un peu. Elle serre son livre contre elle comme un point d’ancrage.
Yu, lui, n’a pas encore réintégré son corps. Il reste debout, mais son regard flotte ailleurs, encore emprisonné dans le Temple Inversé. Ses doigts frémissent, comme s’ils retenaient encore l’onde qu’il a libérée.
— Ils se sont inclinés… souffle-t-il. J’ai rien forcé. Rien du tout.
Il tourne la tête vers Aya, incrédule, inquiet, cherchant confirmation.
— T’as vu… hein ? C’était pas juste moi.
Aya hoche doucement la tête, le cœur battant encore trop vite.
— Oui. J’ai vu… et j’ai senti ton énergie aussi. Ça n’avait rien de normal.
Elle n’ajoute rien. Sa gorge est sèche. C’est la première fois qu’elle a peur de ce qu’elle a ressenti, pas du temple, pas des fléaux, mais de ce qu’elle a vu naître en Yu.
Gojo, lui, ne parle pas tout de suite. Il se tourne vers eux lentement, les mains dans les poches, calme… mais son regard n’a plus rien de léger. Il scrute Yu comme un médecin examinerait un phénomène inconnu.
— Rien dans ce que t’as libéré n’était normal, Min-Jae.
Sa voix tombe, plus basse, plus froide.
— Ce n’était pas de l’énergie maudite brute. Pas une simple impulsion. C’était… organisé. Ancien. Une volonté. Une force qui n’attendait qu’une porte.
Silence.
Yu avale sa salive.
Gojo recule d’un pas, croise les bras.
— On va surveiller ça.
Il adoucit volontairement son expression en se tournant vers Aya.
— Et toi… merci d’avoir tenu parole. Observation nickel.
Aya incline légèrement la tête, sans oser sourire. Ses mains tremblent autour de son livre.
Yu reprend enfin son souffle, secouant la tête comme pour se réveiller.
— Ce que vous avez fait, là-bas Sensei… c’était dingue. Vous avez nettoyé le temple comme si c’était rien. C’était… classe. Incroyablement classe.
Il rit nerveusement.
— J’crois que je viens de comprendre pourquoi tout le monde vous craint autant… et vous respecte.
Aya sourit, légère mais sincère.
— C’est toi qui as été dingue, Yu. Ils se sont inclinés devant toi…
Yu fronce les sourcils, perplexe.
— Ils… se sont inclinés… ouais. Mais j’suis même pas sûr qu’ils s’inclinaient devant moi.
Il serre les poings, un frisson dans l’épaule.
— C’était trop calme. Trop facile. Comme s’ils attendaient autre chose.
Gojo avance d’un pas souple, l’ombre d’un sourire aux lèvres.
— C’est rare, les fléaux dociles. Très rare. Mais tu t’es pas effondré, Min-Jae. Je note.
Un doigt tapote sa tempe.
— Je vais continuer à t’observer.
Yu pâlit.
— Je sais pas si c’est rassurant ou terrifiant…
Gojo hausse les épaules, totalement honnête :
— Les deux. Probablement.
Puis, d’un coup, comme si l’atmosphère ne devait surtout pas devenir trop lourde, il gonfle la poitrine.
— Bon ! À part ce détail minuscule du pouvoir ancien qui a failli se réveiller… On peut dire que j’ai encore brillé ! Nettoyage impeccable ! Pas un pli sur la veste ! Dit-il avec un sourire flamboyant.
Aya rit, soulagée par la rupture de tension.
— Sans froisser ta veste… oui. Clairement, avec vous deux, les autres peuvent aller faire la vaisselle.
Yu soupire, dramatique.
— Il va s’auto-décorer. Je le vois venir.
— La gloire est son propre costume, Min-Jae ! renchérit Gojo en levant un doigt triomphalement.
Aya secoue la tête, amusée.
— Vous faites un bon duo.
— Un duo comique, ouais, marmonne Yu. Le Sensei et le Survivant.
— Je fais tout le boulot stylé, et toi tu paniques, corrige Gojo.
— Wow. C’est beau l’humilité, chez vous sensei…
— Je suis l’humilité. En édition limitée !
— …Je regrette d’être venu. Souffle Yu
Aya rit, un rire clair qui fait tourner Yu vers elle, surpris, attendri.
— On s’ennuie pas avec vous deux, dit-elle doucement.
Gojo claque des doigts, satisfait.
— L’animation, c’est moi ! Les traumatismes, lui !
Yu grogne.
— Eh. Ça va. Vous pourriez au moins prétendre que je suis utile…
Aya lui fait un clin d’œil.
— Tu l’es. Et… très impressionnant, en plus.
Yu ouvre la bouche. Rien ne sort. Il détourne le regard, gêné.
Gojo, lui, regarde sa montre imaginaire.
— Bon ! Je dois prétendre être un adulte responsable ailleurs. Min-Jae ? Évite juste de déclencher la fin du monde pendant que j’ai le dos tourné.
Il s’éloigne en reculant, agite deux doigts vers Aya.
— Si Min-Jae s’effondre dramatiquement, tu cries SATORU très fort. J’apparaîtrai… probablement.
— PROBABLEMENT ?! hurle Yu. Je suis foutu… Il rit nerveusement.
— Pas foutu Min-Jae ! Formé ! réplique Gojo, déjà loin.
Il disparaît dans un couloir.
Aya soupire en souriant.
— Bonne soirée, Satoru…
Elle se tourne vers Yu.
— Comment tu te sens… vraiment ?
Yu reste un instant silencieux, avant de murmurer :
— Je me sens… chargé. Comme si ce que j’ai libéré là-bas… m’avait suivi.
Il sourit, petit, fragile.
— Mais t’être eue près de moi… ça garde les choses à leur place.
Aya rougit malgré elle.
— Tu as été fort, Yu. Vraiment.
— Fort, ouais… Mais pas sûr que ce soit une bonne chose.
Il lève les yeux vers elle, plus doux.
— Toi… t’as vu ça. Et t’es restée. Ça m’a marqué. Tu as changé, Aya.
Elle se crispe un peu.
— J’étais morte de peur…
— Peut-être. Mais t’es restée.
Il sourit.
— Et parfois, c’est ça, le vrai courage.
Elle baisse les yeux, touchée.
Yu reprend, un peu taquin :
— Et puis… t’as un livre tueur. C’est intimidant. Peut-être encore plus que le dragon de Souta !
Léger battement quand elle l’entend parler du shikigami, puis elle lève son livre, le fait claquer comme une petite mâchoire.
— Méfie-toi. Il mord !
Elle avance d’un pas menaçant.
Yu hurle faussement :
— Aaaah ! Pas le grimoire carnivore !
Ils éclatent de rire. Un vrai rire, qui résonne longtemps dans la cour.
Puis Aya s’arrête, elle écarquille les yeux, horrifiée.
Le monde se déchire.
Une tache rouge.
Un corps. Dans l’herbe.
Rin.
La gorge ouverte.
Les yeux grands, figés.
Du sang partout.
L’hallucination la transperce.
— NON RIN!!
Son cri fend l’air. Le livre tombe de ses mains.
La cour retrouve sa normalité. Le silence heurte.
Yu se retourne, alarmé.
— Aya ?!
Son regard est inquiet. Vraiment inquiet en apparence. Mais derrière ce masque… un tressaillement. Un scintillement infime dans ses iris dorées. Rapide. Trop rapide. Un éclat d’autre chose. Qui disparaît aussitôt.
Il récupère son livre avec douceur.
— Qu’est-ce que t’as vu ? Tu t’es figée comme si t’avais vu un fantôme…
Aya, livide, récupère son livre.
— Une hallucination… je crois. C’était tellement réel…
— T’as crié fort, murmure Yu. Tu devrais aller te reposer.
— Oui… je vais me reposer. Désolée…
Elle s’éloigne, les jambes vacillantes.
— Bonne nuit, Yu…
— Bonne nuit, Aya.
Elle ne voit alors pas le regard qu’il pose dans son dos, accompagné d’un petit sourire en coin.
Au-dessus d’eux, sur un toit, Gojo est accroupi.
Il n’a pas bougé. Son aura est dense, tranchante.
Ses lunettes abaissées. Ses yeux parfaitement clairs.
Il a tout vu.
Aya. Le cri. Et surtout Yu.
Ce tressaillement infinitésimal.
Ce scintillement trop rapide pour un humain. Pas de peur. Pas de surprise.
Autre chose...
Gojo se redresse. Son visage se ferme. Plus d’humour. Plus de façade. Juste une froideur parfaite.
— {ça…Ce n’était pas un sursaut.}
Il disparaît en un battement de paupière vers le bâtiment administratif, et s'engouffre dans le bureau du proviseur.
A suivre...
Rendez-vous jeudi pour les prochains chapitres, entre 20h et 22h...