La nuit où les étoiles se sont rallumées

Chapitre 4 : FINN

899 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour 13/11/2025 23:08

Au bout d’un moment, le souffle commence à manquer.

Je me laisse tomber sur un trottoir, haletant, et j’ai presque envie de continuer à pleurer ou de rire. Ces portails, ces haies impeccablement taillées, ces baraques en forme de palais… Toutes ces merdes qui me crient que je n’ai rien à faire ici, que j’ai toujours été un intrus, je les reconnais ! Durant ma course effrénée, j’ai tourné en rond, car je suis pratiquement de retour chez les Adams.

Les larmes remportent le combat, alors pour les réfréner, je mets ma bouche contre mon avant-bras, celui qui n’est pas blessé, et je hurle. Ça ne suffit pas. La douleur continue à me bouffer de l’intérieur. Putain, putain, putain.

Je sors mon portable de ma poche, espérant y lire un message d’excuses de Nate, et évidemment, rien. Mais au lieu de fracasser l’engin par terre ou de le rengainer, je me force à faire ce que j’aurais dû, l’hiver passé : demander de l’aide.

On ne va pas se mentir, le choix est plutôt restreint. Kenna est à New York, Kurt à Boston et Cliff en plein concert. Ne reste que Jaeger, mais il fait face à ses propres combats. Depuis que son père est poursuivi pour fraude fiscale, il a tout perdu et se bat pour récupérer la garde de son frère et de sa sœur, embarqués par les services sociaux. Il squatte même ma piaule chez Cliff, vu que sa maison familiale a été saisie… Il n’en parle pas souvent, mais je sais qu’il galère.

J’hésite, le doigt au-dessus du clavier. Puis-je vraiment lui imposer mes soucis ? Je tranche en me disant que je veux juste éviter d’être seul, pas forcément déballer ma dispute avec Nate.




Moi – Aujourd’hui, à 22h36

T’es au boulot ?

Jaeger – Aujourd’hui, à 22h36

Ouais, pourquoi ?


À quoi je pensais ? Bien sûr qu’il est au taf à cette heure-ci. Son père l’a laissé sur la paille, il doit désormais gagner sa vie. Malgré tout, la déception me serre le bide.


Moi – Aujourd’hui, à 22h37

Pour rien

J’avais juste envie de sortir prendre l’air

Une prochaine fois, t’inquiète

Jaegger – Aujourd’hui, à 22h38

T’es sûr ?

Tu peux toujours venir au bar, si tu veux

C’est calme, ce soir

Moi – Aujourd’hui, à 22h39

Non, ne t’en fais pas

De toute façon, on se voit au hangar

Demain ?

Jaeger – Aujourd’hui, à 22h39

Ouais, tu passes me chercher à 14h ?

Moi – Aujourd’hui, à 22h39

👍

 

Soudain épuisé, je me laisse aller en arrière. Je me sens con de ne pas avoir accepté, mais c’était au-delà de mes forces. Je ne veux pas foutre la honte à Jaeger au bar, avec ma gueule de déterré, même si je sais qu’en vérité, je me suis dégonflé.

La tristesse et la colère recommencent à me grignoter le ventre jusqu’à le remplir d’acide. Je vais devenir dingue si je reste sans rien faire.

Alors comme un automate, je me remets en route.

Personne ne guette mon arrivée quand je pousse le portail des Adams. Le vaste parc m’accueille, immobile et silencieux, comme s’il retenait son souffle. Chacun de mes pas explose à mes oreilles et j’ai peur de voir surgir la mère de Nate d’une seconde à l’autre. Enfin, je le vois. Un gros chêne à côté d’un étang.

Je cours, puis je m’écroule à genoux.

Faites que ce soit bien là !

Je creuse avec ma main droite, histoire d’économiser mon biceps gauche. Mes ongles se remplissent de terre sous la faible lueur des étoiles. L’un d’eux se brise, mais je poursuis mes recherches.

Enfin, un bout de plastique apparaît.

J’extrais un paquet de weed. Elle a l’air intacte, comme les feuilles à rouler et le briquet que j’avais glissés à l’intérieur.

Quand j’ai décidé d’intégrer l’armée, je pensais en avoir fini avec ces conneries : plus de joints ou de combats illégaux. Les premiers temps ont été difficiles, et j’ai souvent dû lutter, trouver des alternatives, comme les entraînements de boxe ou les clopes, que j’ai fumées comme un pompier… Ouais, ça craint. Au final, il n’y a qu’un truc que je n’ai pas réussi à faire.

Balancer ma weed.

Je crois que ça me rassurait, de savoir que je l’aurais sous la main, au cas où. Et on dirait que j’ai bien fait.

Les mains tremblantes, je suis tenté de m’en rouler une tout de suite, mais une voix me fait sursauter.

— Finn ?

La mère de Nate. Elle a dû me voir malgré mes précautions.

Je me casse.


Note de l'autrice Si vous avez lu le tome 3 (Ces prières que je fais dans le noir), vous aurez reconnu l'échange de messages, héhé. Sinon, le deuxième paragraphe m'a donné du fil à retordre. Je l'ai réécrit pas mal de fois avant de trouver une version satisfaisante. Et oui... Finn renoue avec ses vieux démons... A la semaine prochaine, pour un bond dans le futur! :D

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