Le Hobbit : A la reconquête de soi

Chapitre 6 : En route pour Grand'Peur

1745 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour 25/10/2020 14:04

« Puis survint par le plus grand des hasards cette fameuse rencontre entre Gandalf et Thorïn, rencontre qui devait bouleverser les destinées de la Maison de Durïn et conduire également à d’autres fins, plus grandes encore », Le Seigneur des Anneaux, Appendices p. 1498.

 

 

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- Vous n’y pensez pas ?!

Ce fut la première phrase que prononça Thorïn Ecu-de-Chêne au lever du jour. Contrarié était un mot bien faible pour décrire ce qu’il ressentait. Une frustration au-delà des mots gagnait son cœur face à l’annonce subite du magicien.

- Si je vous quitte, c’est que j’y suis contraint.

- Contraint ?! Mais par quoi ? S’emporta le Nain en suivant le vieil homme à l’extérieur de la maison. Vous m’avez promis votre aide Gandalf ! Vous ne pouvez partir maintenant.

Le magicien ne l’écoutait plus qu’à moitié, préférant préparer ses affaire pour le voyage qu’il avait prévu. Abandonner la compagnie ne lui plaisait guère, mais en tant que protecteur de la Terre du Milieu, il était de son devoir de vérifier si les rumeurs qui lui avaient été contées étaient ou non fondées.

- C’est vous qui êtes venu à moi près de Brie pour reconquérir la Montagne ! Continua Thorïn. Et pour quoi au final ? Partir je ne sais où sans savoir si, où et quand vous reviendrez !

- Que se passe-t-il ?

Sur le seuil de la maison, Bilbo regardait ses amis sans comprendre la raison de leur dispute. Thorïn ne lui accorda aucun regard, bien trop en colère pour accorder son attention sur qui que ce soit, hormis sur le magicien. Quant à Gandalf, il invita le Hobbit à retourner dans la maison, suivi de près par Ecu-de-Chêne.

- Il y a un problème ? Demanda Dwalïn en voyant l’air colérique de leur chef.

Gandalf l’ignora et fit signe à Alyson de le suivre. Il sortit une nouvelle fois de la petite maison et s’éloigna de quelques mètres pour éviter les oreilles indiscrètes. Son amie l’observait et remarqua l’air contrarié sur les traits de son visage. Il semblait avoir vieilli de dix ans en à peine quelques minutes. Il fronçait ses sourcils broussailleux et semblait chercher ses mots pour éviter une nouvelle querelle.

- Je dois quitter la compagnie, dit-il. Des affaires urgentes m’attendent à l’Ouest d’ici.

- Vous voulez parler des Monts du Rhudaur et de Dol Guldur ?

Le magicien regarda Alyson, les yeux arrondis par la surprise.

- Que savez-vous dessus ?

- Seulement ce que j’ai entendu dire. D’après Radagast le Brun, Dol Guldur serait soumis à un sort de dissimulation.

- Vous a-t-il montré l’arme de Morghul ? 

La jeune femme hocha la tête, l’air grave. Le magicien des bois lui avait raconté ce qu’il avait vu dans cette vieille cité abandonnée, lui expliquant que quelqu’un invoquait les morts. Or, un nom lui revenait sans cesse en tête. Un nom qu’elle refusait de prononcer.

- Pourquoi me dites-vous cela ? Continua Alyson après de longues secondes de silence.

- J’ai peur qu’il arrive malheur à la compagnie. Si c’était le cas, je ne pourrais me le pardonner car Thorïn a raison. C’est moi qui suis venu le voir pour l’inciter à marcher sur Erébor. Mais la tâche s’avère plus dangereuse que prévue.

Désormais, les mots de Gandalf se transformaient en chuchotements, comme s’il craignait que ses amis ne l’entendent.

- Quelqu’un doit veiller sur eux.

- ... Non. Gandalf non !

Le magicien rattrapa son amie, qui s’était déjà détournée de lui. Alyson lui jeta un regard noir, à la fois blessée et frustrée d’avoir été au cœur des manigances de son vieil ami.

- Écoutez, vous connaissez les Terres Sauvages aussi bien que moi. Vous saurez les guider.

- Vous n’avez aucun droit de me demander cela, fulmina la jeune femme. Pas après ce que je vous ai dis hier soir.

- C’est pour cela que je vous le demande, fit Gandalf en s’avançant vers elle. Oui, il est vrai que les Nains sont têtus et d’une impolitesse parfois insupportable, mais ils sont également attachants et loyaux. Je sais que je vous demande beaucoup, mais j’ai confiance en vous mon amie.

- Eux non, trancha Alyson.

- Ils finiront par changer d’avis au fil du temps. Thorïn a eu beaucoup de mal à accepter Bilbo Sacquet dans sa compagnie. Mais maintenant, une confiance aveugle s’est installée entre eux. Je vous en prie, ne les laissez pas partir seuls, continua Gandalf d’un ton suppliant.

Alyson croisa les bras, l’air boudeur. Rares étaient les amis qu’elle avait et savoir que l’un d’eux s’était servi de son hospitalité pour arriver à ses fins la faisait bouillir de rage. Elle n’avait aucune envie de quitter sa maison pour se mêler à ces Nains insupportables et à ce Hobbit plus que curieux.

La jeune femme posa son regard sur sa demeure de fortune, d’où venaient des protestations. Thorïn avait sûrement dû avertir ses compagnons du départ de Gandalf, et ils ne semblaient pas ravis de cette nouvelle. Marcher sur Erébor était certes leur quête, mais l’aide du magicien grisonnant était nécessaire. Alors qu’elle s’apprêtait à lui lâcher le fond de sa pensée, Alyson aperçut le semi-homme sur le seuil de la porte, regardant dans leur direction, les mains sur les hanches. En voyant cet être si petit ; si insignifiant comparé aux Nains, elle ne put émettre le moindre son.

- Si vous ne le faîtes pas pour les Nains, acceptez au moins pour monsieur Sacquet.

- Lui aussi, vous l’avez manipulé pour rejoindre la compagnie ? Lâcha Alyson d’un ton acerbe.

Gandalf ne répondit rien. Son silence était des plus explicites.

- Très bien, déclara Alyson après de longues secondes. Je les accompagnerai. Mais seulement jusqu’à la sortie de Grand’ Peur. Je les quitterai dès que nous atteindrons Esgaroth. C’est ça ou rien Gandalf.

Le magicien regarda son amie, les traits de son visage détendus de soulagement. Il hocha la tête, un sourire derrière sa moustache avant de rentrer dans la maison pour rejoindre la compagnie, qui se tut lorsqu’ils les rejoignirent. Les treize Nains et le Hobbit, installé près de Thorïn, fixaient le magicien et leur hôte, un sentiment d’abandon dans leur cœur. Tous étaient contrariés, mais aucune parole ne pourrait faire changer d’avis le vieil homme, surtout en sachant qu’ils ne seraient pas seuls, comme il l’avait craint.

- Alyson vous accompagnera.

Des murmures s’élevèrent dans la pièce. Ecu-de-Chêne décroisa les bras et lança un regard noir sur le vieux magicien. Jamais il ne pourrait accepter la présence de cette femme dans sa compagnie.

- Elle n’a pas sa place parmi nous, fit Thorïn d’un ton sec. Je refuse qu’elle nous rejoigne.

- Comme vous refusiez que Bilbo vous rejoigne, rappela Gandalf.

- Vous ne m’aurez pas sur votre dos longtemps. Je repartirez lorsque vous aurez traversé la Forêt Noire. Nous pourrons alors nous dire adieu pour le plus grand soulagement de chacun, expliqua Alyson.

- Et à quoi pourrait-elle nous servir ? Bougonna Dwalïn. Bilbo a été engagé comme cambrioleur. Mais elle ?

- Alyson possède des ressources qu’elle enfuit depuis bien trop longtemps. Si je vous dis qu’elle sera utile auprès de vous, vous pouvez me croire.

Les commentaires fusèrent de nouveau. Bilbo ne les écoutait plus vraiment et préférait étudier les paroles du magicien. Cela faisait plusieurs mois qu’il voyageait auprès des Nains, et il n’avait pu que constater le manque de raisonnement de leur part. Ils préféraient partir tête baissée au lieu d’évaluer la situation. Il suffisait de les voir dans la pièce et les écouter rouspéter pour comprendre qu’ils n’étaient pas prêts de changer.

- Pourquoi pas après tout ? Déclara Fili en haussant les épaules. Je pense qu’il serait bénéfique de suivre l’idée de Gandalf.

Des protestations s’élevèrent tandis que certains compagnons se rangeaient aux côtés du neveu d’Ecu-de-Chêne. Tandis que la tension montait dans la maison, l’héritier de Durïn ordonna le silence.

- C’est à vous de décider Thorïn, conclut le magicien.

Le Nain croisa le regard d’Alyson. Aucun d’eux ne chercha à détourner les yeux. Thorïn savait qu’écouter son orgueil et refuser la présence de cette femme dans sa compagnie pouvait avoir de lourdes conséquences.

- Je ne pourrai garantir votre sécurité, lui dit-il. Et je ne serai pas responsable de votre sort.

- Heureusement pour moi, je n’ai pas besoin de vous pour me protéger.

Thorïn se tourna vers ses compagnons. Si certains montraient une réticence à sa présence, la plupart acceptait la décision. Ne pas veiller à sa sécurité, comme ils devaient le faire avec Bilbo, était un poids en moins qu’ils appréciaient.

- Vous avez pris la bonne décision Thorïn. Vous ne la regretterez pas.

Le magicien sortit de la maison et rejoignit sa monture, suivi de près par les Nains qui avaient terminé de préparer leurs affaires.

- Je vous attendrai sur le promontoire. Surtout, ne rentrez pas dans la montagne sans moi, dit Gandalf, le regard rivé sur Ecu-de-Chêne.

Ce dernier se contenta de hocher la tête. Il regarda le vieil homme s’installer sur son cheval et ne répondit rien lorsque le magicien leur souhaita bonne chance. Tout ce qu’il voulait désormais, c’était traverser la Forêt Noire le plus vite possible pour se débarrasser d’Alyson. Quant à Bilbo, il regarda Gandalf s’éloigner pour ne devenir qu’un petit point noir à l’horizon avant de disparaître.

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