Te repousser pour mieux t'aimer

Chapitre 18 : Chapitre 17 : Confidences sur l'oreiller

4745 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 07/01/2021 17:30

Chapitre 17 :

Confidences sur l’oreiller.



— Couleur ?


— Le bleu et le vert.


— Moment préféré de la journée ?


— On est vraiment obligé de faire ça ?


— Tristan…


Ma voix se fait menaçante et il soupire. Après avoir parlé un moment, j'ai décidé qu'un « jeu » pourrait nous aider à mieux nous connaître. Du moins, les bases car il est clair que nous sommes presque des étrangers l'un pour l'autre. Et le fait d'avoir couché avec un homme dont je ne sais presque rien, même si j'en suis amoureuse, me dérange. Tristan a protesté ou du moins essayé mais, j'ai usé d'arguments que je juge convaincants – soit il jouait le jeu, soit je le foutais dehors – et des supplications larmoyantes visant à le faire culpabiliser – après tout ce qu'il avait fait, il pouvait bien faire cette petite chose pour me faire plaisir, non ? – et il a abdiqué de mauvaise grâce.


— Pourquoi n'y a-t-il que moi qui réponds aux questions ? s'insurge-t-il.


— Ben, je fais bêtement. Je ne pensais pas que tu aurais des questions à me poser, j'explique en haussant les épaules.


— Pourquoi n'en aurais-je pas ? Ici, tu es celle qui en cache le plus, rappelle-t-il alors que je ne le regarde plus et me mordille la lèvre.


Il m'a bien eue. Je n'ai jamais pensé qu'il s'intéresserait à moi pour ce genre de choses, il ne m'a jamais posé de questions et je me suis sentie soulagée et déçue en même temps. Certes, je préserve ainsi mes secrets sans devoir lui mentir mais, ça veut aussi dire que je ne suis pas assez intéressante à ses yeux pour qu'il se pose des questions.


Et maintenant qu'il veut en poser, j'aurais préféré en rester au soulagement. J'ai peur de tomber sur une question piège mais, je ne peux décemment pas lui refuser d'en apprendre plus sur moi après le discours que je lui ai tenu. De plus… Même si je ne l'avouerai jamais, une partie de moi se sent apaisée par le fait que son intérêt aille plus loin qu'entre les draps… même si nous sommes dans mon lit et qu'il doit être tard.


— Que veux-tu savoir ? je demande prudemment.


C'est à son tour de rester silencieux, il ne devait pas s'attendre à ce que je cède aussi facilement et cherche par où commencer.


— Parle-moi des personnes que tu as représentées, demande-t-il finalement en reprenant le dessin à côté de mon lit – je le regarde souvent avant de m'endormir, espérant que ça éloigne les cauchemars.


Bon ce n'est pas si terrible pour commencer.


— Et bien il y a mes parents évidemment, je commence en les lui montrant, me rapprochant fortement de lui – mauvaise idée, me hurle mon esprit mais, je l'ignore. Des personnes formidables et des parents exceptionnels. Je sais que c'est rare qu'une ado dise du bien de ses parents mais, les miens ont toujours été là pour moi, quoi qu'il arrive. Ils ne m'ont jamais jugée, je les aime et… Ils me manquent beaucoup, je termine en caressant leur visage. Antonio, je continue avec un sourire. Un sacré cas celui-là. Mais tellement adorable avec ses croyances bizarres. Au début, je ne le prenais pas au sérieux mais aujourd'hui… Il a été le seul à voir que Julian et moi, ça ne durerait pas, les autre nous voyaient déjà mariés, je souffle en levant les yeux au ciel.


Tristan se tend à mes côtés et je jurerais qu'il a arrêté de respirer. Note à moi-même pour moi-même : ne plus parler de mes ex – même si je n'en ai qu'un – pour éviter les disputes inutiles et fatigantes. Pour ce faire, je décide d'aborder le sujet délicat en dernier. Drôle de tactique me direz-vous mais, je vous répondrai que ce sujet risque de durer plus longtemps et que je prendrai le temps de répondre à toutes ses questions afin de ne plus avoir à en parler avec lui par la suite.


— Évangeline, je montre. La fille la plus belle qu'il m'ait été donné de voir. Elle en est consciente et en joue évidemment mais, c'est paradoxalement la personne la plus gentille et généreuse qui soit quand elle aime. Sarah, toujours de bonne humeur, je ris. Impossible de déprimer avec elle, même si je n'ai jamais eu à déprimer avec eux.


Je m'arrête, hésitante. Oui je suis une dégonflée et je l'assume entièrement. Et j'avoue que j'ai juste voulu retarder le sujet qui fâche mais vous auriez fait pareil à ma place.


— Et Julian, m'incite-t-il, de nouveau tendu.


— Oui Julian, je réponds sans pouvoir retenir un élan de tendresse, souriant doucement et caressant son visage. Il est tellement… tout. L'homme rêvé de toute jeune fille croyant encore au prince charmant, je rigole, partie dans mes souvenirs. On se connaît depuis toujours alors, se mettre ensemble, ça nous est apparu comme une évidence. Il a su calmer mon tempérament quelque peu… corsé.


— Tu l'aimais ? demande-t-il mal à l'aise – je me doute que parler sentiments ne doit pas lui arriver tous les jours.


— Oui, enfin d'une certaine manière. J'ai cru l'aimer d'amour avec un grand A, c'est toujours ainsi la première fois. J'ai cru faire ma vie avec lui, qu'on se marierait et qu'après trente ans de mariage on s'aimerait toujours autant mais…


— Mais ?


Je voudrais être honnête et lui dire : « Mais je t'ai rencontré et tu as tout bouleversé, tout changé. Je me suis sentie comme revivre, mon cœur a battu comme jamais et j'ai su ce qu'était aimer d'amour, le vrai amour. Celui qui te prend aux tripes et te donne parfois envie de pleurer tellement il est puissant et fort. Celui qui vous transporte de joie et pourtant vous serre le cœur parce que vous savez qu'il n'est pas partagé. Mais, au lieu de vous enfuir, vous restez, au risque de souffrir, au risque d'y laisser la vie. Oui, c'est toi qui m'as appris à aimer vraiment sans même t'en rendre compte ».


Mais je ne veux pas l'effrayer. Ce qui arriverait à coup sûr si je lui déballais ce discours niais à en mourir.


— Mais il en a décidé autrement, je réponds simplement. Il m'a laissée en m'assurant qu'entre nous, il n'y avait qu'une grande tendresse mais pas d'amour, du moins pas celui-là.


— Et ?


— Et il avait raison, je réponds en plantant mes yeux dans les siens. Je pense que je me suis accrochée à lui par facilité. Par peur d'être seule, par sécurité aussi. Mais au final, je n'étais pas amoureuse, non.


Ses yeux se perdent dans le vide, il semble perdu dans ses pensées et je voudrais tellement savoir ce qu'il pense, là tout de suite. Au bout de cinq minutes de silence, pendant lesquelles il semble toujours perdu dans ses pensées, je ne résiste plus à l’envie de le réveiller. Je me penche et pose mes lèvres sur les siennes. Il a un mouvement de surprise mais, ne me repousse pas. Je voulais juste le faire revenir avec moi, qu'il me regarde, me parle. Mais, comme à chaque fois que ma peau entre en contact avec la sienne, je prends feu et perds le contrôle. Je me presse contre lui, passant mes mains dans ses cheveux alors que ses mains à lui viennent agripper mes hanches, nos langues se trouvent et entament un ballet langoureux. Je m'éloigne finalement après avoir rassemblé le peu de force mentale qu'il me restait, haletante alors que son souffle, heurté également, me caresse le visage.


— En quel honneur ? souffle-t-il.


— Tu étais trop loin, je souris doucement. D'autres questions ? je demande finalement en m'éloignant pour me reprendre.


— J'aimerais reparler de ce qu'il s'est passé avec le seau, répond-t-il alors que je me fige.


— Je ne vois pas de quoi tu parles, je réplique sans oser le regarder.


Il m'attrape vivement le menton et me tourne vers lui, plongeant un regard furieux dans le mien.


— Plus de mensonges avec moi Enora, articule-t-il en resserrant sa prise sur mon visage. Je ne suis pas stupide, je sais ce que j'ai vu.


— Je ne peux pas te le dire, je souffle alors des larmes commencent à monter mais je les retiens.


— Je te demande de me le dire alors tu vas le faire, ordonne-t-il et bien que je sache que je devrais être furieuse par le ton employé, je ne peux trouver ça que sexy et j'ai une forte envie de lui sauter dessus et… je deviens ingérable.


— Je… Je ne sais pas, ça ne s'explique pas, je commence alors que sa prise se desserre. Ça vient tout seul, surtout quand je suis en colère… Vraiment en colère. Il faut que je dépasse mes limites et que je perde le contrôle et ça se déclenche.


— Mais qu'est-ce que c'est exactement ? demande-t-il avec intérêt.


Vous êtes surpris de sa réaction ? Ben moi aussi. Je pensais qu'il allait crier à la sorcière et mettre le feu à mon corps lui-même pendant que je le supplierais de m'épargner mais… Ben il est intéressé. Et ne semble pas me prendre pour un monstre.


— Je ne sais pas ce que c'est, Antonio appelait ça ma particularité, sans plus. Je n'ai jamais eu à mettre de nom sur… ça, je termine en haussant les épaules.


Il soupire et se passe une main sur le visage, il semble hésiter à me dire quelque chose. Je l'encourage du regard et il se lance.


— Tu as déjà entendu parler de Merlin ?


— Le Merlin de Harry Potter ça compte ? je demande sans savoir s'il est sérieux ou pas.


— … J'en doute, répond-t-il en me regardant bizarrement. Le chef des Pictes plutôt.


— Aaah, je fais avec la tête de celle qui comprend puis fronce les sourcils et réponds : Non pourquoi ?


— Lui semble bien te connaître, marmonne-t-il. Il m'a dit des choses sur toi, reprend-t-il alors que je me fige.


— Et qu'a-t-il dit ?


— Et bien, pour résumer que c'est lui qui t'avait fait venir…


— Quoi ? je m'exclame alors que je sens toutes les couleurs quitter mon visage.


— Oui, reprend Tristan sans s'apercevoir de mon état. Il a dit qu'il avait demandé de l'aide et que l'on t'avait envoyée.


— Non mais je rêve, je hurle en me relevant. Le sale petit enfoiré… Pourquoi ? je crie en me tournant vers un Tristan choqué.


— Pourquoi quoi ? demande-t-il bêtement et j'ai envie de lui donner une bonne claque – oui, je sais que ce n'est pas de sa faute mais, j'ai besoin de me défouler et il est le seul dans la pièce.


— Pourquoi moi ?


— Je n'ai pas compris non plus, répond-t-il en haussant les épaules. Je veux dire, tes capacités au combat ne sont pas les meilleures – si on ne compte pas le corps à corps – et tu ne sembles même pas au courant des querelles qui animent nos peuples. Mais, c'est là qu'il m'a dit que tu étais importante et il m'a ensuite rappelé tes pouvoirs…


— Parce qu'en plus cet abruti essaye de me faire rôtir sur un bûcher ! je m'écrie.


— Tu n'as tout de même pas imaginé que je laisserais faire une chose pareille ? demande Tristan, ébahi.


— Beaucoup l'aurait fait, je réplique. Mais là n'est pas la question. Pour qui se prend-t-il ? Il m'enlève à ma famille, à ma vie bien rangée. Et il me fait atterrir en milieu hostile et me laisse aux mains des Saxons ! D'ailleurs, si c'est lui qui a demandé à ce que l'on m'envoie, pourquoi il n'est pas venu me récupérer ?


— Il n'est pas arrivé à temps.


— Et en plus il n'est même ponctuel, je réplique, les yeux au plafond, me parlant à moi-même. Comment peut-on être aussi égoïste ? je demande ensuite à Tristan, les larmes menaçant de couler alors que je les retiens de toutes mes maigres forces. Il m'a arrachée à tout ce que j'aimais et tout ça pour quoi ? Parce qu'il pense que je suis importante ? Mais c'est quoi son problème au juste ? je crie.


Je fais les cents pas dans la chambre, essayant en vain de me calmer. Je n'ai jamais été aussi furieuse de ma vie, la colère m'étouffe, j'ai du mal à respirer et ma vision est floue. Je remarque dans un état second des affaires trembler un peu partout mais je n'arrive pas à me reprendre. Tristan semble le comprendre car il se lève, se plante devant moi et reste immobile un moment. Il est incertain quant à ce qu'il doit faire et finalement, il semble suivre son instinct et me prend dans ses bras. Il me serre de toutes ses forces. Et, même si je me suis tendue au départ, le résultat se fait sentir et je me détends peu à peu, son odeur envahit mes sens et je n'arrive bientôt plus à penser à autre chose que son corps collé au mien, ses bras autour de moi et son odeur qui me donne envie de le supplier de me faire l'amour… Ben voilà, c'est reparti, il me rend complètement dingue.


Et après tu dis que c'est son piaf qui a des troubles bipolaires ? Tu es carrément schizophrène au point où tu en es ma chère.


La preuve : j'entends une voix stupide qui passe son temps à me critiquer ou à se foutre de ma gueule. Au moins, je ne risque pas de souffrir de solitude. Dommage que je n'aie jamais été très sociable et que j'aime le silence.


Tu ne pourrais pas vivre un jour sans moi !


Il faut vraiment que je me fasse soigner, ça devient grave. Je retourne aux bras de Tristan, bien plus agréable que les jérémiades de ma conscience.


— Je ne sais pas vraiment quoi te dire, avoue-t-il. Je ne suis pas doué pour ce genre de choses.


— Tu t'en sors bien, je le rassure en enfonçant ma tête dans son torse musclé alors qu'un bâillement m'échappe.


— Il se fait tard, souffle-t-il. Tu devrais dormir, nous continuerons cette conversation plus tard.


— Seulement si tu restes près de moi, je négocie en faisant la moue.


Il sourit légèrement en secouant la tête mais se couche près de moi. Je le colle, me couchant presque sur lui, ma tête dans son cou. Il me serre contre lui alors qu'un sourire niais, que je suis contente qu'il ne voit pas, apparaît sur mes lèvres. Je pose mes lèvres sur son cou, ne pouvant pas m'en empêcher et je le sens frissonner alors qu'il me sert plus fort. Il baisse la tête et mes lèvres atterrissent sur les siennes. Encore une fois, un baiser censé être léger et chaste dégénère. Je m'accroche à lui comme à une bouée de sauvetage, j'ai besoin d'être rassurée, ce que j'ai appris m'a mise en colère, m'a fait du mal et m'a fait peur. On attend quelque chose de moi mais quoi ? Que pourrais-je leur apporter ? Je n'ai rien de spécial – qui pourrait vraiment les aider s'entend.


Tristan se retrouve, je ne sais comment, au-dessus de moi sans que ses lèvres ne lâchent les miennes. Ma respiration se fait difficile et j'ai l'impression que mon cœur va exploser. A-t-il déjà remarqué la vitesse de mes battements lorsqu'il est dans les parages ? Je brûle littéralement. S'il savait à quel point je l'aime, je n'aurais pas tenu sans ça.


Il s'éloigne alors que mon corps, soudé au sien, commence à se frotter à lui sans que je ne lui en aie donné l'ordre. J'essaye de le ramener à moi mais il résiste.


— Ce n'est pas l'envie qui manque, souffle-t-il alors que je sens effectivement que l'envie est loin d'être le problème. Mais il faut que tu te reposes.


Je pousse un soupire plaintif alors qu'il sourit avec moquerie mais aussi… tendresse ? Je n'aurais jamais cru que ce soit lui qui refuse mais, il l'a fait et je ne sais si je me sens soulagée de voir que mon bien-être l'intéresse autant ou frustrée parce que j'ai envie de lui. Sûrement un peu des deux. Je me recolle à lui et ferme les yeux pour les quelques heures qu'il me reste de sommeil. Je pars sans même m'en rendre compte.


J'ouvre les yeux et constate que cette fois, c'est Tristan qui est parti avant que je ne me réveille. Je soupire en me levant, décidant de ne pas repenser maintenant à la conversation d'hier et manquant de tomber en m'emmêlant dans mes draps. Je m'habille, me passe de l'eau sur le visage sans que ça ne me réveille vraiment. On ne m'a pas donné d'informations sur mes entraînements alors, je décide d'aller voir Vanora. Je passe donc la porte – que je me suis prise en voulant sortir sans l'ouvrir – et me dirige vers chez elle dans un demi-sommeil. J'entre et ce que je vois finis de me réveiller.


Quoi ? Non je n'ai pas vu Bors et Vanora en pleine action, berk ! Par contre, une Vanora épuisée en train de faire le ménage alors que ses enfants courent partout, si ! Et je ne suis pas très contente de ce que je vois.


— Vanora dépose ça tout de suite, je la gronde en lui reprenant son torchon.


Elle sursaute et me fixe avec des yeux fatigués, elle va dire quelque chose mais, je la coupe.


— Chut, je ne veux même pas savoir. Toi, tu vas te coucher et moi, je m'occupe du reste.


— Mais…


— Un petit conseil entre amie… On est bien amie ?


— Oui.


— Bien, dans ce cas, un petit conseil entre amies : tais-toi et fais ce que je te dis.


— Décidément toi et Tristan allez vraiment bien ensemble, soupire-t-elle.


— On dit Tristan et toi, je la reprends avant de me retourner vers en fronçant les sourcils. Tu penses vraiment ?


— Oh oui, aussi autoritaire l'un que l'autre, sourit-t-elle avec malice.


— Qui te dit qu'on est ensemble, au fait ? je demande en plissant des yeux.


— Je savais juste que vous aviez passé la nuit ensemble mais vu tes réactions, je vois qu'il y a bien plus, continue-t-elle de sourire.


Je lève les yeux au ciel en rougissant alors qu'elle fait ce que je lui ai demandé. Je regarde ensuite les enfants qui n'ont pas encore remarqué ma présence. Enfin, sauf le petit numéro dix que j'appelle désormais Antonio sans avoir osé en parler à sa mère – j'ai failli l'appeler Julian mais je me suis dit que Tristan n'aimerait pas avoir le sosie de mon ex plus une personne portant son nom dans les parages – qui vient déjà dans mes bras. Je le soulève et il pose un baiser sur ma joue en me disant bonjour. Je regarde les enfants et l'ensemble de la maisonnette plusieurs fois avant qu'une idée sadique qui me rend assez fière jaillisse dans mon esprit. Il est temps que je montre à Bors ce qu'est un homme, un vrai, dans mon monde.


Je sors avec la marmaille, laissant juste les plus grands aller jouer. Je trouve les chevaliers – sauf Arthur et Tristan – assez rapidement. J'appelle Bors qui se tourne vers moi en fronçant les sourcils à la vue des enfants. Une lueur d'inquiétude emplit ses yeux.


— Il y a un souci avec Vanora ? demande-t-il alors que je m'énerve un peu.


—Et c'est maintenant que tu t'en inquiètes ? je le gronde. Celle qui porte ton enfant va bientôt accoucher et meurt de fatigue et toi, tu la laisses avec les enfants faire le ménage ?


— Ben…, commence-t-il sans aller plus loin.


Je le regarde en me mordant la lèvre et opte pour une autre tactique car, il est lent à la détente. Je le regarde avec ma moue qui fait craquer n'importe qui.


— Tu m'aimes bien, pas vrai ? je demande d'une petite voix.


— Heu… Oui, répond-t-il en se demande où je veux en venir alors que Dagonet se retient de rire.


— Et tu aimes vraiment Vanora, hein ?


— Bien sûr, répond-t-il avec plus d'assurance – le pauvre, il va bientôt la perdre son assurance.


— Alors tu ne vas pas la laisser se tuer au travail tout ça parce qu'elle veut que tu rentres dans un foyer propre, si ?


— J'ai peur de savoir où tu veux en venir, avoue-t-il alors que les chevaliers le regardent, vraiment amusés.


— Tu pourrais aider un peu, je fais avec la même petite voix et des yeux suppliant de petite fille à qui rien ni personne ne résiste.


— Oh non, s'écrie-t-il en comprenant. Ce n'est pas à moi de faire ça.


— Et tu trouves que c'est à une femme enceinte et épuisée de le faire ? je me scandalise. Une femme que TU as mise enceinte et pour la onzième fois en plus !


— Et bien, aide-la, réplique-t-il comme si c'était une évidence.


— Je ne peux pas m'occuper du ménage et des enfants en même temps, je soupire en levant les yeux au ciel. Allez, je reprends en reprenant ma moue suppliante. Tu ne vas pas laisser ta petite femme comme ça, si ?


Il grimace. Je sais que je joue sur la corde sensible et c'est volontaire. Je sais que si je veux obtenir ce que je suis venue chercher, c'est sur ça qu'il faut que j'appuie. J'accentue mon regard, rivalisant parfaitement avec le Chat Potté de Shrek.


— Je ne sais rien de tout ça, tente-t-il en dernier recourt.


— C'est pour ça que je suis là, gros bêta, je soupire. Je t'aiderai tout en m'occupant des petits.


Il se passe une main sur le visage alors que Lancelot ricane. Je plante mon regard dans le sien et lui fait un petit sourire.


— Qu'est-ce qu'il y a Bouclettes, tu veux nous aider aussi ? je demande avec sournoiserie.


— Non, déglutit-il avec difficulté, son petit sourire disparaissant instantanément.


— Alors arrête de bêler et rejoins ton troupeau, je lui dis. Et c'est valable pour vous aussi, je réplique à Galahad et Gauvain qui commencent à ricaner. Galahad, tu ne voudrais pas retrouver de nouveau des pantalons à la place de tes jupettes de fille, n'est-ce pas ?


Il fait non de la tête.


— Bien, je souris avec fierté. On y va les enfants, j'ajoute en rebroussant chemin, Bors traînant des pieds.


Quand on arrive, Vanora s'est endormie et nous envoyons tous les enfants devant la maison. Je donne des directives à un Bors complètement perdu.


— Qu'est-ce que je fais avec ça ? demande-t-il en me montrant un torchon.


Je pousse un soupir. Ça ne va pas être facile.


Tu serais allée plus vite toute seule.


Je ne serai pas toujours là pour le faire…


Tu espères toujours rentrer à la maison ?


Évidemment. Pourquoi je n'espérerais plus ?


Pour Tristan, il ne sera plus là une fois rentré à la maison. Il sera mort depuis près de deux milles ans !


Je soupire, refusant de penser à ça. Pas maintenant. Car, de toute façon, la question ne se pose pas. Je n'ai aucun moyen de rentrer chez moi mais, par contre je trouverai bien un moyen de botter le cul de cet abruti de dégénéré de Merlin !

Je nettoie le sol alors que Bors fait les poussières et une image sortie de nulle part me vient à l'esprit. Une image de Bors en tenue de soubrette. J'éclate de rire et Bors se retourne vers moi en haussant un sourcil interrogateur mais je n'arrive pas à parler, l'image d'un Bors en tenue de soubrette coquine, en train de passer le plumeau avec un petit sourire charmeur, ne me quitte pas et des larmes de rire coulent sur mes joues.


— Tout va bien gamine ? s'inquiète-t-il en s'arrêtant de travailler.


J'inspire profondément et acquiesce en reprenant un semblant de sérieux. Il hausse les épaules et retourne à son travail ce qui me fait pouffer mais, j'arrive néanmoins à ne pas être trop bruyante et il ne se tourne pas vers moi de nouveau. Je passe le reste de notre travail à me retenir de rire, l'image ne quittant pas mon esprit. Il faut dire que je suis à bout de nerfs avec toute cette histoire et quand mes nerfs sont sur le point de lâcher, j'ai besoin de rire pour ne pas devenir violente.


Nous finissons finalement, Bors parait plus soulagé que jamais et Antonio Junior ne m'a presque pas lâchée de la journée.


— Tu vois que tu y es arrivé, je souris.


— Oui, grimace-t-il. Mais maintenant, Lancelot ne va plus me lâcher avec ça, ajoute-t-il en se grattant l'arrière de la tête avant de me regarder avec le petit dans les bras. Il t'aime beaucoup on dirait.


— Oui, je souris doucement. Et c'est réciproque, c'est un ange. Pas très loquace mais adorable. Quant à ce que pourrait dire Lancelot, tu t'en fiches, non ? Au pire, dis-le-moi et je te vengerai, je rigole. Je pourrais lui lisser les cheveux.


Il secoue la tête en riant et on se sépare là. Je joue un peu avec les enfants avant que Vanora ne se réveille. Je la laisse après qu'elle m'ait remerciée et ait failli accoucher en apprenant que Bors avait aidé pour nettoyer. L'heure venue, je pars à la taverne. Il y a peu de gens, il est encore trop tôt mais, Eric est toujours fidèle au poste et m'attend.


— Tu dors ici ou quoi ? je demande en lui déposant un baiser sur la joue.


— Presque, répond-t-il doucement.


Son regard me gêne un peu. Il y a de la tendresse, de la bienveillance mais aussi quelque chose sur lequel je n'arrive pas à mettre le doigt. La taverne se remplit peu à peu et je sers les clients tout en parlant avec Eric qui me fait rire comme toujours. À moment de la soirée, alors qu'il imite un homme et que je suis pliée de rire et me retiens à lui, je me sens tirée en arrière et retournée avant qu'une bouche se colle à la mienne. Si je ne l'avais pas reconnu, mon genou serait parti rencontrer ses attributs masculins avec toute la violence dont je suis capable. Mais Tristan a de la chance bien que le pourquoi de sa réaction m'énerve un peu car, il est évident que la raison se nomme Eric. Je m'éloigne en rougissant car les yeux sont tous braqués sur nous et quelques rires atteignent mes oreilles.


— Heu bonjour, je bredouille en m'écartant.


Je suis gênée comme pas possible car un peu plus loin se trouvent les chevaliers qui nous regardent avec surprise mais aussi amusement. Par contre, la satisfaction m'envahit quand j'aperçois blondie à côté, le visage défait. J'espère qu'elle a compris cette fois. La réaction la plus étrange est celle d'Eric. Son visage est fermé et il me salue d'un simple signe de tête avant de s'en aller. Sa réaction me peine et je ne comprends pas.


Tu es tellement naïve Enora...


Comment ça ?


...


Quand je veux que ma conscience se taise, il est impossible pour elle de la fermer mais quand je lui demande de parler, là, il n'y a plus personne !


Je décide de mettre ça dans un coin de ma tête et d'y repenser plus tard. Je retourne travailler mais, je suis perturbée par autre chose car, je me rends compte que je me suis bien trompée. Blondie n'a rien compris et passe son temps à coller Tristan qui ne met pas beaucoup d'efforts à la repousser. Je suis furieuse mais, j'arrive à me contenir. Par contre, ils vont voir de quel bois je me chauffe ces deux-là et je vais commencer par cette blonde stupide après le travail.


Et oui, je sais que je suis blonde aussi !


***

Merci à BakApple pour la correction

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