Un regard à faire tourner la mayonnaise

Chapitre 4 : Lothon

553 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour 01/10/2019 22:04

Ma petite contribution aux conseils d’Oldie en matière de portraits.

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Lothon Bessac-Descarcelle n’avait pu échapper à une revue détaillée de ses habits de fête. Pantalon neuf, chemise à manches bouffantes, col empesé, gilet chamarré, élégante veste de tweed… Le miroir en pied lui renvoyait l’image d’un épouvantail raide et soigné, dont il ne reconnaissait que la face boutonneuse. Sa tignasse rebelle, à présent lissée et plaquée sur le crâne, luisait comme les culs de casseroles de Tante Lalésine. Il avait de justesse échappé aux guêtres, mais sa tenue le serrait aux entournures et le grattait horriblement, et – le Roi seul sait pourquoi – désormais sa mère trouvait peu distingué que l’on se grattât en public.

Lorsque ses parents endimanchés avaient tenté de le faire grimper dans le « carrosse », le jeune hobbit avait croisé les bras, avec cette moue obstinée et stupide qu’il prenait lorsqu’il croyait faire preuve de caractère. Son père lui avait donc accordé quartiers libres, en contrepartie de quoi il s’était vu confier une mission spéciale par son intraitable maman.

Pendant toute la journée, il avait vaqué aux distractions et trinqué d’une table à l’autre, le plus souvent en compagnie de son ami Ted, le fils du meunier, lui aussi affublé de frusques assez coquasses, avec bas de laine et livrée à jabot ! Les larrons avaient ensuite établi leur quartier général, au bar de la grande cuisine de plein air, sise tout en haut du champ.

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Vers le milieu de l’après-midi, la grande tonne de bière commença à donner des signes de sécheresse. Et c’est avec beaucoup d’à-propos que les compères se proposèrent d’aider les nains à quérir, installer et percer sa « grande-sœur ». Ainsi, leurs allées et venues vers les réserves passaient inaperçues.

Ils étaient à présent dans la place – le cellier principal de Cul-de-Sac !

Lothon sortit de sa manche une baguette de coudrier. Pendant que Ted faisait le guet, longuement, le fils de Lobelia ausculta le sol à l’aide de son instrument de sourcier, et sonda les murs à la recherche du trésor de Bilbon l’Aventurier. Plusieurs fois, ils faillirent se faire prendre, et durent interrompre les recherches pour donner un coup de main, transporter des pains de glace ou approvisionner une buvette.

Mais les efforts des larrons furent couronnés de succès – Lothon découvrit, dissimulé dans une cache sous les planches de la glacière, un trésor véritable ! Les gredins s’attachèrent immédiatement à déterrer le magot, qui jetait des reflets ambrés sur les murs du cellier.

Malheureusement pour eux, les voleurs ne purent résister à l’attrait pernicieux de leur butin : ils y goûtèrent ! Le breuvage suave et doré coula dans leur gorge comme une panacée merveilleuse, évoquant les soirées d’automne et la saveur des noix sèches. Ils ne parvinrent même pas à décacheter une seconde bouteille : on les retrouva le lendemain de la fête, ronflant dans les bras l’un de l’autre au fond du cellier !

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