PUNISHER: La Tierra De Nadie

Chapitre 2 : PUNISHER: La Tierra De Nadie

1574 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 30/11/2025 21:29

Le pick-up cahotait sur la route de terre, projetant des nuages de poussière derrière lui. Le soleil tombait lentement, mais la chaleur ne faiblissait pas. L'air tremblait encore de vagues de chaleur, et la carrosserie du véhicule brûlait comme une plaque de métal.


Lina restait recroquevillée sur le siège passager, enveloppée dans la vieille veste de Frank. Elle respirait vite. Trop vite. Ses mains tremblaient encore, malgré l'eau qu'elle avait bue. À chaque soubresaut, elle sursautait comme si quelqu'un allait surgir de sous le siège.


Frank jetait des coups d'œil réguliers vers elle, sans parler. Il avait vu ce regard un nombre incalculable de fois : celui d'une personne qui ne croit plus qu'un avenir existe. Il savait aussi qu'elle ne dirait rien tant qu'elle serait prisonnière de sa panique.


Ils roulèrent encore quelques minutes en silence avant qu'elle ne souffle, d'une voix presque imperceptible :


— Je... je suis désolée.


Frank plissa les yeux.


— Pour quoi faire ?


Elle serra la veste contre elle, comme si elle avait froid malgré 43 degrés dehors.


— De te... de te causer des problèmes. Ils vont te chercher. Les Russes, les Mexicains... tous. Ils n'aiment pas qu'on leur enlève une fille. Jamais.


Frank garda le regard fixé sur la route.


— C'est pas tes problèmes, ça. C'est les leurs.


Lina détourna la tête vers la fenêtre. Le désert défilait, immense, vide, sans fin.

Elle secoua la tête.


— Tu comprends pas... Les Jaguares... ils laissent rien passer. Quand ils veulent quelqu'un, ils le retrouvent. Même si tu vas te cacher au bout du monde.


Elle avait dit Jaguares avec un frisson qui glaça Frank.

Un cartel local.

Sanglant.

Sadique.

Un de ceux qui tuaient un village entier pour un message mal transmis.


Frank gronda :


— Comment t'es tombée entre leurs mains ?


Cette fois, elle mit de longues secondes à répondre. Sa gorge se serra.


— J'avais besoin d'argent. Ma mère est malade depuis des mois. Les médicaments... les docteurs... C'était trop cher. J'ai commencé à travailler dans un bar de danse... juste ça, au début. Et puis un jour, des hommes sont arrivés. Ils ont emmené trois filles. J'ai essayé de partir, mais... ils ont dit que je leur devais de l'argent. Que je leur appartenais.


Sa voix se brisa.


— Ils m'ont revendue. Comme un objet.


Frank inspira lentement.

Il avait combattu des monstres toute sa vie.

Mais il n'y avait rien, absolument rien, de pire que ceux qui utilisaient des filles pour s'enrichir.


— Ils t'ont gardée où ? demanda-t-il, toujours sans regarder vraiment.


— Dans une maison, près de la frontière... un endroit où ils mettaient toutes les filles avant de les livrer aux Russes. C'était... c'était pas humain.


Elle passa une main dans ses cheveux emmêlés, cherchant un mot qui n'existait pas.


— Une cage, murmura-t-elle. Une cage où on apprend à arrêter de pleurer.


Frank serra le volant si fort que ses jointures blanchirent.


Il connaissait ces endroits.

Il en avait vu des dizaines.

Il en avait détruit quelques-uns, aussi.


Lina tourna vers lui un regard hésitant.


— Pourquoi... pourquoi tu m'aides ? Tu ne me connais pas.


Frank répondit du tac au tac :


— J'ai pas besoin de connaître pour savoir que ce que t'as vécu mérite d'être vengé.


Elle avala difficilement sa salive.


— Les autres filles... elles sont encore là-bas.


Le silence qui suivit fut lourd.

Très lourd.


Frank garda les yeux sur la route.

Mais dans son regard, quelque chose venait de s'allumer. Une braise de colère, lente mais brûlante.

Il répondit sans hausser la voix :


— On s'occupera d'eux.


Lina ouvrit légèrement la bouche, surprise qu'il parle au pluriel.


— "On"... ?


Frank haussa imperceptiblement les épaules.


— D'abord, on te met en sécurité. Après... on verra.


Elle n'insista pas.

Mais au fond d'elle, pour la première fois depuis longtemps, une minuscule étincelle d'espoir remua.


Le pick-up atteignit finalement un petit chemin qui menait vers des ruines de maisons en adobe. Un village fantôme. Abandonné depuis vingt ans. Les fenêtres n'étaient plus que des trous noirs. Les murs lézardés s'effritaient sous la chaleur. Pas un bruit vivant, sinon le cri lointain d'un corbeau.


Frank coupa le moteur.


— On reste ici pour la nuit.


Lina déglutit.


— C'est... c'est un endroit sûr ?


Frank sortit, fit un tour d'horizon, plissa les yeux vers les collines sèches, puis répondit simplement :


— Pour eux ?

Oui.

Pour toi ?

Encore plus.


Il se tourna vers elle.


— Personne va venir te chercher ici. Et si quelqu'un essaie... il ressortira pas vivant.


Lina frissonna.

Pas de peur.

Plutôt de soulagement.


Elle suivit Frank dans la maison en ruine.

Le sol était couvert de poussière.

Les murs, percés de trous.

Mais au moins, c'était un toit.


Elle se laissa tomber contre le mur, les jambes tremblantes.

Frank s'accroupit à côté d'elle, vérifiant les fenêtres, la porte, les angles morts.


Lina murmura :


— Merci.


Il ne répondit pas.

Il continua simplement d'inspecter les lieux, méthodique, implacable.


Parce que dans le désert mexicain, la nuit appartenait aux monstres.

Et Frank Castle venait d'en provoquer deux : un cartel local et un groupe russe en exil.


Cette nuit, il allait devoir rester éveillé.


Et demain... la guerre commencerait.


La maison jaune au bord de la route était l'un des repaires des

Los Jaguares.

De l'extérieur, elle semblait abandonnée : fenêtres murées, façade peinture écaillée, clôture rouillée.

À l'intérieur, l'air empestait le sang séché, la sueur et la tequila.


Un pick-up noir s'arrêta brusquement devant l'entrée. Trois hommes en descendirent, nerveux, armés, le visage fermé.


En entrant, ils trouvèrent deux survivants assis contre un mur, les mains tremblantes. Le troisième, étendu sur la table, avait un bandage de fortune sur l'épaule — le tir précis de celui qui avait attaqué la camionnette. Celui qu'ils surnommaient El Gringo de la Muerte.


Personne ne savait son nom.

Mais tout le monde connaissait la rumeur autour de lui :

un homme sans peur, sans famille, sans limites.

Un démon en forme humaine.


Le chef local, un type large aux yeux injectés de sang nommé Vargas, entra à son tour. Il portait une chemise verte ouverte sur un torse couvert de cicatrices. Il s'arrêta net devant les corps étendus au sol, ramenés quelques minutes plus tôt depuis la route.


Trois cadavres.

Trois hommes du cartel.

Abattus proprement.


Vargas se tourna lentement vers les deux survivants.


— Expliquez-moi... lentement... comment trois de nos hommes se sont fait dégommer par un seul type ?


L'un d'eux avala sa salive, les yeux fuyants.


— Patron... c'était pas un type normal... Il est sorti de nulle part, comme un fantôme... Il a tiré avant qu'on puisse lever nos armes...


Vargas s'accroupit près du corps le plus proche et observa la plaie nette dans le front.


— Ça, c'est pas un fantôme.

Il planta son regard dans celui du survivant.

— C'est un professionnel.


Dans un coin de la pièce, un homme plus jeune feuilletait nerveusement un dossier. Une photo mal imprimée s'y trouvait : un crâne blanc peint sur un gilet.


— Vargas... dit-il d'une voix hésitante...

— Quoi ?

— Je crois qu'on sait qui c'est.


Vargas s'approcha, arracha le papier des mains du jeune homme et contempla le symbole.


Un crâne blanc.

Simple.

Froid.

Iconique.


Le Punisher.


Vargas serra la mâchoire.

— No chingues...

Il éclata d'un rire nerveux.

— Le Diablo del Norte ? Ici ? Au Mexique ?


Puis son rire s'éteignit aussitôt.


Il fit un signe de tête au survivant blessé.


— Parle.


Le blessé leva la tête, la voix tremblante.


— Il... il est venu pour la fille... Lina... Ils l'ont vue s'enfuir avec lui.


Un silence épais s'abattit dans la pièce.


Vargas ferma les yeux et inspira profondément, comme s'il essayait de contenir un ouragan.


Puis il explosa :


— HIJOS DE PUTA !

Il frappa la table du plat de la main, renversant bouteilles et cendres.


— On avait une transaction avec les Russes demain ! Une fille ! UNE SEULE ! Et vous êtes pas foutus de la garder vivante ou attachée ?!


Il se tourna soudain vers l'homme blessé.


— Et toi... pourquoi t'es pas mort avec les autres ?


Le blessé tenta de répondre, mais Vargas avait déjà dégainé son arme.


Une détonation sèche résonna.

Le corps retomba, inerte.


Le jeune homme au dossier blêmit.


Vargas jeta l'arme sur la table, essuya ses mains sur sa chemise et reprit son calme comme si rien ne s'était passé.


— Prévenez les Russes. Dites-leur que la fille a été enlevée par un Américain.

Il fixa le symbole du crâne blanc.

— Dites-leur son nom... qu'ils comprennent bien dans quel merdier on est.


Les hommes acquiescèrent sans discuter.


Vargas continua, voix basse, presque un murmure :


— Et envoyez deux équipes sur toute la zone nord. Checkpoints, barrages, villages abandonnés, stations-service.

Il se pencha vers la fenêtre et regarda le désert qui s'étendait à perte de vue.

— Ce fils de pute va pas loin. Pas sur notre territoire.


Il se redressa, pris d'un sourire carnassier.


— Trouvez-le. Ramenez la fille.

Et ramenez-moi sa tête.





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