Le secret

Chapitre 11 : Ciel de feu

1137 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour 08/11/2016 22:31

- Bougez-vous, Cooper, il faut faire quelque chose !

Le ciel était en feu. Des sifflements odieux emplissaient l'air, suivi d'explosions violentes. Le vent charriait des odeurs abominables de gaz et de chair brûlée. À quelques kilomètres, les flammes dansaient leur sarabande morbide sur les bâtiments de la colonie, tandis qu'ils restaient là, statufiés d'horreur. Impuissants.  Les fumées qui s'élevaient dans le firmament embrasé dessinaient des visages spectraux, terrorisés.

- Faut faire quelque chose ! répéta quelqu'un.

Un bruit sourd les fit réagir. Le canon. Le canon avait tiré. Ils levèrent tous la tête. Loin au-dessus d'eux, une ombre grossissait. De plus en plus proche. Un vaisseau creva la couverture nuageuse et s'écrasa avec fracas à deux pas. Et le monde explosa.

Seven se redressa sur sa couchette, la bouche ouverte sur un cri silencieux. Elle était baignée de sueur, et son souffle précipité retentissait avec bruit dans l'espace confiné de la pièce. Au bout de quelques instants, la jeune femme reconnut les objets familiers de sa cabine et commença à se calmer. Les lumières étaient éteintes dans le Cyclone, seules les veilleuses d'urgence brillaient faiblement. Seven enfouit son visage dans ses mains et laissa échapper un sanglot nerveux. Foutu cauchemar !

Son attention fut attirée par des coups frappés à la porte.

- Entrez, grommela-t-elle.

Vakarian passa la tête par l'entrebâillement.

- Je vous dérange, lieutenant ?

- Non, ça ira, répondit-elle en se levant. Qu'est-ce qui se passe ?

- Je voulais voir avec vous le déroulement de la mission, puisqu'Alenko a décidé de jouer les ermites, mais ça peut attendre. Vous avez une sale tête, Cooper, ajouta-t-il.

- C'est ça le légendaire charme turien ? grogna la jeune femme. Franchement, je m'attendais à mieux.

- Sans rire, Cooper…

- OK, OK… capitula-t-elle. La colonie Horizon, ça vous dit quelque chose ?

Oui, ça lui évoquait bien des choses en réalité. Cette planète en avait sérieusement bavé. La première fois qu'il y était allé, la moitié des humains avait été enlevé par les Récolteurs, ils avaient sauvé le reste de justesse. La seconde, c'était Cerberus et cet enfoiré de Lawson, le père de Miranda, qui avaient transformé l'endroit en un centre de recherches sur l'endoctrinement et les modifications génétiques des armées Moissonneurs. Une horreur. Il gardait un souvenir atroce de l'opération de nettoyage que Shepard avait menée là-dedans pour récupérer l'ancien agent de l'Homme Trouble. Ça s'était mal terminé.

- Y a cinq ans, une escouade N5 a été envoyée là-bas pour une mission de routine. Quelques pirates se baladaient dans la zone, rien de bien méchant, mais ça faisait un bon entraînement. Le transporteur nous y a déposés, et est reparti. On a dressé le camp à proximité des vieilles tourelles sol-espace de défense, la colonie était à trois ou quatre kilomètres.

C'était un piège, un foutu piège. Il n'y avait pas l'ombre d'un pirate sur Horizon. En fait, on n'y avait vu ni pirate ni mercenaire depuis un bon moment, et c'était assez louche. Tout le monde se résignait à avoir fait chou blanc, quand l'attaque avait commencé.

- Vous avez déjà vu un bombardement incendiaire, Vakarian ? demanda Seven les yeux fixés sur la cloison. C'est moche. Vraiment très moche. Et quand on n'a aucun vaisseau, rien pour le faire dégager de sa position, on a plus qu'à le regarder incendier tranquillement son objectif, sans pouvoir rien faire. Y avait pas loin de quatre millions de civils dans cette colonie. Moins d'une centaine de survivants.

- Je comprends, Cooper. Y a de quoi faire des cauchemars…

- Oh non, vous comprenez pas, le coupa Seven avec un rire sans joie. Une tourelle était encore utilisable, un gars s'en est servi pour descendre le bombardier. Vous savez ce qui se passe quand un vaisseau bourré jusqu'à la gueule de bombes incendiaires s'écrase à moins d'un kilomètre de vous ? Ça fait un sacré feu d'artifice. Et tout le monde se met à cramer.

Garrus resta silencieux.

- On est que trois à s'en être tirés. Mickael est dans un hôpital psychiatrique où il passe son temps à hurler qu'il brûle, et Kenny sortira jamais du coma. Alors vous voyez, je vais bien. Quelques cauchemars de temps en temps, c'est pas un prix très lourd à payer.

- J'imagine, oui…

Il ressentait de la compassion pour elle. Voir toute son escouade se faire décimer de cette façon, ce n'était pas quelque chose de facile à vivre. Et la regarder évoluer en sachant cela forçait le respect. Mais il y avait un problème quelque part. Une incongruité. Garrus avait la sensation de quelque chose d'incompréhensible, sans parvenir à mettre le doigt dessus. Pas dans son récit, maintenant qu'elle en avait parlé, il se souvenait : l'attaque avait fait du bruit à l'époque. Des fanatiques l'avaient commandité, arguant que le lieu du Sanctuaire devait être purifié pour justifier leur acte barbare. C'était autre chose.

- Désolée, Monsieur, mais le colonel ne m'a pas encore informée des plans de mission. Vous serez le premier au courant, ne vous en faites pas, l'assura-t-elle.

En se retournant avant de sortir, il remarqua le bandage tombé au sol près de la couchette. Les yeux bleus du turien se posèrent automatiquement sur la main découverte de l'humaine.

Elle ne portait plus la moindre trace de blessure. 

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