Miraculeux Décembre

Chapitre 25 : Mardi 24 décembre | Réveillon

2684 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour 24/12/2019 10:03

✲ Cher journal,


J'ai les jambes en coton à cause de la veille. Tout ce temps à attendre derrière le comptoir a pompé toute l'énergie de mon corps. Ou alors est-ce à cause de Chloé Bourgeois et ses dix foutues bûches qu'elle n'a pas daigné toucher à son retour à la boulangerie ? ✲


- « Si elle savait mon identité secrète, elle m'aurait supplié depuis le début. » Je marmonne en m'étirant.


Les premiers rayons de lumière s'infiltrent dans ma chambre par la trappe extérieure. Cette fois, je me suis levée tôt dans un seul et unique objectif : boucler mes cadeaux de Noël. Si la veille, Adrien et Luka avaient insinué qu'on ne se reverrait pas avant la date fatidique, j'ai bien la ferme intention de leur offrir leur mitaine et leur écharpe en temps voulu.


- « Je suis contente de te voir aussi motivée Marinette ! »


J'acquiesce énergiquement. Certes, les paroles de Kagami m'ont touchée et presque blessée, mais je ne peux rechigner la part de vérité qu'ils englobent. Il est temps pour moi de faire un choix, et celui-ci doit respecter les règles des porteurs de Miraculous. Mon téléphone vibre à plusieurs reprises, sûrement Alya qui me questionne quant à la petite visite d'Adrien la veille.


- « Adrien ou Luka... » Je marmonne, le stylo enfoncé dans ma lèvre inférieure.


Le choix parait si logique et complexe à la fois. Celui qui m'aime en tant que Marinette et celui qui aime la super-héroïne.


- « L'amour est si compliqué Tikki.


- Je ne te le fais pas dire... »


De son air abattu germent d'autres questions dans mon esprit.


- « Dis Tikki, est-ce que les kwamis peuvent tomber amoureux ?


- Bien sûr qu'ils peuvent ! Les kwamis peuvent éprouver des sentiments profonds pour les autres, tout comme les humains. »


Mon attention s'oriente sur la Miracle Box planquée sous mon lit.


- « Mais comment vous faites pour vous voir ? Si les Miraculous restent enfermés dans les écrins de la Miracle Box ?


- On se connait depuis des générations, même si nous ne sommes pas toujours réunis, nous pouvons tous sentir le cœur de chaque kwami battre au plus profond de nous. »


Son explication me réchauffe le cœur autant qu'elle me fout le cafard. Tous ces kwamis, incapables de survivre en dehors de leurs écrins, c'est terriblement triste. Avec une idée un peu farfelue en tête, je m'approche de mon lit et y déniche la boite.


- « Tikki, est-ce que tu m'autorises à offrir aux autres un merveilleux Noël en famille ? »


La principale intéressée se pose sur le sommet de la boite, plongée dans ses pensées. Si elle refuse, je me plierais à son choix. Après tout, ce n'est pas très judicieux par les temps qui courent.


- « J'ai longuement eu peur de confier les Miraculous à mes amis après la bataille contre Queen Bee. Mais Alya, Luka et Chat Noir ont raison, je ne peux pas laisser la peur dicter mes actes. »


A genoux, j'attends patiemment sa réponse. Puis, au bout de longues minutes de réflexions, Tikki relève la tête et m'adresse un sourire fort de sens.


(transition)


- « Alya, Nino, je vous confie les Miraculous du renard et de la tortue. »


Les deux tourtereaux, qui jouaient à un énième jeu sur tablette lors de mon irruption chez les Césaires, me dévisagent, inquiets.


- « Il y a un akuma dans le coin ?


- Je n'ai rien entendu de tel, pourtant mon téléphone ne manque aucune alerte !


- Rassurez-vous, ce n'est que pour Noël. Je vous confie la mission de vous occuper de Trixx et Wayzz. Vous acceptez ? »


Il ne leur en faut pas plus pour enfiler le collier et le bracelet. Les kwamis se rejoignent joyeusement et embrassent leurs propriétaires.


- « Compte sur nous Ladybug. »


Si en me levant on m'avait dit que je passerais ma matinée à distribuer des Miraculous à travers la ville, je ne l'aurais jamais cru ! C'est ainsi que je confie Fluff à Alix, Kaalki à Max, Xuppy à Kim et Longg à Kagami - non sans appréhension cette fois. Pour les autres miraculous que je n'ai pas encore confié comme le tigre, le coq, la souris, le lapin, le buffle, la vache, la chèvre et le cochon, je préfère les garder à mes côtés en enfilant les différents accessoires. Seuls deux kwamis n'avaient pas encore retrouvé leur maître : Sass et Pollen.


- « Quelle belle panoplie, ma Lady. »


Alors que je marchais tranquillement le long des toits de la capitale, une silhouette noire atterrit à l'autre bout de la charpente. Chat Noir agite son arme tel un bâton de majorette.


- « Tu trouves ? Je me suis dit qu'un peu de force supplémentaire m'aiderait à attaquer la nouvelle année.


- Tout doux, Noël n'est pas encore passé. »


Malgré son ton légèrement moqueur, je décèle de la fatigue chez mon partenaire, à commencer par sa démarche lasse et lente.


- « Tout va bien Chat Noir ? »


Il pouffe en évitant mon regard puis s'assoit contre les tuiles en fixant l'horizon.


- « Ce Noël va être encore plus pourri que le dernier. »


Ce n'est pas la première fois qu'il me parle de Noël en ces termes. Il y a une dizaine de jours, il m'a presque supplié de rester avec lui le 25. Mais ça, c'était avant que...


- « Pourquoi tu dis ça ? Tu ne partages pas ce moment avec ta famille ? »


Je me maudis aussitôt. Nous ne devons en aucun cas nous donner d'indices sur nos identités secrètes. Je me mords la langue et m'installe à ses côtés.


- « C'est compliqué. Ma famille n'est sûrement pas aussi aimante que la tienne, Buguinette. »


Impossible de trouver les mots pour le réconforter sans risquer de me mettre dans une situation inconfortable.


- « Dis-moi, ma Lady, à quoi ressemblent les Noël chez toi ? »


Il n'ose pas me regarder dans les yeux malgré l'insistance avec laquelle je le fixe. N'y voyant pas d'inconvénient, je lui énumère les étapes d'un réveillon classique chez les Dupain-Cheng : on ferme la boulangerie à clé, on prépare l'appéritif, la télévision en fond sonore, on s'attable ensuite pour l'entrée et le repas. Puis quand les feux d'artifices finissent d'illuminer le ciel, nous discutons autour d'un désert fait maison. Bien sûr, je ne précise pas la qualité exceptionnelle du dessert. 


Pendant que je déversais mon flot de paroles, oubliant de reprendre mon souffle parfois, Chat Noir m'écoute attentivement. On dirait qu'il s'imagine chez moi, autour de la table.


- « Et vous êtes combien ? »


Cette fois, je marque une pause pour réfléchir. Le réveillon classique ne comporte que mes parents et moi - ou dans de rares occasions mon oncle maternel, le chef étoilé.


- « Normalement mes grands-parents paternels se joignent à nous cette année. Les tensions se sont apaisées durant les derniers mois alors ils font l'effort de dîner avec nous, juste pour un jour.


- La chance... »


Chat Noir baisse le menton vers ses griffes. Malheureusement, je ne peux pas le convier chez moi pour des raisons évidentes. En revanche...


- « Et si tu devenais maître des Miraculous, rien qu'un soir ? »


Il relève subitement son minois vers le mien. Je consulte du regard les autres kwamis qui acquiescent joyeusement.


- « C-Comment ça ?


- En tant que Gardienne de la Miracle Box, je te confère les droits sur les Miraculous pour les prochaines vingt-quatre heures. Tu te sentiras moins seuls comme ça, pas vrai ? »


Pourquoi confier les Miraculous à des gens dont je ne connais pas encore les capacités à être des super-héros plutôt qu'à mon partenaire de toujours ? Cette idée m'apparait comme une évidence.


- « Ma Lady... Tu en es sûre ?


- Pas besoin de sondage pour le savoir." Je commente en déposant les lunettes de Mullo sur le bout de son nez.


Ma petite plaisanterie lui fait l'effet d'un soufflé raté. Il esquisse un léger sourire qui s'efface aussi vite.


- « Chat Noir...


- Je sais que je ne suis pas toujours le meilleur partenaire, que j'agis parfois plus par envie que par réflexions. Mais on ne se débrouille pas si mal ensemble, pas vrai ? Je veux dire, ce Vipérion...


- « N'est qu'un garçon que j'ai choisi pour m'aider que sur quelques missions, tout comme Rena Rouge et Carapace. »


De peur de le voir s'éloigner de moi, je glisse ma main sur son épaule et le presse doucement contre moi. J'attache ensuite le bracelet du tigre autour de son poignet gauche.


- « Mais le seul parmi eux que je n'interchangerai jamais, c'est toi Chat Noir. »


Du coin de l'œil, il vérifie la véracité de mes propos, j'achève d'attacher tous les Miraculous à son corps puis lui tend d'une main celui de l'abeille.


- « Queen bee ?


- Un vrai gardien doit reconnaitre quand son jugement est altéré par les sentiments. Je te laisse le droit de choisir si on lui confie ce Miraculous, ou non. »


Une partie de moi croise les doigts pour qu'il en vienne à la même conclusion que moi. Cependant, Chat Noir remarque que j'ai volontairement gardé le bracelet du Serpent.


- « Tu pars voir Luka ? »


Je penche légèrement la tête, peu sûre de la bonne réponse à fournir. Techniquement, je n'ai aucune raison de lui refuser ce Miraculous.


- « Je crois bien, oui.


- Tiens-le à l'œil, s'il te plait. »


Sa menace implicite me provoque un frisson. Il est rare que mon partenaire se montre aussi sérieux.


- « Pourquoi ?


- Une de mes amies est proche de lui. Marinette, je crois qu’elle l’aime bien et je n’aimerais pas la voir souffrir à cause d’un garçon. »


Je demeure interdite devant son explication, mais impossible de ne pas ressentir une certaine joie devant son envie de protéger celle que je suis réellement. Un sourire se dessine sur mes lèvres et, serrant davantage le Miraculous du serpent dans le creux de ma main, j’opine du chef.


- « C’est promis. »


Un flot d’émotions remonte dans ma gorge. Si je reste ici, je risque de me montrer plus émotive que nécessaire. Ainsi, je décide donc de prendre congé de Chat Noir et m’élance en direction du Liberty.


__


- « Luka Couffaine, je te prête le Miraculous du serpent. Ta mission sera de le protéger jusque demain, quand je viendrais le récupérer. »


Vêtu de son habituel sweat à capuche, Luka m’écoute avec attention tandis que je lui remets l’écrin.


- « Pas de danger à l’horizon ? 


- Non, juste un petit cadeau en avance. Je suis désolée pour tout le remue-ménage autour de toi en ce moment. »


Initialement, je n’avais pas prévu d’aborder le sujet de son identité révélée, mais devant son expression contrite, je ne pouvais plus faire semblant.


- « C’est à moi de m’excuser.


- Quoi ? Mais non, tu-


- Je savais que Chloé Bourgeois m’avait vu me détransformer. »


Prise de court, je recule légèrement et bute du talon contre un mur du navire. De quoi parle-t-il ?


- « Le soir où je n’ai pas pu te rendre le Miraculous, j’ai voulu me dissimuler dans une ruelle, mais je suis tombé sur Chloé. Puis le bracelet a bipé et j’ai retrouvé mon apparence normale. »


Figée, je le fixe, un sentiment d’incompréhension me soulève les entrailles. Depuis tout ce temps, Chloé était au courant pour Vipérion ? Une autre question me trotte dans la tête :


- « Pourquoi ne m’as-tu rien dit quand je suis venue récupérer le Miraculous le lendemain ? »


Il avait l’occasion de tout m’expliquer. J’aurais pu… J’aurais pu trouver un moyen d’empêcher Chloé de révéler son secret.


- « C’est ce que je comptais faire, mais tu avais déjà des soucis avec Chat Noir. Je ne voulais pas t’ajouter ça en plus. Comme elle n’a rien fait au bout d’une semaine, je pensais que c’était réglé. »


C’est mal connaitre Chloé Bourgeois, elle attendait simplement le bon moment pour frapper. Pour la première fois, je ressens une pointe d’amertume envers Luka, bien que ses intentions soient bonnes. Il semble le comprendre car il me tend l’écrin en retour.


- « Je comprendrais que tu ne puisses plus compter sur moi. »


A cet instant, j’aimerais que Chat Noir soit à mes côtés pour m’aider à prendre une décision. En dépit de mon rôle de gardienne, je ne parviens pas à écarter mes sentiments de l’équation, ni même mes craintes qu’il ait lui-même découvert mon identité.


- « Garde-le.


- Tu es certaine ?


- Prouve-moi que tu mérites d’être Vipérion et nous serons quittes. Tu as dit que tu étais prêt à me protéger, pas vrai ? »


L’avenir me dira si j’ai eu tord de mélanger sentiments et devoir. En tout cas, Luka accepte ma proposition et recouvre l’écrin de sa deuxième main. Paris sera en sécurité ce soir, peu importe les desseins du Papillon.



Le réveillon chez les Dupain-Cheng se déroule exactement comme je l’ai raconté à Chat Noir. Mes grands-parents se jettent de gentilles piques alors que je plonge ma main dans les gâteaux apéritifs en regardant la télévision. Le sapin décoré de boules et autres guirlandes lumineuses orne un coin du salon. Sur la première chaine nationale, une rétrospection de l’année des deux super-héros défile sur le petit écran. On y redécouvre tous les vilains qui nous ont donné du fil à retordre, mais aussi les nouveaux compagnons de Ladybug et Chat Noir. Chloé Bourgeois n’a pas pu s’empêcher de se faire interviewer entre deux vidéos.

Si Chat Noir lui a confié le Miraculous de l’abeille, j’espère qu’il sera capable de la lui reprendre et qu’elle ne fera pas de bêtise ce soir, je songe affalée dans le canapé auprès de mon père.


- « Le feu d’artifice va bientôt commenter ! » Annonce ma mère en posant les flûtes à champagne sur la table.


L’aiguille de l’horloge murale avoisine le sommet. Il est déjà si tard ! Nous nous précipitons tous à la fenêtre, sous laquelle le canapé a été poussé pour profiter du spectacle. Aux côtés de mes parents, je décompte le nombre de secondes avant minuit.


- « Sept, six, cinq… »


J’espère que Luka profite lui aussi de sa soirée.


- « … quatre, trois, deux… »


Il faut que je pense à appeler Adrien pour lui souhaiter un joyeux Noël.


- « … Un… ! »


Et que Chat Noir s’éclate avec les autres kwamis.


- « … Qu’est-ce qui se passe ? »


La surprise est globale. Rien, aucune lumière dans le ciel, pas la moindre fusée, ni d’éclats. Rien du tout. 

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