Rathlands

Chapitre 4 : Chapitre 4 (Arsenic POV)

4708 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour 13/10/2019 14:06

Arsenic suivait son frère dans le couloir menant à la salle du trône.

Songeuse, elle fixait tour à tour les colonnes de marbre du corridor puis ses serres d’un regard vide, trahissant son intense réflexion.

Depuis que son père adoptif avait révélé la mort de Tourmaline au reste de la famille royale, soit la veille, elle et Zénith avait médité sur cet inéluctable retour en guerre qu’entraînait la perte de leur sœur. Incapables de dormir après avoir appris cette nouvelle, ils s’étaient concertés la nuit durant pour décider de ce qu’ils pouvaient faire pour remédier à la situation actuelle, ou du moins y contribuer. Tous deux savaient le pays très affaibli depuis dix ans à cause de la guerre Sanglante, qu’on croyait maintenant achevée grâce à ce mariage arrangé, parti en véritable fiasco. Durant cette décennie de malheur, les forces Rathiennes n’avaient pas réussi à vaincre les Nordiques, et se contentaient de les repousser, parfois péniblement. Cependant, animés par un désir de basculer la balance en leur faveur, afin de remotiver les troupes et d’opposer une plus grande résistance aux Rakuriens, les deux aînés souhaitaient cette fois s’enrôler eux-mêmes dans l’armée, comptant encore sur le fait que la volonté et l’espoir des Rathiens en voyant leur implication puissent leur venir en aide pour vaincre. En effet, les deux héritiers avaient reçu chacun un entraînement de guerrier, depuis leur plus tendre enfance, prodigué par les généraux Astalian et Tinarg eux-mêmes. Une mesure préventive contre d’éventuelles offensives sur le château, affirmait Khryselios, que tous savaient terrifié à l’idée de perdre l’un de ses précieux enfants.

« On sait combattre, avait dit Zénith, pourquoi renoncer à utiliser nos aptitudes ? Ce serait idiot de laisser les troupes mourir à petit feu alors que nous pouvons les aider à affronter Rakuraï. »

Elle avait approuvé, bien entendu, mais lui avait fait remarquer que leurs parents, et son père en particulier, refuseraient certainement de les laisser s’engager ainsi.

« Je me fiche de ce que pensera Khryselios, avait-il répondu, à partir du moment où c’est mon futur royaume qui est en danger. »

Ils prévirent alors ce soir-là d’annoncer leur décision à leur père le lendemain même.

-        A quoi tu penses, soeurette ? demanda d’un air léger le Roi-Enfer en jetant un œil par-dessus son épaule.

Elle releva un peu la tête, et posa son regard améthyste sur lui.

-        … Tu sais très bien à quoi je pense, souffla-t-elle doucement.

Il se retourna et l’effleura d’une de ses ailes dans un geste affectueux.

-        Ne t’inquiète pas pour ça. Il ne pourra pas ne m’en empêcher. Tu me connais, je suis bien trop borné, la rassura-t-il.

C’était bien cela qui l’inquiétait. Néanmoins, elle s’efforça de lui rendre un sourire timide.

-        Quant à toi, tu sais bien qu’il n’a pas la légitimité de te retenir …

Elle reçut cette parole comme un pincement au cœur, malgré sa véracité.

-        Entrons, dit-il, tandis que les gardes Seltas ouvraient la porte de la Griffe d’Or.

Arsenic hocha la tête et lui emboîta le pas.



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-        Père ! Je dois te parler ! appela d’une voix forte le Roi-Enfer en se redressant, laissant son écho se répercuter dans toute la salle et amplifier la puissance de ses mots.

Quelques secondes plus tard, le souverain des Rathlands apparut, salua ses deux enfants de la tête et s’assit sur son trône.

-        Bonjour, Zénith. Bonjour, Arsenic. De quoi souhaites-tu me faire part ? demanda Khryselios en réorientant son regard vers lui.

Arsenic put alors sentir son frère à côté d’elle se gonfler de courage et de détermination.

-        Je viens t’annoncer que nous avons décidé, moi et Arsenic, de nous enrôler dans l’armée en tant que soldats, proclama-t-il avec une certaine férocité.

Khryselios tressaillit et se figea un instant.

-        Ce n’est pas possible, mon fils. Je refuse que vous vous mêliez personnellement à ce conflit, répondit-il calmement.

En face de lui, Zénith se forçait encore à contenir sa colère grondante, prêt à imposer son choix.

« Il le considère comme responsable de la mort de notre grande sœur … Mais a-t-il besoin d’en arriver à cette extrémité ? A provoquer son propre père, à contester ses ordres ? Veut-il le fuir en accomplissant cela … ? » songeait avec perplexité la Reine-Poison, ses yeux rivés sur les iris incandescentes de son frère.

-        Nous avons subi l’entraînement royal depuis nos dix ans. Nous pouvons nous battre et soutenir notre armée. Nous pouvons gagner cette guerre si chacun met cœur à l’ouvrage, en commençant par nous. Phénix est encore trop jeune pour cela, mais Blast serait prêt à nous rejoindre si nous parvenons à obtenir ton accord, dit-il.

Arsenic frissonna. L’intensité avec laquelle il appuyait ses « nous » était presque effrayante.

« De plus en plus, je la sens. Cette farouche envie de prendre les rênes, de mener le royaume … Cette frustration de ne pouvoir agir … C’est palpable. On croirait presque qu’il serait capable de renverser son père demain. »

Le roi eut un air effaré en constatant la réelle volonté de Zénith.

-        C’est bien trop dangereux, Zénith. Tu n’iras pas combattre. Ni toi, ni Arsenic, ni Blast. Je ne souhaite pas qu’il vous arrive malheur. Votre présence ou non n’aurait aucune réelle conséquence sur nos chances de victoire. C’est inutile, crois-moi.

La Rathian Reine-Poison sentit alors son frère se tendre de rage, et laisser s’échapper un sourd grondement de ressentiment.

-        Je veux combattre aux côtés de mon peuple, grogna le Rathalos Roi-Enfer, comme le font toutes les autres nations. Même ce chien de Rakuraï combat au sein de ses troupes, et autorise ses fils à s’enrôler ! Alors, si toi tu veux rester assis sur ton trône, sache que tes fils et ta fille ne sont pas forcément du même avis.

Il y eut un silence pendant lequel le père et le fils se fixait avec tension. Arsenic prit alors la parole.

-        Nous pensons que notre engagement remotivera grandement les troupes, et par conséquent, que cela accroîtra bien nos chances de réussite. La plupart des membres de la famille royale possède des capacités hors-normes. Il serait égoïste de priver l’armée d’une telle ressource, déclara-t-elle posément. Je comprends votre appréhension, mais il est temps pour nous de choisir nous-mêmes ce que nous voulons. Nous ne sommes plus des enfants.

Khryselios semblait acculé et impuissant, ses ailes s’abaissant jusqu’à toucher le sol.

-        Je ne peux pas vous laisser y aller, lâcha finalement le roi après un moment, secouant la tête. Il en va de la survie du royaume. Que ferais-je sans héritiers, dites-moi ?

 Zénith, toujours rayonnant de colère, s’empressa de répliquer du tac-au-tac.

-        Tu n’auras plus besoin d’héritiers si tu ne possèdes plus de royaume, cracha le prince des Rathlands en faisant volte-face. Et ce n’est pas toi qui nous empêchera d’accomplir notre volonté.

Il lança ensuite un regard déterminé à la Rathian.

-        Nous partons, Arsenic, annonça-t-il solennellement, sans daigner observer la réaction de son père. 

Et sans un mot, elle le suivit en dehors de la salle du trône.




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-        Allons demander à Knart de nous fabriquer des pièces d’armure, lui souffla discrètement à l’oreille Zénith en sortant du château avant de se diriger vers la forge.

Elle hocha la tête silencieusement.

« Espérons seulement qu’il acceptera malgré le refus de notre père … Oh, connaissant Zénith, il doit déjà être en train de mijoter quelque chose … » songeait-t-elle tandis qu’ils foulaient le pavé de la capitale.

Ignis, malgré ce retour en guerre imminent, semblait bien calme ce matin-ci. Les échoppes commençaient à peine à s’ouvrir, tels des boutons de fleurs à la première lueur de l’aube, et le marché ne grouillait pas encore de monde. Tout semblait encore endormi et apaisé. La campagne bleutée, au loin, n’était pas encore éveillée. Le seul élément pouvant trahir le renouveau de l’agitation guerrière était la présence de bruits métalliques s’élevant dans l’azur du ciel, provenant des forges grondantes et rougeoyantes où l’on s’attelait déjà à la confection et au polissage des armures. Les coups de marteaux s’entendaient dans le silence matinal à au moins un kilomètre à la ronde, clairement et régulièrement, à la manière d’un carillon annonçant l’heure du réveil non seulement des habitants, mais également celle des armuriers, soldats ou encore mercenaires. Au loin, les murailles de pierre blanche délimitant l’enceinte royale commençaient à être baignées d’un soleil frileux, tout comme les habitations aux toits rouges ou verts.

Arsenic et Zénith progressaient dans la ville éveillée depuis une dizaine de minutes lorsqu’ils atteignirent la forge de Knart, qui les remarqua immédiatement, et abandonna sa tâche pour venir à leur rencontre.

-        Bien le bonjour, messeigneurs ! Que me vaut votre visite si matinale ? demanda l’Agnaktor en effectuant une grâcieuse révérence.

Son frère sourit. Il appréciait beaucoup Knart, même s’il lui reprochait souvent, comme beaucoup d’autres, son excessif zèle envers les membres de la famille royale.

-        Bonjour Knart, toujours aussi motivé dès le matin ? Tu m’impressionneras toujours ! Et cesse de nous vouvoyer, pour la énième fois, rit le Roi-Enfer.

La Reine-Poison sentit l’esquisse d’un sourire se tracer sur son visage.

-        Je pense que notre bon vieil ami ne se fera jamais à l’idée de nous tutoyer, si tu veux mon avis, dit-elle en s’avançant pour se tenir à son côté.

Le léviathan volcanique eut un soudain air affligé.

-        Pardonnez-moi, messeigneurs. Et … Je tenais à vous présenter mes condoléances, pour Dame Tourmaline … dit-il en murmurant ses derniers mots, les yeux emplis d’une compassion sincère.

Le frère et la sœur se regardèrent avec une gêne douloureuse.

-        Merci Knart, remercia Arsenic à la place de son frère, quelque peu chamboulé par l’énonciation du nom de sa sœur défunte, et absorbé dans ses pensées. Nous venions te demander s’il était possible que l’on nous forge trois plastrons de dragonite avec une protection anti-foudre, ainsi que trois casques légers sans visière et deux armures caudales, dans les plus brefs délais, s’il te plait.

L’Agnaktor cligna des yeux plusieurs fois, incrédule.

-        Comment ça ? V-Vous partez au front ? M-m-mais ! C’est très dangereux vous savez ! paniqua-t-il. Et … Si v-vous n’avez pas l’accord de votre père, je suis au regret de vous apprendre q-que je ne pourrais pas accéder à votre requête … ajouta-t-il ensuite, forçant un sourire crispé et anxieux, de peur de courroucer les deux aînés.

Zénith sembla reprendre ses esprits à ce moment.

-        Nous avons l’accord de notre père, je le jure par Teostra, affirma-t-il avec conviction en levant l’aile droite en signe de promesse. Et nous savons ce que cela implique. Nous souhaitons prendre part au combat pour permettre aux Rathiens de gagner cette guerre, on en est capables. C’est bien le devoir d’un prince de servir son peuple, non ?

La Rathian Reine-Poison sourit intérieurement.

« Bien joué Zénith. Knart, malgré sa grande fidélité au roi, nous croit sur parole et n’osera pas demander confirmation à Khryselios … Et si jamais notre père l’apprend … Il n’aura certainement pas le cœur de contester. Il sait que cela ne servirait à rien, à part dévoiler à son peuple à quel point il est devenu impuissant … Même face à ses propres enfants. » songea-t-elle avec une pointe de tristesse.

-        B-bien alors, si vous avez l’accord du roi … répéta l’Agnaktor en baissant les yeux. Je vais commencer à travailler sur vos armures de suite ! Elles seront achevées dans trois jours, tout au plus, cela dépendra de l’arrivée de ma livraison de métaux … On commence à être en pénurie, vous savez …

Zénith hocha la tête. L’effort de guerre soutenu depuis dix ans commençait à s’essouffler, et les ressources minières manquaient de plus en plus … Ainsi, par restriction budgétaire, chaque soldat ne possédait comme armure qu’un plastron de fer, qui couvrait la partie centrale du dos et le thorax, qui était fourni par l’armée. S’ils souhaitaient une plus grande protection, c’était à eux de payer leur équipement. Quelques exceptions, comme les deux généraux Tinarg et Astalian, avaient le privilège de posséder un matériel entièrement financé par la famille royale elle-même. Quant à Zénith et Arsenic, ils n’avaient aucun souci à acquérir ce genre de choses, grâce à leur argent de poche.

L’Agnaktor commença à compter sur ses doigts palmés.

-        Mmmh … Avec tout ce que vous me demandez là, nous en aurons pour un total de 800 Rathdors, déclara-t-il, cela rentre dans votre budget ?

Le frère et la sœur acquiescèrent simultanément, et Zénith déposa dans la paume de l’Agnaktor une bourse de cuir.

-        Merci bien, messeigneurs, dit-il en s’inclinant. C’est un honneur de faire affaire avec vous.

-        Et nous donc, répondit Arsenic.

Le léviathan magmatique exécuta une dernière révérence avant de s’en retourner à son ouvrage.

-        Bien. Voilà une chose de faite, soupira le Roi-Enfer.

Arsenic lui donna un léger coup de coude.

-        Eh, ne fais pas cette tête-là, comme si mentir t’avais réellement dérangé, le taquina-t-elle avec des yeux malicieux.

Son frère eut un air faussement offusqué.

-        Moi, mentir ? Je n’ai fait que dire la vérité ! Si Knart doute de la véracité de mes propos, il peut demander à Père, et Père dira qu…

-        On sait, on sait, il répondra oui par défaitisme, dit la Rathian en levant les yeux au ciel.

Zénith esquissa un sourire de côté.

-        Et bien, tu vois que je n’ai pas menti.



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-        Raté ! Essaye de viser plus bas pour ne pas manquer ta cible ! s’écria Astalian en bloquant la queue encapuchonnée d’Arsenic avec sa pince caudale.

Arsenic serra les dents mais se reprit rapidement. Cela faisait déjà trois heures qu’elle s’entraînait et elle n’avait réussi à toucher l’Astalos que dix fois. Grondant pour se remotiver, elle lança un énième coup de queue visant la tête de l’espionne royale, qui la frôla.

-        Manque de vitesse.

La Reine-Poison enchaîna avec une morsure, que l’Astalos évita en s’envolant.

-        Pas mal. Mais ne laisses pas autant de temps mort quand tu enchaînes, conseilla Astalian. Allez, encore un essai puis on passe au tir, motivée ?

-        Et comment ! rugit Arsenic, soudain prise de frénésie.

-        Parfait. Réessaye un balayage alors, plus rapidement, et continue ensuite avec un retourné, lui demanda-t-elle.

Arsenic reprit sa position initiale, puis effectua l’enchaînement indiqué. Transfert d’appui sur la jambe droite, rotation, balayage de la queue, ciblé bas, transfert d’appui sur la jambe gauche, puis coup de queue en back-flip, en ciblant plus haut, s’envolant au passage pour donner de la puissance à la frappe.

-        Touchée ! s’exclama-t-elle en sentant son couvre-queue métallique heurter le casque de l’Astalos.

-        Excellent ! Si je n’avais rien sur la tête, j’aurais certainement été assommée, la félicita-t-elle. On passe au tir maintenant ? A moins que tu ne veuilles travailler ton poison d’abord ?

L’aînée se reposa au sol.

-        Je préférerai d’abord le tir. Je manque encore de précision, je pense.

-        Oh, crois-moi tu te débrouilles toujours mieux que Phénix ! répondit Astalian. Je crois qu’il n’a toujours pas saisi le concept de « viser » … se lamenta-t-elle.

Arsenic rit de cette évocation. Le cadet tout feu tout flamme de la fratrie avait effectivement des difficultés à contrôler ses flammes, et brûlait souvent tout ce qui se trouvait autour de lui lors de l’entraînement au tir. Tinarg et Astalian avaient beau lui expliquer qu’il suffisait de concentrer une partie de celles-ci pour faire mouche, le Rathalos Incendiaire faisait la sourde oreille, prétendant que tant que la cible était détruite, c’était le principal, au grand dam des généraux.

-        Je vais chercher des cibles, prends une pause en attendant, dit l’Astalos femelle en s’envolant.

Arsenic hocha imperceptiblement la tête. Elle étira ses ailes un instant puis s’approcha de l’abreuvoir pour y boire, puis plongea sa tête luisante de sueur dedans.

« Brrr. Je ne devrais pas me rafraîchir la tête, je vais éprouver des difficultés à produire des flammes, après … Tant pis. Ça me permet de me concentrer. » songea-t-elle avant de sortir sa tête de l’élément liquide.

Elle inspira longuement, fit chauffer l’intérieur de sa gorge, puis essaya de cracher une flammèche, avec succès.

-        Je suis revenue ! annonça l’Astalos en déposant au sol trois cibles de tir en bois. On n’en a plus beaucoup, donc je n’en ai pris que trois … J’espère que ça ira.

-        On fait avec ce qu’on a, répondit la Reine-Poison en haussant les épaules.

-        Bien. Pour le premier tir, on va essayer un jet lance-flammes sur une distance de dix mètres, tu t’en sens capable ?

Elle réfléchit. Possible, mais pas aisé.

-        On peut toujours tenter, mais ça risque d’être difficile.

-        Ce serait pour réévaluer ta distance de puissance, ne t’inquiètes pas, expliqua Astalian en allant placer la cible à dix mètres. Prête ? C’est quand tu veux !

L’Astalos recula de plusieurs pas et regarda Arsenic en attendant qu’elle se décide. Celle-ci recula d’un pas, inspira lentement l’oxygène nécessaire à la combustion, puis utilisa ses crocs pour provoquer l’étincelle qui enflamma son jet de flammes orangées, qu’elle souffla ensuite de toutes ses forces vers la cible. Cible qui ne fut que léchée par ses flammes, malgré l’effort de la Reine-Poison, qui céda quelques secondes plus tard, toussant à cause du surmenage de sa gorge.

-        Neuf mètres et soixante centimètres ! Tu as progressé depuis la dernière fois, déclara l’espionne.

Arsenic soupira.

-        J’aurai bien souhaité réussir à atteindre les dix mètres quand même.

Astalian vint vers elle et lui tapa l’épaule amicalement.

-        Ce n’est pas donné à tout le monde de tenir ne serait-ce que huit mètres, tu sais … Bon, second essai, on va essayer d’affiner ta précision de tir par balle à une distance de trente mètres, je vais changer la cible, dit l’Astalos en s’exécutant.

Grattant le sable humide sous ses serres, la Rathian se reconcentra.

-        Tu peux y aller ! lui cria Astalian.

Visualisant la cible dans sa tête, elle concentra son gaz de combustion dans un point précis de sa gueule pendant quelques secondes. Puis, avec une réaction très vive, elle enflamma sa sphère et la cracha droit vers la cible. Dans le mille.

-        Parfait ! lança-t-elle en éteignant les flammes avec ses ailes. Une dernière à quarante, ça te tente ?

-        Pourquoi pas ! lui cria la Rathian à l’autre bout du terrain.

La générale changea à nouveau la cible et la recula de dix mètres supplémentaires.

-        Vas-y !

« Je peux le faire. Je peux y arriver. Ce n’est qu’une question de concentration. »

Déterminée, elle remplit ses poumons d’air, puis cracha à nouveau une sphère enflammée en direction du panneau de bois. Mouche.

-        Impeccable ! sourit Astalian en revenant vers elle. Je crois que t’as assimilé le truc.

-        Merci, dit Arsenic, elle-même satisfaite de sa performance.

-        Un petit duel à l’épée pour finir ? proposa son entraîneuse qui ramassait son glaive avec sa pince.

Le regard de l’aînée se remplit de motivation.

Bien qu’elle n’affectionnait pas autant les combats à l’épée qu’Astalian, cette idée lui plut. En effet, seule Astalian se battait avec une arme, et celle-ci était particulière. Au lieu de posséder une garde en cuir comme la grande majorité des épées, son glaive était entièrement constitué de métal. Cela lui permettait, grâce à sa production naturelle d’électricité, notamment par la queue, les ailes et la crête, d’électrifier celui-ci pour combattre. De tout le royaume, il n’y avait qu’elle qui savait manier le glaive à la perfection, et qui appréciait se battre avec. Quant à Arsenic, elle appréciait ces duels intempestifs, mais ne prenait pas réellement de plaisir à manier l’épée.

-        Allons-y, accepta la Reine-Poison.

Astalian lui désigna son couvre-queue avec son arme, qu’elle tenait dans sa pince caudale.

-        Enlève ça, que tu puisses t’exercer.

Sans un mot, elle défit son couvre queue en argent, laissant son appendice caudal extrêmement venimeux répandre dans l’air des toxines volatiles.

-        C’est parti ! gronda l’Astalos femelle en s’envolant.

Arsenic, elle, débuta en claquant sa queue au sol, provoquant la création de plusieurs petits cristaux violets toxiques. Elle en ramassa un en guise d’arme avec l’une de ses serres, puis s’envola. Saisissant l’opportunité de lancer le premier mouvement, Astalian fondit sur elle toutes serres dehors. Arsenic l’évita, mais répliqua immédiatement par une morsure enflammée pour empêcher l’Astalos de continuer avec un coup d’épée.

« Je commence à connaître tes techniques, maintenant, tu sais » ricana-t-elle intérieurement.

Frustrée, la dragonne libellule chargea ses ailes d’électricité verte, puis relâcha un éclair vers sa cible, qui encaissa sans mal, et riposta par un coup porté avec son poison cristallisé qui frappa le vide.

« Ce plastron à couche de caoutchouc est vraiment efficace, je n’ai rien senti » pensa Arsenic.

Ne laissant aucun répit à l’espionne, elle continua d’essayer de toucher l’Astalos, en vain.

-        Ce n’est pas en multipliant les coups au hasard que tu vas m’avoir ! s’écria la générale.

La Rathian grinça des dents. Pas faux.

« Reconcentre-toi, Arsenic, tu t’éparpilles. » s’ordonna-t-elle.

Astalian tenta alors d’asséner un coup vertical avec son glaive, mais ne toucha qu’un bout de l’aile droite de son adversaire, qui tressaillit et s’éloigna de plusieurs mètres à cause de l’électricité qui irradiait douloureusement son membre alaire.

« Ouch. Il faut vraiment que j’évite d’être touchée aux ailes par de la foudre … »

Grognant à cause de cette piqûre lancinante, elle s’élança pour cueillir la dragonne libellule avec ses griffes, mais celle-ci esquiva en s’élevant un peu plus dans les airs, reculant vivement, puis invoqua un autre éclair, qui cette fois manqua sa cible. Profitant de ce temps mort, la Rathian se jeta à nouveau vivement sur l’Astalos, qui ne réagit pas assez rapidement pour se dégager des serres d’Arsenic, et qui la plaqua au sol, sa lame venimeuse à quelques centimètres de sa gorge.

-        Je crois que j’ai gagné, dit la Reine-Poison en la retirant et en laissant la guerrière se relever.

-        C’était bien joué, avoua-t-elle avec un sourire.



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