Rathlands

Phénix admirait son grand frère, parfois. En fait, il l’admirait en permanence. Il fallait dire qu’il ne baissait jamais les bras. Il était attentionné. Il était brave. Et par-dessus tout, il était fort.

Dans les plus sombres et tragiques moments, là où il n’y a plus d’espoir, Zénith était là et les guidait. Il était celui sur lequel on pouvait compter. S’appuyer. Il n’était pas le prince aîné pour rien.

Alors, lorsque son grand frère lui avait annoncé la mort de son père, Khryselios, à lui et à Blast et Blister, il lui avait naturellement fait confiance. Dans un moment pareil, il avait su partager la douleur et la lucidité, gardant la tête froide dans une telle situation.

Son grand frère était un leader né.

Même lorsqu’il avait amené leur mère, Chryselene, il n’avait pas failli. Il l’avait soutenu tandis qu’elle se désolait sur la dépouille de son mari, les jambes faibles, menaçant de se dérober sous elle à chaque instant. Il l’avait épaulé comme un solide pilier avec la délicatesse d’une plume, tentant de la consoler dans l’étreinte de ses ailes.

La scène aurait fendu le cœur de n’importe qui. Lui le premier, et Teostra sait qu’il avait autant fondu en larmes que sa mère, juste par le ressenti de sa profonde douleur. Blister aussi avait été fortement émue. Mais lui … Malgré tout, il se sentait le pleurnichard de la famille. Mais comment rester de marbre, stoïque et fort, face à tant de tragédie ?

Zénith. Zénith, lui, y parvenait. Cela devait requérir une énergie extraordinaire.

Même durant les funérailles nationales, au petit matin, il n’avait jamais cillé. Déterminé, stoïque, radiant de force inébranlable. Narrant au peuple les circonstances de la mort de leur bien-aimé souverain depuis le balcon royal où se tenaient les grands discours. Les probables causes. La suite des évènements. Leur promettant de venger le cœur même de la Nation, meurtri par la perte successive de Tourmaline et Khryselios. Jamais il n’avait montré de faiblesse, même lorsque la foule l’avait acclamé comme nouveau souverain légitime, là où Phénix aurait sans doute versé au moins une larme de pure émotion.

Phénix souhaitait de tout son cœur, qu’en grandissant, il parviendrait à devenir comme lui.

« Je ne régnerais peut-être jamais, mais rien ne m’empêche de représenter ma Nation pour autant. Avec un peu de chance, je pourrais devenir général ! » songeait-il souvent.

Zénith avait ensuite convoqué les généraux, ordonnant la mise en route de l’armée pour King’s Gate. Décidant de se joindre à l’expédition, il confia son nouveau rôle régalien à Chryselene en son absence. Le même jour, il demanda l’accord du général Skypiercer pour son soutien. Phénix ignorait comment il avait réussi à le convaincre, mais l’étranger avait accepté. Enfin, le nouveau roi avait déboursé une grande quantité de Rathdors pour fournir davantage d’armures aux soldats.

Leur grand frère les avait ensuite réunis tous, pour qu’ils puissent choisir ce qu’ils souhaitaient faire. Naturellement, tous, à l’exception de Blister qui souhaitait soutenir leur mère, et de Phénix, avaient répondu qu’ils voulaient lui prêter main forte. Le Rathalos Incendiaire lui, s’était gardé de s’exprimer. Lorsque Zénith, Arsenic et Blast s’étaient enrôlés dans l’armée peu auparavant, Zénith lui-même l’avait stoppé dans son élan de bravoure, lui rappelant qu’il était encore trop jeune pour cela. Le cadet s’était donc résolu à abandonner l’idée de combattre à leur côté. Mais quelle ne fut pas sa surprise, lorsque son grand frère, lui tendant l’aile, lui avait dit :

-        L’heure est venue pour toi de choisir, petit frère.

La joie l’avait rempli. Zénith le considérait apte ! Il lui faisait confiance ! Il avait accepté sans une once d’hésitation.

A midi, ils levaient le camp et faisaient route vers la ville qu’ils devaient sauver.

King’s Gate.

Gonflé à bloc, Phénix huma l’air et lui trouva un parfum d’espoir. Le vent qui soufflait dans leurs ailes les portait vers la réussite. Teostra lui-même leur avait envoyé ce vent, il en était certain.

Zénith avait planifié deux groupes. Le premier, mené par Astalian, et auquel il se mêlerait, avait pour tâche de profiter de ce vent de dos pour se rendre sur place le plus vite possible. Tous les soldats capables de voler étaient donc réquisitionnés. Les autres, constitués des non-volants, dirigé par Tinarg, et des Skypiercers, au sol, se chargeraient d’amener ensuite le matériel supplémentaire.

Naturellement, Phénix s’était retrouvé dans le premier bataillon. C’était même avec joie qu’il acceptait d’endosser ce lourd rôle d’éclaireur.

Pour la première fois de sa vie, il se sentait fichtrement important.

-        Tout est bon, à l’arrière ? demanda Astalian, juste devant lui, par-dessus son épaule.

Phénix s’éleva un peu et se retourna brièvement pour transmettre la question à l’arrière, signant la phrase au Rathalos azur chargé de transmettre les informations. Celui-ci lui renvoya aussitôt sa réponse d’un geste : « Affirmatif ».

-        Affirmatif ! répondit alors Phénix en se replaçant dans le rang.

-        Parfait, confirma l’Astalos.

Zénith, qui se tenait tout à droite, à côté d’Arsenic prit la parole.

-        Nous devrions atteindre la ville d’ici une vingtaine de minutes. Faut-il déjà faire passer le message ?

Astalian secoua la tête.

-        Inutile. Il suffira d’informer un peu moins de dix minutes avant. Ce système est très efficace, Majesté, vous savez.

Zénith hocha la tête.

-        Je crois vos dires, générale. Après tout, je ne suis pas encore habitué à tout cela !

-        Aucun problème à cela, mon roi, sourit Astalian. Il faut bien acquérir l’expérience quelque part.

Zénith lui rendit son sourire, qui ne subsista que quelques secondes sur son visage.

-        J’espère que nous n’arriverons pas trop tard. Nous avons tout de même quelques éléments à mettre en place … Notamment ces étranges dispositifs que les Skypiercers ont amené avec eux … pensa le nouveau roi.

-        Le général Scarface m’a assuré que ses hommes auraient le temps d’installer leur matériel. Il y a autant de soldats compétents et formés que de ces « balistes » et “canons”.

Son grand frère hocha la tête.

-        Ils font vraiment les choses avec minutie … Voilà quelque chose dont ils peuvent se targuer. C’est fort judicieux et appréciable, en notre cas présent.

-        Assurément, sire, approuva la générale.

-        Que sont les « balistes » ? demanda soudainement Phénix à tout hasard.

Astalian lui jeta un œil par-dessus son épaule.

-        Il paraît que chez eux, ces armes sont assez courantes. Elles permettent de lancer des projectiles, bien plus loin que nos flammes le peuvent. Ce doit être fort utile pour un peuple principalement dépourvu d’aptitudes élémentaires. Je n’en ai jamais vu en action, mais on ne va pas tarder à en avoir l’occasion ...

-        Waoh ! Ce doit être si puissant ! s’émerveilla Phénix à la simple description de l’arme.

Le Rathalos Roi-Enfer eut un air songeur.

-        En effet, je suis curieux de les voir à l’œuvre …

Le reste du voyage se déroula dans un silence relatif, tous étant plongés sur la réflexion de la bataille à venir. Phénix lui-même était fortement préoccupé, car il n’avait jamais participé à une bataille. Certes, il avait subi l’entraînement royal, mais il se doutait bien qu’une fois sur le champ de bataille, tout serait différent. L’appréhension le saisissait. Mais il faisait confiance à son frère. S’il était là aujourd’hui, c’est parce qu’on avait cru en lui. Il était à la hauteur.

Il pouvait le faire.

Lorsqu’ils se posèrent aux abords de King’s Gate, une escouade s’empressa de pénétrer dans l’enceinte de la ville pour annoncer l’attaque imminente des Rakuriens à la population. Des voix s’élevèrent bien vite au-delà des remparts, mais Phénix n’y prêta guère plus d’attention.

-        Par ici ! s’écria Astalian, appelant le restant du premier groupe vers la muraille Est.

Zénith s’empressa de la suivre, et Phénix fit de même.

La muraille Est de King’s Gate était plantée à flanc de falaise, au sommet d’un dénivelé escarpé. D’ici, ils auraient la meilleure vue pour apercevoir les Rakuriens dès leur apparition à l’horizon. Comme cette falaise était pratiquement imprenable, les Nordiques seraient contraints de faire un détour. Là-bas, sur la façade Sud, par où ils étaient arrivés, les attendraient les balistes et canons des Skypiercers.

Mais cela ne s’arrêtait pas là, car, en effet, Zénith avait tenu à ce que deux canons soient disposés sur la muraille Est. Son plan dépassait la simple contre-attaque : à l’approbation des généraux, qui considérèrent l’opération possible, ces canons feraient feu dès que les Rakuriens seraient à portée de tir. Ainsi, lorsque qu’ils auraient effectué le détour forcé, il y aurait déjà des pertes dans les rangs, et leur assurance serait assurément ébranlée.

Lorsque Zénith lui avait expliqué cette stratégie, le cadet de la fratrie royale avait été galvanisé. Non seulement le plan sonnait comme un éclat de génie, mais en plus, il provenait en partie de son grand frère.

Il ne cesserait sans doute jamais de le surprendre.

Le restant des troupes arriva quelques heures plus tard, alors que le soleil commençait à décliner. Sitôt aperçu, Zénith quitta son poste pour les rejoindre, sans doute pour les informer des constats effectués concernant le terrain. Phénix, lui, se retrouva bien assez tôt avec de la ferraille dans les serres, aidant à la mise en place des armes des Skypiercers.

« Woah, ces machins pèsent une tonne ! » songea-t-il en soulevant le tube d’un canon, suffisamment lourd pour le faire vaciller, tandis qu’il s’élevait dans les airs.

Ce remue-ménage dura bien deux heures, car lorsque Phénix acheva de mettre sur pied une baliste aux côtés d’un ingénieur Skypiercer, le soleil se couchait sur la plaine, en contrebas. Le ciel, pur et dégagé, laissait entrevoir, au Sud, les murailles d’Ignis et le Château des Rathlands.

Il sentit une aile se poser sur son épaule.

-        Alors, petit frère, pas trop fatigué ? demanda Zénith qui avait visiblement lui aussi fini ses tâches.

Phénix répondit par un sourire.

-        Si, un peu, mais je suis assigné au premier tour de garde. J’ai toute la nuit pour me reposer !

Son grand frère hocha lentement la tête.

-        Demain sera une rude journée.

Phénix resta silencieux. A vrai dire, il ne savait pas à quoi s’attendre.

-        Je veillerai sur toi, prononça le nouveau roi.

Le cadet exprima un rictus nerveux.

-        Hé, celui qui peut promettre une telle chose au cours d’une bataille est sacrément puissant ...

Zénith s’avança, et plaça ses ailes sur ses épaules.

-        Et pourtant, je le ferais. Tu peux dormir en paix, petit frère. On rentrera sains et saufs.

Il l’enserra doucement entre ses ailes, et Phénix fit de même.

Puis, comme il était apparu, Zénith le relâcha et disparut dans la foule qui dressait le campement pour la nuit.

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La nuit était étrangement calme durant le tour de garde de Phénix. Il faut dire que le soleil s’était à peine couché. Quel genre de personne attaquerait une ville au coucher du soleil, lorsque la luminosité est basse, et les sens tous encore en alerte ?

Si les Rakuriens attaquaient par surprise, ce serait soit au beau milieu de la nuit, soit au petit matin, quelques heures avant le lever du soleil.

Malgré ça, Phénix ressentait ce silence omniprésent comme malaisant et menaçant. Il en avait des fourmis dans les serres. A moins que ce ne soit le froid ? Le Vent du Nord, comme un messager, avait descendu des Monts Nordiques pour les frigorifier. Et ce n’était pas sa torche qui allait l’empêcher d’avoir froid, lui et sa température corporelle plus élevée que la moyenne. Ils seraient chanceux si d’ici l’aube, le sol n’aurait pas gelé.

“Oh, mais pourquoi je m’embête, moi ?”pensa-t-il soudainement en replaçant la torche sur son socle.

Il se concentra pour embraser ses écailles dorsales, dont les flammes nouvellement créées s’étendirent à tout son corps.

“Pour une fois, je n’ai pas tout brûlé !” songea-t-il joyeusement en constatant qu’il n’avait effectivement rien détruit durant sa manoeuvre.

Une heure plus tard, une Rathian Rose vint prendre sa relève. Phénix ne se fit pas prier pour quitter son poste, ses flammes l’ayant certes réchauffé, mais lui ayant également donné de douloureuses engelures, dûes à la différence de température.

Fort heureusement, lui et ses frères et soeurs partageaient la même tente, qu’ils avaient pris soin de chauffer avant son arrivée.

Phénix déposa deux nouvelles bûches dans leur feu de camp, puis s’installa sur la couchette de paille restante.

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L’appréhension le hanta toute la nuit. Phénix parvint à trouver le sommeil, mais il fut sans rêves, et entrecoupé de plusieurs réveils spontanés. Si bien que, dès que l’aube pointa, il se retrouva sur ses pieds, incapable de dormir davantage. 

Arsenic s’éveilla quelques minutes plus tard, et se chargea de réveiller les autres. Une fois toute la fratrie debout, chacun s’occupa d’équiper son armure.

Phénix, lui, fut prit d’une grande galère pour parvenir à enfiler la sienne. Il fallait dire que la seule pièce d’équipement qu’il avait jamais eu à mettre, c’était un casque durant les entraînements … Heureusement, Blast remarqua son malaise et vint promptement l’aider.

-        Là, expliqua le Rathalos de Cristal, prenant le passant supérieur du plastron, qu’il sangla à la boucle située au milieu de son dos. Il y a deux sangles à nouer, une en haut, et une en bas. Cela permet d’éviter au maximum que l’armure ne se décroche pendant la bataille. Ainsi, si une sangle est tranchée, l’autre agit comme une sécurité. C’est aussi pour cela qu’elles se croisent, sourit Blast.

Malgré l’explication fort logique et claire de son frère, le Rathalos Incendiaire n’avait pas tout bien saisi. Au moins, il se souviendrait que les deux passants étaient supposés se croiser, la prochaine fois qu’il se tromperait.

Le clairon retentit alors.

-        Allons-y, déclara Zénith, éteignant le restant de braises avec ses serres.

La fratrie suivit sans plus de cérémonie l’aîné, qui ouvrit la marche.

Dehors, l'effervescence s’était déjà emparée de King’s Gate, qui fourmillait de soldats en préparation, de convois d’armures et de munitions pour les armes Skypiercers.

Zénith s’arrêta alors, et se retourna vers eux.

-        Nous sommes en troisième ligne. Hâtons-nous, les généraux ne vont pas tarder à nous appeler pour la mise en place.

Phénix et les autres acquiesçèrent. Le froid mordant qui pénétrait leur armure de dragonite les saisissait déjà, alors qu’ils venaient à peine de mettre le pied dehors.

Or, cette fois, Phénix ne pouvait pas se permettre d’user de ses flammes pour les réchauffer tous, car son aptitude devait rester secrète jusqu’au début de la bataille.

“Cela pourrait se révéler être un important élément de surprise” avait suggéré Zénith.

Ce qui avait semblé être au premier abord un chaos grouillant de soldats s’était révélé être une organisation sagement réfléchie. Les deux premières lignes s’étaient déjà placées le long de la muraille Est, et la troisième commençait déjà à prendre ses positions. Zénith les guida à l’extrême gauche de la ligne, où ils prirent chacun leur tour leur place, Zénith en premier, à côté d’un grand soldat bleu que Phénix ne connaissait pas. Zénith lui, en revanche, devait le connaître, car il échangea une poignée de mains avec lui.

Le cadet se retrouva au centre de la fratrie, ainsi que de la ligne.

“Je me demande si ce placement est l’oeuvre de Zénith ...” songea-t-il brièvement.

Phénix prit notes de la situation. A sa gauche, il avait Zénith, puis Blast, et à sa droite, il avait Arsenic. En face de lui, au-delà de la deuxième ligne, en première, se tenaient les généraux, un à chaque extrémité. Derrière lui, les nouvelles lignes s’assemblaient à une vitesse extraordinaire, et il remarqua le général Skypiercer au niveau de la douzième ligne, ainsi que ses hommes.

Moins d’un quart d’heure plus tard, le dernier bataillon restant des Rathlands était fin prêt à prendre sa revanche, épaulé par trois mille Skypiercers. Il allait de soit que les artificiers et les “archers” Rathiens situés sur la muraille étaient prêts depuis bien longtemps.

L’attente fut plutôt longue. De sombres nuages brumeux, poussés par le Vent du Nord, plus glacial et mordant que jamais, perturbaient fortement leur visibilité. En fait, avant d’apercevoir les Rakuriens, ils les entendirent.

Comme d’habitude, leur armée majoritairement terrestre n’était pas très discrète.

Le tonnerre grondant au loin dans la plaine fut le signal que Saxo et Trumpet, les deux Qurupecos, perchés sur la muraille, attendaient. En choeur, ceux-ci commencèrent leurs chants de soutien.

Phénix ressentit pour la première fois l’effet tant vanté de ces chants. Comme par magie, il sentit ses muscles décupler d’énergie, et ressentit comme un blindage d’insensibilité se développer sur sa peau.

“ Woaw ! Zénith n’avait vraiment pas menti ! Ces sons sont vraiment extraordinaires !” s’émerveilla le cadet.

Cependant, lorsque les deux troubadours achevèrent leurs chants, un écho semblable s’éleva alors depuis les rangs.

Phénix, surprit, se retourna vers Zénith, se demandant bien ce qu’il se tramait.

Zénith, dont la gueule était étirée par un léger sourire. Blast, à côté de lui, semblait se poser la même question.

Avant qu’ils ne puissent ouvrir la bouche, Zénith leur indiqua de la tête l’arrière de l’armée. Phénix suivit son regard.

En même temps qu’il sentit l’effet des chants s’intensifier, il remarqua la dizaine de Qurupecos présents dans le bataillon Skypiercer.

-        Woah ! s’exclama Phénix, d’autant plus médusé.

-        Et ce n’est que le début, souria davantage Zénith.

Leur admiration fut interrompue par la voix du général Tinarg, qui s’élevait en première ligne, surpassant le sourd bruit croissant provenant du lointain.

-        Camarades ! clama le Gravios. Nous avons payé de notre sang. La bataille d’Ignis fut une boucherie qui nous a tous marqué à jamais. Mais l’heure est venue pour les Rathlands d’obtenir sa propre vengeance. Main dans la main, Rathiens et Skypiercers combattront pour l’anéantissement de l’ennemi commun, et la restauration de la paix ! Pour les Rathlands ! rugit-il.

-        POUR LES RATHLANDS ! rugit vigoureusement Phénix, tout comme la masse de soldats autour de lui, plus déterminée que jamais.

Au loin, presque simultanément, retentit clairement le son d’un rugissement de Zinogre.

Comme en réponse, le Vent du Nord se mit à balayer violemment la plaine, tandis que l’armée Rakurienne apparaissait à l’horizon, se rapprochant à grande vitesse.

“Quelle tempête ! Est-ce vraiment une coïncidence que le vent souffle ainsi ?” se demanda Phénix, essayant de distinguer les deux individus volant à l’avant de leur bataillon.

Les Rakuriens parurent remarquer alors l’abrupt pente où était perchée la muraille Est, protégée à son pied par quelques cinq mille soldats, et amorcèrent une manoeuvre de contournement, comme prévue. Alors, Tinarg se retourna, et effectua un signe vers l’arrière. Phénix devina qu’il s’adressait au général Skypiercer.

Et il devina juste, car ce fut le cri perçant du Yian Garuga qui fendit l’air quelques secondes plus tard, annonçant le début du bombardement.

De puissantes détonations retentirent du haut de la muraille Est, où la vingtaine de canons et de balistes entrèrent en action. Même en troisième ligne, Phénix pouvait nettement apercevoir les impacts se produire à plus de trois cent mètres d’eux.

“Incroyable ! Ces Skypiercers sont vraiment incroyables !”

Le vacarme tonitruant des armes Skypiercers dura une poignée de minutes, durant laquelle les Rakuriens, visiblement impactés, hésitaient à abandonner leur détour périlleux, au risque de faire pis que mieux.

-        Artilleurs, changement de poste ! rugit le général Skypiercer.

Sans se faire prier, les Skypiercers qui s’occupaient des canons migrèrent immédiatement vers la muraille Sud.

-        Soldats, en avant ! CHARGEZ ! ordonna Tinarg à son tour.

D’un puissant élan, toute l’armée bondit vers l’avant, mue comme une seule entitée. Phénix, surpris, se mit à courir un peu précipitamment, et ne parvint à s’envoler que quelques secondes après sa ligne. Le plus dur était de rester en vol, car le vent, particulièrement violent, menaçait de les déséquilibrer sitôt élancés.

Devant lui, les premières lignes virèrent à droite, de manière à rejoindre les Rakuriens. Le Rathalos Incendiaire fit de même lorsqu’il sentit sa rangée amorcer ce même mouvement.

Le vent n’avait pas que des inconvénients. Chevauchant ses bourrasques en leur faveur, les lignes volantes se rapprochèrent rapidement des Rakuriens, déjà au niveau de la muraille Sud, suffisamment prêts pour lancer la phase deux.

-        SOLDATS, A MON COMMANDEMENT ! ordonna la voix d’Astalian, en première ligne.

Phénix entendit le son déclic qui annonçait l’imminence d’un crachat de flammes retentir partout, tandis que lui-même se préparer à tirer.

-        FEU !

Une centaine de détonations retentirent, relâchant de furieux projectiles enflammés qui sifflèrent à travers le vent. Sous lui, Phénix vit que les premières lignes avaient fait mouche sur des Blangongas et des Lagombis, effondrés au sol, sévèrement touchés.

Tout à coup, un rugissement dont le timbre sonnait comme du métal leur perça les tympans. Phénix ne vit pas exactement ce qui leur fondit dessus, mais entendit l’ordre de la générale juste à temps.

-        DISPERSION !

Il se jeta instinctivement sur le côté. Le Rathalos Incendiaire sentit la puissante bourrasque frapper de part en part la troupe aérienne. Lorsqu’il se retourna pour voir ce qui les avait frappés, il vit une grande ombre planer au-dessus d’eux.

Grande ombre qui appartenait à un énorme dragon recouvert de métal.

“Qu’est-ce que c’est que ça ?!” angoissa Phénix.

L’adrénaline, en réaction de sa peur, afflua dans tout son corps, déclenchant automatiquement ses flammes corporelles. Malheureusement pour lui, son soudain enflammement attira l’attention du dragon d’acier. Celui-ci, faisant volte-face, fondit alors sur lui.

“Par Teostra !” paniqua Phénix en plongeant en piqué, évitant les serres du Rakurien inconnu.

“Ok,”songea-t-il, “Ce n’est pas le moment de se défiler. Ma vie est en jeu !”

Le dragon métallique revint à la charge.

Apparaissant de nul part, Blast surgit d’entre les lignes en proie au chaos, se jetant sur l’inconnu toutes serres dehors.

-        Laisse-le ! s’écria-t-il en lui projetant ses épines de cristal au visage, agrippant son cou pour le mordre .

L’inconnu émit un sifflement hostile, puis s’extirpa de la prise du Rathalos de Cristal d’une serre, le balayant d’un coup de queue.

-        Blast ! cria Phénix.

Heureusement, son frère se remit de l’attaque et riposta avec un de ses lasers à bout portant. Celui-ci fit réagir ses épines préalablement plantées, qui explosèrent au contact du faisceau lumineux.

Le Rakurien inconnu émit un grincement avant d’invoquer une bourrasque qui fit chavirer Blast. Profitant de sa faiblesse, le monstre se jeta à son tour sur lui, le saisissant dangereusement à la gorge.

-        Non ! rugit Phénix en s’élançant vers lui, ses flammes plus ardentes que jamais.

Le guerrier Rakurien recula et abandonna sa prise, chassant une grande quantité d’air d’un seul battement d’aile. Phénix fut repoussé, mais sitôt son équilibre retrouvé, il cracha une féroce boule de feu.

Cependant, d’un simple virement d’aile, il absorba les flammes sans ciller, qui ne laissèrent pas une marque sur ses écailles métalliques.

“Mais qui est ce Rakurien ?!” s’horrifia Phénix, tétanisé.

Le dragon chargea à nouveau vers lui, le vent l’entourant comme une aura.

“Je ne peux rien faire contre lui !” s’écria mentalement le cadet, esquivant désespérément l’attaque.

Un nouveau laser fusa, mais il ne parvint qu’à frôler le dragon inconnu, beaucoup moins puissant sans la réaction des épines. Celui-ci, comme agacé de la présence de Blast, souffla une tornade sur lui. Il l’évita difficilement.

Phénix constata avec effarement que Blast avait usé de sa pleine puissance, et commençait déjà à fatiguer après ces deux grosses attaques infructueuses.

“Blast non plus ne peut rien faire !”

Le Rathalos Incendiaire chercha désespérément une solution. Mais, dans la panique de la situation, il n’en trouva aucune, trop préoccupé à esquiver les assauts du Rakurien qui lui, ne se fatiguait pour rien au monde avec ses charges incessantes.

“Il nous faut du renfort !” pensa-t-il avec détresse, sachant très bien que l’inconnu ne leur laisserait jamais le temps d’appeler les renforts.

Bien qu’entièrement concentré sur les faits et gestes du Rakurien, Phénix prit le temps d’observer les environs. L’entièreté de la troupe aérienne se tenait non loin d’eux, occupée à s’acharner sur les Rakuriens qui tentaient de pénétrer dans King’s Gate, pilonné de flammes et de boulets de canons.

-        Blast ! s’écria-t-il, après avoir évité une énième bourrasque ! Par-là ! l’appela-t-il en fuyant vers la muraille Sud.

Il entendit Blast tirer un de ses lasers, puis le suivre à vive allure.

-        On doit rejoindre les autres, commença-t-il en parlant fort pour surpasser le mugissement du vent, on pourra-

Phénix se retourna pour lui expliquer son plan.

Blast ne le suivait plus.

Blast était coincé entre les serres du dragon inconnu, et celui-ci s’apprêtait à lui mordre la jugulaire.

-        BLAST ! hurla Phénix.

Blast l’ignora, tirant un nouveau laser sur son agresseur. Phénix vit avec horreur que celui-ci ne dura pas plus d’une seconde, trahissant la faiblesse du Rathalos de Cristal. Complètement indemne, le Rakurien ouvrit grand la gueule et mordit Blast à la gorge. Blast devint mou entre les serres du dragon

-        NON ! s’époumona Phénix en se précipitant vers lui.

D’un coup sec, le Rakurien retira ses crocs ainsi que la chair emprisonnée avec, et jeta le Rathalos de Cristal, qui tomba dans le vide.

-        BLAAAAST !